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CA REIMS (ch. civ. sect. 1), 5 juillet 2016

Nature : Décision
Titre : CA REIMS (ch. civ. sect. 1), 5 juillet 2016
Pays : France
Juridiction : Reims (CA), ch. civ. sect. 1
Demande : 14/02864
Date : 5/07/2016
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 27/10/2014
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5660

CA REIMS (ch. civ. sect. 1), 5 juillet 2016 : RG n° 14/02864

Publication : Jurica

 

Extrait : « Il est versé aux débats la demande d'adhésion GAV et un document intitulé « Convention Pacifia » signé par M. Ch. X. aux termes duquel ce dernier reconnaît avoir été informé qu'il recevrait la confirmation d'adhésion ainsi que les conditions générales ultérieurement ; l'ensemble des documents constituant le contrat établi définitivement à la réception de la confirmation d'adhésion.

M. D. X. a versé aux débats les conditions générales du contrat d'assurance de sorte qu'il est établi que son père M. Ch. X. a bien été rendu destinataire des dites conditions générales antérieurement au sinistre et qu'il a été nécessairement informé de la clause d'exclusion qui ne peut dès lors être qualifiée d'abusive et qui est valide et opposable aux ayants droits de l'assuré. »

 

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 5 JUILLET 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/02864.

 

APPELANT :

d'un jugement rendu le 19 septembre 2014 par le tribunal de grande instance de CHARLEVILLE-MÉZIÈRES,

Monsieur D. X.

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de REIMS), COMPARANT, concluant par la SCP D. V. J. D., avocats au barreau des ARDENNES

 

INTIMÉE :

SA PACIFICA ASSURANCES

COMPARANT, concluant par la SCP J., avocats au barreau de REIMS,

 

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Madame MAILLARD, président de chambre, Madame SIMON-ROSSENTHAL, conseiller, Mme BOUSQUEL, conseiller

GREFFIER : Monsieur MUFFAT-GENDET, greffier lors des débats et du prononcé.

DÉBATS : A l'audience publique du 24 mai 2016, où l'affaire a été mise en délibéré au 5 juillet 2016,

ARRÊT : Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2016 et signé par Madame SIMON-ROSSENTHAL, conseiller, en l'absence du président de chambre régulièrement empêché, et Monsieur MUFFAT-GENDET greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Monsieur Ch. X. a souscrit auprès de la compagnie d'assurance Pacifia un contrat d'assurance « garantie des accidents de la vie » le 22 avril 2005.

Le 5 juin 2008, Monsieur Ch. X. a été retrouvé inanimé à son domicile, dans la cuisine, lumière allumée. Le certificat médical du 17 juillet 2008 indique que le décès de Monsieur X. Ch. est survenu à son domicile, suite à une chute avec traumatisme crânio-facial.

Monsieur D. X. a sollicité auprès de la compagnie d'assurance Pacifia le paiement de la somme de 20.000 euros correspondant au capital décès.

La société Pacifica a refusé aux motifs que :

1) les conditions générales du contrat excluaient de la garantie les dommages résultant d'un état de santé particulier suite à une infection cardio-vasculaire et vasculaire-cérébrale,

2) le certificat médical établi le jour du décès par le Docteur C. précisait que Monsieur Ch. X. était décédé de mort naturelle,

3) Monsieur D. X. ne démontrait pas le lien entre le décès et un événement accidentel.

Par exploit d'huissier 8 octobre 2012, Monsieur D. X. a saisi le tribunal de grande instance aux fins d'obtenir condamnation de Pacifia à lui payer la somme de 20.000 euros au titre du capital décès dû au décès de Monsieur Ch. X.

Par jugement du 19 septembre 2014, le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières a considéré que la convention Pacifia signée par Monsieur D. X. ne comportait pas de clause abusive, que M. D. X. ne justifiait pas que la cause du décès serait due à un accident de la vie privée et débouté celui-ci de ses demandes. Il a condamné M. X. aux dépens dont distraction au profit de la SCP R. D. C. & Associés et débouté la compagnie d'assurances Pacifica de sa demande d'indemnité de procédure.

