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CA METZ (1re ch.), 10 novembre 2016

Nature : Décision
Titre : CA METZ (1re ch.), 10 novembre 2016
Pays : France
Juridiction : Metz (CA), 1re ch.
Demande : 13/01762
Décision : 16/00424
Date : 10/11/2016
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 24/04/2013
Numéro de la décision : 424
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6502

CA METZ (1re ch.), 10 novembre 2016 : RG n° 13/01762 ; arrêt n° 16/00424 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « La demande présentée par M. X. tendant à faire écarter l'application de la clause contractuelle relative à la définition de l'incapacité totale de travail entraînant droit à indemnisation, est une défense à la demande en répétition de l'indu formée [par] la SA CNP ASSURANCES qu'elle a pour objet de faire rejeter. Elle est donc admissible en application de l'article 564 qui déclare recevables les prétentions nouvelles tendant à faire écarter les prétentions adverses. »

2/ « Il n'est établi par aucun élément soumis aux débats que le prêt contracté par M. X., dont le contrat d'assurance avec la CNP souscrit par lui est l'accessoire, était destiné à financer son activité professionnelle alors qu'il ressort du 28 septembre 2001 que le prêt a été contracté par les époux X., pour financer l'achat d'un bien immobilier, Mme X. n'exerçant aucune profession à l'époque de la conclusion du contrat et M. X. occupant alors un emploi de « premier vendeur ». Ainsi la seule mention « assurance prêts « professionnels » » apposée en tête du formulaire d'adhésion au contrat de groupe ne saurait évincer M. X., du bénéfice des dispositions du code de la consommation dont il demande l'application. A défaut pour la CNP d'établir que le prêt garanti par l'adhésion au contrat d'assurance de groupe a été utilisé par les époux X. pour les nécessités de leur profession, ce que ne révèle aucun des éléments fournis par les parties, la qualité de consommateur ne saurait être déniée à M. X. qui, dès lors, est fondé à demander l'application des dispositions protectrices du code de la consommation. »

3/ « Ces dispositions contractuelles qui ne font que définir la garantie pour le risque « ITT » ne sont complétées ou contredites par aucune autre clause du contrat. Il convient en outre de relever que la définition de l'incapacité totale de travail de l'article 2 du contrat d'assurances est rédigée en termes clairs, non susceptibles d'interprétation et ne contient aucun terme juridique dont le sens échapperait au profane. La clause litigieuse, qui définit l'ITT, dont le risque est assuré, en termes clairs et simples, immédiatement compréhensibles, non susceptibles d'interprétation et dépourvus de technicité, qui n'entre en outre en conflit avec aucune autre disposition contractuelle, ne peut être qualifiée d'abusive au sens de l'article L. 132-1 de l'ancien code de la consommation devenu l'article L. 212-1 du code de la consommation. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE  METZ

PREMIÈRE CHAMBRE

ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/01762. Arrêt n° 16/00424.

 

APPELANT :

Monsieur X.

représenté par Maître H., avocat à la Cour d'Appel de METZ

 

INTIMÉE :

SA CNP ASSURANCES

représentée par son représentant légal, représentée par Maître H., avocat à la Cour d'Appel de METZ

 

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Monsieur HITTINGER, Président de Chambre

ASSESSEURS : Madame STAECHELE, Conseiller, Madame BOU, Conseiller

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme SAHLI

DATE DES DÉBATS : Audience publique du 15 septembre 2016 ; L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 10 novembre 2016.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE ANTÉRIEURE :

Le 22 septembre 2001 M. X. a contracté un prêt bancaire auprès de la CAISSE D'ÉPARGNE. A cette occasion, il a adhéré à une assurance groupe que la banque a souscrite auprès de la CAISSE NATIONALE DE PRÉVOYANCE devenue la SA CNP ASSURANCES (La CNP ci-après) pour en garantir les mensualités en cas de décès, invalidité ou incapacité totale de travail.

