CA PAU (1re ch. civ.), 16 juin 2003
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 648
CA PAU (1re ch. civ.), 16 juin 2003 : RG n° 01/01994
Publication : Jurinet
Extrait : « Que les sections 3, 4 et 5 du titre II de la convention relative à la compétence traitent respectivement de la compétence en matière d'assurances, de la compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs et des compétences exclusives ; Attendu que seule la section 4 du titre II est susceptible d'intéresser le présent litige ; Qu'en effet, aux termes de l'article 13, en matière de contrat conclu par une personne pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la présente section, lorsqu'il s'agit d'un prêt à tempérament ou d'une autre opération de crédit liés au financement d'une vente d'objets mobiliers corporels ; Que le contrat de location avec option d'achat souscrit par Monsieur X. entre assurément dans les prévisions de ce texte ; Que l'article 14 alinéa 2 dispose que l'action intentée contre le consommateur par l'autre partie au contrat ne peut être portée que devant les tribunaux de l' Etat contractant sur le territoire duquel est domicilié le consommateur ; »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PAU
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 16 JUIN 2003
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Dossier : 01/01994.
ARRÊT prononcé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, en vertu de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Madame PEYRON, Greffier, à l'audience publique du 16 juin 2003 date à laquelle le délibéré a été prorogé.
APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 10 mars 2003, devant : Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, Madame PONS, Conseiller, Monsieur LESAINT, Conseiller, assistés de Madame PEYRON, Greffier, présent à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur X.
[adresse], représenté par la SCP LONGIN C. ET P., avoués à la Cour, assisté de la SCP HENRY DE BRISIS - MARTINE DE BRISIS - ELISABETH DE BRISIS, avocats au barreau de MONT DE MARSAN
INTIMÉE :
Société BMW LEASING GMBH
[adresse], représentée par la SCP DE GINESTET / DUALE, avoués à la Cour, assistée de Maître ANWALTSBURO, avocat au barreau de STRASBOURG
sur appel de la décision en date du 31 octobre 2000 rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONT DE MARSAN
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Par ordonnance du 31 octobre 2000, le Président du Tribunal de Grande Instance de MONT DE MARSAN, statuant sur la requête présentée par la société BMW LEASING GMBH a :
- Autorisé l'exécution en FRANCE de l'ordonnance exécutoire rendue le 25 septembre 1997 par le Tribunal de MUNICH (ALLEMAGNE) sous le n° B50834/97 déduction faite du paiement de la somme de 22.105,59 Francs à imputer sur les intérêts, puis les frais, et enfin le principal ;
- Ordonné la conversion des condamnations en Francs français ou en Euros au cours du change du jour du paiement ;
- Condamné Monsieur X. aux dépens et au paiement d'une indemnité de DEUX MILLE FRANCS FRANÇAIS soit 304,90 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par déclaration au greffe de la Cour en date du 22 décembre 2000, Monsieur X. a relevé appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.
L'appelant s'étant abstenu de déposer ses conclusions dans les 4 mois de la déclaration d'appel, le magistrat de la mise en état de la Cour a ordonné d'office la radiation de l'affaire, en application de l'article 915 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La réinscription de l'appel a été requise par Monsieur X. par conclusions déposées le 2 juillet 2001.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par écritures déposées le 17 mai 2002, Monsieur X. demande à la Cour :
Vu les dispositions des articles L. 311-2 et L. 311-37 du Code de la Consommation ;
- de réformer l'ordonnance d'exequatur qui lui a été signifiée le 30 novembre 2000 ;
- de dire et juger forclos en son action la SOCIETE BMW LEASING à son encontre ;
- de condamner BMW LEASING à lui payer la somme de 1.500 Euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre la somme de 1.500 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
- la condamner aux entiers dépens.
L'appelant soutient :
- qu'il est fondé à soulever la forclusion tirée des dispositions de l'article 311-37 du Code de la Consommation ;
- qu'il est d'ordre public que l'injonction de payer soit délivrée devant la juridiction du domicile du défendeur.
La SOCIÉTÉ BMW LEASING GMBH demande par écritures déposées le 29 janvier 2002 de :
- dire que l'ordonnance d'exequatur attaquée est régie par les dispositions de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 ;
- constater que Monsieur X. ne soulève aucun moyen recevable au vu des dispositions de cette Convention ;
- juger en conséquence irrecevable et en tout cas mal fondé l'appel interjeté par Monsieur X. ;
Très subsidiairement,
- de constater que le contrat de location est signé entre les parties le 25 mai 1991, en Allemagne, ancien pays de domiciliation de Monsieur X., exclusivement régi par les dispositions du droit allemand ;
- de dire qu'en conséquence il n'y a pas lieu à l'application des dispositions du Code de la Consommation français ;
- de juger en conséquence le moyen tiré des dispositions du Code de la Consommation français irrecevable et en tout cas mal fondé ;
En conséquence,
- de rejeter toutes les demandes de Monsieur X. ;
- de confirmer la décision entreprise ;
- de constater le caractère purement dilatoire de l'appel interjeté par Monsieur X. ;
- de condamner Monsieur X. à payer à la SOCIÉTÉ BMW LEASING GMBH la somme de 1 500 Euros à titre de dommages-intérêt pour appel abusif ;
- de condamner Monsieur X. aux entiers frais et dépens ;
- de condamner Monsieur X. à payer à la SOCIETE BMW LEASING GMBH la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er octobre 2002.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Attendu qu'il convient de rappeler :
- que Monsieur X. a souscrit le 13 mai 1991, à [ville A.] (ALLEMAGNE) un contrat de location avec option d'achat, portant sur un véhicule automobile BMW 525, auprès de la société BMW LEASING GMBH, établie à MUNICH (ALLEMAGNE), alors qu'il était domicilié à [ville B.] (ALLEMAGNE) ;
- qu'en raison de la défaillance de l'emprunteur dans le versement des loyers, la société BMW LEASING GMBH a obtenu du Tribunal d'Instance de MUNICH, le 5 mai 1997, une ordonnance d'injonction de payer la contre valeur en francs français de 17.047,13 DM, y compris les frais de procédure ;
- que l'ordonnance a été régulièrement signifiée à Monsieur X., le 4 juillet 1997, à MONT DE MARSAN où il demeurait alors ;
- qu'à défaut d'opposition formée dans les délais requis, l'injonction de payer a été revêtue de la formule exécutoire par le tribunal de MUNICH le 25 septembre 1997.
