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CA RENNES (3e ch. com.), 31 janvier 2017

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (3e ch. com.), 31 janvier 2017
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 3e ch. com.
Demande : 14/09165
Décision : 17/52
Date : 31/01/2017
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 24/11/2016
Numéro de la décision : 52
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6730

CA RENNES (3e ch. com.), 31 janvier 2017 : RG n° 14/09165 ; arrêt n° 52

Publication : Jurica

 

Extrait : « Ces clauses ont pour objet de prévoir une indemnité au profit de la société COPY CONCEPT ARMORIC en cas de résiliation anticipée, la rupture du contrat lui occasionnant un préjudice manifeste eu égard aux investissements concédés et au bénéfice espéré ; cette clause indemnitaire ne peut être considérée comme instaurant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, et ce alors que la durée normale des contrats avait été déterminée d'un commun accord entre les deux parties ; la société N. PÈRE ET FILS n'apparaît dès lors pas fondée à invoquer les dispositions de l'article L. 422-6 2° du Code de Commerce ; le dommage résultant pour la société COPY CONCEPT ARMORIC de la résiliation des contrats avant le terme convenu est manifeste et la clause prévoyant une indemnisation à hauteur de 95 % des sommes qui auraient dû lui revenir ne peut dès lors être considérée comme une clause pénale engendrant une peine manifestement excessive ; le volume de copies moyen par jour lors des douze derniers mois n'étant pas contesté, pas plus que le mode de calcul, il convient dès lors de confirmer la décision ayant condamné la société N. PÈRE ET FILS au paiement des sommes de 6.521 euros 20. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

TROISIÈME CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 31 JANVIER 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/09165. Arrêt n° 52.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : M. Pierre CALLOCH, Président, rapporteur

Assesseur : Mme Brigitte ANDRE, Conseiller,

Assesseur : Madame Véronique JEANNESSON, Conseiller,

GREFFIER : Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 6 décembre 2016

ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement le 31 janvier 2017 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats.

 

APPELANTE :

SARL SOCIETE DE PLATRERIE ET DE CARRELAGE N. PERE ET FILS

agissant poursuites et diligences de son gérant pour ce domicilié de droit audit siège, Représentée par Maître Franck L. substituant Maître Dominique LE C.-B. de la SCP PHILIPPE C. DOMINIQUE LE C.-B., postulant, avocats au barreau de RENNES, Représentée par Maître Luc F., plaidant, avocat au barreau de LORIENT

 

INTIMÉE :

SAS COPY CONCEPT ARMORIC

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, Représentée par M Maître Julien D. de la SELARL L./D., plaidant/postulant, avocat au barreau de RENNES

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 16 juin 2009, la société N. PÈRE ET FILS a acquis auprès de la société COPY CONCEPT ARMORIC un photocopieur de type CANON IRC23801 pour un prix de 5.764 euros 72.

Le 8 juillet 2009, la société N. PÈRE ET FILS a signé avec la société COPY CONCEPT ARMORIC deux contrats de maintenance d'une durée de 63 mois concernant l'un la maintenance du photocopieur couleur (n° 850304), l'autre des fonctions fax, scanner et logiciel (n° 870338).

Suivant courriers en date des 28 août et 11 septembre 2012, la société N. PÈRE ET FILS a résilié les deux contrats de maintenance. Le 13 septembre 2012, un salarié de la société COPY CONCEPT ARMORIC a constaté que le photocopieur n'était plus dans les locaux de la société N. PÈRE ET FILS.

Le 19 octobre 2012, la société COPY CONCEPT ARMORIC a adressé à la société N. PÈRE ET FILS une mise en demeure de régler la somme de 10.364 euros 11 au titre d'indemnité de résiliation des deux contrats de maintenance, outre le coût des 4 tambours du photocopieur. Cette mise en demeure étant restée infructueuse, la société COPY CONCEPT ARMORIC a adressé une requête en injonction de payer au président du tribunal de commerce de LORIENT qui, par ordonnance en date du 17 mai 2013, a rendu une ordonnance en paiement de la somme principale de 10.364 euros 11.

La société N. PÈRE ET FILS a formé opposition à cette ordonnance d'injonction de payer. Le tribunal de commerce de LORIENT a statué sur cette opposition par jugement en date du 3 septembre 2014, décision qui a condamné la société N. PÈRE ET FILS à payer à la société COPY CONCEPT ARMORIC la somme de 6.521 euros 20 en principal, outre 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et lui a donné acte de son offre de restituer les tambours d'origine du photocopieur.

