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CA NANCY (2e ch. civ.), 26 janvier 2017

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (2e ch. civ.), 26 janvier 2017
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 2e ch. civ.
Demande : 15/02576
Date : 26/01/2017
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 18/09/2015
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2017-002817
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6747

CA NANCY (2e ch. civ.), 26 janvier 2017 : RG n° 15/02576 

Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2017-002817

 

Extraits : 1/ « Les dispositions de l’article L. 312-3-1 du code de la consommation issu de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013, abrogé à compter du 1er juillet 2016 par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et déplacé au nouvel article L. 313-64 qui en reprend les termes, selon lequel « […] », ne peuvent trouver application au présent prêt, contracté le 28 août 2009 ».

2/ « Attendu conformément à la jurisprudence antérieure, que la stipulation d’une obligation en monnaie étrangère est licite dès lors que cette monnaie est prévue non comme instrument de paiement mais comme unité de compte, ce qui est le cas en l’espèce, l’offre de prêt acceptée par Mme X. le 15 avril 2009 réitérée par acte authentique du 28 août 2009, prévoyant expressément que le franc suisse constitue la monnaie de compte, l’euro constituant la monnaie de paiement et que le règlement des échéances par l’emprunteur devra être effectué nécessairement en euros pour ensuite être converti en francs suisses et permettre le remboursement du capital emprunté en francs suisses ;

Attendu que la fixation de la créance en monnaie étrangère est assimilée à une indexation déguisée dont la validité est subordonnée au respect des conditions de la réglementation des indexation telles qu’elles résultent de l’article L. 112-2 du code monétaire et financier lequel édicte que, dans les dispositions statutaires ou conventionnelles, est interdite toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n’ayant pas de relation directe avec l’objet du statut ou de la convention ou avec l’activité de l’une des parties ; que la relation directe est suffisamment caractérisée, le contrat fût-il purement interne, par la qualité de banquier de la Sa Bnp Paribas Personal Finance, dont l’activité porte notamment sur des opérations passées sur les marchés internationaux de devises pour assurer son approvisionnement en ressources financières ».

3/ « Or attendu, qu’il sera rappelé que si l’interruption de la prescription ne peut, en principe, s’étendre d’une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, quoique ayant des causes différentes, tendent à un seul et même but de sorte que la deuxième est virtuellement comprise dans la première ; que tel est le cas en l’espèce, la mise en œuvre par l’emprunteuse de la responsabilité de la banque et du conseiller en patrimoine pour manquement aux obligations contractuelles d’information, mise en garde et conseil ou pour pratiques commerciales déloyales tendant au même but, à savoir la réparation du préjudice subi du fait de la souscription du prêt litigieux, seul le fondement juridique différant ; Que le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu’il a déclaré irrecevable comme prescrite la demande de Mme X. sur le fondement des articles L. 120-1 et L. 121-1 du code de la consommation, recodifiés L. 121-1 et L. 121-1-1 ».

 

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 26 JANVIER 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/02576. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance de NANCY, R.G. n°12/2144, en date du 14 septembre 2015.

 

APPELANTE :

Madame X.

née le [date] à [ville] demeurant [adresse], représentée par Maître Olivier B. de l'AARPI B.B., avocat au barreau de NANCY

 

APPELANT INCIDENT ET INTIMÉS SUR APPEL PRINCIPAL :

Monsieur Y.,

demeurant [adresse], représenté par Maître Sylvain C. de la SCP B. C., avocat au barreau de NANCY

 

INTIMÉE :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social [...] inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés sous le numéro XX, représentée par de Maître Corinne A.-F. de la SCP A.-F. A., avocat au barreau de NANCY

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 24 novembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de Chambre, chargée du rapport et Madame Sandrine GUIOT-MLYNARCZYK, Conseiller,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre, Madame Sandrine GUIOT-MLYNARCZYK, Conseiller, Madame Konny DEREIN, Conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Ali ADJAL ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 26 janvier 2017, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 26 janvier 2017, par Monsieur Ali ADJAL, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre, et par Monsieur Ali ADJAL, greffier ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 12 février 2009, M. Y., qui exerçait alors une activité de conseil en patrimoine à l'enseigne Cabinet Y., a remis à Mme X., infirmière libérale, une étude de sa situation patrimoniale, lui proposant un investissement immobilier en loi Scellier, financé par un prêt à différé d'amortissement total de 141.500 euros, à taux fixe en euros.

Le 15 avril 2009, la Sa Bnp Paribas Personal finance a adressé à Mme X. une offre préalable de prêt immobilier, portant sur un montant de 219.844, 92 francs suisses (soit 143.689,51 euros sur la base d'un taux de change de 1 euro = 1, 53 franc suisse), au taux d’intérêt de 3,95 % l’an, d'une durée de 21 ans et remboursable après un différé de 12 mois, moyennant des mensualités de 915,35 euros.

Par acte reçu le 28 août 2009 par Maître C., notaire à [ville M.], Mme X. a acquis en l'état de futur achèvement, pour un prix de 141.500 euros, un bien immobilier de type T2 situé à [ville P.] et a réitéré son acceptation de l'offre de crédit proposée par la Sa Bnp Paribas le 15 avril 2009.

Par actes délivrés les 10 et 11 mai 2012 et dernières conclusions du 16 décembre 2014, Mme X. a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Nancy, au visa des articles L. 120-1, L. 232-1 du code de la consommation, 1382 et suivants et subsidiairement 1142 du code civil, L. 312-10 du code de la consommation et L. 112-2 du code monétaire et financier, la Sa Bnp Paribas Personal Finance et le Cabinet Y. aux fins de voir dire et juger qu’ils ont engagé leur responsabilité civile à son égard et les entendre condamner in solidum à lui verser en réparation de ses préjudices économiques et matériels les sommes de 59.103,51 euros et 9.613 euros, et en réparation de son préjudice moral la somme de 10.000 euros, outre une indemnité de 3.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme X. a conclu en outre, sur le fondement de l’article 1134 du code civil, à la condamnation de la banque à procéder, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à la conversion en euros du prêt souscrit le 29 avril 2009 avec effet rétroactif au 10 août 2012, tous frais, intérêts et coûts éventuels engendrés par cette conversion devant être intégralement mis à la charge in solidum des défendeurs.

Par acte du 27 juin 2012, Mme X. a fait attraire M. Y., à titre personnel, devant la juridiction, et les procédures ont été jointes.

La Sa Bnp Paribas Personal Finance a conclu au rejet de la demande tendant à ce qu’il lui soit enjoint sous astreinte de procéder à la conversion du prêt en euros à compter du 10 août 2012 dans la mesure où elle ne s’oppose pas à cette conversion en application et selon les modalités prévues au contrat.

Elle a conclu par ailleurs au rejet des demandes de Mme X. en réparation de ses préjudices économique et moral, soulevé la prescription de la demande tendant au paiement de la somme de 9.613 euros et sollicité la condamnation de la partie succombante aux entiers dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. Y. a conclu au rejet de l’intégralité des demandes de Mme X. dont il a sollicité la condamnation aux entiers dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 4.000 euros du chef des frais irrépétibles.

