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CA PARIS (pôle 1 ch. 8), 20 mai 2016

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 1 ch. 8), 20 mai 2016
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 1 ch. 8
Demande : 15/04531
Date : 20/05/2016
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 26/02/2015
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6581

CA PARIS (pôle 1 ch. 8), 20 mai 2016 : RG n° 15/04531

Publication : Jurica

 

Extrait : « Il convient enfin, infirmant l'ordonnance entreprise en cette disposition, de dire n'y avoir lieu à référé sur la somme réclamée au titre de la clause pénale contractuellement prévue qui prévoit une indemnité d'occupation au double du montant du loyer courant : en effet, l'application et le quantum de cette clause pénale, sérieusement contestée à hauteur de référé par les appelants, relèvent des pouvoirs du juge du fond qui peut la modérer ou l'écarter. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE  PARIS

PÔLE 1 CHAMBRE 8

ARRÊT DU 20 MAI 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/04531 (11 pages). Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 janvier 2015 -Tribunal d'Instance de SENS - R.G. n° 14-000210.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [adresse]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

Madame X.

née le [date] à [adresse]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/YY du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

Représentés et assistés de Maître Sylvie D., avocat au barreau de PARIS, toque : E1073

 

INTIMÉ ET APPELANT INCIDENT :

Monsieur Y.

né le [date] à [adresse], Représenté et assisté de Maître Sophie M., avocat au barreau de PARIS, toque : D1256

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 mars 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Odette-Luce BOUVIER, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Annie DABOSVILLE, Présidente de chambre, Mme Odette-Luce BOUVIER, Conseillère, Mme Mireille de GROMARD, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Patricia PUPIER

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Annie DABOSVILLE, présidente et par Mme Patricia PUPIER, greffière.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte du 26 juin 2013, M. Y. a conclu un contrat de bail avec M. X. et Mme X., locataires solidaires, d'un logement situé [adresse].

Le bailleur a fait délivrer aux locataires le 12 mai 2014 un commandement de payer visant la clause résolutoire la somme de 1.600 euros au titre des loyers et charges impayés arrêtés au mois de mai 2014 outre le coût des actes en cours de signification soit 141,47 euros.

Par acte du 1er septembre 2014, M. Y. a assigné M. X. et Mme X. devant le juge des référés du tribunal d'instance de Sens aux fins de constatation de l'acquisition de la clause résolutoire, d'expulsion de M. X. et Mme X. et de tous occupants de leur chef, de condamnation solidaire au paiement de la somme de 1.726,96 euros au titre de la dette locative, échéance d'août 2014 incluse et d'une indemnité provisionnelle d'occupation égale au double du montant du loyer et des charges, avec revalorisation de droit, jusqu'à complète libération des lieux.

A l'audience, M. Y. a actualisé sa demande au titre de la dette locative à la somme de 2.284,38 euros, mois de décembre 2014 inclus.

M. X. et Mme X. n'ont pas comparu à l'audience et n'y étaient pas représentés.

 

Par ordonnance réputée contradictoire du 21 janvier 2015, le juge des référés du tribunal d'instance de Sens, retenant notamment que M. X. et Mme X. ne se sont pas acquittés de l'intégralité des sommes réclamées dans le délai de deux mois imparti par le commandement de payer ; que le compte locatif est en position débitrice depuis le mois de janvier 2014, et aucune proposition sérieuse d'apurement de la dette de loyer n'a été formulée par les locataires, qui n'ont pas comparu ; que la clause pénale insérée au bail conduisant à fixer le montant de l'indemnité d'occupation au double du montant du loyer courant apparaît excessive et doit être réduite en application de l'article 1152 du code civil ; qu'au vu des pièces produites, les locataires restent redevables de la somme de 2.284,38 euros au titre de l'arriéré locatif, indemnité d'occupation du mois de décembre 2014 incluse, a, par ces motifs :

- constaté la résiliation de plein droit du bail consenti à M. X. et Mme X. sur le logement sis [...] à compter du 12 mai 2014, date d'effet du commandement visant la clause résolutoire ;

- faute de départ volontaire de M. X. et Mme X., ordonné leur expulsion, ainsi que celle de tout occupant de leur chef, avec au besoin le concours de la force publique conformément aux dispositions des articles L. 153-1 et L. 153-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

