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6310 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Dépôt-vente

Nature : Synthèse
Titre : 6310 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Dépôt-vente
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6310 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT

DÉPÔT-VENTE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Recommandation. Recommandation n° 99-01, du 18 février 1999, concernant les contrats de dépôt-vente : BOCCRF du 31 mars 1999 ; Cerclab n° 2192.

Nature juridique. Selon la recommandation, « les relations contractuelles que les parties qualifient de contrat de dépôt-vente s'analysent en un mandat de vente assorti d'une obligation de conservation du bien destiné à être vendu ». Recomm. n° 99-01 : Cerclab n° 2192 (considérant 1-3°). § V. aussi : si le contrat comporte un dépôt et un mandat de vente, dès lors que les deux prestations sont liées dans le dépôt-vente, le contrat ne peut être examiné au regard des règles du contrat de dépôt ou de celui de mandat pris séparément. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339. § Sur le mandat, V. aussi Cerclab n° 6424.

A. CLAUSES LIÉES À LA VENTE

Fixation du prix initial. * Prix indéterminé. Est abusive une clause relative au prix et à la commission qui rend incertaine les conditions de prix en ne prévoyant pas les différentes décotes de prix. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339.

* Prix fixé dans une fourchette. En présence d’une clause stipulant qu’« en accord avec le déposant, il pourra être convenu à titre de prix de mise en vente initial et pendant les deux premiers mois une fourchette de prix à l'intérieur de laquelle [le dépositaire] pourra librement proposer à la vente l'article déposé », une cour d’appel, qui relève qu’il s’agissait d’une fourchette de prix qui n’était pas obligatoire et était librement débattue entre les parties lors de la signature du contrat, que la clause n’imposait pas une obligation, mais prévoyait une simple faculté, qu’elle était favorable au déposant puisqu’elle permettait d’adapter le prix à la demande, en a justement déduit qu’aucun déséquilibre entre les droits et obligations des parties n’était caractérisé. Cass. civ. 1re, 1er février 2005 : pourvoi n° 03-13779 ; Bull. civ. I, n° 61 ; Cerclab n° 1995, rejetant le pourvoi contre CA Grenoble (1re ch. civ.), 10 février 2003 : RG n° 99/04378 ; arrêt n° 99 ; Cerclab n° 3121.

Modification du prix. N’est pas abusive la clause qui prévoit que, passé un certain délai connu du consommateur qui peut alors retirer ses objets invendus, le prix sera fixé librement par le dépositaire. TGI Vienne, 22 juin 2000 : RG n° 375/99 ; Cerclab n° 414 (arg. : 1/ le consommateur est informé du délai ; 2/ il peut reprendre les invendus sans supporter aucun frais ; 3/ il peut trouver un intérêt à cette baisse du prix lorsqu'il souhaite se débarrasser d'un objet difficile à vendre).

Vente du bien : information du déposant. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de dispenser le professionnel de toute information du déposant relative à la réalisation de la vente. Recomm. n° 99-01/4° : Cerclab n° 2192 (considérant n° 4 : clause empêchant le déposant de s'assurer de la réalité de la vente et du prix payé).

Les solutions recensées semblent en sens inverse, en estimant qu’il appartient plutôt au déposant de s’assurer de la vente (ou de l’absence de vente) de son bien. V. par exemple : le fait de demander à un déposant qui est venu volontairement déposer un objet dans ce type de magasin, de vérifier régulièrement le sort de soin dépôt n'est pas constitutif d'une obligation déséquilibrant l'économie du contrat ; le professionnel ne peut à l'évidence aviser tous les déposants concernés compte tenu du nombre d'objets déposés, alors que le déposant qui n'est concerné le plus souvent que par un ou quelques objets peut aisément et sans frais considérable (coups de téléphone local...) vérifier l'issue de son dépôt ; n’est pas abusive la clause prévoyant que le professionnel n’a pas à prévenir le consommateur de la vente du bien, celui-ci pouvant s’informer facilement. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339 (décision conseillant toutefois d’offrir une option au consommateur qui en réglerait les frais).