Par jugement en date du 14 septembre 2015, le tribunal a condamné la Sa Bnp Paribas Personal Finance à procéder à la conversion du prêt souscrit par Mme X. le 29 avril 2009 dans une monnaie de compte en euros, à taux fixe, avec effet rétroactif au 10 août 2012, et ce dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard après ce délai pour une période de trois mois, dit que passé ce délai, il devra à nouveau être statué sur l'astreinte, dit qu’il appartiendra au juge de l'exécution de liquider l'astreinte, dit que les frais de change découlant de ce changement de monnaie de compte seront à la charge de l'emprunteur, dit que les autres frais pouvant résulter de cette opération resteront à la charge exclusive de la Sa Bnp Paribas.

Le tribunal a débouté Mme X. de sa demande tendant à voir engager la responsabilité de la Sa Bnp Paribas pour le non-respect du délai de réflexion prévu à l'article L. 312-10 du code de la consommation, déclaré licite la clause d'indexation figurant au contrat de prêt souscrit par Mme X. le 29 avril 2009, déclaré Mme X. irrecevable en sa demande en réparation formée sur le fondement des articles L. 120-1 et L. 121-1 du Code de la consommation, l'a déboutée de ses demandes tendant à voir engager la responsabilité de la Sa Bnp Paribas sur le fondement d'un manquement à ses devoirs d'information, en ce compris sur le risque d'un défaut d'assurance, de conseil et de mise en garde.

Le premier juge a également débouté Mme X. de sa demande tendant à voir engager la responsabilité de M. Y. sur le fondement d'une faute extra-contractuelle tirée d'un défaut d'information et de conseil, dit en revanche que ce dernier a commis une faute envers la demanderesse lors de la réalisation de son étude patrimoniale et l’a condamné en conséquence, à lui verser les sommes de 9.613,08 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier et de 1.500 euros en réparation de son préjudice moral, majorées des intérêts au taux légal à compter du jugement.

Les parties ont été déboutées du surplus de leurs prétentions, M. Y. et la Sa Bnp Paribas Personal Finance étant condamnés à verser à la demanderesse une somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Le tribunal a énoncé en premier lieu, que la banque ne pouvait, pour le seul motif qu’une procédure judiciaire était en cours, refuser de procéder à une conversion du prêt en euros, suivant un taux fixe, alors qu'il n'est pas contesté que Mme X. avait formé une telle demande en temps utile.

Sur la demande dirigée contre la Sa Bnp Paribas Personal Finance, le tribunal a énoncé :

- que Mme X. a reconnu avoir reçu l'offre de prêt litigieuse par voie postale le 18 avril 2009 et l'avoir acceptée le 29 avril 2009, soit plus de 10 jours après sa réception conformément à l'article L. 312-10 du Code de la consommation ;

- que l’indexation de l’obligation de remboursement de l’emprunteur sur le taux de change de l’euros contre le franc suisse ne contrevient pas aux dispositions de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier, dans la mesure où elle est en relation directe avec l'activité de la Sa Bnp Paribas Personal Finance, établissement de crédit qui emprunte sur les marchés monétaires internationaux de devises afin notamment de financer ce type de concours ;

- que le moyen soulevé par Mme X. et les demandes qui en découlent formulés par conclusions du 16 décembre 2014 et tirés des pratiques commerciales trompeuses auxquelles se seraient livrés à son encontre les défendeurs en préconisant le financement de son investissement immobilier par un prêt à taux fixe en euros, puis en lui présentant une offre de prêt totalement différente du projet initial, sans attirer son attention sur les différences des deux projets et les risques encourus, sont prescrits par application de l’article 2224 du code civil, les faits allégués se situant en effet nécessairement antérieurement ou concomitamment à la présentation et à l'acceptation de l'offre préalable de prêt intervenues en avril 2009 ;

- au vu des différents paragraphes et clauses de l'offre de crédit adressée à Mme X. le 15 avril 2009 et de la notice y indexée, qu'une information claire, précise et suffisante lui a été donnée par la banque sur la nature du prêt et sur les incidences d'une variation du taux de change euros/francs suisses sur l'amortissement du capital, la durée et le coût total du crédit, ces informations étant de surcroît reprises dans l'acte authentique de prêt signé le 28 août 2009 ; qu’il n’appartenait pas à la Sa Bnp Paribas en sa qualité de prêteuse de deniers, d'attirer l'attention de la demanderesse sur les différences existant entre le prêt préconisé par M. Y. et le prêt proposé ; qu’il ne lui incombait pas davantage de veiller à ce que le contrat d'assurance choisi par la demanderesse soit adapté aux particularités du contrat de crédit, et notamment aux risques liés aux variations du taux de change, dès lors qu’elle s’était assurée que l’emprunteuse avait effectué les démarches pour contracter une assurance ;

- que la Sa Bnp Paribas Personal Finance, conformément au principe de non immixtion, n'était pas tenue envers Mme X. d'une obligation de conseil quant au choix du financement qui convenait le mieux à sa situation

- que le prêt, dont les mensualités de remboursement s’élevait à 915,35 euros, ne comportait pas pour Mme X. qui percevait un salaire de 3.000 euros par mois environ pour des charges personnelles de 309 euros, un risque d’endettement particulier et ce, même en tenant compte d'une éventuelle augmentation des échéances induites par une variation défavorable du taux de change pour l'emprunteur ; qu’il ne peut être reproché à la Sa Bnp Paribas Personal Finance d’avoir manqué à son devoir de mise en garde alors que le crédit était adapté aux capacités financières de l’emprunteuse

Sur la demande dirigée contre M. Y., le tribunal a énoncé :

- que M. Y. qui n'était, en sa qualité d’intermédiaire en opération de banque, contractuellement lié qu’à la Sa Bnp Paribas, n’était tenu à aucun devoir de conseil envers Mme X. laquelle, de surcroît, ne démontre pas avoir sollicité son avis sur l'opportunité ou non d'accepter l'offre de crédit, l'attestation peu circonstanciée de M. J. étant inopérante à cet égard ; que M. Y. qui a informé la demanderesse de l'ensemble des frais liés au prêt « classique » qu'il préconisait pour financer son projet immobilier et n’est pas à l’origine de l'offre de crédit finalement proposée, ne peut se voir reprocher de ne pas l’avoir alertée sur les risques particuliers liés aux variations du taux de change

- qu’en revanche, en omettant d'inclure dans son étude le montant des frais de gestion d'assurance ainsi qu'une estimation des charges incompressibles de copropriété, alors que le projet portait sur l'acquisition d'un lot situé dans une résidence fonctionnant en copropriété, M. Y. a commis une faute.