La société N. PÈRE ET FILS a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 24 novembre 2016.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance datée du 16 novembre 2016 et a renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience du 6 décembre 2016.

A l'appui de son recours, par conclusions enregistrées le 18 juin 2015, la société N. PÈRE ET FILS indique en premier lieu que du fait du paiement d'un avenant d'un montant de 122 euros 26, la société COPY CONCEPT ARMORIC a accepté la résiliation du contrat de maintenance connectique (n° 870338) sans appliquer d'indemnité de résiliation. Sur la résiliation du contrat de maintenance photocopieur, elle indique que l'absence du photocopieur postérieurement à la résiliation de ce contrat par ses soins n'entraîne pas l'application de l'indemnité de résiliation. Elle affirme que c'est à l'initiative de la société COPY CONCEPT ARMORIC qu'elle a résilié ce contrat et affirme que la clause de calcul de l'indemnité de résiliation est une clause abusive au sens de l'article L. 442-6 du Code de Commerce, ladite clause prévoyant une indemnité égale à 95 % de la facturation restant à courir. Elle soutient qu'en toute hypothèse une telle clause s'analyse en une clause pénale et est donc soumise à réduction. Elle conclut en conséquence à l'annulation de cette clause ou à défaut à la réduction de la somme due à hauteur de la somme de 239 euros 17. Sur l'appel incident de la société COPY CONCEPT ARMORIC, elle affirme avoir toujours laissé à la disposition de celle-ci les tambours du photocopieur et qu'au contraire cette société s'est emparée des tambours installés initialement sur le système. La société N. PÈRE ET FILS conclut en conséquence à l'infirmation de la décision déférée, la société COPY CONCEPT ARMORIC étant déboutée de l'intégralité de ses demandes, sauf en ce qui concerne le décerné acte relatif à la restitution des tambours. Elle sollicite enfin la condamnation de l'intimée à lui verser une somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société COPY CONCEPT ARMORIC conteste avoir incité son cocontractant à résilier les deux contrats de maintenance et rappelle que les indemnités de résiliation étaient clairement stipulées dans les conventions. Elle indique que l'avenant de 122 euros 26 a été édité en raison du paiement par le client du forfait annuel couvrant la période résiliée et ne peut s'interpréter comme une acceptation de la résiliation sans indemnité. Selon elle, les clauses de résiliation sont habituelles en la matière, proportionnées et ne revêtent aucun caractère abusif. Elles auraient une nature de dédit, et non de clause pénale, et ne seraient dès lors pas soumises à réduction. La société COPY CONCEPT ARMORIC reprend le calcul de ces indemnités à partir de la consommation estimée et arrivent aux sommes de 6.282 euros 03 pour le contrat 850304 et 239 euros 17 pour le contrat 870338. Elle rappelle les termes de l'article 10 du contrat de maintenance du photocopieur pour affirmer que son client avait l'obligation de restituer les tambours fournis avec la machine, et non les toners. Ces tambours n'ayant jamais été remis par la société N. PÈRE ET FILS, elle s'estime fondée à réclamer leur coût, soit la somme de 2.129 euros 55, elle-même s'engageant à restituer les rouleaux d'origine conservés dans ses locaux, et au demeurant hors d'usage. Elle conclut en conséquence à une infirmation partielle de la décision, demandant la condamnation de la société N. PÈRE ET FILS à lui verser les sommes de 10.364 euros 11 au titre des indemnités de résiliation et de la non restitution de tambours, outre 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, elle-même s'engageant à restituer les tambours d'origine du photocopieur.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il ressort des pièces versées aux débats que par lettres recommandées datées du 28 août 2012 et 11 septembre 2012, la société N. PÈRE ET FILS a demandé à son cocontractant la résiliation des contrats de maintenance 850304 et 870338 ; aucun document ne permet de soutenir que la société N. PÈRE ET FILS a envoyé ces courriers à la demande de la société COPY CONCEPT ARMORIC et il convient dès lors de retenir que l'auteur de la résiliation anticipée des deux contrats est bien l'auteur des deux lettres recommandées.