- rappelé que l'expulsion ne pourra avoir lieu qu'à l'expiration du délai de deux mois suivant la signification d'un commandement d'avoir à quitter les lieux et selon les modalités prévues par les articles L. 411-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

- rappelé s'agissant des meubles et objets mobiliers laissés dans les lieux, qu'il devra être procédé conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

- condamné solidairement, à titre provisionnel, M. X. et Mme X. à payer à M. Y. la somme de 2.284,38 euros au titre des loyers, charges et indemnité d'occupation impayés au 17 décembre 2014 (indemnité d'occupation du mois de décembre 2014 incluse), majorée des intérêts au taux légal sur la somme à compter de la présente décision ;

- condamné solidairement, à titre provisionnel, M. X. et Mme X. à payer à M. Y. la somme de 50 euros au titre de la clause pénale insérée au contrat de bail ;

- condamné solidairement, à titre provisionnel, M. X. et Mme X. à payer à M. Y. une indemnité d'occupation provisionnelle fixée au montant du dernier loyer dû, majoré du montant des charges, soit la somme de 550 euros, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la complète libération des lieux, avec revalorisation en fonction des évolutions réglementaires ;

- condamné in solidum M. X. et Mme X. à verser à M. Y. la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;

- condamné in solidum M. X. et Mme X. aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement de payer pour 82,54 euros, l'assignation pour 65,11 euros et la dénonciation à la sous-préfecture pour 4,82 euros ;

- dit que l'ordonnance sera transmise par les soins du greffe au représentant de l'Etat dans le département.

 

M. X. et Mme X. ont relevé appel de cette décision par déclaration d'appel reçue le 26 février 2015.

Les appelants, par conclusions transmises le 22 juillet 2015, demandent à la cour de :

- déclarer leur appel recevable et bien fondé ;

- déclarer leur demande de dommages - intérêts recevable et bien fondée ;

- débouter M. Y. de ses demandes ;

- infirmer, par conséquent, le « jugement » rendu le 21 janvier 2015 par le tribunal d'instance de Sens ;

A titre principal :

- leur donner acte qu'ils ont quitté le logement le 4 avril 2015 et remis les clés au propriétaire le 3 juin 2015 ;

- dire que l'appartement loué par M. Y. à M. X. et Mme X. est impropre à l'usage d'habitation,

- déclarer, en conséquence, la demande de M. Y. aux fins d'expulsion de M. X. et Mme X. irrecevable et devenue sans objet,

- condamner M. Y. à restituer à M. X. et Mme X. la somme de 500 euros versée à titre de dépôt de garantie,

- condamner M. Y. à régler à M. X. et Mme X. la somme de 12.000 euros en réparation des préjudices subis,

- ordonner la compensation entre les sommes respectivement dues par les parties à concurrence de leurs quotités respectives,

- dire que la clause pénale prévoyant la fixation d'une indemnité d'occupation égale au double du montant du loyer, est abusive,

- en conséquence, la déclarer nulle,

A titre subsidiaire :

- dire que la clause pénale est manifestement excessive ;

- en conséquence, la réduire ;

- dire que le paiement des sommes dues par M. X. et Mme X. à hauteur de 1.662,66 euros sera échelonné dans la limite de trois années ;

En tout état de cause :

- condamner M. Y. à leur verser à chacun la somme de 3.500 euros au titre de l'article 37 de la loi du de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- condamner M. Y. aux entiers dépens, de première instance et d'appel, en ce compris le coût du procès-verbal de constat d'huissier de justice du 15 avril 2015 de 308,35 euros.

Les appelants font valoir :

- que l'article 1719 du code civil dispose que le bailleur d'une habitation principale s'oblige à délivrer un logement décent, et que « lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant » ;

que l'article 1720 du même code dispose que « le bailleur est tenu de livrer la chose en bon état de réparations de toute espèce. Il doit y faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que locatives » ; qu'en l'espèce, les manquements du bailleur à ses obligations ont perduré pendant toute la durée du bail ;

- que, dès la première année de location, ils ont constaté des moisissures apparaissant dans tous les coins des murs des deux chambres, du salon et du cagibi ; qu'ils ont alerté le bailleur qui s'est contenté de légers travaux, qui se sont avérés manifestement insuffisants ; que le service hygiène de la mairie de Sens a été alerté et a constaté des infractions au règlement sanitaire départemental et au décret n° 120/2002 relatif aux critères définissant le logement décent ; qu'ils ont déposé plainte contre leur bailleur pour remise à disposition de local vacant, insalubre, dangereux et impropre à l'habitation ; que l'insalubrité a fait l'objet d'un constat d'huissier.

