CA NÎMES (1re ch. civ.), 17 novembre 2016
CERCLAB - DOCUMENT N° 6534
CA NÎMES (1re ch. civ.), 17 novembre 2016 : RG n° 14/04335
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « En vertu des dispositions énoncées par l'article L. 341-1 du code précité et de l'article L. 311-2 auquel il fait référence, le fait de se rendre au domicile d'une personne en vue de la souscription de produits financiers ou d'opérations d'investissement ou de gestion de patrimoine, constitue un acte de démarchage, et, ainsi que l'a justement apprécié le premier juge, le fait que le domicile de M. X. soit situé dans la même rue que l'organisme financier n'a aucune incidence sur la qualification de cet acte, pas plus le fait que ce démarchage ait eu lieu à la demande de M. X. qui se serait présenté précédemment dans les bureaux de la Sarl à une date inconnue de la cour. »
2/ « Au vu de ces constatations, c'est à bon droit que le premier juge a relevé le caractère irrégulier de la « fiche d'entrée en relation » en ce qu'elle ne contient pas les informations dues à la personne démarchée avant qu'elle ne soit liée par un contrat, conformément à l'article L. 341-12, notamment la mention du délai de rétractation de 14 jours dont devait bénéficier M. X. et de ses modalités d'exercice. Aucun autre élément produit aux débats ne permet de justifier que la Sarl JCB Finances et Assurances s'est acquittée de cette obligation d'information. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE - PREMIÈRE CHAMBRE
ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2016
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/04335. [Sur appel de] TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NÎMES, 4 juillet 2014 : R.G. n° 13/03705.
APPELANTE :
SARL JCB FINANCES ET ASSURANCES
au capital 3.000 euros, immatriculée au RCS de NÎMES sous le n° B XXX, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice domicilié es qualité audit siège social, Représentée par Maître Sylvie S. de la SCP D.-S., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NÎMES
INTIMÉ :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], Représenté par Maître Marie-Christine B. C., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NÎMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 8 septembre 2016
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS : Mme Sylvie BLUME, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l'article 786 du Code de Procédure Civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Sylvie BLUME, Président, Mme Anne-Marie HEBRARD, Conseiller, M. Luc BARBIER, Conseiller
GREFFIERS : Mme Isabelle DELOR, Greffier, lors des débats et Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffier lors du prononcé de la décision.
DÉBATS : A l'audience publique du 22 septembre 2016, où l'affaire a été mise en délibéré au 17 novembre 2016 ;
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT : Arrêt contradictoire, prononcé et signé par Mme Sylvie BLUME, Président, publiquement, le 17 novembre 2016, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
OBJET SUCCINCT DU LITIGE - PRÉTENTIONS ET ARGUMENTS DES PARTIES :
Vu l'appel interjeté le 2 septembre 2014 par la Sarl JCB Finances et Assurances à l'encontre d'un jugement rendu le 4 juillet 2014 par le Tribunal de Grande Instance de Nîmes,
Vu les conclusions de la Sarl JCB Finances et Assurances du 27 mars 2015,
Vu les conclusions de M. X. du 28 janvier 2015,
Vu l'ordonnance du 13 juin 2016 fixant la clôture au 8 septembre 2016
Par acte d’huissier du 23 juillet 2013 la Sarl JCB Finances et Assurances faisait assigner M. X. devant le tribunal de Grande instance de Nîmes afin d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 17.686,08 euros au titre d'un contrat souscrit en vue d'une étude patrimoniale. Soutenant que le contrat avait été signé dans le cadre d'une action de démarchage à domicile, Monsieur X. concluait principalement à la nullité du contrat pour absence de délai de rétractation et de reproduction des dispositions légales imposées par le code monétaire et financier, ainsi qu'à la restitution de sommes perçues indûment par la Sarl Finances et Assurances en exécution d'une clause abusive afférente au prix. Subsidiairement il estimait avoir été victime d'un abus de faiblesse et concluait à la restitution de sommes indûment perçues, et en tout état de cause à la réduction des honoraires réclamés.