 

Suivant déclaration reçue le 18 septembre 2015, Mme X. a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Elle a sollicité la confirmation de ladite décision en ce qu'elle a enjoint à la banque de procéder à la conversion en euros du prêt qu'elle a souscrit, avec effet rétroactif à la date du 10 août 2012, demandant en outre à la cour de dire et juger que cette conversion n'occasionnera pour elle aucun frais, intérêt ni coût à son détriment et que tous les frais, intérêts et coûts éventuels seront intégralement pris en charge par la banque, in solidum avec M. Y. et d’assortir l'injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard, 15 jours après la signification de la décision à intervenir.

Mme X. a conclu à l’infirmation du jugement en ce qu’il a écarté la responsabilité de la banque et celle de M. Y. quant à l'obligation d'information et de mise en garde et en ce qu'il a déclaré irrecevable le moyen tiré des pratiques commerciales trompeuses, demandant à la cour de dire et juger que la Sa Bnp Paribas Personal Finance et M. Y. ont engagé leur responsabilité civile à son égard, de les condamner in solidum à lui verser la somme de 59.103,51 euros en réparation du préjudice économique, ainsi que la somme de 9.613 euros en indemnisation du préjudice qu’elle subit du fait du caractère erroné de l'étude sur les charges foncières liées à l'achat de l'appartement dans la résidence [P. M.], et la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral, outre une indemnité de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

L’appelante a critiqué la décision du premier juge en ce qu’il a considéré que sa demande tirée des pratiques commerciales trompeuses était prescrite pour avoir été soulevée pour la première fois dans les conclusions déposées le 16 décembre 2014, alors qu’il s’agit d’un moyen nouveau et non d’une demande nouvelle, étant observé en tout état de cause, que suivant la jurisprudence constante, l’interruption d’une action peut s’étendre à une autre lorsque les deux actions, quoique ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but de telle sorte que la deuxième est virtuellement comprise dans la première. Elle a ajouté que les demandes finalement récapitulées dans les dernières écritures sont rigoureusement identiques à celles précédemment formulées dans le cadre de l’assignation et que le moyen avait déjà été développé en fait dans des conclusions antérieures.

Elle a soutenu que sa demande sur ce fondement est en outre parfaitement justifiée, les manquements reprochés aux intimés à leur obligation d’information, de conseil et de bonne foi confinant en l’espèce, à l’institution de pratiques commerciales trompeuses telles que définies par les articles L. 120-1 et L. 121-1 du code de la consommation. Elle a exposé que le prêt consenti par la banque était un prêt spéculatif et aléatoire comportant d’importants risques liés aux fluctuations du taux de change ; qu’en outre, ce prêt était totalement différent de celui préconisé aux termes de l'étude de M. Y., qui était un prêt classique, à taux fixe en euros ; qu’or, ni M. Y. ni la Sa Bnp Paribas n’ont attiré son attention sur ces différences majeures alors qu’ils sont intervenus dans le cadre d’une seule et même opération qui aurait dû être orchestrée de concert et en cohérence au vu du lien contractuel les unissant ; que M. Y. ne saurait être dégagé de toute obligation à son égard du seul fait qu’il a été rémunéré par la banque alors qu’elle l’avait mandaté en sa qualité de conseiller en patrimoine, qu’il avait pour obligation de l’assister jusqu’à la signature de l’offre de crédit, qu’il ne pouvait ignorer que la Bnp ne proposait que des prêts en francs suisses et qu’il a persisté à réaliser une étude trompeuse ; que n’ayant été alertée en aucune façon sur le caractère autrement plus risqué de l’offre de prêt, elle était légitimement fondée à penser que les risques encourus étaient les mêmes que ceux résultant du projet de prêt tel que figurant dans l’étude réalisée par M. Y..

Mme X. a critiqué l’analyse du premier juge qui a estimé que les informations données par la Sa Bnp Paribas Personal Finance dans l'offre de crédit étaient claires, précises et suffisantes, alors que la banque, qui n’a jamais pris contact avec elle en dehors de l’envoi postal de l’offre de crédit, ne lui a pas délivré d'information individualisée et qu’elle ne lui a fourni aucun renseignement relativement aux mécanismes qui sous-tendent la fluctuation du cours du d’une monnaie par rapport à une autre, et plus précisément aux fluctuation du franc suisse par rapport à l'euros alors que de tels renseignements étaient indispensables pour lui permettre d’apprécier la portée de l’engagement qu’elle souscrivait, s’agissant d’une opération si risquée qu'elle est désormais interdite pour les particuliers par la loi.

Elle a reproché à l’intimée de lui avoir fourni une simulation de la variation du taux de change de plus ou moins 5 % par rapport au taux figurant sur le tableau d’amortissement édité, bien plus optimiste que l'évolution du taux concomitante à l'édition de l'offre de prêt n'aurait pu le laisser envisager, et d’avoir minimisé le risque de change et ses conséquences alors que dans les mois précédents, l’euros avait chuté de près de 15 %, en utilisant au contraire la stabilité du taux de change comme argument commercial, dans la volonté délibérée de la tromper.

Elle a ajouté que la banque n'a pas expliqué avec clarté les risques encourus du fait de l'opération entreprise, notamment sur le montant du capital à rembourser et que par sa faute, elle a perdu plus de 59.000 euros sur trois ans.

Mme X. a prétendu également que tant la Sa Bnp Paribas Personal Finance que M. Y. ont méconnu leur devoir de mise en garde en n'intégrant pas dans les charges du prêt le risque que pouvait présenter son caractère spéculatif et en lui dispensant des informations faussement rassurantes alors qu’elle était en mesure de prévoir une importante chute du taux de change, à terme plus ou moins imminent ; qu’or, il résulte de la brochure commerciale éditée à destination de ses intermédiaires, que loin d’évoquer un quelconque risque ou danger relatif à l’opération projetée, elle fonde sa démarche sur le pari affiché et revendiqué de la stabilité de la parité entre le franc suisse et l’euros en joignant un graphique qui retrace l’évolution de la parité arrêtée au 1er janvier 2007 ; qu’il est donc manifeste que la banque a, de volonté délibérée, trompé ses cocontractants afin de les déterminer à souscrire des opérations particulièrement complexes et dangereuses à l’appui d’informations inexactes, étant observé que M. Y. persistait à réaliser des études patrimoniales en euros afin de s’assurer la confiance de ses interlocuteurs pour finalement les déterminer à souscrire une offre de prêt lucrative pour lui-même et pour la Bnp mais parfaitement inconsidérée pour les emprunteurs.

L’appelante a prétendu que tant la Bnp Paribas personal Finance que M. Y. ont également manqué à leur devoir de mise en garde en s’abstenant de l’alerter sur le caractère inadapté de l’assurance souscrite pour un capital garanti de 141.566 euros correspondant au capital envisagé dans l’étude de M. Y., insuffisante à couvrir les risques de l’offre de prêt présentée par la banque.

Elle a soutenu par ailleurs que le prêt qui lui a été consenti en francs suisses est illicite au regard des dispositions de l'article L. 112-2 du Code monétaire et financier qui prohibe toute clause prévoyant des indexations fondées sur les prix des biens et services n’ayant pas de relation directe avec l’objet du statut ou de la convention ou avec l’activité de l’une des parties ; qu’or, il n’existe aucune relation directe entre le franc suisse et le financement d’un bien situé en France alors même que ni l’emprunteur ni le prêteur n’ont d’activité en Suisse et que le contrat est de droit purement interne.