- que leur demande de dommages-intérêts du fait de l'inexécution par le bailleur de ses obligations contractuelles n'est pas irrecevable comme nouvelle, l'article 564 du code de procédure civile permettant en effet de soumettre à la cour de nouvelles prétentions pour opposer compensation ; que la jurisprudence considère ainsi qu'un locataire peut demander en appel, alors qu'il n'en avait pas fait la demande en jugement de première instance, des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère non décent de son logement, et ce pour obtenir une compensation avec la dette de loyers et de charges impayés dont il est le débiteur ;

- que cette demande est bien fondée, l'humidité du logement ayant des conséquences importantes pour la santé et la sécurité des occupants ; qu'elle leur cause des difficultés respiratoires comme en atteste un certificat médical ; qu'elle a provoqué la détérioration de leur mobilier ;

- qu'ils ont finalement dû quitter les lieux le 4 avril 2015 sans attendre de pouvoir être relogés ;

- sur la dette réclamée de logement, que l'intimé n'a pas précisé qu'il convenait de déduire de ses demandes le montant des allocations logement des locataires qui lui ont été directement versées par la caisse d'allocations familiales ;

- qu'il convient également de déduire la taxe d'ordures ménagères pour laquelle aucun justificatif n'est produit.

- sur l'indemnité d'occupation prévue au contrat, il ressort des articles L. 132-1 et R. 132-2 du code de la consommation ainsi que de recommandations de la commission des clauses abusives qu'une telle clause pénale est abusive ; que la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 dite loi ALUR répute également non-écrite une telle clause ; que, si la cour ne considérait pas la clause pénale comme nulle, il conviendrait de la réduire en application de l'article 1152 du code civil en ce qu'elle est manifestement excessive ;

- que la Cour de cassation a considéré dans un avis récent que l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 24 mars 2014 dite loi ALUR s'applique aux baux en cours à la date de son entrée en vigueur ; qu'il conviendra donc de l'appliquer et d'accorder aux locataires des délais de paiement dans la limite de trois années.

 

Par ses dernières conclusions régulièrement transmises le 10 février 2016, M. Y., intimé et appelant incident, demande à la cour de :

- débouter purement et simplement M. X. et Mme X. de toutes leurs demandes à son encontre ;

- confirmer les termes de l'ordonnance de référé rendue le 21 janvier 2015 par le tribunal d'instance de Sens en toutes ses dispositions ;

En tous les cas :

- condamner solidairement M. X. et Mme X. à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. X. et Mme X. aux entiers dépens.

A titre liminaire, il soutient que la demande de dommages-intérêts des appelants est irrecevable en ce qu'elle est nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile ; qu'elle a en effet pour fin la reconnaissance de leur préjudice subi résultant de désordres affectant selon eux le logement ; que cette fin est différente du résultat recherché par les demandes de résiliation du bail, d'expulsion et d'arriérés de loyers ; qu'il ne peut être efficacement opposé la compensation avec la dette de loyers, dans la mesure ou cette demande est insuffisamment justifiée dans son montant.

Au principal, l'intimé fait valoir :

- que la clause pénale est acquise ; qu'elle est prévue au contrat ; qu'elle ne saurait être considérée comme abusive dans la mesure où elle est expressément autorisée par la loi, conformément à l'article 1152 du code civil ; que les recommandations de la commission des clauses abusives n'ont pas force de loi ;

- que l'allocation d'aide au logement a été versée directement aux locataires jusqu'au mois de mai 2014 et non janvier 2014 ; qu'elle a ensuite été versée directement entre les mains du bailleur à sa demande ; que cela apparaît sur les quittances de loyers comme sur le tableau récapitulatif versé aux débats en première instance ; que les calculs réalisés par les intimés sont entachés de plusieurs erreurs ;