Les contrats de service et de maintenance 850304 et 870338 stipulent tous deux, en leur article 16-2 et 12.1 des conditions générales relatifs aux indemnités en cas de résiliation anticipée, les dispositions suivantes :

« En cas de résiliation anticipée du contrat, de revente ou de dessaisissement du matériel pour quelque motif que ce soit, le client sera redevable envers COPY CONCEPT ARMORIC d'une indemnité de résiliation égale à :

- en cas de formule T.A.S.C : d'une part, la totalité des montants forfaitaires mensuels le séparant de l'échéance normale d'expiration du contrat avec un minimum de six fois le montant forfaitaire mensuel et d'autre part, d'une indemnité égale au coût de 95 % du volume copies le séparant de l'échéance normale d'expiration du contrat, laquelle est calculée sur la base du nombre de copies réalisées au cours des 12 mois précédent la résiliation par le client.

- en cas de résiliation anticipée du contrat suivant sa date d'échéance telle que fixée au recto, de revente ou du dessaisissement du matériel ou du copieur connecté ou imprimante pour quelque motif que ce soit, le client sera redevable envers COPY CONCEPT ARMORIC d'une indemnité de résiliation égale au coût de 95 % de la facturation restant à courir jusqu'au terme du nombre d'années correspondant à la durée du présent contrat et de l''échéance normale d'expiration. »

La renonciation par une partie à un droit ne peut résulter que d'un acte exprès ; le remboursement par la société COPY CONCEPT ARMORIC d'une partie du forfait annuel après résiliation ne peut s'interpréter comme manifestant sa volonté de renoncer à l'indemnité de résiliation ; cette volonté n'étant établie par aucun autre fait ou acte, la société COPY CONCEPT ARMORIC reste fondée à se prévaloir des articles 16-2 et 12-1 rappelés au paragraphe précédent.

Ces clauses ont pour objet de prévoir une indemnité au profit de la société COPY CONCEPT ARMORIC en cas de résiliation anticipée, la rupture du contrat lui occasionnant un préjudice manifeste eu égard aux investissements concédés et au bénéfice espéré ; cette clause indemnitaire ne peut être considérée comme instaurant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, et ce alors que la durée normale des contrats avait été déterminée d'un commun accord entre les deux parties ; la société N. PÈRE ET FILS n'apparaît dès lors pas fondée à invoquer les dispositions de l'article L. 422-6 2° du Code de Commerce ; le dommage résultant pour la société COPY CONCEPT ARMORIC de la résiliation des contrats avant le terme convenu est manifeste et la clause prévoyant une indemnisation à hauteur de 95 % des sommes qui auraient dû lui revenir ne peut dès lors être considérée comme une clause pénale engendrant une peine manifestement excessive ; le volume de copies moyen par jour lors des douze derniers mois n'étant pas contesté, pas plus que le mode de calcul, il convient dès lors de confirmer la décision ayant condamné la société N. PÈRE ET FILS au paiement des sommes de 6.521 euros 20.

Conformément aux dispositions des articles 10 et 10.4 du contrat de maintenance n° 850304, la société COPY CONCEPT ARMORIC est fondée à réclamer les 4 tambours qu'elle a installé le 11 novembre 2011 en lieu et place des tambours originaux ; la société N. PÈRE ET FILS ne prouve pas avoir fourni ces pièces, rappel étant fait que ses courriels des 1er et 18 février 2013 sont relatifs à la restitution de toners, et non des tambours et que le photocopieur n'était plus dans les locaux lors de la visite du technicien de la société COPY CONCEPT ARMORIC ; en l'absence de restitution en nature, la société COPY CONCEPT ARMORIC est fondée à réclamer la valeur des pièces non remises, soit la somme de 2.129 euros 55 HT ; il appartiendra à la société COPY CONCEPT ARMORIC de fournir à la société N. PÈRE ET FILS les tambours d'origine, conformément là encore au contrat signé entre les parties.

Les circonstances de l'espèce imposent de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la société N. PÈRE ET FILS en cause d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

- CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de LORIENT en date du 3 septembre 2014, sauf en ce qui concerne la demande en paiement de la somme de 2.129 euros 55 au titre de la non restitution de tambours.

Statuant à nouveau de ce chef,

- CONDAMNE la société N. PÈRE ET FILS à verser à la société COPY CONCEPT ARMORIC la somme de 2.129 euros 55 avec intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 2014.

Ajoutant à la décision attaquée,

- DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.

- MET l'intégralité des dépens à la charge de la société N. PÈRE ET FILS, dont distraction au profit des avocats à la cause.

LE GREFFIER                   LE PRÉSIDENT