Le 30 avril 2009, M. X. a été victime d'un accident de la circulation.

Après expiration du délai contractuel de carence de 90 jours, la CNP a pris en charge, au titre de la garantie de l'incapacité totale de travail, le remboursement des échéances du prêt pour la période courant du 31 juillet 2009 au 8 novembre 2010.

La CNP a refusé de prendre en charge le paiement des mensualités de remboursement d'emprunt postérieurement à cette période au motif que l'assuré ne se trouvait plus ultérieurement en incapacité totale de travail au sens défini par le contrat dans les termes suivants : « l'assuré est en état d'ITT lorsque, à l'expiration d'une période d'interruption continue d'activité de 90 jours (dite délai de carence) il se trouve, sur prescription médicale, à la suite d'une maladie ou d'un accident, dans l'obligation d'interrompre totalement toute activité professionnelle (ou, s'il n'exerce pas ou n'exerce plus d'activité professionnelle, d'observer un repos complet le contraignant à interrompre ses activité habituelles) ».

Par acte d'huissier de justice du 30 novembre 2011, M. X. a fait assigner la CNP devant le tribunal de grande instance de Metz pour obtenir sa condamnation à lui verser une somme de 9.410,56 euros au titre de la prise en charge des mensualités de remboursement du prêt pour la période s'étendant du 9 novembre 2010 au 30 septembre 2011 outre les sommes de 3.000 euros au titre de dommages et intérêts et 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 6 juin 2013 le tribunal de grande instance de Metz a débouté M. X. de toutes ses demandes fins et conclusions et l'a condamné à verser à la CNP une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a essentiellement retenu que M. K., qui était demandeur d'emploi à la date de l'accident et durant la période faisant l'objet de sa demande, ne démontrait pas qu'il se trouvait dans l'obligation de respecter un repos total à compter du 9 novembre 2010 suite aux conséquences de l'accident du 30 avril 2009.

Par déclaration au greffe de la cour d'appel du 24 avril 2013, M. X. a régulièrement interjeté appel du jugement.

Par arrêt du 23 septembre 2014, cette cour a ordonné une expertise médicale de M. X. afin de notamment déterminer s'il était apte, après la période de carence à exercer une activité professionnelle même partielle ou encore à se livrer à des activités privées non professionnelles sans restrictions.

L'expert a déposé son rapport le 24 novembre 2015 en concluant que :

- M. X. a été en incapacité totale de travail selon la définition contractuelle du 30 avril 2009 au 30 juin 2009. Il n'était plus en ITT au 9 novembre 2010. Il n'a pas été en ITT du 1er juillet 2009 au 18 mai 2015 ;

- La date de consolidation médico-légale pour les conséquences de l'accident du 30 avril 2009 peut être estimée au plus tard au 9 novembre 2010 ;

- Le taux de déficit fonctionnel permanent à consolidation peut être estimé à un maximum de 3 % (trois pour cent) ;

- L'évolution de la pathologie dégénérative du rachis cervical a amené à programmer une intervention chirurgicale le 3 juin 2015 ;

- Au 31 juillet 2009, date de la fin de période de carence, M. X. était en arrêt de travail, prescrit par son médecin traitant. Il n'avait pas pris le poste de chef de chantier qui lui avait été promis au 4 mai 2009 par l'entreprise de bâtiment SAMSUN. Il était médicalement apte à exercer une activité professionnelle, au moins partielle. Il a été médicalement apte à exercer une activité professionnelle du 1er juillet 2009 au 18 mai 2015 au moins ;

- A deux mois de l'accident, soit au 30 juin 2009, M. X. était apte à reprendre la totalité de ses activités privées non professionnelles à l'exception de la conduite automobile.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières écritures du 10 juin 2016, M. X. formule des demandes dans les termes suivants :

« - Dire recevable et bien fondé l'appel interjeté le 24 juin 2013 par M. X. contre le jugement rendu le 6 juin 2013 par le Tribunal de Grande Instance de Metz,