Mme X. a prétendu enfin qu’elle subit un préjudice indéniable puisque le montant des mensualités qu’elle rembourse ne permet pas l’amortissement du capital qu’elle a emprunté lequel augmente au contraire ; que son préjudice résulte de la différence entre le capital qu’elle a amorti en août 2012 et celui qu’elle aurait amorti selon un prêt classique, soit la somme de 59.103,51 euros ; qu’on ne peut indemniser son préjudice en fonction d’une perte de chance au regard de la violation de l’obligation de bonne foi, de l’illicéité du prêt litigieux et du non-respect du délai de réflexion

Elle a ajouté que l’analyse réalisée par M. Y. s’est avérée erronée quant aux charges foncières de l’immeuble acquis, soit un différentiel de 1.068,12 euros par an entre les charges réelles et les charges évaluées dans l’étude ; que M. Y. dont le métier était d’effectuer un travail de projection afin de présenter l’analyse d’une situation future aussi exacte que possible s’est par ailleurs abstenu d’envisager le coût d’une assurance loyer ou le coût des charges de copropriété annuelle, le caractère facultatif de l’assurance ne le dispensant pas de l’envisager ; que la responsabilité de la banque est engagée à cet égard en sa qualité de mandante de M. Y.

Enfin, elle a fait état d’un préjudice moral lié au fait que le placement conseillé ne lui ayant pas permis d’envisager son avenir financier avec sérénité mais au contraire ayant entraîné un stress important et l’exposition de frais de change dont elle n’avait pas été informée.

 

La Sa Bnp Paribas Personal Finance a conclu à la confirmation du jugement entrepris, demandant à la cour de dire et juger qu'elle ne saurait être tenue à une quelconque astreinte s'agissait de la conversion du prêt Helvet Immo souscrit par Mme X., dire et juger qu'elle n'a pas failli à son devoir d'éclairer l’emprunteuse s'agissant de l'assurance qu’elle a souscrite, en tout état de cause, débouter Mme X. de l'intégralité de ses demandes et la condamner aux dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Sa Banque Paribas Personal Finance a exposé que le franc suisse est utilisé comme monnaie de compte et non comme monnaie de paiement, que cette clause de monnaie de compte, conformément à la jurisprudence constante, est en relation directe avec son activité d’établissement de crédit, de sorte que la clause d'indexation prévue au contrat de prêt est licite au regard des prescriptions de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier. Elle a ajouté que l’article L. 312-3-1 du code de la consommation issu de la loi du 26 juillet 2013, qui a soumis l’octroi des prêts internes en devises à certaines conditions n’a pas vocation à s’appliquer rétroactivement.

La Sa Bnp Paribas a soutenu par ailleurs que le prêt Helvet Immo n'est pas une opération spéculative, l'existence d'un risque de surcoût ou de gain ne permettant pas à lui seul de qualifier une opération comme telle ; que la clause de monnaie de compte est assimilable à une indexation exclusive de toute spéculation, le but étant de faire bénéficier Mme X. d'un taux d'intérêt pratiqué sur un marché plus compétitif avec un taux de change entre deux devises stables, permettant d'optimiser le rendement d'un investissement locatif en diminuant la part d'intérêt liée au financement par l'emprunt ; que mis en perspective avec l'opération principale, il est évident que le prêt Helvet immo n'a pas été souscrit dans le but de réaliser des gains sur la variation des cours en prenant un risque de perdre sa mise, mais de financer la constitution d'un patrimoine duquel l'emprunteur tire des revenus et exonérations fiscales. Elle a ajouté que le prêt n'est pas toxique et que l'emprunteur n'est pas lié de manière irrévocable à la monnaie de compte stipulée en francs suisse dans la mesure où il peut convertir son prêt en euros tous les 3 ans.

La banque a indiqué encore qu'elle ne pouvait prévoir l'évolution du taux de change ; qu’elle n’a pas délivré d'informations optimistes mais qu'elle a repris fidèlement l'évolution constatée sur les années précédentes ; que le fait d'avoir soumis l'emprunteur à un risque de change et de taux d'intérêt ne peut pas être assimilé à une faute qu'elle aurait commise, étant observé que la variation défavorable du taux de change, s’agissant des prêts remboursables en francs suisses, est compensée par une baisse du taux d'intérêt qui est aujourd'hui inférieur à celui prévu initialement dans l'offre de prêt.

Elle a prétendu que Mme X. fait une présentation fallacieuse des circonstances dans lesquelles elle a souscrit le prêt Helvet Immo, la prise de contact portant sur la réalisation d’un investissement à but fiscal matérialisé par l’acquisition d’un bien immobilier ou de parts de Scpi et la question du financement n’ayant été abordée que par la suite. Elle a exposé qu'aucune disposition légale n'oblige un établissement dispensateur de crédit à rencontrer physiquement un candidat à l'emprunt et que s’il est exact qu’elle met les apporteurs d’affaires en mesure d’appréhender les caractéristiques essentielles du prêt Helvet Immo et le cas échéant de les retranscrire aux investisseurs au moyen d’un discours adapté, elle n’est pas en mesure de leur donner des consignes particulières en ce sens, en l’absence de tout lien d’exclusivité et de subordination ; qu’on ne peut lui reprocher une quelconque instrumentalisation de la présentation faite par M. Y. alors qu’au moment où elle a été sollicitée pour émettre l’offre de prêt, elle ne savait pas s’il avait sollicité d’autres établissements bancaires dont il était le partenaire pour proposer d’autres prêts en euros ; qu’elle ne saurait donc être tenue pour responsable si les conseils de M. Y. n’ont pas été conformes aux attentes convenues entre celui-ci et Mme X. ; que pour sa part, elle a rempli les obligations qui étaient à sa charge en adressant à Mme X. une offre de prêt qui reprend de manière complète précise et détaillée les caractéristiques du prêt, l’emprunteur qui disposait du maintien des conditions de l’offre pendant une durée de 40 jours puis d’un délai de rétractation légale ayant toute latitude pour solliciter son intermédiaire en vue d’obtenir des informations complémentaires.

La Sa Bnp Paribas a fait valoir que Mme X., que la qualité d’emprunteur non averti ne dispensait pas de lire l’offre de prêt et de prendre connaissance des informations qui lui étaient fournies, est mal fondée à soutenir que le « document d'information » a altéré son consentement alors qu’il s’agit d’un document non contractuel, strictement réservé aux professionnels partenaires de la banque qui ne lui était pas destiné et dont elle ne démontre pas avoir été en possession ; qu’en tout état de cause, ce document d’information fait une présentation objective des caractéristiques du prêt Helvet Immo.