Attendu que par requête présentée le 20 octobre 2000, la société BMW LEASING GMBH a demandé au Président du Tribunal de Grande Instance de MONT DE MARSAN d'autoriser l'exécution en France de l'ordonnance exécutoire, sous déduction de la somme de 22.105,59 Francs payée par Monsieur X., d'ordonner la conversion des condamnations en francs français ou Euros, au cours de change du jour de paiement ainsi que de condamner Monsieur X. au paiement de la somme de 2.000 Francs en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Attendu que pour s'opposer à la décision faisant droit à la requête de la société BMW LEASING GMBH, Monsieur X. soulève la forclusion tirée de l'article 311-37 du Code de la consommation.
Attendu qu'aux termes de l'article 26 alinéa 1 de la Convention de BRUXELLES du 27 septembre 1968, ratifiée par la France, les décisions rendues dans un Etat contractant sont reconnues par les autres Etats contractants, sans qu'il soit nécessaire de recourir à aucune procédure ;
Qu'aux termes de l'article 34 de la Convention, la requête ne peut être rejetée que pour l'un des motifs prévus aux articles 27 et 28 et qu'en aucun cas, la décision étrangère ne peut faire l'objet d'une révision au fond.
Attendu que l'article 27 dispose notamment, que les décisions ne sont pas reconnues si la reconnaissance est contraire à l'ordre public de l'Etat requis ;
Que force est de constater que l'exécution de l'ordonnance dont s'agit n'emporte aucune conséquence de nature à porter atteinte à l'ordre public français.
Attendu que l'article 28 énonce que de même, les décisions ne sont pas reconnues si les dispositions des sections 3,4 et 5 du titre II ont été méconnues ainsi que le cas prévu à l'article 59 ;
Que l'article 59 ne peut recevoir application en l'espèce ;
Que les sections 3, 4 et 5 du titre II de la convention relative à la compétence traitent respectivement de la compétence en matière d'assurances, de la compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs et des compétences exclusives ;
Attendu que seule la section 4 du titre II est susceptible d'intéresser le présent litige ;
Qu'en effet, aux termes de l'article 13, en matière de contrat conclu par une personne pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la présente section, lorsqu'il s'agit d'un prêt à tempérament ou d'une autre opération de crédit liés au financement d'une vente d'objets mobiliers corporels ;
Que le contrat de location avec option d'achat souscrit par Monsieur X. entre assurément dans les prévisions de ce texte ;
Que l'article 14 alinéa 2 dispose que l'action intentée contre le consommateur par l'autre partie au contrat ne peut être portée que devant les tribunaux de l' Etat contractant sur le territoire duquel est domicilié le consommateur ;
Attendu qu'il résulte de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 5 mai 1997 qui matérialise l'action intentée par la société BMW LEASING GMBH que Monsieur X. était domicilié : [adresse] (FRANCE) ;
Qu'ainsi, la règle de compétence édictée par l'article 14 alinéa 2 a été méconnue ;
Qu'il s'ensuit que l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 25 septembre 1997 par le Tribunal de MUNICH (ALLEMAGNE) sous le n° B 50834/97 ne peut être exécutée en France ;
Qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise et de rejeter la requête aux fins d'exequatur de la société BMW LEASING GMBH.
Attendu que faute de caractériser un abus commis par la requérante dans l'exercice de son action, Monsieur X. sera débouté de sa demande de dommages et intérêts ;
Attendu qu'il serait cependant inéquitable de laisser à la charge de l'appelant les frais non compris dans les dépens qu'il a exposés dans le cadre de la présente instance ;
Que la société BMW LEASING GMBH sera condamnée à lui payer la somme de 1.000 €, à titre d'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu que la société BMW LEASING GMBH supportera les dépens de la procédure.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Déclare l'appel recevable en la forme ;
Infirme l'ordonnance rendue le 31 octobre 2000 par le Président du Tribunal de Grande Instance de MONT DE MARSAN et statuant à nouveau ;
Vu les articles 26, 27, 28 et 31 de la Convention de BRUXELLES du 27 septembre 1968 ;
Rejette la requête aux fins d'exequatur présentée par la société BMW LEASING GMBH ;
Déboute Monsieur X. de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Condamne BMW LEASING GMBH à payer à Monsieur X., la somme de 1.000 €, en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Condamne la société BMW LEASING GMBH aux dépens de la procédure ; autorise la SCP LONGIN, avoués à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l'avance, sans avoir reçu provision.