CA RIOM (3e ch. civ. et com.), 18 novembre 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5393
CA RIOM (3e ch. civ. et com.), 18 novembre 2015 : RG n° 15/01449
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Les dispositions spécifiques de l'article 914 du code de procédure civile prévoient que le conseiller de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement seul compétent pour déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel. Au demeurant, dès lors que la société 3CI s'opposait à toute disjonction de l'instance, son incident était de nature à mettre un terme à l'instance s'il était fait droit à la fin de non-recevoir tirée de l'application des règles particulières à l'appel d'une décision statuant sur la rupture des relations commerciales établies. C'est donc à bon escient que la conseillère de la mise en état a retenu sa compétence pour trancher l'incident soulevé par la société 3CI. »
2/ « Par ailleurs, il résulte de la combinaison des articles L. 442-6, III alinéa 5 et D. 442-3 du code de commerce, que la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application des dispositions de l'article L. 442-6 du même code relatives à la rupture des relations commerciales établies et, l'inobservation de ces textes est sanctionnée par une fin de non-recevoir comme telle susceptible d'être proposée en tout état de cause. Il s'ensuit que le fait que la société 3CI n'ait pas soulevé cette question devant les premiers juges est sans incidence sur sa capacité à la faire valoir en cause d'appel et c'est donc en vain que la société SPM vient soutenir que son adversaire aurait implicitement renoncé à soulever ce moyen. L'incident de mise en état formé par la société 3CI doit donc être déclaré recevable. »
3/ « Il existe, en effet, des liens indissociables entre la question de la réalisation effective et satisfaisante des prestations commandées, de la pertinence de la facturation et entre la rupture des relations contractuelles et ses conséquences, de sorte que l'appréciation portée par les juges sur la pertinence de l'une de ces demandes a nécessairement une incidence quant à la réponse à apporter à l'autre. Disjoindre les différentes demandes ne pouvait avoir que pour effet de priver la cour d'appel de Paris, dont c'est la compétence exclusive, de sa capacité à apprécier l'ensemble des éléments ayant conduit à la rupture des relations commerciales établies et d'en tirer toutes les conséquences qu'elle estimait nécessaire. C'est donc à bon escient que la conseillère de la mise en état a rejeté la demande de disjonction qui lui était présentée par la société SPM. Le rejet de cette demande a pour conséquence que cette société qui, a mal dirigé son recours, est irrecevable en son appel pour le tout. »
COUR D’APPEL DE RIOM
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 18 NOVEMBRE 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/01449.
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : M. François RIFFAUD, Président, M. Philippe JUILLARD, Conseiller, M. Cédric BOCHEREAU, Vice-Président placé auprès de Mme la Première Présidente
lors des débats et du prononcé : Mme Carine CESCHIN, Greffière
Statuant sur requête en déféré à l'encontre d'une ordonnance rendue le 13 mai 2015 par le magistrat chargé de la mise en état de la troisième chambre civile et commerciale de la Cour d'appel de Riom
A l'audience publique du 3 septembre 2015 M. Riffaud a fait le rapport oral de l'affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 785 du CPC
ENTRE :
APPELANT :
SAS SOCIÉTÉ D'EXPLOITATION DES PLASTIQUES ET METAUX (SPM)
Représentant : Maître Jean-Michel DE ROCQUIGNY de la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT ROMENVILLE BRODIEZ § Associes, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
ET :
INTIMÉS :
Maître Béatrice PASCUAL ès-qualités de mandataire liquidateur de la SARL 3CI
SARL CRÉATION CONCEPTION COMMERCE INDUSTRIALISATION (3CI)
ayant pour représentants : Maître Olivier PIRO de la société d'avocats JCF, avocat au barreau d'EVREUX - Me Brigitte LIMAGNE de la SELARL POLE AVOCATS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Vu l'ordonnance rendue le 21 mai 2015 par Mme la première présidente de la Cour d'appel de Riom ;
DÉBATS : A l'audience publique du 3 septembre 2015, la Cour a mis l'affaire en délibéré au 18 novembre 2015 et à cette date l'arrêt a été prononcé publiquement conformément à l'article 452 du code de procédure civile :
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La SAS Société d'exploitation des plastiques et métaux (la société SPM) spécialisée dans la mécanique et la plasturgie entretient des relations commerciales de longue date avec la SARL Création conception commerce industrialisation (la société 3CI) pour laquelle elle fabrique des moules et objets en matière plastique, notamment des présentoirs destinés au groupe alimentaire FERRERO. Les moules qui deviennent propriété de la société 3CI, restent en possession de la société SPM pour les besoins des fabrications en cours.