- à titre subsidiaire, que les intimés doivent être déboutés de leur demande de dommages- intérêts pour le cas où elle serait jugée recevable ; qu'il ressort en effet de la jurisprudence que le caractère insalubre d'un logement ne peut être invoqué après la résiliation du bail ; qu'en l'espèce le bail se trouve résilié ;

- que, s'agissant de ses prétendus manquements à ses obligations de bailleurs, les appelants portent à son encontre des accusations infondées, non démontrées et soutenues uniquement par des pièces postérieures à la résiliation du bail ; que les états des lieux d'entrée et de sortie des locataires, signés par eux, mentionnent un appartement en bon état, sans faire mention des désordres allégués ; que le constat d'huissier a été réalisé sans la présence du bailleur et après la résiliation du bail, tout comme l'enquête des services d'hygiène ; que la plainte déposée est également postérieure à la résiliation et il n'est pas établi qu'il y ait été donné suite ; que le certificat médical se prononce sur le caractère humide d'un logement dont le médecin n'a pas connaissance ; que les intimés ne démontrent donc pas la réalité de leur préjudice et ne justifient son montant.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Faute d'avoir payé ou contesté les causes du commandement de payer dans les deux mois de sa délivrance, prévu au contrat du bail d'habitation, conformément à l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire ne peut remettre en cause l'acquisition de la clause résolutoire sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer ; que l'existence de cette mauvaise foi doit s'apprécier lors de la délivrance de l'acte ou à une période contemporaine à celle-ci

En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats que les causes du commandement de payer délivré le 12 mai 2014 n'ont été ni régularisées ni contestées dans le délai de deux mois régulièrement imparti.

En outre, les pièces, constat, courriers et attestation produits en cause d'appel par M. X. et Mme X. pour justifier de l'insalubrité du logement loué et partant, de l'inexécution par le propriétaire de l'obligation qui est la sienne, en application de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 et des articles 1719 à 1727 du code civil, d'offrir au locataire un logement décent, en bon état d'usage et de réparation et de lui assurer la jouissance paisible de la chose louée, sont des éléments de faits et de preuve postérieurs à la date de délivrance du commandement de payer, le premier d'entre eux, le compte rendu de visite du service hygiène de la mairie de Sens, datant du 31 octobre 2014.

Il s'en déduit que n'est pas caractérisée en l'espèce, avec l'évidence requise en référé, la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer, étant relevé que les locataires reconnaissent dans leurs conclusions en appel ne plus avoir payé le reliquat de la somme due à titre de loyer à compter du mois de janvier 2014, l'allocation logement de 461,97 euros étant dès lors versée directement à M. Y.

Il convient en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de plein droit du bail consenti à M. X. et Mme X. sur le logement situé [adresse] sauf à préciser que la résiliation de droit du bail en découlant est intervenue le 13 juillet 2014, à l'expiration du délai imparti par le commandement visant la clause résolutoire, ordonné l'expulsion de M. X. et Mme X., faute de départ volontaire, ainsi que celle de tout occupant de leur chef et réglé le sort des meubles et en ce qu'elle a condamné solidairement, à titre provisionnel, M. X. et Mme X. à payer à M. Y. une indemnité d'occupation provisionnelle fixée au montant du dernier loyer dû, majoré du montant des charges, soit la somme de 550 euros, à compter de la résiliation du bail sauf à préciser, vu l'évolution du litige, que cette indemnité est due à titre provisionnel jusqu'à la date du 3 juin 2015, date de la complète libération des lieux par la restitution des clefs par M. X. et Mme X..

Il convient enfin, infirmant l'ordonnance entreprise en cette disposition, de dire n'y avoir lieu à référé sur la somme réclamée au titre de la clause pénale contractuellement prévue qui prévoit une indemnité d'occupation au double du montant du loyer courant : en effet, l'application et le quantum de cette clause pénale, sérieusement contestée à hauteur de référé par les appelants, relèvent des pouvoirs du juge du fond qui peut la modérer ou l'écarter.

 

Sur les sommes provisionnelles :

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou révélation d'un fait ;

La cour relève que n'est pas nouvelle en cause d'appel au sens de l'article 564 sus visé la demande de dommages-intérêts formée par M. X. et Mme X. au titre du préjudice subi du fait de l'inexécution par leur bailleur et propriétaire de ses obligations contractuelles dès lors que les appelants entendent opposer à la partie adverse la compensation des sommes réciproquement dues au titre du bail litigieux.