Elle a repris l’analyse du premier juge quant à la prescription de l'action en responsabilité sur le fondement des pratiques commerciales trompeuses, ajoutant que l’appelante ne distingue pas entre ses demandes délictuelles sur le fondement des pratiques commerciales trompeuses et ses demandes contractuelles sur le fondement du manquement aux obligations d'information et de mise en garde et qu’en vertu du principe du non cumul ou de non option des régimes de responsabilité sanctionné par la jurisprudence constante, l’article 1382 du code civil est inapplicable lorsqu’il s’agit d’une faute commise dans l’exécution d’une obligation résultant d’un contrat.

L’intimée a prétendu en tout état de cause que l’action en responsabilité délictuelle sur le fondement des pratiques commerciales trompeuses est mal fondée à son encontre alors que Mme X. met en cause le discours commercial tenu par l’intermédiaire et qu’elle ne démontre pas dans quelle mesure elle aurait pu être trompée lorsqu’elle a envisagé de souscrire le prêt Helvet Immo.

La Sa Bnp Paribas a également soutenu que son devoir de mise en garde se limitait au risque d'endettement excessif né du prêt consenti à l’exclusion des risques encourus de manière générale, qu’or Mme X., qui est à jour dans le règlement des mensualités, ne fait état d'aucun risque d'endettement excessif par rapport à ses capacités financières.

Elle a ajouté qu’ainsi que l’a exactement retenu le tribunal, elle a parfaitement respecté son obligation d'information quant au risque lié à la variation du taux de change ; que par ailleurs, Mme X. qui a souhaité souscrire une assurance facultative et extérieure, a négocié le montant de sa couverture sans l'intervention de la banque, ce montant ne constituant pas en outre une condition de l’octroi du prêt, ajoutant qu’en tout état de cause, le devoir d'éclairer à la charge de l'établissement de crédit prêteur ne porte pas que le montant de la couverture mais sur le type d'assurance à souscrire.

L’intimée a fait observer enfin, que Mme X. ne démontre pas la perte de chance de ne pas contracter ni l'existence d'un préjudice indemnisable.

 

M. Y. a conclu à la confirmation du jugement entrepris excepté en ce qu’il a retenu qu’il avait commis une faute à l'égard de Mme X. lors de la réalisation de son étude patrimoniale et l’a condamné au paiement des sommes de 9.613 euros et 1.500 euros à titre de dommages intérêts, concluant au rejet de l’intégralité des demandes de Mme X. ainsi qu’à sa condamnation aux entiers dépens et au paiement d’une somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. Y. a exposé qu’il n’a conclu aucun contrat avec Mme X. laquelle ne lui a versé aucune rémunération pour l’étude patrimoniale qu’il a réalisée, aux termes de laquelle il a préconisé un investissement en loi Scellier financé par un prêt classique sur 20 années, d’un montant de 141.500 euros au taux annuel fixe de 5 %, moyennant des échéances assurance comprise de 1033 euros après un différé total de 12 mois ; que cependant, Mme X. n’a pas donné suite à cette étude qui ne peut être considérée comme une phase précontractuelle au projet qui lui a été soumis directement par la Bnp Paribas Personal Finance et qu’elle a, en définitive, choisi, sans qu’il ait été consulté. Il a précisé qu’en sa qualité de simple prestataire de service dans le domaine patrimonial, il a mis en relation Mme X. avec la société Akeris Promotion qui proposait des investissements immobiliers et la société Bnp Paribas Personal Finance qui devait proposer le financement ; que Mme X., qui ne rapporte pas la preuve qu’elle l’aurait mandaté pour l’assister dans ses choix et l’aurait rémunéré pour ses conseils, ne peut rechercher sa responsabilité sur le terrain contractuel ; que sur le terrain délictuel, il lui appartient de démontrer qu’il aurait commis une faute, ce qu’elle ne fait pas.

M. Y. a souligné que la consultation produite en pièce n° 25 sur le fondement de laquelle Mme X. prétend engager sa responsabilité, a été rédigée par M. T. exerçant sous l'enseigne F., lequel à la date de son étude, n’exerçait pas dans le cadre d’une activité réglementée, ne présentait aucune des habilitations habituelles et ne disposait d'aucune qualification professionnelle reconnue par l'État, par un organisme public ou par un organisme privé lui permettant de rédiger des consultations juridiques au sens et dans les limites des articles 54 et suivants de la loi du 31 décembre 1971.

Il a fait valoir que Mme X., en souscrivant un emprunt en francs suisses, a choisi de ne pas suivre les préconisations qu’il lui avait faites dans son étude du 12 février 2009, qu’elle a fait ce choix en toute connaissance de cause puisqu’elle était parfaitement informée par la banque sur les risques liées au taux de change, notamment par le dossier remis avec l'offre de prêt du 15 avril 2009.

M. Y., rappelant que les articles L. 519-4-1, R. 519-2, R. 519-23, R. 519-26, R. 519-28, R. 519-30, cités par Mme X. n'existaient pas en 2009 et que seul l'article R. 341-16 était en vigueur au moment des faits, a fait valoir que la banque a refusé unilatéralement de faire droit à la demande de conversion de l'emprunt en août 2012, qu'elle a maîtrisé seule les informations transmises à Mme X. lors de la conclusion du crédit de sorte qu’il n’y a pas lieu, en toute hypothèse, à une condamnation in solidum.

L’intimé a soutenu qu’il ne saurait lui être reproché une erreur dans le calcul des charges foncières, alors que la souscription d’une assurance « loyers » a un caractère facultatif, qu’il n’est pas démontré que les charges de copropriété incombaient au seul copropriétaire et qu’en tout état de cause, il ne pouvait, lors de l’étude réalisée en février 2009, tenir compte des résultats du vote d'une assemblée générale des copropriétaires qui s’est tenue en septembre 2010 ; qu’en outre, le préjudice dont il est fait état n’est pas explicité.

Il a ajouté qu’il ne saurait être tenu à une obligation de résultat quant à la rentabilité finale de l'opération d'investissement réalisée sur une durée de 20 ans et soumise à de nombreux aléas, risques et décisions du propriétaire.

 

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 15 juin 2016.

Par arrêt en date 27 octobre 2016, la cour a ordonné la réouverture des débats en invitant Mme X. à s’expliquer sur la demande formulée dans ses dernières écritures tendant à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a enjoint, sous astreinte, à la banque de procéder à la conversion en euros du prêt qu’elle a souscrit, au regard du courrier officiel de renonciation à cette disposition en date du 4 février 2016.