A la fin de l'année 2011, des difficultés sont survenues entre les deux sociétés et se sont traduites par le non paiement de différentes factures par la société 3CI à concurrence de 65.000,00 euros.
Le 19 janvier 2012, cette société a rompu unilatéralement et brutalement ses relations avec la société SPM avant de s'acquitter partiellement du paiement des factures, la société SPM engageant alors une instance en paiement de leur solde devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand.
La société 3CI, qui entendait obtenir leur restitution, ce qui lui aurait permis d'avoir recours aux services d'un autre fabriquant, était déboutée de sa demande en revendication des moules restés en possession de la société SPM, laquelle se prévalait d'un droit de rétention sur ces derniers du fait de l'absence de paiement de ses factures.
La société SPM obtenait l'autorisation de faire procéder à la saisie conservatoire des moules qui devait être ultérieurement cantonnée par décision du tribunal de commerce de Rouen le 13 janvier 2014.
La société SPM accompagnait sa demande en paiement du solde de ses factures d'une demande indemnitaire invoquant le préjudice causé par la rupture abusive des relations commerciales imputable à la société 3CI. Cette dernière, formait une demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts en se fondant sur le fait que la rétention des moules par son fournisseur était à l'origine de la rupture de son marché avec la société FERRERO intervenue en fin d'année 2011.
Par jugement rendu le 18 septembre 2014, assorti du bénéfice de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand a :
- constaté que la commande des moules objet de la facturation impayée pour 28.893,59 euros avait été formellement reconnue par la société 3CI en dépit de ses contestations initiales ;
- considéré que la preuve de la réalisation de ces moules par la société SPM n'avait pas été rapportée et rejeté la demande en paiement présentée par celle-ci au titre de leur fourniture ;
- fait droit à la demande reconventionnelle de dommages et intérêts de la société 3CI à concurrence de la somme de 20.000,00 euros au titre de la privation indue des moules.
Suivant déclaration enregistrée au greffe de la cour le 9 octobre 2014, la société SPM a relevé appel de ce jugement et, parallèlement a, par actes des 27 et 30 mars 2015, fait assigner la société 3CI, qui avait été placée en redressement judiciaire en septembre 2014 et son mandataire judiciaire, Maître Béatrice PASCUAL, devant la première présidente de la cour d'appel de céans pour obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire assortissant le jugement déféré.
Par ordonnance rendue le 21 mai 2015, la première présidente a fait droit à cette demande.
Saisie de conclusions d'incident du 16 décembre 2014 par la société 3CI tendant à voir déclarer l'appel irrecevable au motif que la cour d'appel de Paris serait seule compétente pour connaître du recours portant sur la rupture de relations commerciales établies et d'écritures en réplique de la société SPM, en date du 25 février 2015, tendant à ce qu'elle se déclare incompétente en l'absence d'incident de nature à mettre fin à l'instance et, subsidiairement, d'une demande de disjonction entre la demande en paiement de factures, la demande indemnitaire présentée sur le fondement du droit commun, d'une part et la demande présentée au titre des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce, d'autre part, d'une demande d'injonction de production de pièces portant sur l'ensemble des correspondances ayant trait à la rupture alléguée par la société 3C1 de ses relations avec le groupe FERRERO entre le 1er janvier 2012 et le 1er janvier 2015 et à la justification du chiffre d'affaires réalisé avec ce client entre 2011 et 2014, ainsi que d'une demande d'autorisation de communiquer l'ensemble de ces correspondances au mandataire de la société SPM, la conseillère de la mise en état a, par ordonnance rendue le 13 mai 2015 :
- rejeté la demande de disjonction ;
- déclaré irrecevable pour le tout, l'appel formé par la société SPM le litige relevant du pouvoir juridictionnel de la cour d'appel de Paris ;
- déclaré, par suite, irrecevable la demande de communication de pièces ;
- dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la société SPM aux dépens.
Par requête, notifiée au moyen du RPVA et enregistrée au greffe le 26 mai 2015, la société SPM a déféré cette ordonnance devant la cour.