Y faisant droit, infirmant le jugement entrepris et statuant à nouveau,

- Dire qu'est abusive et que doit être en conséquence supprimée la clause du contrat d'assurances groupe CNP définissant l'incapacité temporaire totale de travail comme l'impossibilité absolue pour un assuré ayant une activité professionnelle au jour du sinistre d'exercer une activité professionnelle,

- Condamner la CNP à verser à M. X. une somme de 9.410,56 euros au titre de la prise en charge des mensualités de remboursement du prêt pour la période s'étendant du 9 novembre 2010 au 30 septembre 2011,

- Condamner la CNP à verser à M. X. une somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- En tout état de cause, dire irrecevable comme étant prescrite la demande tendant à voir condamné M. X. à rembourser à la CNP ASSURANCES une somme de 13.385,25 euros,

- Condamner la CNP à verser à M. X. une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- Condamner la CNP en tous les frais et dépens d'instance et d'appel. »

L'appelant fait principalement valoir que :

- au sens contractuel doit être considéré comme étant en ITT au l'assuré en situation d'arrêt de travail car il se trouve, sur prescription médicale, dans l'obligation d'interrompre totalement toute activité professionnelle.

- selon un arrêt du 14 avril 2016 de la 1ère chambre civile de la Cour de cassation, est abusive la clause du contrat d'assurances groupe de prêts immobiliers souscrits auprès de la CNP qui définit l'incapacité temporaire totale de travail (ITT) comme l'impossibilité absolue pour un assuré ayant une activité professionnelle au jour du sinistre d'exercer une activité professionnelle à temps plein ou à temps partiel, sans autre précision.

La Cour de cassation estime que cette définition de l'ITT ne correspond pas à l'acception commune selon laquelle l'ITT correspondant à une incapacité mettant l'assuré dans l'incapacité de se livrer à son activité professionnelle, cette acception commune n'étant pas démentie par l'article 1er du contrat qui définit les garanties souscrites. Faute de définition précise de l'ITT, la Cour de cassation considère que la clause n'est ni claire ni compréhensible au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation et que, dès lors qu'elle entraîne une restriction substantielle de garantie, elle a pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

- l'expert judiciaire a formé ses conclusions à partir d'une définition contractuelle de l'ITT proposée par l'assureur selon lui plus restrictive que la notion d'arrêt de travail en assurance maladie. Son travail n'est donc exploitable pour la cour qui devra se déterminer sur la base d'une ITT « médicale ».

De plus l'expert n'a pas répondu à sa mission qui était de donner une appréciation d'un point de vue médical.

- M. X. justifie avoir perçu de la CPAM des indemnités journalières du 25 décembre 2010 au 4 octobre 2011 ce qui signifie nécessairement qu'il était à l'époque en arrêt de travail et n'était pas autorisé à exercer d'activité, que cette dernière soit ou non rémunérée.

- il est sollicité le versement d'une somme de 9.410,56 euros se décomposant comme suit :

- mensualités de remboursement du prêt du 9 au 30 novembre 2010 : 876,76 euros - 233,80 euros déjà versé par l'assureur pour la période du 1er au 8 novembre 2010 = 642,96 euros ;

- mensualités de remboursement du mois de décembre 2010 au mois de septembre 2011 inclus, soit 876 x 10 = 8.760 euros ;

- il est réclamé une indemnité de 3000 euros pour préjudice matériel et moral résultant du refus injustifié que lui a opposé la CNP. Marié et père de quatre enfants, il s'est retrouvé dans une situation financière délicate et a dû par ailleurs faire face à des agios bancaires du fait de l'insuffisance de provision de son compte.

- la demande de remboursement de la somme de 13.385,25 euros présentée pour la première fois par la CNP dans ses conclusions du 18 avril 2016 est irrecevable comme étant prescrite en application des dispositions de l'article L. 114-1 du code des assurances ou selon la prescription du droit commun. Ce montant correspondant en effet à des prestations versées pour la période du 31 juillet 2009 au 8 novembre 2010.