Monsieur D. X. a relevé appel de ce jugement le 27 octobre 2014.

 

Par conclusions notifiées le 21 décembre 2015, M. X. demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de juger les clauses d'exclusion de garanties abusives et réputées non écrites, de juger les conditions générales et clauses d'exclusion Pacifica inopposables à Monsieur Ch. X. et Monsieur D. X., ayant-droit et de condamner la Compagnie Pacifica à lui payer la somme de 20.000 euros au titre du contrat capital décès souscrit par Monsieur Ch. X., ce avec intérêts au taux légal à compter du 5 juin 2008, celle de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 2.500 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP D. V. J. D..

Il soutient que les clauses d'exclusion de garantie sont présumées abusives, de manière irréfragable, lorsqu'elles ne figurent pas dans l'écrit accepté ou lorsqu'elles sont reprises dans un autre document auquel il n'est pas fait expressément référence lors de la conclusion du contrat en application de l'article R. 132-1-1° du code de la consommation ; et dont il n'a pas eu connaissance lors avant sa conclusion ; qu'en l'espèce, les conditions générales qui comprennent l'exclusion de garantie ne figurent pas dans le contrat de garantie lequel précise que les conditions générales seront transmises ultérieurement ; que la société Pacifia ne justifie ni de l'envoi ni de la réception des conditions générales ; que le fait d'utiliser les conditions générales communiquées par le demandeur pour déduire une connaissance de Monsieur Ch. X. n'est pas un argument recevable dès lors que :

- il appartient à Pacifica de justifier avoir porté à la connaissance du souscripteur les conditions générales ;

- la pièce communiquée fut-elle datée de janvier 2005 ne dispense pas Pacifica de la charge de la preuve ;

- la communication d'une information imposée par la loi ne se déduit pas

- Monsieur D. X. peut avoir reçu cette pièce par ailleurs ou même peut se l'être procuré par tout moyen ;

- rien n'indique que cette pièce ait été portée à la connaissance du défunt avant le contrat et pour la souscription du contrat et que le lien ait été fait par le défunt ;

- il s'agit d'une information légale visant à protéger le consommateur et le juge doit rechercher si cette protection a été effective ; cette recherche est le seul moyen d donner à la protection un caractère efficient ;

- en l'espèce, cette production de pièce ne justifie pas de l'information du souscripteur.

Sur le caractère accidentel du décès, il fait valoir que la chute qui est la cause de la mort est nécessairement accidentelle ; que Pacifica qui doit justifier de la clause d'exclusion de garantie et qui soutient que la chute n'est pas accidentelle mais la conséquence de la mort, doit démontrer qu'elle est due à un accident cardio-vasculaire et que Monsieur X. était mort avant de tomber ; or, les certificats médicaux ne justifient pas d'une attaque cardiaque à l'origine du décès.

Il invoque :

- le certificat médical du Docteur L. du 4 juillet 2008 vise bien « suite à une chute avec traumatisme crânio-facial sur terrain cardio-respiratoire très précaire » ; Ce certificat fait état de la chute et du traumatisme, les difficultés cardio-respiratoires n'étant qu'un terrain et non une cause ; la cause étant en l'espèce, la chute et le traumatisme en résultant.

- le certificat du Docteur C. du 19 août 2008 qui indique expressément que la mort est causée par le traumatisme crânio-facial et donc la chute.

Il est donc apparu que la mort était naturelle, ce qui n'exclut pas l'existence d'une chute et d'un traumatisme qui a entraîné la mort de Monsieur Ch. X.

 

Par conclusions notifiées le 23 avril 2015, la société Pacifica demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, au visa des conditions générales de contrat des garanties accidents de la vie souscrit par Monsieur Ch. X., de juger que la cause du décès de ce dernier ne peut être rattachée à un accident de la vie et que Monsieur D. X. ne rapporte pas la preuve d'un lien direct et certain entre le décès de son père et un événement accidentel et qu'en conséquence, le contrat souscrit par Monsieur Ch. X. ne peut trouver application.

