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CA NÎMES (1re ch. civ.), 22 septembre 2016

Nature : Décision
Titre : CA NÎMES (1re ch. civ.), 22 septembre 2016
Pays : France
Juridiction : Nimes (CA), 1re ch.
Demande : 14/06144
Date : 22/09/2016
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 16/12/2011
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5967

CA NÎMES (1re ch. civ.), 22 septembre 2016 : RG n° 14/06144 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Le prêt dont s'agit étant en relation directe avec l'objet social de la société (financement de travaux dans le cadre d'une activité de promotion immobilière), elle ne peut invoquer les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation relatives aux clauses abusives. »

 

COUR D’APPEL DE NÎMES

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/06144. [sur appel de] TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON, 1er décembre 2014 RG : 13/02176.

 

APPELANTE :

SARL AKS HABITAT

au capital de 50.000 euros, inscrite au RCS d'Avignon sous le n° XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège, Représentée par Maître Caroline F. DE T. de la SCP M. F. DE T. B. T. V., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

 

INTIMÉE :

SA CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DU LANGUEDOC ROUSSILLON

Banque Coopérative régie par les articles L. 512-85 et suivants du Code Monétaire et Financier, SA à Directoire et Conseil d'Orientation et de Surveillance au Capital de XX euros, Prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié en cette qualité en son siège, Représentée par Maître V. de la SCP T. V. V. G. L., Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER, Représentée par Maître Jean-Jacques S. de la SCP L. I. J. S., Postulant, avocat au barreau de NÎMES

 

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 26 mai 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Monsieur Philippe SOUBEYRAN, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l'article 786 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. André JACQUOT, Président, Mme Anne-Marie HEBRARD, Conseiller, Monsieur Philippe SOUBEYRAN, Conseiller

GREFFIER : Mme Carole MAILLET, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS : à l'audience publique du 6 juin 2016, où l'affaire a été mise en délibéré au 22 septembre 2016 ; Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;

ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé et signé par Mme Anne-Marie HEBRARD, Conseiller, en l'absence du Président légitimement empêché, publiquement, le 22 septembre 2016, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, par mise à disposition au greffe de la Cour

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SARL AKS Habitat (la société) a contracté un prêt de 100.000 euros auprès de la Caisse d’Épargne et de Prévoyance du Languedoc Roussillon (ci-après la banque). Cette dernière a annulé le contrat en se prévalant des dispositions contractuelles.

La SARL estimant cette annulation abusive a saisi le tribunal de grande instance d'Avignon qui, par jugement en date du 1er décembre 2014, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée aux dépens distraits au profit de l'avocat.

Par acte en date du 16 décembre 2014, la SARL AKS Habitat a interjeté appel.

Dans ses dernières conclusions en date du 13 février 2015 auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé de ses prétentions, elle demande à la cour de réformer le jugement déféré et, au visa des articles 1134, 1135, 1142, 1146, 1147, 1153 et s., 1184 et s et 3 du Code civil, L. 132-1 du Code de la consommation, L. 312-1-1 et s. du Code monétaire et financier, de :

« AU PRINCIPAL

DIRE ET JUGER la clause de résolution du contrat de prêt ou d'annulation prévue à l'article 2 du Contrat de prêt du 22 décembre 2011 comme abusive et réputée non écrites.

DIRE ET JUGER le Contrat de prêt du 22 décembre 2011 applicable dans ses dispositions autres que celles jugées abusives.

ENJOINDRE à la CAISSE D’ÉPARGNE LANGUEDOC ROUSSILLON d'avoir à exécuter le contrat de prêt n° XX du 22 Décembre 2011 dans toutes ses dispositions et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2012

A DÉFAUT

DIRE ET JUGER que la rupture du contrat de prêt n° XX du 22 décembre 2011 par la CAISSE D’ÉPARGNE LANGUEDOC ROUSSILLON est fautive.

CONSTATER que la résolution du contrat à la date du 11 juillet 2012 par la société CAISSE D’ÉPARGNE LANGUEDOC ROUSSILLON constitue un préjudice certain et direct à la société AKS HABITAT

DIRE ET JUGER fautif le comportement de la CAISSE D’ÉPARGNE en ce qu'elle a procédé à la clôture du compte bancaire et ce, en violation des dispositions légales et réglementaires.

PAR CONSÉQUENT

CONDAMNER la société CAISSE D’ÉPARGNE LANGUEDOC ROUSSILLON à verser à la société AKS HABITAT la somme de 1.500.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice financier subi,

CONDAMNER la société CAISSE D’ÉPARGNE LANGUEDOC ROUSSILLON à verser à la société AKS HABITAT la somme de 50.000 euros pour le préjudice moral.