Par jugement du 4 juillet 2014 le tribunal, retenant au visa des articles L. 341-1, L. 341-12 et L. 341-16 du code monétaire et financier un non-respect du délai de rétractation de 14 jours prévu au profit de la personne démarchée et l'absence de remise à celle-ci des informations prévues avant la conclusion du contrat, a annulé le contrat conclu entre la Sarl JCB Finances et Assurances et M. X. les 26 avril 2012 et 10 mai 2012, condamné la Sarl JCB Finances et Assurances à restituer à Monsieur X. la somme de 12.400 euros indûment versée, rejeté le surplus des demandes et condamné la Sarl JCB Finances et Assurance aux dépens.
La Sarl JCB Finances et Assurances a relevé appel de ce jugement et sollicite son infirmation en toutes ses dispositions. Elle demande à la cour de condamner M. X. au paiement de la somme de 17.686,08 euros avec intérêts de droit à compter du 19 septembre 2012 date de la première mise en demeure, de rejeter les demandes de ce dernier et de le condamner au paiement de la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive outre 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens, en ce compris ceux de première instance.
M. X. conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nul le contrat souscrit en vertu des dispositions des articles L. 341-12 et L. 341-16 du code monétaire et financier dans le cadre d'un démarchage à domicile et condamné la Sarl JCB Finances et Assurances à lui restituer la somme de 12.400 euros. A titre subsidiaire il se prévaut d'un abus de faiblesse par la société JCB Finances et Assurances, d'un abus dans la fixation des honoraires et du caractère abusif de la clause relative au prix. Encore plus subsidiairement, il demande à la cour par application de l'article L.,133-2 du code de la consommation de réduire à la somme de 855 euros les honoraires dus à la Sarl JCB Finances et Assurances et de condamner celle-ci à lui restituer la somme de 9.045 euros. Il sollicite également la condamnation de l'appelante à lui verser la somme de 2.000 euros en réparation du préjudice subi outre 2.000 euros au titre des frais irrépétibles en sus des entiers dépens.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
En vertu des dispositions énoncées par l'article L. 341-1 du code monétaire et financier, « constitue un acte de démarchage bancaire ou financier toute prise de contact non sollicitée, par quelque moyen que ce soit, avec une personne physique ou une personne morale déterminée, en vue d'obtenir, de sa part, un accord sur :
1° La réalisation par une des personnes mentionnées au 1° de l'article L. 341-3 d'une opération sur un des instruments financiers énumérés à l'article L. 211-1 ;
2° La réalisation par une des personnes mentionnées au 1° ou au 4° de l'article L. 341-3 d'une opération de banque ou d'une opération connexe définies aux articles L. 311-1 et L. 311-2 ;
3° La fourniture par une des personnes mentionnées au 1° de l'article L. 341-3 d'un service d'investissement ou d'un service connexe définis aux articles L. 321-1 et L. 321-2 ;
4° La réalisation d'une opération sur biens divers mentionnée à l'article L. 550-1 ;
5° La fourniture par une des personnes mentionnées au 3° de l'article L. 341-3 d'une prestation de conseil en investissement prévu au I de l'article L. 541-1 ;
6° La fourniture par une des personnes mentionnées au 1° de l'article L. 341-3 d'un service de paiement prévu au II de l'article L. 314-1 ;
7° La fourniture par un conseiller en investissement participatif de la prestation de conseil en investissement prévu au I de l'article L. 547-1.
Constitue également un acte de démarchage bancaire ou financier, quelle que soit la personne à l'initiative de la démarche, le fait de se rendre physiquement au domicile des personnes, sur leur lieu de travail ou dans les lieux non destinés à la commercialisation de produits, instruments et services financiers, en vue des mêmes fins.
L'activité de démarchage bancaire ou financier est exercée sans préjudice de l'application des dispositions particulières relatives à la prestation de services d'investissement, à la réalisation d'opérations de banque et de services de paiement et à la réalisation d'opérations sur biens divers, ainsi que des dispositions de l'article 66-4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.'
Des explications concordantes fournies par les parties, il ressort qu'un premier contact est intervenu entre la Sarl JCB Finances et Assurances et M. X. à la demande de ce dernier courant avril 2012, sans que la date et l'objet de cette rencontre ne soient établis par les pièces produites aux débats ; qu'une seconde rencontre est intervenue au domicile de M. X. le 26 avril 2012, date à laquelle celui-ci a signé un document dénommé « entrée en relation - fiche d'informations légales ».