 

Par conclusions du 13 juin 2016, la CNP demande à la cour de :

« - Dire et juger irrecevable comme nouvelle la demande de Monsieur X. tendant à voir dire et abusive et que doit être en conséquence supprimer la clause du contrat d'assurance groupe CNP définissant l'incapacité temporaire totale de travail comme l'impossibilité absolue pour un assuré ayant une activité professionnelle au jour du sinistre d'exercer une activité professionnelle ;

- En tout état de cause, dire et juger cette demande mal fondée ;

- Débouter Monsieur X. de son appel et de toutes ses demandes, fins et conclusions en tant que dirigées à l'encontre de la SA CNP ASSURANCES ;

- Confirmer le jugement entrepris en son principe ;

- Vu les conclusions de l'expertise judiciaire, constater que la période d'incapacité totale de travail de Monsieur Y. (du 30 avril 2009 au 30 juin 2009) est inférieure au délai contractuel de carence de 90 jours ;

- Dire et juger la demande de la SA CNP ASSURANCES en restitution des sommes indûment réglées recevable et bien fondée ;

- En conséquence, condamner M. X. à restituer à la SA CNP ASSURANCES les prestations indûment versées pour la période du 31 juillet 2009 au 8 novembre 2010, soit la somme de 13.385,25 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la demande ;

- Eu égard aux circonstances de la cause, condamner M. X. aux entiers dépens d'instance et d'appel et à verser à la SA CNP ASSURANCES la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du CPC.

A titre infiniment subsidiaire :

- si la Cour devait retenir l'obligation à garantie de la SA CNP ASSURANCES, dire et juger que toute éventuelle prise en charge des échéances du prêt en cause ne pourra s'effectuer que dans les stricts termes et limites contractuels, et ce, au seul profit de l'organisme prêteur, bénéficiaire du contrat d'assurance, à charge pour ledit organisme prêteur de rembourser à M. X. les sommes qu'il aurait pu avancer dans le cadre du remboursement de son prêt. »

Au soutien de ses prétentions, la CNP argue essentiellement que :

- La CNP n'est tenue que par les termes de son contrat (article 1134 du code civil) et, en aucun cas, par les décisions prises par les autres organismes, y compris l'organisme social dont relève l'assuré, selon des critères différents de ceux du contrat d'assurance litigieux. La circonstance qu'un assuré bénéficie d'indemnités journalières par la CPAM, comme l'invoque l'appelant, n'implique pas pour autant qu'il soit incapable de reprendre toute activité professionnelle, même partiellement, en application du contrat d'assurance.

- la prise en charge par l'assureur des échéances du prêt pour la période du 31 juillet 2009 au 8 novembre 2010 était injustifiée. En effet, le 31 juillet 2009 étant la date de la fin de la période de carence, l'expert a considéré que M. X. était apte, au 30 juin 2009, à reprendre la totalité de ses activités privées non professionnelles, à l'exception de la conduite automobile, et était apte apte à exercer une activité professionnelle du 1er juillet 2009 au 18 mai 2015 au moins.

- les conclusions du Dr A. ne sont pas opposables à la CNP car elles n'ont été contradictoirement établies.

- la demande de déclarer abusive la clause de définition de l'ITT est nouvelle. Elle est irrecevable.

- les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ne sont pas applicables. En effet le prêt garanti par l'assurance concerne des locaux professionnels. S'agissant d'un contrat d'assurance prêts « professionnels » conclu entre professionnels, le code de la consommation n'est pas applicable.

- l’arrêt de la cour de cassation du du 14 avril 2016 concerne un contrat différent. Elle n'est pas applicable en l'espèce.

La clause ITT critiquée, qui délimite le risque ITT, porte sur la définition de l'objet principal du contrat d'assurance. La clause litigieuse est claire, précise et dénuée d'ambiguïté. Il n'y a donc pas lieu à appréciation du caractère abusif de la clause en application de l'article L. 132-1 alinéa 7 du code de la consommation.