Elle sollicite le rejet des demandes de l'appelant et sa condamnation aux dépens de l'instance et à lui payer une indemnité de procédure de 2 000 euros ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle expose que le contrat souscrit par M. Ch. X. est un contrat qui intervient en cas notamment d'accident, soit une lésion corporelle provenant de l'action violente soudaine et imprévue d'une cause extérieure ; qu'aux termes de la demande d'adhésion GAV (pour garantie des accidents de la vie), il a souscrit une convention Pacifica aux termes de laquelle il était précisé notamment que le souscripteur reconnaissait avoir été informé qu'il recevrait la confirmation d'adhésion ainsi que les conditions générales ultérieurement et que le double de la présente demande d'adhésion, les conditions générales et la confirmation d'adhésion constituaient le contrat établi définitivement qu'à la réception de la confirmation d'adhésion ; que M. X. a versé aux débats la pièce intitulée « contrat d'assurances » qui contient les exclusions de garantie, de façon particulièrement apparente ainsi que les conditions générales.

Elle expose que le contrat couvre les dommages consécutifs à un accident survenu entre le jour de prise d'effet du contrat et sa résiliation ; que sont exclues les maladies et les conséquences directes d'un choc émotionnel et les dommages résultant de l'état de santé, en particulier suite à une infection cardio-vasculaire et vasculaire-cérébrale et que les conditions générales définissent un accident comme étant toute lésion corporelle provenant de l'action violente, soudaine et imprévue d'une cause extérieure.

Elle soutient que la charge de la preuve pour pouvoir prétendre au bénéfice de cette police d'assurance et du lien de causalité entre l'éventuelle chute et le décès de l'assuré repose sur le bénéficiaire ou son ayant droit.

Elle invoque que le certificat médical est établi par le médecin traitant de la famille, le Docteur C. indique que Monsieur X. Ch. était décédé de mort naturelle et précise que ce praticien, sollicité par M. D. X. a précisé de manière habile que la chute avait entraîné un traumatisme sans préciser l'origine de la chute ; que les certificats rédigés par le Docteur C. les 17 juillet et 19 août 2008 ne sont pas de nature à remettre en cause, les constatations qu'elle a elle-même effectuées le 5 juin 2008 au domicile de M. Ch. X. puisque dans son certificat du 17 juillet 2008, elle indique que le décès est survenu au domicile suite à une chute avec traumatisme crânio-facial et dans celui du 19 août 2008 que la chute de M. Ch. X. a entraîné un traumatisme crânio-facial qui est responsable de la mort sans préciser sur quels éléments ses conclusions reposent alors même que celles-ci sont faites plus de deux mois après le décès de M. Ch. X.

Elle ajoute qu'en l'absence d'obstacle médico-légal constaté par le médecin, le corps de M. Ch. X. n'a fait l'objet ni d'un examen externe complet ni d'une autopsie et que, dès lors, l'affirmation par le Docteur C. dans son certificat du 19 août 2008 que le décès de M. Ch. X. est imputable au traumatisme crânien causé par sa chute ne peut dès lors, reposer que sur des hypothèses et est donc dénuée de toute valeur probante.

La clôture de l'instruction est intervenue par ordonnance du 10 mai 2016.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Il appartient à l'assuré de rapporter la preuve des conditions d'application du contrat d'assurance et à l'assureur de rapporter la preuve de la réunion des conditions de fait de l'exclusion de garantie.

En l'espèce, M. Ch. X. a souscrit auprès de la compagnie Pacifica une assurance accidents de la vie le 22 avril 2005 et il n'est pas contesté qu'au jour du décès de M. X. le 17 juillet 2008, le contrat était en vigueur. Le montant du capital décès de 20.000 euros n'est pas contesté également.