Par écritures du 3 novembre 2016, Mme X. a repris les termes de ses dernières conclusions tendant notamment à la conversion par la banque de l’emprunt souscrit en euros.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Vu les conclusions déposées le 3 novembre 2016 par Mme X., le 23 mai 2016 par la Sa Bnp Paribas personal Finance et le 11 février 2016 par M. Y., auxquelles la cour se réfère expressément pur un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;

 

Sur la demande de conversion du prêt libellé en francs suisses en euros :

Attendu que l’offre de prêt acceptée par Mme X. stipule en page 9 que l’emprunteur a la faculté d’opter pour une monnaie de compte en euros tous les trois ans lors de la révision du taux, que l’emprunteur devra faire parvenir à la banque son choix entre un taux fixe en euros ou un taux révisable en euros, au plus tard trois mois avant la révision du taux du crédit intervenant tous les trois ans à compter du premier ou unique déblocage du crédit et que la banque s’engage à rappeler cette échéance à l’emprunteur par courrier ;

Attendu ainsi que l’a exactement rappelé le premier juge, qu’en l’espèce, la Sa Bnp Paribas Personal Finance a rappelé à Mme X., par courrier du 30 avril 2012, la possibilité qui lui était offerte, au 3ème anniversaire du 1er déblocage du crédit intervenant le 10 août 2012, d’opter pour une monnaie de compte en euros, soit selon un taux fixe en euros ou un taux révisable en euros, en lui laissant un délai jusqu’au 26 juillet 2012 pour faire connaître son choix ; que Mme X., par courrier du 16 juillet 2012, que la banque ne conteste pas avoir reçu, a sollicité la transformation de son prêt actuel en monnaie de compte en euros selon un taux fixe ;

Attendu qu’il y a lieu en conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a, au visa de l’article 1134 du code civil, enjoint à la Sa Bnp Paribas Personal Finance de procéder, sous astreinte, à la conversion du prêt souscrit par l’appelante dans une monnaie de compte en euros à taux fixe, avec effet rétroactif au 12 août 2012, les frais découlant de cette conversion, autres que les frais de change qui sont à la charge de l’emprunteur, étant mis à celle de la banque ;

Que l’astreinte prendra effet à compter du 15ème jour suivant la signification du présent arrêt ;

 

Sur la licéité du contrat de prêt :

Attendu qu’il sera observé que les dispositions de l’article L. 312-3-1 du code de la consommation issu de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013, abrogé à compter du 1er juillet 2016 par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et déplacé au nouvel article L. 313-64 qui en reprend les termes, selon lequel « les emprunteurs, personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels, ne peuvent contracter de prêts libellés dans une devise étrangère à l’Union européenne remboursables en monnaie nationale, que s’ils déclarent percevoir principalement leurs revenus ou détenir un patrimoine dans cette devise au moment de la signature du contrat de prêt excepté si le risque de change n’est pas supporté par l’emprunteur », ne peuvent trouver application au présent prêt, contracté le 28 août 2009 ;

Attendu conformément à la jurisprudence antérieure, que la stipulation d’une obligation en monnaie étrangère est licite dès lors que cette monnaie est prévue non comme instrument de paiement mais comme unité de compte, ce qui est le cas en l’espèce, l’offre de prêt acceptée par Mme X. le 15 avril 2009 réitérée par acte authentique du 28 août 2009, prévoyant expressément que le franc suisse constitue la monnaie de compte, l’euro constituant la monnaie de paiement et que le règlement des échéances par l’emprunteur devra être effectué nécessairement en euros pour ensuite être converti en francs suisses et permettre le remboursement du capital emprunté en francs suisses ;

Attendu que la fixation de la créance en monnaie étrangère est assimilée à une indexation déguisée dont la validité est subordonnée au respect des conditions de la réglementation des indexation telles qu’elles résultent de l’article L. 112-2 du code monétaire et financier lequel édicte que, dans les dispositions statutaires ou conventionnelles, est interdite toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n’ayant pas de relation directe avec l’objet du statut ou de la convention ou avec l’activité de l’une des parties ; que la relation directe est suffisamment caractérisée, le contrat fût-il purement interne, par la qualité de banquier de la Sa Bnp Paribas Personal Finance, dont l’activité porte notamment sur des opérations passées sur les marchés internationaux de devises pour assurer son approvisionnement en ressources financières ;

Qu’en l’espèce, le prêt stipulé en monnaie suisse, remboursable en euros, n’est donc pas soumis à la prohibition édictée par le texte précité ;

 

Sur l’existence de pratiques commerciales trompeuses :

Attendu en premier lieu, qu’il est constant que l’assignation déposée par Mme X. les 10 et 27 juin 2012 tendait à la mise en œuvre de la responsabilité contractuelle de la Sa Bnp Paribas Personal Finance et de M. Y. pour manquement à leurs obligations d’information, de mise en garde et de conseil et que ce n’est qu’aux termes de ses écritures déposées le 16 décembre 2014, qu’elle a invoqué au soutien de sa demande de dommages intérêts, la responsabilité de la banque et du conseiller en patrimoine pour infractions aux règles relatives aux pratiques commerciales trompeuses édictées par les articles L. 120-1 et L. 121-1 du code de la consommation recodifiés L. 121-1 et L. 121-1-1 ;

Qu’il sera toutefois observé que le comportement de la Bnp Paribas Personal Finance et de M. Y., qualifié de pratiques commerciales trompeuse, était déjà stigmatisé dans l’assignation au regard du manquement à leur devoir de mise en garde et de conseil, par Mme X., qui dénonçait les fautes professionnelles commises tant par la banque que par M. Y. consistant à lui avoir adressé une offre de prêt sans lien avec l’étude préalable, sans nouvelle étude et sans avertissement quant aux différences majeures entre l’offre proposée et l’étude, cette présentation trompeuse de la situation l’ayant conduite à se méprendre sur la portée de ses engagements ;

Or attendu, qu’il sera rappelé que si l’interruption de la prescription ne peut, en principe, s’étendre d’une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, quoique ayant des causes différentes, tendent à un seul et même but de sorte que la deuxième est virtuellement comprise dans la première ; que tel est le cas en l’espèce, la mise en œuvre par l’emprunteuse de la responsabilité de la banque et du conseiller en patrimoine pour manquement aux obligations contractuelles d’information, mise en garde et conseil ou pour pratiques commerciales déloyales tendant au même but, à savoir la réparation du préjudice subi du fait de la souscription du prêt litigieux, seul le fondement juridique différant ;

Que le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu’il a déclaré irrecevable comme prescrite la demande de Mme X. sur le fondement des articles L. 120-1 et L. 121-1 du code de la consommation, recodifiés L. 121-1 et L. 121-1-1 ;

Attendu que la demande est, en revanche, mal fondée ;

Attendu que selon l’article L. 121-1, anciennement L. 120-1, du code de la consommation, une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service ; que l’article L. 121-1-1, anciennement L. 121-1, précise qu’une pratique commerciale est trompeuse notamment lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service, notamment le prix ou le mode de calcul du prix ;

Qu’il est constant en l’espèce que M. Y. a établi, pour le compte de Mme X., un rapport concernant sa situation patrimoniale aux termes duquel il a préconisé un investissement dans le cadre du dispositif fiscal Scellier, financé par un prêt classique d’un montant de 153.600 euros au taux annuel fixe de 5 % ; qu’il a ensuite mis Mme X. en relation avec la Sa Bnp Paribas Personal Finance, avec laquelle il était lié par un contrat de mandat d’intermédiaire en opération de banque signé le 27 novembre 2006, prévoyant une rémunération en sa qualité d’apporteur d’affaires par une commission versée par la banque, égale à 1,30 % du capital emprunté ;