CONDAMNER la société CAISSE D’ÉPARGNE LANGUEDOC ROUSSILLON à verser à la Société AKS HABITAT la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE ainsi qu'aux entiers dépens. »

Elle soutient pour l'essentiel que :

- la banque a annulé unilatéralement le crédit, ce qu'elle n'a pas accepté, dénaturant les termes des articles 2 et 4 du contrat, ce dernier ne prévoyant aucun délai pour le déblocage des fonds et prélevant les échéances ;

- la banque a clôturé sans délai de prévenance son compte professionnel ;

- les manquements de la banque lui ont causé un important préjudice né de l'impossibilité de mener à terme l'opération financée portant sur la vente de 8 lots alors que de nombreux frais ont été engagés.

- sa qualité de non professionnel du crédit financier doit lui permettre de bénéficier des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation et d'obtenir que la cour juge abusive la clause énoncée à l'article 2 en raison du déséquilibre significatif créé au profit de la banque.

 

Dans ses dernières conclusions en date du 3 mars 2015 auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé de ses prétentions, la banque demande la confirmation du jugement déféré sauf en qui concerne le rejet de sa prétention au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Elle demande de condamner la SARL AKS Habitat de ce chef à la somme de 3.000 euros au titre de la procédure de première instance et celle de même montant pour la procédure d'appel, outre les dépens de cette dernière.

Elle fait valoir pour l'essentiel que :

- l'article 2 lui permettait d'annuler le contrat à défaut de versement dans le délai de 6 mois de la date de formation du contrat ; les termes de cette stipulation sont clairs et précis si bien qu'il n'y a pas lieu à interprétation ;

- il existe un lien direct entre la conclusion du contrat et l'activité exercée si bien que la SARL AKS ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Les parties conviennent de l'existence et de l'objet de la convention : la SARL AKS Habitat a souscrit le 4 janvier 2012 à l'offre de crédit du 22 décembre 2011 pour un capital de 100 000 euros destiné à financer des travaux de construction d'un immeuble sis à [ville B].

Pour l'amortissement de ce prêt, la société a ouvert dans les livres de la banque un compte professionnel sur lequel les échéances de 35 euros ont été prélevées.

La banque a procédé à l'annulation de ce prêt le 11 juillet 2012 et a clôturé le compte le 12 juillet en émettant un chèque de banque du montant disponible, que la société a refusé d'encaisser ; cette dernière a mis en demeure la banque de satisfaire à ses obligations par courrier du 19 octobre 2012.

Pour justifier la décision d'annulation, dont la banque reconnaît qu'elle intervient suite à la demande du notaire de modifier la sûreté, elle invoque les stipulations combinées des articles 2 et 4 du contrat.

Selon l'article 2, « les conditions de prêt pourront être revues ou le contrat annulé à l'initiative du prêteur si le premier versement n'est pas intervenu dans un délai de 6 mois à compter de la date de formation du contrat de prêt ».

L'article 4, dénommé « déblocage des fonds » énonce les conditions auxquelles celui-ci est subordonné et les modalités de versement des fonds. Parmi les conditions, figurent la constitution et la régularisation des garanties prévues dans les conditions particulières. Celles-ci énonçaient la constitution d'une hypothèque conventionnelle non rechargeable sur les parcelles cadastrées section BB lots […].

La SARL AKS ne justifie pas que cette garantie était constituée au jour de l'annulation du crédit. Les termes du courrier de Maître D., notaire en date du 29 juin 2012 ne laissent pas entendre qu'elle l'était puisqu'il demande le cantonnement de l'hypothèque en l'état de la division du terrain au seul visa de l'offre de prêt mais non de l'inscription effective de la sûreté.

Dès lors qu'une condition au déblocage des fonds n'était pas remplie et que les termes de l'article 2 précité sont clairs et précis, ne nécessitant aucune interprétation, la banque avait la faculté d'annuler le contrat si les fonds n'avaient pas été versés dans le délai de six mois à compter du 4 janvier 2012, soit après le 4 juin 2012. En annulant le contrat le 11 juillet 2012, la banque a respecté les termes contractuels qui ne lui imposaient pas de recueillir le consentement de la société à cette annulation.

Le prêt dont s'agit étant en relation directe avec l'objet social de la société (financement de travaux dans le cadre d'une activité de promotion immobilière), elle ne peut invoquer les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation relatives aux clauses abusives.

Le jugement sera en conséquence confirmé, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de la banque au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Il sera alloué à la banque la somme de 1 000 euros de ce chef.

La société, partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, supportera les dépens d'appel. Il convient en outre qu'elle participe à concurrence de 2.000 euros aux frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort

Confirme la décision déférée sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de la banque au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

statuant à nouveau de ce chef

Condamne la SARL AKS Habitat à payer à la Caisse d’Épargne et de Prévoyance du Languedoc Roussillon la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance.

Y ajoutant,

Condamne la SARL AKS Habitat à payer à la Caisse d’Épargne et de Prévoyance du Languedoc Roussillon la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Condamne la SARL AKS Habitat aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Mme HEBRARD, Conseiller, par suite d'un empêchement du Président et par Mme MAILLET, Greffier.

LE GREFFIER                    LE PRÉSIDENT