Elle demande à la cour de :
- constater l'état de liquidation judiciaire de la société 3CI, ce y compris au jour de l'audience devant la conseillère de la mise en état ;
- dire que la défense au fond de la société 3CI, sans la moindre réserve devant le tribunal a emporté acceptation de la compétence et renonciation à la contester ;
- se déclarer incompétente pour statuer sur la demande de la société 3CI faute d'incident de nature à mettre fin à l'instance ;
- dire distinctes les prétentions des parties relatives à trois aspects de leur litige qui ne contiennent aucun lien d'indivisibilité entre eux ;
- constater le droit absolu de la société SPM à bénéficier d'un procès équitable dont le double degré de juridiction est une composante, sur deux aspects de droit commun (factures et saisie des moules) fondés sur des faits, des qualifications, des prétentions et des moyens ayant des objets et cause totalement distincts de la spécificité d'une rupture de relations établies ;
- ordonner la disjonction entre la demande en paiement de factures, d'une part, la demande reconventionnelle sur le droit commun, d'autre part, et enfin la demande sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce ;
- enjoindre à la société 3CI de produire dans les 15 jours qui suivront la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150,00 euros, l'ensemble des correspondances ayant trait à la rupture alléguée des relations avec le groupe FERRERO entre le 1er janvier 2012 et le 1er janvier 2015 et la justification par son commissaire aux comptes ou son expert-comptable des chiffres d'affaires réalisés avec ce client entre 2011 et 2014 ;
- autoriser le groupe FERRERO, sur présentation de la décision à intervenir, à communiquer au mandataire de la société SPM l'ensemble des correspondances dont s'agit, échangées avec la société 3CI entre le 1er janvier 2012 et le 1er janvier 2015 relatives à la rupture définitive des relations contractuelles ;
- condamner la société 3CI aux entiers dépens de l'incident et au paiement d'une indemnité de 2.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient :
- qu'ayant accepté le débat devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand la société 3CI a tacitement renoncé à se prévaloir de la fin de non-recevoir invoquée en cause d'appel ;
- que l'incident était irrecevable dès lors qu'il ne pouvait mettre fin à l'instance puisque la recevabilité de l'appel n'était pas contestée entre ce qui concerne l'aspect du jugement relatif à la créance de la société SPM et à la contestation de la demande reconventionnelle, aucun argument n'étant développé à ce double titre ;
- qu'aucun texte n'établit de distinction, au sein d'une instance, entre une prétention parmi d'autres ou un moyen particulier, sauf indivisibilité qui n'est pas, en l'espèce, constituée, les dispositions du jugement critiqué étant divisibles ;
- que le refus de sa demande de disjonction par la conseillère de la mise en état, au motif d'une bonne administration de la justice, ne peut conduire à exclure un moyen de fond tenant à l'absence d'indivisibilité des demandes, la disjonction étant la conséquence de la divisibilité des demandes et non l'inverse ;
- qu'elle s'est trouvée privée de son droit d'appel sur des questions échappant à la compétence spéciale alors qu'aucun texte ne prévoit cette sanction et que seule une indivisibilité juridique entre des prétentions différentes permettrait de faire admettre l'unicité de leur traitement ;
- que la société 3CI, se refusant à produire toute pièce au sujet de sa rupture avec le groupe FERRERO, elle est fondée à en solliciter la communication.
Aux termes de ses écritures notifiées au moyen du RPVA le 5 août 2015, la liquidation judiciaire de la société 3CI, représentée par son liquidateur Maître Béatrice PASCUAL, demande à la cour aux visas des articles L. 420-1 à L. 420-7, R. 420-5, L. 442-6, L. 462-8, L. 463-1 à L. 463-7, L. 464-1 et L. 464-8 du code de commerce, 81 et 82 du traité instituant la Communauté Européenne et des articles 125, 73 et suivants du code de procédure civile, de :
- déclarer irrecevable pour le tout, l'appel formé par la société SPM à l'encontre du jugement prononcé par le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, le 18 septembre 2014, la cour d'appel de Paris étant seule compétente pour connaître des recours sur la matière de la rupture de relations commerciales établies ;
- confirmer dans sa totalité l'ordonnance déférée ;
- condamner la société SPM au paiement d'une indemnité de 2.500,00 euros à la liquidation judiciaire de la société 3CI sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la même société aux entiers dépens d'instance, dont distraction au profit de l'avocat postulant de la société 3CI.