Il convient en conséquence de dire recevables la demande de provision et les demandes subséquentes faites par les appelants en réparation du préjudice par eux subi du fait de la location d'un logement indécent et de l'atteinte causée à leur droit de jouissance et de débouter l'intimé de son exception d'irrecevabilité.

Aux termes de l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la juridiction des référés peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution d'une obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ;

Aux termes de l'article 1315 du code civil, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, M. Y. verse aux débats devant la cour un décompte détaillé des loyers, charges et indemnités d'occupation impayées à la date de la libération des lieux.

Après déduction des sommes payées par les appelants, des allocations logement perçus par le bailleur en 2014 et des allocations versées de janvier à avril 2015, il résulte des éléments de fait et de preuve produits devant la cour que la dette locative non sérieusement contestable de M. X. et Mme K. s'élevait au mois de décembre 2014 inclus à la somme de 1.310,54 euros et non à celle de 2.234,38 euros retenue par le premier juge et, vu l'évolution du litige, est d'un montant de 1.662, 66 euros, arrêté au mois d'avril 2015 inclus.

Il convient en conséquence d'infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a condamné solidairement, à titre provisionnel, M. X. et Mme X. à payer à M. Y. la somme de 2.284,38 euros au titre des loyers, charges et indemnité d'occupation impayés au 17 décembre 2014 (indemnité d'occupation du mois de décembre 2014 incluse), majorée des intérêts au taux légal sur la somme à compter de la présente décision et la somme de 50 euros au titre de la clause pénale insérée au contrat de bail et, statuant à nouveau, de condamner M. X. et Mme X. à payer solidairement et à titre provisionnel à M. Y. la somme de 1.310,54 euros au titre de l'arriéré locatif, arrêtée au mois de décembre 2014 inclus et, vu l'évolution du litige, d'actualiser la dette locative à la somme provisionnelle de 1.662,66 euros, arrêté au mois d'avril 2015 inclus, de dire n'y avoir lieu à référé sur la somme demandée au titre de la clause pénale et, ajoutant à l'ordonnance entreprise de dire que la demande d'expulsion est devenue sans objet en cause d'appel.

En ce qui concerne la demande de somme provisionnelle formée par les appelants, la cour relève qu'ils produisent au soutien de leur demande de dommages-intérêts :

- un courrier du service hygiène de la mairie de Sens du 25 novembre 2014 et un compte rendu de visite de ce service dans leur logement qui fait état au 31 octobre 2014 de traces d'humidité et d'une humidité importante dans l'appartement, de traces de moisissure et d'un défaut de ventilation permanente dans toutes les pièces de l'appartement de type 3 occupé par M. X. et Mme X. avec leurs trois enfants en bas âge, conclut à l'existence, de ce fait, d'anomalies constituant des infractions aux articles 23.1, 33, et 40.1 du règlement sanitaire départemental et au décret 120/2002, relatif aux critères définissant le logement décent et fixe la liste des travaux à réaliser par le propriétaire dans un délai de deux mois à compter de la réception dudit compte rendu (pièce 3).

- un procès-verbal n° 2015/000061 de la plainte déposée le 7 janvier 2015 par M. X. auprès du commissariat de police de Sens en raison de la mise à disposition par le propriétaire d'un logement insalubre et dangereux et de l'absence de réalisation, dans les délais prescrits, des travaux ordonnés par le service d'hygiène (pièce 4).

- un certificat médical du docteur G.-A. en date du 9 janvier 2015 attestant que « la famille X. présente un état respiratoire incompatible avec un logement trop humide » (pièce 5).

- un procès-verbal d'huissier de justice établi le 15 avril 2015 par maître C.-V., huissier de justice, accompagné de photographies qui établissent l'absence de ventilation et de système d'aération dans le séjour et sur les fenêtres, de la présence de moisissures et de champignons dans les trois pièces et dans le cagibi, d'une ventilation qui ne fonctionne pas dans la cuisine d'une odeur d'humidité perceptible dans tout l'appartement, « rendant impropre l'air ambiant » (pièce 6).