Seul l'assuré dans l'obligation d'interrompre totalement toute activité professionnelle (et pas seulement en arrêt de travail comme le soutient à tort l'appelant) peut bénéficier de la mise en œuvre de la garantie ITT, sous peine de dénaturation du contrat.

- seule une clause créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat peut être déclarée abusive. Le caractère abusif d'une clause est donc écarté quand la prime payée est réellement calculée en fonction de l'étendue de la garantie, ce qui est bien le cas en l'espèce. Le déséquilibre ne saurait résulter de la seule limitation de garantie. Le montant des primes (et donc la contrepartie) est précisément fonction de l'étendue (et des limites) de garantie. M. X. ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un déséquilibre, de surcroît significatif, entre les droits et obligations des parties au détriment du non-professionnel.

- la demande de la CNP n'est pas prescrite car c'est le rapport d'expertise judiciaire du 25 novembre 2015 qui a fait apparaître le caractère injustifié des versements.

- toute éventuelle prise en charge des échéances du prêt en cause ne pourra s'effectuer que dans les stricts termes et limites contractuels et ce, au seul profit de l'organisme prêteur, bénéficiaire du contrat d'assurance, à charge pour ledit organisme prêteur de rembourser à M. X., les sommes qu'il aurait pu avancer dans le cadre du remboursement de son prêt.

 

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 2016.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande d'annulation de la clause contractuelle relative à la définition de l'ITT :

La demande présentée par M. X. tendant à faire écarter l'application de la clause contractuelle relative à la définition de l'incapacité totale de travail entraînant droit à indemnisation, est une défense à la demande en répétition de l'indu formée [par] la SA CNP ASSURANCES qu'elle a pour objet de faire rejeter. Elle est donc admissible en application de l'article 564 qui déclare recevables les prétentions nouvelles tendant à faire écarter les prétentions adverses.

Il n'est établi par aucun élément soumis aux débats que le prêt contracté par M. X., dont le contrat d'assurance avec la CNP souscrit par lui est l'accessoire, était destiné à financer son activité professionnelle alors qu'il ressort du 28 septembre 2001 que le prêt a été contracté par les époux X., pour financer l'achat d'un bien immobilier, Mme X. n'exerçant aucune profession à l'époque de la conclusion du contrat et M. X. occupant alors un emploi de « premier vendeur ».

Ainsi la seule mention « assurance prêts « professionnels » » apposée en tête du formulaire d'adhésion au contrat de groupe ne saurait évincer M. X., du bénéfice des dispositions du code de la consommation dont il demande l'application. A défaut pour la CNP d'établir que le prêt garanti par l'adhésion au contrat d'assurance de groupe a été utilisé par les époux X. pour les nécessités de leur profession, ce que ne révèle aucun des éléments fournis par les parties, la qualité de consommateur ne saurait être déniée à M. X. qui, dès lors, est fondé à demander l'application des dispositions protectrices du code de la consommation.

L'article 2 des conditions du contrat d'assurance collective souscrit par M. X. stipule que « l'assuré est en état d'ITT lorsque, à l'expiration d'une période d'interruption continue d'activité de 90 jours (dite délai de carence) il se trouve, sur prescription médicale, à la suite d'une maladie ou d'un accident, dans l'obligation d'interrompre totalement toute activité professionnelle (ou, s'il n'exerce pas ou n'exerce plus d'activité professionnelle, d'observer un repos complet le contraignant à interrompre ses activités habituelles) ».

Ces dispositions contractuelles qui ne font que définir la garantie pour le risque « ITT » ne sont complétées ou contredites par aucune autre clause du contrat. Il convient en outre de relever que la définition de l'incapacité totale de travail de l'article 2 du contrat d'assurances est rédigée en termes clairs, non susceptibles d'interprétation et ne contient aucun terme juridique dont le sens échapperait au profane.

