CA PARIS (pôle 5 ch. 3), 27 mai 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5279
CA PARIS (pôle 5 ch. 3), 27 mai 2015 : RG n° 15/02808
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « L'article 914 du code de procédure civile attribue compétence exclusive au conseiller de la mise en état pour déclarer l'appel irrecevable et la cour saisie sur déféré d'une ordonnance du conseiller de la mise en état n'est pas compétente pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel fondée sur le non-respect du délai de l'article 538 du code de procédure civile. »
2/ « Pour autant, il résulte de la lecture du jugement du tribunal de commerce d'Avignon que le litige opposant les parties a pour objet les conditions d'exercice par la société Le Mistral du pacte de préférence dont elle disposait sur le fonds de commerce exploité par la société St Antoine alors que la société St Antoine a conclu un compromis de cession de fonds de commerce avec la société Distribution Casino France. L'objet du litige n'est pas à l'évidence relatif à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce qui interdit notamment de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Cet article n'a été soulevé par la société Distribution Casino France qu'à titre de moyen d'illicéité de l'article 12 du règlement intérieur de la société Le Mistral et non pas à titre principal. Et la cour constate que la société Distribution Casino France n'a pas soulevé l'incompétence de la cour d'appel de Nîmes au profit de la cour d'appel de Paris sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce alors que l'affaire a été retenue à l'audience du 9 avril dernier.
Il convient en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise qui a justement déclaré l'appel irrecevable sur le fondement de l'article R. 311-3 du code de l'organisation judiciaire en rappelant à juste titre que, sauf disposition particulière, la cour d'appel connaît de l'appel des juridictions situés dans son ressort et que le tribunal de commerce d'Avignon n'est pas situé dans le ressort de la cour d'appel de Paris. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 3
ARRÊT DU 27 MAI 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/02808. Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 28 janvier 2015 - Conseiller de la mise en état de la Cour d'Appel de PARIS - R.G. n° 14/23901.
DEMANDERESSE AU DÉFÉRÉ :
SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE
prise en la personne de ses représentants légaux ; Représentée par Maître Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653, avocat postulant ; Ayant pour avocat plaidant Maître Michel TROMBETTA, avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE, substitué, à l'audience et lors du dépôt du dossier, par Maître Anne-Marie MAUPAS OUDINOT
DÉFENDERESSES AU DÉFÉRÉ :
LA SOCIÉTÉ ANONYME COOPÉRATIVE D'ACHATS EN COMMUN LE MISTRAL
prise en la personne de ses représentants légaux ; Représentée par Maître Sonia ANGLIVIEL DE LA BEAUMELLE, avocat au barreau de PARIS, toque : B1046
SARL SAINT ANTOINE
prise en la personne de ses représentants légaux ; Régulièrement assignée - Défaillante
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 mai 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Caroline PARANT, conseillère, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Brigitte CHOKRON, faisant fonction de présidente, Madame Caroline PARANT, conseillère, Madame Marie-Annick PRIGENT, conseillère
Greffier : lors des débats : Madame Orokia OUEDRAOGO
ARRÊT : réputé contradictoire, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Brigitte CHOKRON, faisant fonction de présidente, et par Madame Orokia OUEDRAOGO, greffière.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l'appel relevé le 27 novembre 2014 par la société Distribution Casino France contre un jugement du tribunal de commerce d’Avignon du 16 mai 2014 qui a, notamment,
- retenu sa compétence,
- reçu l'action de la société Le Mistral,
- prononcé l'annulation de la cession du fonds de commerce de la société St Antoine au profit de la société Distribution Casino France intervenue en méconnaissance des droits de la société Le Mistral,
- rétabli la société Le Mistral dans ses droits à exercer sa préférence,
- débouté la société Le Mistral de sa demande de substitution à la société St Antoine,
- invité la société St Antoine à donner suite à toute offre de la société Le Mistral,
- débouté les sociétés St Antoine et Distribution Casino France de leurs demandes,
- débouté la société Le Mistral de sa demande d'indemnisation de son préjudice financier, - condamné solidairement les sociétés St Antoine et Distribution Casino France à payer à la société Le Mistral la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;
Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état de cette cour qui a, le 28 janvier 2015, déclaré l'appel irrecevable aux motifs que la cour d'appel de Paris n'est pas la juridiction d'appel du tribunal de commerce d'Avignon ;
Vu la requête en déféré de la société Distribution Casino France du 5 février 2015 et ses conclusions par lesquelles elle demande à la cour, au visa des articles 916 du code de procédure civile, L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce :
- de déclarer le référé recevable,
- de mettre à néant l'ordonnance du 28 janvier 2005,
- de constater la compétence exclusive de la cour d'appel de Paris pour connaître du litige
- de constater la recevabilité de cet appel au regard des règles de compétence territoriale,
- de débouter la société Le Mistral de ses demandes,
- de statuer ce que de droit sur les dépens ;
Vu les conclusions de la société Le Mistral du 27 mars 2005 qui prie la cour de :
- déclarer irrecevable comme tardif l'appel de la société Distribution Casino France du 28 novembre 2014,
- confirmer l'ordonnance d'irrecevabilité critiquée,
- condamner la société Distribution Casino France à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;
Vu la défaillance de la société St Antoine à laquelle a été signifiée à personne morale une assignation à comparaître à l'audience du 31 mars 2015, date à laquelle l'affaire a été renvoyée au 13 avril puis au 12 mai 2015 ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Sur l'irrecevabilité de l'appel pour tardiveté :
La société Le Mistral demande à la cour de déclarer l'appel irrecevable comme tardif car formé plus de 4 mois après la signification du jugement entrepris intervenue le 20 juin 2014. La société Distribution Casino France soutient que la cour n'est pas compétente pour statuer sur cette fin de non-recevoir qui relève de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état
L'article 914 du code de procédure civile attribue compétence exclusive au conseiller de la mise en état pour déclarer l'appel irrecevable et la cour saisie sur déféré d'une ordonnance du conseiller de la mise en état n'est pas compétente pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel fondée sur le non-respect du délai de l'article 538 du code de procédure civile.