Elle soutient :
- que sa procédure d'incident est régulière dès lors que le 26 février 2015, date des plaidoiries devant la conseillère de la mise en état, le redressement judiciaire de la société 3CI n'avait pas encore été converti en liquidation judiciaire ;
- qu'il appartient au demandeur de saisir la bonne juridiction rationne materie et rationne loci [N.B. conforme à la minute Jurica] et que la société SPM, qui n'en est pas à sa première erreur, ne peut se soustraire à l'application des dispositions de l'article R. 420-5 du code de commerce qui sont impératives et prévoient la compétence exclusive et d'ordre public de la cour d'appel de Paris en matière de rupture de relations commerciales établies :
- que le régime applicable à l'irrecevabilité soulevée n'est pas celui des exceptions d'incompétence mais celui des fins de non-recevoir, l'objection relative au pouvoir de la juridiction de juger d'un recours formé devant elle ne concernant pas sa compétence mais le respect des règles d'ordre public régissant l'exercice de ce recours et donc sa recevabilité, de sorte qu'elle peut être proposée en tout état de cause et a vocation à être relevée d'office ;
- que contrairement à ce que soutient la partie adverse, son incident ne concernait pas que la compétence de la cour d'appel de céans quant à sa demande de dommages et intérêts relative à la rupture brutale des relations commerciales mais également la demande en paiement de factures et la demande indemnitaire en 'droit commun’ ;
- qu'en effet, en raison des faits, la rupture des relations commerciales établies entre les deux sociétés ne peut être dissociée de la question du caractère indu de factures en raison de l'inexécution des prestations et de dommages et intérêts dus à la société 3CI ;
- qu'à juste titre, la conseillère de la mise en état a retenu que la disjonction sollicitée par la société SPM n'est pas conciliable avec l'intérêt d'une bonne administration de la justice et que l'article R. 420-5 du code de commerce ne prévoit pas de partage de compétence en cas de pluralité de demandes ;
- que dès lors qu'il a été interjeté appel d'une décision de première instance portant notamment sur l'application de l'article L. 442-6-5° du code de commerce, seule la cour d'appel de Paris est compétente pour statuer sur l'appel ;
- qu'enfin, la demande de communication de pièces concernant la perte par la société 3CI de son principal client, le groupe FERRERO, n'est pas fondée dès lors que le tribunal de commerce a eu connaissance de tous les éléments en la matière, la perte de ce client ayant conduit à la liquidation de la société 3CI.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la compétence du conseiller de la mise en état :
Les dispositions spécifiques de l'article 914 du code de procédure civile prévoient que le conseiller de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement seul compétent pour déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel.
Au demeurant, dès lors que la société 3CI s'opposait à toute disjonction de l'instance, son incident était de nature à mettre un terme à l'instance s'il était fait droit à la fin de non-recevoir tirée de l'application des règles particulières à l'appel d'une décision statuant sur la rupture des relations commerciales établies.
C'est donc à bon escient que la conseillère de la mise en état a retenu sa compétence pour trancher l'incident soulevé par la société 3CI.
Sur la recevabilité de l'incident :
Le jugement de conversion en liquidation du redressement judiciaire ouvert à l'égard de la société 3CI a été prononcé le 31 mars 2015 alors même que l'incident a été introduit par des écritures en date du 16 décembre 2014 et que les parties ont été entendues par la conseillère de la mise en état le 26 février 2015.
C'est donc à tort que la société SPM vient prétendre que la société 3CI, dont le gérant n'était pas alors privé de la capacité d'ester en justice, n'était pas valablement représentée à l'occasion de cette procédure.
Par ailleurs, il résulte de la combinaison des articles L. 442-6, III alinéa 5 et D. 442-3 du code de commerce, que la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application des dispositions de l'article L. 442-6 du même code relatives à la rupture des relations commerciales établies et, l'inobservation de ces textes est sanctionnée par une fin de non-recevoir comme telle susceptible d'être proposée en tout état de cause.
Il s'ensuit que le fait que la société 3CI n'ait pas soulevé cette question devant les premiers juges est sans incidence sur sa capacité à la faire valoir en cause d'appel et c'est donc en vain que la société SPM vient soutenir que son adversaire aurait implicitement renoncé à soulever ce moyen.