La clause litigieuse, qui définit l'ITT, dont le risque est assuré, en termes clairs et simples, immédiatement compréhensibles, non susceptibles d'interprétation et dépourvus de technicité, qui n'entre en outre en conflit avec aucune autre disposition contractuelle, ne peut être qualifiée d'abusive au sens de l'article L. 132-1 de l'ancien code de la consommation devenu l'article L. 212-1 du code de la consommation.

 

Sur la demande d'indemnisation complémentaire :

Il appartient à M. X., qui sollicite une indemnisation au titre de la prise en charge des mensualités de remboursement du prêt pour la période s'étendant du 9 novembre 2010 au 30 septembre 2011 durant laquelle il était demandeur d'emploi, qu'il se trouvait durant cette période, et à la suite de l'accident de la circulation du 30 avril 2009, dans la nécessité, sur prescription médicale, d'observer un repos complet le contraignant à interrompre ses activités habituelles.

L'expert judiciaire ayant procédé à l'examen médical de M. X. et à l'étude de son dossier médical a conclu qu'il était apte à reprendre la totalité de ses activités privées non professionnelles à l'exception de la conduite automobile dès le 30 juin 2009, ce dont il résulte qu'il n'est pas fondé à prétendre à une indemnisation pour la période allant du 9 novembre 2010 au 30 septembre 2011.

Il convient par suite de rejeter l'ensemble des demandes de M. X.

 

Sur la demande de répétition de l'indu :

La CNP demande la condamnation de M. X. à lui restituer les prestations indûment versées pour la période du 31 juillet 2009 au 8 novembre 2010, soit la somme de 13.385,25 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la demande.

M. X. soutient que cette demande présentée pour la première fois dans les conclusions du 18 avril 2016 est prescrite, et cela que l'on se place sous l'empire des dispositions de l'article L. 114-1 du code des assurances ou sous celles de la prescription du droit commun.

La CNP objecte que le délai de prescription n'a couru qu'à compter du dépôt du rapport d'expertise judiciaire, le 25 novembre 2015, et donc, que sa demande n'est pas prescrite.

La cour retient que l'action en répétition de l'indu fondée à sur les articles 1235 et 1376 du code civil ne dérive pas du contrat d'assurance, quelle que soit la source du paiement indu, de sorte qu'elle se prescrit selon le délai de droit commun applicable, à défaut de disposition spéciale, aux quasi-contrats.

Selon l'article 2224 du code civil, les actions mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

La CNP avait toute faculté, avant de verser les indemnités dont elle demande aujourd'hui le remboursement, de contrôler la situation, du point de vue médical, de l'assuré au moyen d'un contrôle médical effectué au vu d'un questionnaire de santé et en faisant subir, au besoin, une visite médicale à l'assuré comme l'y autorisait l'article 7 du contrat d'assurance.

Il convient donc de retenir que la CNP aurait dû connaître le caractère indu des indemnités versées à M. X. pendant la période du 31 juillet 2009 au 8 novembre 2010 à la date des versements, laquelle doit être retenue comme point de départ du délai quinquennal de prescription.

Plus de cinq ans s'étant écoulés entre la date du dernier versement, le 8 novembre 2010, et la demande de répétition de l'indu formulée pour la première fois dans les conclusions du 18 avril 2016, il y a lieu de déclarer l'action en répétition de l'indu de la CNP prescrite.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,

- confirme le jugement déféré,

- déclare irrecevable comme prescrite l'action en répétition de l'indu formée par la CAISSE NATIONALE DE PRÉVOYANCE,

- rejette toutes les autres demandes y compris celles formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamne la CAISSE NATIONALE DE PRÉVOYANCE et M. X. au paiement, chacun, de la moitié des dépens d'appel.

Le présent arrêt a été prononcé par sa mise à disposition publique le 10 Novembre 2016, par Monsieur HITTINGER, Président de Chambre, assisté de Madame SAHLI, Greffier, et signé par eux.