Sur le déféré :
La société Le Mistral soutient que le déféré formé par la société Distribution Casino France est irrecevable car la cour d'appel de Nîmes est saisie d'un appel formé contre le même jugement par la société St Antoine le 18 juillet 2014 et l'affaire doit être plaidée le 9 avril 2015 devant cette cour sans que la société Distribution Casino France n'ait soulevé l'incompétence de la cour d'appel de Nîmes devant le juge de la mise en état.
La société Distribution Casino France soutient que son déféré est recevable et que la société Le Mistral ne soulève aucun moyen d'irrecevabilité contre ce déféré ; qu'elle a conclu sur la compétence du tribunal de commerce devant la cour d'appel de Nîmes ; que seule la cour d'appel de Paris est compétente pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce et ce, même si une partie des demandes formées devant le premier juge n'est pas fondée sur l'article précité.
La cour est saisie d'une requête par laquelle il lui est déféré l'ordonnance d'irrecevabilité rendue le 28 janvier 2015 par le magistrat de la mise en état.
L'exception de litispendance résultant du fait que l'appel du jugement du tribunal de commerce d'Avignon est portée devant deux cours d'appel différentes n'a pas été soumise au conseiller de la mise en état seul compétent pour en connaître conformément à l'article 914 du code de procédure civile. La société Le Mistral qui n'a pas soulevé cette exception devant le conseiller de la mise en état ne peut conclure à l'irrecevabilité du déféré en raison de cette double saisine.
La société Distribution Casino France a en effet régulièrement formé sa requête en déféré dans les 15 jours du prononcé de l'ordonnance du 28 janvier 2015 conformément à l'article 916 du code de procédure civile. Il convient de déclarer cette requête recevable.
Il est constant qu'aux termes de l'article R. 311-3 du code de l'organisation judiciaire, sauf dispositions particulières, la cour d'appel connaît de l'appel des jugements des juridictions situées dans son ressort.
L'article L. 442-6 III alinéa 5 du code de commerce dispose que les litiges relatifs à l'application du présent article sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret et l'article D. 442-3 du même code prévoit que la cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par les juridictions compétentes pour l'application de l'article L. 442-6 est celle de Paris.
Pour autant, il résulte de la lecture du jugement du tribunal de commerce d'Avignon que le litige opposant les parties a pour objet les conditions d'exercice par la société Le Mistral du pacte de préférence dont elle disposait sur le fonds de commerce exploité par la société St Antoine alors que la société St Antoine a conclu un compromis de cession de fonds de commerce avec la société Distribution Casino France.
L'objet du litige n'est pas à l'évidence relatif à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce qui interdit notamment de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Cet article n'a été soulevé par la société Distribution Casino France qu'à titre de moyen d'illicéité de l'article 12 du règlement intérieur de la société Le Mistral et non pas à titre principal.
Et la cour constate que la société Distribution Casino France n'a pas soulevé l'incompétence de la cour d'appel de Nîmes au profit de la cour d'appel de Paris sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce alors que l'affaire a été retenue à l'audience du 9 avril dernier.
Il convient en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise qui a justement déclaré l'appel irrecevable sur le fondement de l'article R. 311-3 du code de l'organisation judiciaire en rappelant à juste titre que, sauf disposition particulière, la cour d'appel connaît de l'appel des juridictions situés dans son ressort et que le tribunal de commerce d'Avignon n'est pas situé dans le ressort de la cour d'appel de Paris.
Il n'y a pas lieu, en l'état, de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Distribution Casino France sera condamnée aux dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Rejette la demande tendant à l'irrecevabilité de la déclaration d'appel pour violation de l'article 538 du code de procédure civile,
Déclare recevable la requête en déféré du 5 février 2015,
Confirme l'ordonnance entreprise,
Rejette la demande d'application d'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Distribution Casino France aux dépens.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE