TGI MELUN (ch. 1 cab. 1), 2 avril 2004
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 509
TGI MELUN (ch. 1 cab. 1), 2 avril 2004 : RG n° 02/04128 ; jugement n° 04/199
(sur appel CA Paris (5e ch. A), 17 janvier 2007 : RG n° 04/13320)
Extrait : « Attendu qu'en l'absence d'indivisibilité des contrats expressément exclue par les clauses contractuelles et non contraires à l'économie générale du contrat, le CE CITAIX, qui les a signées en toute connaissance de cause et ne peut arguer d'une erreur que rien ne vient justifier, est mal fondé à se prévaloir d'une exception d'inexécution contre la société FONTEX, fournisseur de prestations de service, pour l'opposer au bailleur et justifier le non paiement des loyers dus alors même que l'obligation de délivrance et d'entretien n'incombe pas au bailleur ».
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MELUN
CHAMBRE 1 CABINET 1
JUGEMENT DU 2 AVRIL 2004
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 02/04128. Jugement n° 04/199.
DEMANDEUR :
COMITÉ D'ENTREPRISE CITAIX
représenté par son Secrétaire Monsieur X. [adresse], Représenté par Maître PREVOST-BOBILLOT, Avocat au Barreau de MELUN ;
DÉFENDEUR :
SA PARFIP FRANCE
[adresse], Représentée par la SCP FRANCOIS, GILLET, BOURICARD, Avocats postulant au Barreau de MELUN, et Maître SAGNES-JIMENEZ, Avocat plaidant du Barreau de BOURG EN BRESSE ;
[minute page 2] COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : Caroline FEVRE
Assesseur : Jean DE KEATING HART
Assesseur : Béatrice FOUCHARD-TESSIER
GREFFIER : Sylvie VARGA
DÉBATS : A l'audience publique tenue le 9 janvier 2004, les Avocats des Parties ont été entendus en leurs plaidoiries.
A cette audience l'affaire a été mise en délibéré au 5 mars 2004, puis à cette date le délibéré a été prorogé au DEUX AVRIL DEUX MIL QUATRE.
DÉCISION : Contradictoire, en premier ressort, prononcée publiquement par Caroline FEVRE, Vice-Président, qui a signé la minute avec Sylvie VARGA, Greffier, le DEUX AVRIL DEUX MIL QUATRE.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] I - OBJET DU LITIGE :
Vu l'assignation en date du 25 novembre 2002 délivrée par le comité d'entreprise CITAIX, représenté par son secrétaire : Monsieur X., contre la société PARFIP FRANCE afin de voir :
- constater que Monsieur X., secrétaire du comité d'entreprise est dûment mandaté pour ester en justice dans le cadre de la présente instance laquelle répond aux exigences de l'article L. 432-1 du Code du Travail,
- recevoir le CE CITAIX en son action,
- constater la résolution des contrats indivisibles conclus le 14 janvier 2002,
- ordonner l'exécution provisoire,
- condamner la société PARFIP à lui verser la somme de 1.520 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;
Vu les dernières conclusions récapitulatives en réponse déposées au greffe le 9 septembre 2003 par la société PARFIP tendant au rejet de l'ensemble des demandes du CE CITAIX compte tenu du caractère indépendant du contrat de location et du contrat de prestation de services et à voir :
- constater la résiliation du contrat de location en date du 14 janvier 2002 pour défaut de paiement des loyers à compter du 1er mars 2002 par le CE CITAIX,
- condamner le CE CITAIX à lui payer la somme de 64.029,47 euros au titre des sommes dues en vertu du contrat avec intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2002,
- condamner le CE CITAIX à lui restituer les matériels loués à son siège social et aux frais de ce dernier,
- condamner la CE CITAIX à lui verser la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- ordonner l'exécution provisoire ;
Vu les conclusions en réplique récapitulatives déposées au greffe le 21 octobre 2003 par le CE CITAIX reprenant des demandes principales en se fondant sur les articles 1134, 1135 et 1142 du Code Civil et sollicitant, à titre subsidiaire, la réduction de la clause pénale en application de l'article 1152 du Code Civil et l'octroi de délais de paiement sur deux ans en application de l'article 1244-1 du Code Civil ;
Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 11 décembre 2003 ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
II - MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur l'indivisibilité des conventions :
Attendu qu'en vertu de l'article 1134 du Code Civil, les conventions formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en vertu de l'article 1165 du Code Civil, les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ;
[minute page 4] Attendu qu'il résulte des pièces produites que selon un contrat du 27 juin 2001 n° 013XXX, le CE CITAIX a loué une fontaine d'eau réseau FONTEX moyennant un loyer mensuel de 330,00 francs hors taxes à la société FONTEX, puis selon un second contrat du même jour n°013XXY, il a loué 3 fontaines d'eau à bonbonnes FONTEX dont la société LOCAM était propriétaire moyennant un loyer mensuel de 600,00 francs hors taxes ;
Que selon contrat du 14 janvier 2002 n° 014XXX, le CE CITAIX a conclu un nouveau contrat de location longue durée avec la société FONTEX portant sur 3 fontaines à eau et une fontaine d'eau réseau moyennant un loyer de 251,16 euros TTC ; que le même jour, il a conclu avec la société FONTEX un contrat de service portant sur le matériel loué et comprenant la mise à disposition du matériel loué, la livraison mensuelle des bonbonnes d'eau de 18,9 litres et récupération des bonbonnes vides, la livraison mensuelle des gobelets à eau, la maintenance des pièces, main d'œuvre et déplacements des fontaines d'eau et des distributeurs de boissons FONTEX, le nettoyage et l'entretien extérieur des fontaines d'eau FONTEX et des distributeurs de boissons FONTEX, le changement trimestriel du circuit d'eau des fontaines à bonbonnes, le changement du système de filtration des fontaines réseau tous les semestres, le suivi des livraisons et de l'entretien par une fiche apposée sur les appareils FONTEX moyennant un loyer mensuel de 210 euros hors taxes ;
Que selon un second contrat de location longue durée n°016XXX d'une durée de 60 mois, le CE CITAIX a loué un distributeur de boissons froides et confiseries VEGAS 700 et un distributeur de boissons chaudes ANTARES moyennant un loyer de 1.003,44 euros TTC à la société FONTEX, la société PARFIP FRANCE y étant porté comme cessionnaire, c'est à dire aux termes du contrat comme bailleur ; que le même jour, il a conclu avec la société FONTEX un contrat distinct de service portant sur le matériel loué et comprenant le suivi des livraisons et de l'entretien par une fiche apposée sur l'appareil moyennant un loyer mensuel de 229 euros hors taxes, puis un contrat de service portant sur le distributeur de boissons chaudes comprenant la livraison du matériel, la livraison mensuelle des doses de boissons chaudes, le nettoyage et l'entretien des distributeurs, le suivi des livraison et de l'entretien par une fiche apposée sur les appareils moyennant un loyer mensuel de 610,00 euros hors taxes ;
Attendu qu'il est justifié que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 25 février 2002, le CE CITAIX a résilié les contrats conclus avec la société FONTEX aux motifs qu'elle n'exécute pas ses prestations et n'assure aucun entretien, ni aucune livraison ;
Attendu qu'il n'est pas contesté qu'a compter de ce jour, il a cessé de payer les loyers à la société PARFIP qui lui a vainement délivré une mise en demeure du 30 avril 2002 visant les deux loyers impayés de mars et avril 2002 et l'indemnité de résiliation due ;
Attendu qu'aux termes de l'article 6 du contrat n° 016XXX, auquel la société PARFIP est bien partie au contrat en tant que cessionnaire selon l'original versé aux débats par celle-ci, il est prévu que l'attention du locataire a par ailleurs été attirée sur l'indépendance juridique du contrat de location et de prestation liant le locataire au fournisseur. Il renonce ainsi à toute suspension ou réduction du loyer qui serait motivée par un litige avec le fournisseur.
[minute page 5] Que l'article 7 du même contrat indique expressément que : « En choisissent sous sa seule responsabilité le matériel et son fournisseur et en signant le procès-verbal de livraison, la locataire a engagé sa responsabilité de mandataire sur le fondement des articles 1991 et 19992 du Code Civil. Si le matériel est atteint de vices rédhibitoires ou cachés, ou en cas de détérioration ou en cas de fonctionnement défectueux, de dommages quelconques causés à ce matériel, le locataire bénéficie de la garantie légale ou conventionnelle normalement attachée à la propriété du matériel. Le bailleur lui transmet la totalité des recours contre le constructeur ou le fournisseur et lui donne en tant que de besoin mandat d'ester en justice, à charge pour lui de l'informer préalablement de ses actions. Le locataire ne pourra différer au prétexte de cette contestation aucun règlement de loyers. Le locataire est solidairement responsable de toutes sommes payées par le bailleur, notamment au fournisseur au titre de l'opération de location, majorée des intérêts décomptés au taux de base bancaire sans préjudice de tous autres dommages-intérêts. Par dérogation, aux dispositions de l'article 1724 du Code Civil, le locataire renonce à demander au bailleur toute indemnité ou diminution de loyer si pour une raison quelconque le matériel devenait temporairement ou définitivement inutilisable ».
Attendu qu'il existe bien deux contrats distincts en la forme même s'ils sont conclus le même jour définissant les droits et obligations de chacune des parties contractantes et faisant l'objet d'une rémunération distincte ; que les termes mêmes du contrat de location excluent que le locataire puisse se prévaloir contre son bailleur des manquements du prestataire dans l'exécution de ses obligations ;que le non recours contre le bailleur trouve sa contrepartie dans la substitution du locataire au bailleur pour agir en garantie contre le fournisseur ou vendeur ;
Attendu que les stipulations très claires du contrat de location excluent toute interdépendance entre le contrat de location et le contrat de prestation de services auquel la société PARFIP n'est pas partie ; que l'article 3 du bon de commande de prestations qui définit les obligations de la société FONTEX envers son abonné et non envers le locataire n'est pas en contradiction avec l'article 9 du contrat de location qui prévoit que le bailleur peut être chargé de l'encaissement des sommes dues au fournisseur au titre du contrat de maintenance ; que le bailleur est en fait le financier de l'opération ; que c'est dans ce cadre que la société PARFIP qui a la propriété des équipements loués est également chargé du recouvrement des prestations et fournitures confiées à la société FONTEX ;
Attendu que la défaillance du prestataire n'interdit pas la poursuite du contrat de location dès lors qu'il peut être remplacé ;
Attendu que par ailleurs le CE CITAIX a signé le procès-verbal de livraison et de conformité sans émettre aucune réserve et n'a jamais pris soin d'informer le bailleur de ses difficultés avec le fournisseur, ni de sa volonté de résilier le contrat de service avec la société FONTEX ;
Attendu que c'est la société PARFIP qui, par courrier du 31 mai 2002, a pris contact avec le CE CITAIX en l'informant de la faillite de la société FONTEX et qu'elle recherchait de nouveaux fournisseurs pour permettre la continuité des services à la suite de la mise en liquidation judiciaire de la société FONTEX le 13 mai 2002 et que la société ELIS se [minute page 6] [substituerait] à la société FONTEX pour la fourniture et l'entretien des fontaines d'eau à bonbonnes, tout en rappelant que la rupture des prestations dues par la société FONTEX ne peut justifier la cessation de paiement des redevances de location qui lui sont dues ou la résiliation du contrat de location ;
Que la notice d'information éditée par la société PARFIP et remise à son locataire vise seulement à gérer les conséquences de la faillite du prestataire de services dans l'attente de son remplacement ; que la société PARFIP n'a jamais été informée d'un quelconque problème par le CE CITAIX qui ne lui a pas répondu et ne l'a jamais informé de rien, se bornant à cesser tout paiement des loyers dus pour la location des distributeurs de boissons et de confiseries qui pouvaient fonctionner même avec un échangeur de monnaie défaillant dès lors que le consommateur a l'appoint, et ce nonobstant les termes très clairs du contrat la liant à la société PARFIP, dès mars 2002 ;