L'assureur soutient qu'il ne doit pas sa garantie lorsque le décès résulte d'un état de santé particulier suite à une infection cardia-vasculaire-cérébrale et que le requérant ne démontre pas de lien entre le décès et un événement accidentel seul événement garanti.

M. D. X. soutient tout d'abord que l'assureur d'une part ne justifie pas avoir porté à la connaissance de M. Ch. X., souscripteur du contrat, les conditions générales du contrat mentionnant l'exclusion de garantie de sorte que ces dernières sont abusives au sens des articles L. 132-1 et R. 132-1-1° du code de la consommation et lui sont inopposables en sa qualité d'ayant droit et d'autre part, soutient que le décès de son père est dû à une chute qui a entraîné un traumatisme crânien qui a lui-même entraîné la mort de sorte que l'assureur doit sa garantie.

Il est versé aux débats la demande d'adhésion GAV et un document intitulé « Convention Pacifia » signé par M. Ch. X. aux termes duquel ce dernier reconnaît avoir été informé qu'il recevrait la confirmation d'adhésion ainsi que les conditions générales ultérieurement ; l'ensemble des documents constituant le contrat établi définitivement à la réception de la confirmation d'adhésion.

M. D. X. a versé aux débats les conditions générales du contrat d'assurance de sorte qu'il est établi que son père M. Ch. X. a bien été rendu destinataire des dites conditions générales antérieurement au sinistre et qu'il a été nécessairement informé de la clause d'exclusion qui ne peut dès lors être qualifiée d'abusive et qui est valide et opposable aux ayants droits de l'assuré.

Il résulte du certificat médical du Docteur L. le 4 juillet 2008 que M. Ch. X. est décédé d'un traumatisme crânio-facial suite à une chute sur un terrain respiratoire très précaire. Aucun élément n'établit que la chute a été provoquée par ce terrain respiratoire précaire ou par une infection cradio-vasculaire-cérébrale de sorte qu'il est établi que M. X. est décédé des suites d'un chute et que sa mort est bien naturelle par opposition à une mort posant des problèmes médicaux-légaux, soit une mort suspecte et constitue un accident comme étant un événement extérieur à l'état de santé de l'assuré, soudain et imprévu qui doit être garanti par la compagnie Pacifica.

Le jugement entrepris sera dès lors infirmé en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de M. D. X.

La compagnie Pacifica sera condamnée à payer à Monsieur D. X. la somme de 20.000 euros au titre du capital décès, outre intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2012, date de l'exploit introductif d'instance valant sommation de payer suffisante.

La compagnie Pacifia sera également condamnée à payer à M. X. la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait de la résistance abusive de l'assureur à payer la somme due.

Le jugement entrepris sera également infirmé sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile.

La compagnie Pacifica sera condamnée aux dépens de première instance et aux dépens d'appel. Elle sera déboutée de sa demande d'indemnité de procédure et sera condamnée à payer à M. X., sur ce même fondement, la somme de 5.000 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Charleville Mézières le 19 septembre 2014 en toutes ses dispositions en ce qu'il dit que la convention Pacifia ne comportait pas de clause abusive et sur l'article 700 du code de procédure civile ;

INFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions ;

Statuant à nouveau ;

DIT que la compagnie Pacifica doit sa garantie au titre du contrat souscrit par Monsieur Ch. X. le 22 avril 2005 ;

En conséquence,

CONDAMNE la compagnie Pacifica à payer à Monsieur D. X. la somme de 20.000 euros au titre du capital décès, outre intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2012 ;

CONDAMNE la compagnie Pacifica à payer à Monsieur D. X. la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement ;

CONDAMNE la compagnie Pacifica aux dépens de première instance ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la compagnie Pacifica aux dépens d'appel avec faculté de recouvrement direct au profit de la SCP D. V. J. D., conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la compagnie Pacifica de sa demande d'indemnité de procédure ;

CONDAMNE la compagnie Pacifica à payer à Monsieur D. X. la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier                             Pour le président empêché