Vente du bien : paiement du déposant. Les décisions recensées illustrent le fait que les contrats examinés contiennent des clauses permettant au dépositaire de s’attribuer le produit de la vente passé un certain délai. Le caractère abusif de ces stipulations doit s’apprécier en lien avec l’obligation, admise ou pas, d’informer le consommateur de la vente (laquelle pourrait prendre en compte la valeur du bien) et avec le fait que, contrairement aux clauses concernant les invendus, la conservation en compte d’une somme d’argent ne crée aucune contrainte de stockage sur le professionnel et ne lui fait encourir aucun intérêt de retard. L’attribution du produit de la vente, sans information du consommateur, dans un délai court et en tout cas inférieur au délai de prescription, est donc très discutable. La Commission et les juges du fond ont adopté une position plus protectrice que celle posée par la Cour de cassation, laquelle semble très discutable pour des biens de valeur non négligeables (V. ci-dessous).

La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel, passé un certain délai et sans information préalable du déposant, soit de conserver le produit de la vente, soit de lui substituer la remise de bons d'achat. Recomm. n° 99-01/5° : Cerclab n° 2192.

Est abusive la clause autorisant la conservation du prix par le dépositaire, à l’issue d’un délai de deux ans, sans information du consommateur. TGI Vienne, 22 juin 2000 : RG n° 375/99 ; Cerclab n° 414 (déséquilibre significatif découlant de l’absence d’obligation d'informer le consommateur de la réalisation de la vente). § Est abusive la clause attribuant le prix de vente dans les six mois du contrat sans information du consommateur. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339.

N’est pas abusive la clause selon laquelle le dépositaire « ne prévient pas les déposants en cas de vente de leurs objets. Les règlements des ventes du mois en cours se font uniquement la dernière semaine du mois », lorsqu’elle prévoit un paiement différé, dès lors qu’elle ne dispense pas pour autant le dépositaire de son obligation de restitution de la chose ou du prix reçu en échange, mais elle crée un déséquilibre significatif lorsqu’elle se combine avec la clause attribuant la propriété du bien dans un certain délai. TGI Bourgoin-Jallieu, 12 avril 2000 : RG n° 199900069 ; Cerclab n° 338 (jugement s’écartant expressément de la recommandation).

V. pour l’hypothèse, le caractère abusif de la clause n’ayant pu être examiné : les sommes dues au déposant par le dépositaire inférieures à 100 francs nets sont quérables. CA Grenoble (1re ch. civ.), 10 février 2003 : RG n° 99/04378 ; arrêt n° 99 ; Cerclab n° 3121 (critiques de l’association manquant en fait), pourvoi rejeté par Cass. civ. 1re, 1er février 2005 : pourvoi n° 03-13779 ; Bull. civ. I, n° 61 ; Cerclab n° 1995 (problème non examiné).

B. CLAUSES LIÉES À LA CONSERVATION ET À LA RESTITUTION DU BIEN

Assurance dans l’intérêt du professionnel payée par le déposant. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de faire supporter par le consommateur déposant tout ou partie de la prime de l'assurance lorsqu'elle est souscrite dans le seul intérêt du professionnel. Recomm. n° 99-01/3° : Cerclab n° 2192 (considérant n° 3 : le déséquilibre significatif résulte du fait que le déposant assume la charge d’une dépense profitant au seul dépositaire professionnel).

Garde des objets déposés : clause exonératoire. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'exonérer le professionnel de toute responsabilité en cas de dégradation, disparition ou destruction du bien déposé. Recomm. n° 99-01/2° : Cerclab n° 2192. § N.B. Clause interdite, depuis le décret du 18 mars 2009, par l’art. R. 212-1-6° C. consom. (ancien art. R. 132-1-6° C. consom., sous réserve de la protection des non-professionnels déplacée à l’art. R. 212-5 C. consom.).