Attendu qu'en l'absence d'indivisibilité des contrats expressément exclue par les clauses contractuelles et non contraires à l'économie générale du contrat, le CE CITAIX, qui les a signées en toute connaissance de cause et ne peut arguer d'une erreur que rien ne vient justifier, est mal fondé à se prévaloir d'une exception d'inexécution contre la société FONTEX, fournisseur de prestations de service, pour l'opposer au bailleur et justifier le non paiement des loyers dus alors même que l'obligation de délivrance et d'entretien n'incombe pas au bailleur ;
Sur la résiliation du contrat de location :
Attendu que l'article 10 du contrat de location stipule que le contrat peut être résilié de plein droit par le bailleur 8 jours après une mise en demeure infructueuse en cas de non paiement du loyer ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que la mise en demeure adressée par la société PARFIP au CE CITAIX le 30 avril 2002, lui faisant injonction de régler les mois de mars et avril 2002 impayés sous peine de résiliation, est restée vaine ;
Attendu qu'en application des clauses du contrat, la convention est résiliée de plein droit du fait du non paiement des loyers par le locataire depuis le mois de mars 2002 ; qu'il convient de la constater ;
Attendu que le CE CITAIX doit, en conséquence, payer à la société PARFIP les loyers échus et impayés d'un montant de 2.006,88 euros majorés d'une clause pénale de 10 % qu'il n'y a pas lieu de réduire, soit un total de (2006,88 + 200,68) 2.207,56 euros ;
Attendu que le contrat prévoit également que le locataire devra verser au bailleur une somme égale au montant des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat, d'un montant en l'espèce de 56.192,64 euros, tel que prévu à l'origine majoré d'une clause pénale de 10 % ;
[minute page 7] Attendu que cette clause constitue une clause pénale au sens de l'article 1152 du Code Civil puisqu'elle évalue forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée ;
Attendu que cette clause pénale est manifestement excessive eu égard à la durée effective du contrat de location et aux circonstances de la cause ; qu'il convient de la réduire à la somme totale de 10.000 euros ;
Attendu qu'il convient, en conséquence, de condamner le CE CITAIX à payer à la société PARFIP la somme totale de 12.207,56 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2002 jusqu'à parfait paiement ;
Attendu que le matériel loué ayant été volé ainsi qu'en atteste une plainte pour vol déposée par le CE CITAIX en date du 8 octobre 2002, il ne peut être restitué à son propriétaire ;
Sur les délais de paiement :
Attendu que le CE CITAIX ne fournit aucune pièce sur sa situation financière et ses difficultés de paiement ;
Attendu qu'eu égard au délai déjà écoulé depuis la résiliation du contrat, il n'y a pas lieu de faire droit aux délais de paiement sollicités par le CE CITAIX en application de l'article 1244-1 du Code Civil ;
Sur l'exécution provisoire :
Attendu que l'exécution provisoire ne s'impose pas ; qu'il n'y a pas lieu de 1’ordonner ;
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Attendu qu'il est inéquitable de laisser à la charge de la société PARFIP le montant des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer dans la présente instance; qu'il convient de lui allouer une indemnité de 1.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu que le CE CITAIX qui succombe supportera ses frais irrépétibles et les dépens de la présente instance;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
III - PAR CES MOTIFS :
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,
[minute page 8] Constate la résiliation de plein droit du contrat de location conclu le 14 janvier 2002 entre la société PARFIP et le CE CITAIX pour défaut de paiement des loyers à compter de mars 2002;
Condamne le CE CITAIX à payer à la société PARFIP la somme de 12.207,56 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2002 jusqu'à parfait paiement ;
Condamne le CE CITAIX à payer à la société PARFIP la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Rejette toutes autres demandes ;
Condamne le CE CITAIX aux dépens ;
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
S.VARGA C. FEVRE