La signature de ce formulaire a été suivie le 4 mai 2012 de l'envoi à M. X. d'une correspondance présentée comme une étude patrimoniale d'une page qui a donné lieu à l'émission le 5 mai 2012 d'une facture de 2.500 euros.
Une lettre de mission a été signée ultérieurement par M. X., le 10 mai 2012.
En vertu des dispositions énoncées par l'article L. 341-1 du code précité et de l'article L. 311-2 auquel il fait référence, le fait de se rendre au domicile d'une personne en vue de la souscription de produits financiers ou d'opérations d'investissement ou de gestion de patrimoine, constitue un acte de démarchage, et, ainsi que l'a justement apprécié le premier juge, le fait que le domicile de M. X. soit situé dans la même rue que l'organisme financier n'a aucune incidence sur la qualification de cet acte, pas plus le fait que ce démarchage ait eu lieu à la demande de M. X. qui se serait présenté précédemment dans les bureaux de la Sarl à une date inconnue de la cour. Il s'ensuit que la rencontre du 26 avril 2016 au domicile de M. X., au cours de laquelle a été soumise à ce dernier une fiche « d'entrée en relation » mentionnant les tarifs de facturation des prestations fournies dans le domaine du conseil en investissement financier et des intermédiaires en opération de banque s'inscrit bien dans le cadre d'un démarchage bancaire ou financier.
Par ailleurs il ne peut être retenu, ainsi que le suggère l'appelante, que la fiche d'informations légales du 26 avril 2012 ne procéderait que d'une simple information publicitaire échappant aux règles du démarchage bancaire ou financier en vertu de l'article L. 341-2, s'agissant d'un document qui a été expressément soumis à l'approbation de M. X., ainsi qu'en atteste la signature de celui-ci sur ledit document. Cette fiche « d'entrée en relation » signée par les deux parties marque le début des relations contractuelles entre ces dernières. De fait la transmission à M. X. par la société JCB Finances et Assurances d'une correspondance datée du 4 mai 2012 présentée comme l'analyse patrimoniale de la situation de l'intéressé, document auquel était joint une facture de 2.500 euros dûment réglée par M. X. le 5 mai 2012, confirme bien le caractère effectif d'une relation contractuelle déjà établie à cette date, avant même l'expiration du délai de rétractation de 14 jours qui a commencé à courir le lendemain de la signature de la fiche d'entrée en relation du 26 avril 2012 et dont a été privé M. X. En tout état de cause ce règlement est intervenu avant la signature d'une lettre de mission du 10 mai 2012 présentée artificiellement par la société appelante comme la date de commencement de la relation contractuelle. Au vu de ces constatations, c'est à bon droit que le premier juge a relevé le caractère irrégulier de la « fiche d'entrée en relation » en ce qu'elle ne contient pas les informations dues à la personne démarchée avant qu'elle ne soit liée par un contrat, conformément à l'article L. 341-12, notamment la mention du délai de rétractation de 14 jours dont devait bénéficier M. X. et de ses modalités d'exercice. Aucun autre élément produit aux débats ne permet de justifier que la Sarl JCB Finances et Assurances s'est acquittée de cette obligation d'information.
En considération des irrégularités présentées par le contrat, le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné son annulation ainsi que la restitution à M. X. par la Sarl JCB Finances et Assurances de la somme globale de 12.400 euros correspondant aux sommes qui lui ont été versées par ce dernier au titre des diverses factures émises au titre du contrat.
Il est fait droit aux demandes principales de M. X., il n'y a donc pas lieu de statuer sur ses demandes subsidiaires.
M. X. ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui qui est indemnisé par l'entière restitution des sommes qu'il a versées à la société JCB Finances et Assurances. Sa demande de dommages et intérêts sera donc rejetée.
De même la Sarl JCB Finances et Assurances qui succombe en son appel, ne démontre aucunement que l'action de M. X. à son encontre procède d'un abus de droit et sera déboutée de la demande de dommages et intérêts formée de ce chef. Elle supportera les entiers dépens. L'équité justifie sa condamnation à payer à M. X. la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant après débats publics, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Rejette toute demande plus ample ou contraire des parties,
Condamne la Sarl JCB Finances et Assurances à payer à M. X. la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles,
Condamne la Sarl JCB Finances et Assurances aux entiers dépens d'appel.
Arrêt signé par Mme BLUME, Président et par Mme LAURENT-VICAL, Greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,