Est abusive la clause exonérant le dépositaire de toute responsabilité quant à la garde des objets déposés. TGI Bourgoin-Jallieu, 12 avril 2000 : RG n° 199900069 ; Cerclab n° 338 (clause stipulant que « le client qui effectue le dépôt est propriétaire et responsable de ses biens : il devra les mettre en place, les démonter ou les remonter si nécessaire » ; rejet d’une prétendue maladresse de rédaction, dès lors que la clause tend, en réalité, à une exonération totale de responsabilité du professionnel dépositaire dans la garde ou la conservation des biens déposés, qui n’est pas conforme aux règles du Code civil). § Même solution pour une clause limitative de responsabilité. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339.

Obligation de restitution des bien viciés ou détériorés. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet d'autoriser le professionnel à disposer du bien déposé, sans en avertir préalablement le déposant, lorsqu'un défaut est constaté sur ce bien postérieurement au dépôt. Recomm. n° 99-01/1° : Cerclab n° 2192. § Rappr. : est abusive la clause autorisant le dépositaire à retirer unilatéralement un bien de la vente pour vice de forme ou de fonctionnement. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339.

Obligation de restitution des invendus. La cour d’appel, qui relève que le déposant qui a la possibilité de retirer les objets deux mois après le dépôt sans verser aucune indemnité au dépositaire est clairement informé de son obligation de se manifester à l’issue du contrat, obligation qui lui est rappelée par l’exigence d’une information préalable, en a justement déduit que la clause prévoyant soit la restitution aux frais du déposant, soit la destruction, soit la vente et la conservation du prix, n’entraînait pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au préjudice du consommateur. Cass. civ. 1re, 1er février 2005 : pourvoi n° 03-13779 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 1995, rejetant le pourvoi contre CA Grenoble (1re ch. civ.), 10 février 2003 : RG n° 99/04378 ; arrêt n° 99 ; Cerclab n° 3121 (dès lors que la clause incriminée prévoit que préalablement à l'action du dépositaire, le déposant est avisé, aucun déséquilibre ne peut être caractérisé étant observé que la commission des clauses abusives a retenu l'existence d'un déséquilibre significatif en l'absence de toute information préalable du déposant). § V. aussi : une clause relative aux invendus prévoyant l'attribution automatique des objets invendus en fin de contrat en cas de non récupération par le déposant ne crée pas en elle-même un déséquilibre en ce qu'elle permet au professionnel de s'assurer d'une carence éventuelle des déposants qui pourraient négliger de récupérer des objets invendus, invendables même à un prix dérisoire ; en aucun cas le professionnel qui assure un service de vente ne saurait être tenu de conserver des objets invendus au terme du contrat et constituer ainsi sans délai un lieu de stockage (grenier : débarras) gratuit à la libre disposition des déposants négligents ou mal intentionnés. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339.

La Commission des clauses abusives a adopté une position plus nuancée et pragmatique, tenant compte notamment de la valeur du bien. V. : la Commission recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel, au terme du contrat et sans information préalable du déposant, de disposer du bien remis, sans distinction selon la durée du contrat et/ou la valeur de ce bien. Recomm. n° 99-01/6° : Cerclab n° 2192 (considérant n° 6 : clause conférant au professionnel dépositaire une prérogative appartenant au déposant, propriétaire du bien).

Les clauses permettant l’attribution de la propriété des objets invendus à l’expiration d’un certain délai sont appréciées en fonction de la durée de ce délai et de l’information du consommateur. V., par ordre croissant de durée du délai : la clause prévoyant le transfert automatique de la propriété d’objets invendus n’est pas abusive dans son principe mais dans le fait que le délai est trop court (15 jours). TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339 (jugement énonçant qu’il n’appartient pas à l’association de consommateurs de fixer un délai, mais les indications fournies peuvent faire penser qu’un délai de deux mois pourrait être satisfaisant). § Est abusive la clause d’un contrat de dépôt-vente stipulant que « tout objet non récupéré au bout de quatre mois à dater du jour du contrat devient la propriété [du dépositaire] qui pourra en disposer comme il l'entend », en permettant l’appropriation par le professionnel du bien déposé en dehors de toute manifestation de volonté du consommateur et en l'absence de toute information de celui-ci. TGI Bourgoin-Jallieu, 12 avril 2000 : RG n° 199900069 ; Cerclab n° 338. § Est abusive la clause qui stipule que « tout article invendu, non retiré au terme d’un an et un jour, devient la propriété définitive » du dépositaire, sans que celui-ci ne soit tenu de rappeler au déposant l’issue de ce délai, ni de l’inviter à venir retirer l’objet placé en dépôt vente. (bien de valeur vendu ultérieurement 20.000 francs ; rejet des arguments du dépositaire, la production d’un autre contrat montrant que leurs clauses sont rédigées différemment et prévoient l’information du consommateur). CA Agen (1re ch.), 3 octobre 2006 : RG n° 05/01484 ; arrêt n° 923 ; Cerclab n° 1259 ; Legifrance ; Lamyline, confirmant TI Cahors, 15 mars 2005 : Dnd.