- une attestation du 4 mars 2015 émanant de Mme X. X. qui déclare héberger à son domicile, [adresse], M. X. et Mme X. (pièce 10) et une attestation postérieure du 15 juin 2015 de cette même personne qui précise héberger à plein temps depuis le mois de mars 2015 ses neveux, S. X. (5ans) et R. X. (3 ans), et héberger le week-end leurs parents et leur petit-frère afin de leur permettre de se réunir au complet et de conserver un lien familial (pièce 15).

Il résulte de ces éléments de fait et de preuve que les appelants justifient, avec l'évidence requise en référé, des préjudices manifestement subis du fait de l'inexécution persistante par M. Y. de ses obligations contractuelles d'offrir à ses locataires, en application des articles 1719 à 1727 du code civil, un logement décent et de leur assurer la jouissance paisible de la chose louée et du fait des risques manifestes d'atteinte à la santé des locataires et de leurs enfants et partant, de leur droit, non sérieusement contestable, à indemnisation.

Il convient en conséquence, ajoutant à l'ordonnance entreprise, de faire droit à la demande des appelants et de condamner M. Y. à payer à M. X. et Mme X. une provision globale de 5.000 euros au titre des préjudices subis du fait de la location d'un logement ne correspondant pas aux exigences légales et réglementaires incombant au propriétaire bailleur et du fait des risques manifestes d'atteinte à la santé des occupants dudit logement.

Il convient enfin d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné in solidum M. X. et Mme X. à verser à M. Y. la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement de payer pour 82,54 euros, l'assignation pour 65,11 euros et la dénonciation à la sous-préfecture pour 4,82 euros et, statuant à nouveau, de débouter M. Y. de sa demande formée devant le premier juge au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de dire que chacune des parties supportera la charge de ses dépens de première instance.

Il n'y a pas lieu de donner acte dès lors qu'un « donner acte » n'emporte pas de conséquences juridiques ;

L'équité commande de faire droit à la demande des appelants présentée sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle : l'intimé est condamné à verser à chacun d'eux et à ce titre la somme visée au dispositif de la présente décision.

Partie perdante pour l'essentiel, M. Y. ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et doit supporter les dépens d'appel en ce compris le coût du procès-verbal de constat d'huissier de justice du 15 avril 2015 de 308,35 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Confirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a constaté la résiliation de plein droit du bail consenti par M. Y. à M. X. et Mme X. sur le logement situé [...] sauf à préciser que cette résiliation est intervenue à la date du 13 juillet 2014, en ce qu'elle a ordonné, faute de départ volontaire de M. X. et Mme X., leur expulsion, ainsi que celle de tout occupant de leur chef, avec au besoin le concours de la force publique conformément aux dispositions des articles L. 153-1 et L. 153-2 du code des procédures civiles d'exécution et rappelé que l'expulsion ne pourra avoir lieu qu'à l'expiration du délai de deux mois suivant la signification d'un commandement d'avoir à quitter les lieux et selon les modalités prévues par les articles L. 411-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution et que, s'agissant des meubles et objets mobiliers laissés dans les lieux, il devra être procédé conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution et condamné M. X. et Mme X. à payer solidairement, à titre provisionnel, à M. Y. une indemnité d'occupation provisionnelle fixée au montant du dernier loyer dû, majoré du montant des charges, soit la somme de 550 euros, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la fin avril 2015, date de la complète libération des lieux, avec revalorisation en fonction des évolutions réglementaires.

Infirme l'ordonnance en ses autres dispositions ;

Et statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à référé sur la somme demandée par M. Y. au titre de la clause pénale,

Déboute M. Y. de sa demande formée devant le premier juge au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chacune des parties supportera la charge de ses dépens de première instance.

Et y ajoutant,

Vu l'évolution du litige,

Dit que la demande d'expulsion est devenue sans objet en cause d'appel,

Dit recevable la demande de dommages-intérêts formée à titre provisionnel par M. X. et Mme X. et déboute M. Y. de son exception d'irrecevabilité,

Condamne M. Y. à payer à M. X. et Mme X. une provision globale de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts,

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de compensation des sommes accordées et sur le surplus des prétentions,

Condamne M. Y. à payer M. X. et Mme X. la somme de 1.500 euros chacun sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle,

Rejette la demande présentée en cause d'appel par M. Y. sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. Y. aux entiers dépens d'appel

Le Greffier,                           Le Président,