L'incident de mise en état formé par la société 3CI doit donc être déclaré recevable.
Sur la demande de disjonction et ses conséquences :
La société SPM reproche à l'ordonnance querellée d'avoir rejeté sa demande de disjonction et d'avoir déclaré son appel irrecevable pour le tout en se fondant sur de seuls arguments de bonne administration de la justice alors même que les différents chefs de demandes dont est saisie la cour seraient divisibles et que le magistrat ne s'est pas explicitement prononcé sur ce point.
Les différents chefs d'un jugement présentent un caractère indivisible dès lors qu'ils entretiennent des liens étroits de dépendance et de connexité qui font qu'il ne peut être statué sur l'un sans incidence quant à la solution à apporter à l'autre.
En l'espèce, les premiers juges étaient saisis par la société SPM d'une demande en paiement de ses factures, d'une demande d'indemnisation au titre de la rupture fondée non sur les règles du droit commun mais sur celles, spécifiques, aux relations commerciales établies et, par la société S3CI, de demandes reconventionnelles visant à contester la pertinence de la facturation de son adversaire et à obtenir de dommages et intérêts en réparation du préjudice provoqué par le non-respect de ses obligations contractuelles par la société SPM et par son comportement abusif à l'occasion de la rétention des moules.
Au soutien de sa décision, la conseillère de la mise en état a justement relevé que les premiers juges avaient considéré qu'il n'était pas démontré que les factures dont la société SPM sollicitait le paiement correspondaient à des prestations menées à bien voire même commandées, que la rupture des relations de la société 3CI avec sa sous-traitante SPM, intervenue à la suite de son déréférencement par son client principal FERRERO, ne pouvait être considérée comme fautive et, qu'au final, la responsabilité de la perte du client commun FERRERO était partagée tout en retenant que la société SPM avait eu un comportement abusif lors de la rétention de la totalité des moules.
Il existe, en effet, des liens indissociables entre la question de la réalisation effective et satisfaisante des prestations commandées, de la pertinence de la facturation et entre la rupture des relations contractuelles et ses conséquences, de sorte que l'appréciation portée par les juges sur la pertinence de l'une de ces demandes a nécessairement une incidence quant à la réponse à apporter à l'autre.
Disjoindre les différentes demandes ne pouvait avoir que pour effet de priver la cour d'appel de Paris, dont c'est la compétence exclusive, de sa capacité à apprécier l'ensemble des éléments ayant conduit à la rupture des relations commerciales établies et d'en tirer toutes les conséquences qu'elle estimait nécessaire.
C'est donc à bon escient que la conseillère de la mise en état a rejeté la demande de disjonction qui lui était présentée par la société SPM.
Le rejet de cette demande a pour conséquence que cette société qui, a mal dirigé son recours, est irrecevable en son appel pour le tout.
Cette erreur lui étant imputable et les pouvoirs publics disposant de la faculté, pour assurer la cohérence de la jurisprudence et une bonne administration de la justice, de prendre dans des domaines particuliers des dispositions dérogeant au droit commun de la compétence des juridictions, il ne peut être considéré qu'il a été porté par la décision critiquée et l'application desdites règles une atteinte disproportionnée au droit de la société SPM à bénéficier d'un double degré de juridiction.
La décision déférée sera donc confirmée de ces chefs.
Sur les autres demandes :
L'irrecevabilité de l'appel pour le tout étant confirmée la demande tendant à la production de pièces formée par la société SPM est dépourvue d'objet.
Son rejet sera, en conséquence, confirmé.
La société SPM, qui succombe, supportera la charge des dépens et sera condamnée à payer au liquidateur de la société 3CI, ès qualités, une indemnité de deux mille euros (2.000,00 euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du même code sera accordé à la société PÔLE AVOCATS.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Rejette l'exception d'incompétence du conseiller de la mise en état soulevée par la société SPM ;
Déclare la société 3CI, représentée par son liquidateur, recevable en son incident ;
Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
Condamne la société SPM aux dépens, dont distraction au bénéfice de la société PÔLE AVOCATS et à payer à la liquidation judiciaire de la société 3CI une indemnité de deux mille euros (2.000,00 euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président,
C. Ceschin F. Riffaud