Résiliation. Est abusive la clause autorisant le dépositaire à interrompre le contrat sur simple appel téléphonique ou simple courrier en obligeant le déposant à reprendre ses biens dans les 72 heures. TGI Vienne, 22 juin 2000 : RG n° 375/99 ; Cerclab n° 414 (clause prohibée par l'art. R. 132-2 C. consom., en offrant au professionnel le droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du service à rendre ; clause créant un déséquilibre significatif en permettant une résiliation discrétionnaire, sans indemnité, et dans un délai extrêmement court). § Est abusive la clause autorisant le dépositaire à retirer unilatéralement un bien de la vente pour vice de forme ou de fonctionnement. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339.

Est abusive la pénalité automatique sanctionnant le consommateur qui retire un objet de la vente sauf à prévoir les motifs légitimes justifiant un retrait sans frais (notamment en cas de manquements du professionnel). TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339 (modification insuffisante de la clause par l’adjonction d’une distinction entre différents délais).

Suites du contrat : restitution du contrat. Est abusive la clause par laquelle le professionnel exige la restitution de l’exemplaire du contrat en possession du consommateur, à l’issue de l’exécution du contrat, car elle entraîne pour le particulier un dessaisissement d'un acte pouvant le cas échéant, faire la preuve du contrat. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339 (jugement acceptant la proposition de modification du professionnel : seule la présentation peut être exigée).

Acquisition du bien par le dépositaire. Dans un contrat de mandat de dépôt-vente d’un véhicule, la clause pré-imprimée selon laquelle le déposant affirme sur l'honneur que le véhicule est livré sans vices cachés ne peut viser que des vices cachés dont il avait ou pouvait avoir connaissance. CA Chambéry (ch. civ. sect. 1), 27 janvier 2015 : RG n° 13/01757 ; Cerclab n° 5032 ; Juris-Data n° 2015-003561 (N.B. contrat ayant en l’espèce été transformé en vente pure et simple au dépositaire, qui a revendu le bien en qualité de vendeur professionnel, le recours contre le déposant-mandant s’inscrivant dans le cadre d’une vente par un vendeur occasionnel, ignorant en l’espèce l’existence du vice), sur appel de TGI Bonneville, 27 mai 2013 : RG n° 11/01268 ; Dnd.

Dès lors que, postérieurement au mandat de dépôt-vente d’un véhicule, le dépositaire s’est porté acquéreur du bien déposé, qu’il a revendu le même jour à un tiers, il est tenu à l’égard de ce dernier en qualité de vendeur professionnel pour la garantie des vices cachés et ne peut donc plus se prévaloir du contrat de dépôt-vente. CA Chambéry (ch. civ. sect. 1), 27 janvier 2015 : RG n° 13/01757 ; Cerclab n° 5032 ; Juris-Data n° 2015-003561 (recours possible contre le déposant, mais en qualité de vendeur occasionnel dont la connaissance du vice n’est pas, en l’espèce, établie), sur appel de TGI Bonneville, 27 mai 2013 : RG n° 11/01268 ; Dnd.

Clause attributive de compétence. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de déroger aux règles de compétence territoriale. Recomm. n° 99-01/7° : Cerclab n° 2192 (dépôt-vente ; clause illicite). § Prise d’acte de la suppression de la clause : TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339.