Attendu que la Sa Bnp Paribas Personal Finance a adressé directement à Mme X., l’offre de crédit litigieuse, dont les conditions étaient certes totalement différentes de celles du prêt préconisé par M. Y., s’agissant d’un prêt en francs suisses ;

Attendu en premier lieu, que Mme X. ne démontre pas que M. Y., comme elle l’allègue dans ses écritures, ne pouvait ignorer que la banque avec laquelle il la mettait en relation ne proposait que des prêts en francs suisses et que l’étude qu’il a réalisée pour son compte, en préconisant pour financer son investissement un prêt en euros au taux fixe était destinée à la tromper ; qu’elle ne rapporte pas davantage la preuve qu’elle avait mandaté M. Y. pour l’assister jusqu’à la signature du prêt ni qu’elle ait sollicité son avis quant à l’opportunité de souscrire le prêt proposé par la banque, de sorte qu’elle ne peut lui faire grief de ne pas l’avoir alertée sur la non-conformité de l’offre de prêt avec ses préconisations ;

Que par ailleurs, Mme X., qui a reçu de la Sa Bnp Paribas Personal Finance, ainsi qu’il sera développé ci-après, une information claire et complète concernant les caractéristiques du prêt en francs suisses qu’elle a accepté en connaissance de cause, ne peut soutenir que la faute conjuguée de la Sa Bnp Paribas et de M. Y. qui n’ont pas attiré son attention sur les modifications apportées par rapport au projet initial, ont altéré de manière substantiel son comportement économique en la conduisant à souscrire un prêt qu’elle n’aurait pas souscrit autrement, alors que les différences majeures existant entre le projet, s’agissant d’un emprunt en euros à taux fixe, et l’offre de prêt s’agissant d’un emprunt en francs suisses, étaient particulièrement flagrantes même pour un emprunteur non averti ;

Attendu enfin, que Mme X. affirme, sans l’expliciter, que le prêt souscrit présenterait un caractère spéculatif ; que cependant, la seule existence d’un risque lié à la volatilité du marché des change est insuffisante à qualifier de spéculatives les opérations litigieuses, dont le but poursuivi n’était pas de jouer sur la variation du taux de change afin d’obtenir un gain, mais de bénéficier sur 20 ans, pour réaliser une acquisition immobilière dans le cadre d’une opération de défiscalisation, d’un taux d’intérêt pratiqué sur un marché plus compétitif, avec un taux de change entre deux devises historiquement stables, l’évolution du taux à partir du début de l’année 2010, sans commune mesure avec celle connue précédemment ne constituant pas un événement prévisible ;

 

Sur la mise en œuvre de la responsabilité de la Sa Bnp Paribas Personal Finance pour manquement au devoir d’information, de conseil et de mise en garde :

Attendu que banquier dispensateur de crédit doit éclairer l’emprunteur sur les caractéristiques du prêt accordé ; qu’en particulier, s’agissant de l’octroi d’un prêt en francs suisses remboursable en euros et destiné à financer l’acquisition d’un bien immobilier, la Sa Bnp Paribas Personal Finance était tenue de donner à Mme X. une information complète, exacte et loyale quant à l’incidence des fluctuations du taux de change sur la durée et le montant des remboursements de sorte que l’offre soit acceptée en connaissance de cause ;

Attendu en l’espèce, que l’offre de prêt adressée qui lui a été adressée par la Sa Bnp Paribas Personal Finance le 15 avril 2009 mentionne :

- en page 1 « description de votre crédit », que le montant du crédit exprimé en francs suisses correspondant au montant du financement en euros de son projet et des frais de change relatifs à l’opération de change du montant du crédit en euros qui seront prélevés lors du déblocage des fonds au notaire,

- en page 2 « financement de votre crédit », que le crédit est financé par un emprunt souscrit en francs suisses sur les marchés internationaux de devises, ce qui permet à l’emprunteur de bénéficier du taux d’intérêt défini au contrat et que la gestion du crédit s’effectuera d’une part en francs suisses (constitué monnaie de compte) pour connaître à tout moment l’état de remboursement du crédit et d’autre part en euros (monnaie de paiement) pour permettre le paiement des échéances, la distinction entre monnaie de compte ; que dès réception de l’acceptation de l’offre, le prêteur ouvrira un compte interne en euros et un compte interne en francs suisses au nom de l’emprunteur pour gérer le crédit, ces comptes ne constituant pas des comptes de dépôt

- en page 3 « opérations de change », que le prêt, objet de l’offre, est un prêt en francs suisses ; que ne s’agissant pas d’une opération de crédit international, les versements au titre du prêt ne peuvent être effectués qu’en euros pour un remboursement en francs suisses ; qu’en conséquence, il est expressément convenu et accepté que les frais de change occasionnés par les opérations décrites font partie intégrante des règlements en euros et des opérations de changement de monnaie de compte, frais sans lesquels le prêt n’aurait pas été octroyé en francs suisses ; qu’en acceptant l’offre de crédit, l’emprunteur accepte les opérations de change de francs suisses en euros et d’euros en francs suisses nécessaires au fonctionnement et au remboursement du crédit tels que précisés au sein de l’offre ; que le montant du prêt, qui comprend les frais de change relatifs à l’opération de change du montant du crédit de francs suisses en euros est fixé selon le taux de change de 1 euro contre 1,5300 francs suisses, sur la base duquel est établi le tableau d’amortissement

- en page 5 « amortissement du capital », que l’amortissement du capital évoluera en fonction des variations du taux de change appliqué aux règlements mensuels après paiement des charges annexes du crédit, selon les modalités définies au paragraphe « opérations de change », étant précisé que :

S’il résulte de l’opération de change une somme inférieure à l’échéance en francs suisses exigible, l’amortissement du capital sera moins rapide et l’éventuelle part de capital non amorti au titre d’une échéance du crédit sera inscrite au solde débiteur du compte interne en francs suisses

S’il résulte de l’opération de change une somme supérieure à l’échéance en francs suisses exigible, l’amortissement du capital sera plus rapide de même que le remboursement du crédit

- également en page 5, qu’à chaque 3ème anniversaire du premier règlement au titre du crédit, le taux d’intérêt sera révisé et l’emprunteur en sera avisé un mois à l’avance ; que sur la base des sommes restant dues sur le compte en francs suisses, de la durée résiduelle initiale du crédit et du nouveau taux d’intérêt applicable, sera déterminé un nouveau montant d’échéance théorique en francs suisses ; que si le montant de ce règlement mensuel théorique est inférieur au règlement mensuel en euros précédemment payé, le montant des règlements en euros restera néanmoins inchangé, la durée du crédit étant raccordée et le remboursement étant plus rapide ; que si le montant de ce règlement mensuel théorique est supérieur au règlement mensuel en euros précédemment payé, le montant des règlements en euros restera également inchangé mais la durée du crédit sera allongée ; que néanmoins, si le maintien du montant des règlements en euros ne permettait pas de régler la totalité du solde du compte sur la durée résiduelle initiale majorée de 5 années, les règlements en euros seraient alors augmentés ;

Attendu que ces différents éléments sont repris en page 29 sous l’intitulé « Informations relatives aux opérations de change qui seront réalisées dans le cadre de la gestion du crédit », où il est rappelé que l’offre de prêt a été établie sur la base d’un taux de change de 1 euro contre 1,5300 franc suisse et que les variations éventuelles de ce taux de change au cours de la vie du crédit auront un impact sur son plan de remboursement ; que ces informations sont illustrées par deux exemples chiffrés de l’évolution du remboursement du crédit en fonction des variations, à la hausse et à la baisse, du taux de change ; qu’ainsi, il est souligné que dans l’hypothèse où à compter du 37ème règlement du crédit, le taux de change initial passe à 1euro contre 1,6100 francs suisses, la durée du crédit sera de 237 mois et le coût total du crédit de 63.405,01 euros assurance incluse ; que dans l’hypothèse inverse où le taux de change initial passe à 1 euro contre 1,4500 franc suisse, la durée totale du crédit sera de 270 mois et son coût total, assurance comprise, de 93.744,38 euros

Attendu ainsi, que l’offre de prêt et les documents annexés indiquent de manière neutre et parfaitement compréhensible que le prêt contracté est un prêt en francs suisses, que l’amortissement se fait par conversion des échéances fixes payées en euros et s’opérera selon un taux de change qui par essence et susceptible d’évoluer, que la variation du taux de change peut avoir une incidence sur la durée des remboursement et sur le montant des échéances et par conséquence sur la charge totale du remboursement du prêt ;

Que Mme X. qui a expressément reconnu aux termes du document intitulé « accusé de réception et acceptation de l’offre de crédit » revêtu de sa signature, qu’elle a pris connaissance de l’offre de crédit et de ses annexes qu’elle a reçues le 18 avril 2009 et qu’elle a été informée que le crédit comporte des opérations de change pouvant avoir un impact sur son plan de remboursement, a été ainsi informée clairement, précisément et complètement sur le risque de voir le coût total du crédit en euros, monnaie de paiement, augmenter par l’effet de l’allongement de la période de remboursement lié à une évolution défavorable du taux de change ; qu’elle avait à la lecture de l’offre, une vision précise de ce que pourrait être la charge réelle de son crédit puisqu’il est indiqué que la durée pourra être augmentée de 5 ans, ce qui constitue le plafond ;

Qu’il sera ajouté que l’ensemble des dispositions de l’offre de prêt concernant rapportées ci-dessus, a été repris dans l’acte de prêt reçu par Maître C. le 28 août 2009 ;

Que dès lors, ainsi que l’a exactement énoncé le premier juge, que Mme X., nonobstant l’absence de contact direct, n’est pas fondée à incriminer le manquement de la Sa Bnp Paribas Personal Finance à son devoir d’information sur le risque de variation du taux de change et son influence sur la durée du prêt et la charge totale du remboursement ;

Attendu que Mme X. n’est pas davantage fondée à soutenir que la banque, en opérant une simulation de la variation du taux de change, de plus ou moins 5 % par rapport au taux en vigueur au jour de la conclusion du prêt, alors que l’euros avait chuté de près de 15 % au cours des mois précédents, a délibérément minimisé le risque lié au change et qu’elle a manqué à son devoir de mise en garde en n’attirant pas spécialement son attention sur la réalité d’un tel risque ;

Attendu en premier lieu, que la notice d’information, ainsi qu’il est expressément indiqué, a un caractère informatif et non contractuel ; qu’elle n’engage pas le prêteur sur l’évolution du taux de change euros contre franc suisse et sur le taux d’intérêt du crédit, par conséquence, sur les durées, montant des règlements mensuels et coût totaux qui y sont mentionnés ;

Qu’il sera ensuite observé que le taux de change euros-franc suisse s’est établi à une moyenne de 1,548 pour l’année 2005, de 1,572 pour l’année 2006, de 1,642 pour l’année 2007, de 1,587 pour l’année 2008 et de 1,510 pour l’année 2009, soit une fluctuation d’environ 5 %, sans commune mesure avec le décrochage de l’euro par rapport au franc suisse constaté à compter de l’année 2010 ; que la banque fait justement valoir qu’elle n’était pas en mesure d’anticiper ce décrochage qui a participé d’une modification fondamentale de la conjoncture économique et a été la conséquence de la crise de la dette souveraine de certains pays de la zone euros, un tel évènement étant imprévisible ;

Attendu par ailleurs, que Mme X. ne rapporte pas la preuve que la banque aurait utilisé la stabilité du taux de change comme argument commercial, dans la volonté délibérée de la tromper ; que le document qu’elle produit au nombre de ses pièces, intitulé « le nouveau produit Bnp Paribas Invest Immo » et édité en mars 2008, qui présente le marché monétaire suisse comme durablement stable, est un document non contractuel, strictement réservé aux professionnels partenaires de Bnp Paribas Invest Immo ; que ce document, dont Mme X. ne soutient pas qu’il lui aurait été remis par la banque ou par M. Y., n’a pu influer sur son consentement ;

Attendu qu’il sera enfin rappelé que le banquier dispensateur de crédit qui ne peut s’immiscer dans les affaires de son client, n’est pas tenu de lui dispenser des conseils quant au choix du financement qui convient le mieux à sa situation ; que le premier juge a exactement retenu que Mme X. qui avait la faculté d’accepter ou de refuser l’offre de crédit qui lui était proposée, au regard de l’information complète et claire qui lui avait été fournie, ne pouvait faire grief à la Sa Bnp Paribas Personal Finance, en l’absence d’engagement particulier, de ne pas orienté son choix vers un autre financement ;

Attendu sur le manquement allégué de la banque au regard de l’assurance souscrite, qu’il sera rappelé que Mme X. a contracté volontairement une assurance facultative auprès de la société Aviva couvrant les risques décès perte totale et irréversible d’autonomie pour un capital garanti de 141.566 euros ;

Attendu que s’il est constant que le banquier est tenu d’éclairer l’emprunteur qui souscrit un crédit immobilier, sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle, il ne saurait en l’espèce, être fait grief à la Sa Bnp Paribas Personal Finance qui s’est assurée que l’emprunteuse avait contracté une assurance couvrant les risques décès perte totale et irréversible d’autonomie, de ne pas avoir vérifié que le montant de la garantie souscrite était adapté aux risques liés aux variations du taux de change ;

Que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté Mme X. de sa demande tendant à la mise en œuvre de la responsabilité de la Sa Bnp Paribas Personal Finance ;

 

Sur la demande dirigée contre M. Y. :

Attendu, ainsi qu’il a été développé plus haut et ainsi que l’a justement retenu le tribunal pour des motifs que la cour adopte, que M. Y., qui n’était lié contractuellement qu’à l’égard de la Sa Bnp Paribas Personal Finance en sa qualité d’intermédiaire en opérations de banque et qui n’était tenu au regard de la réglementation alors en vigueur, à aucun devoir de conseil ou d’accompagnement de Mme X. dans la mise en œuvre du financement dans laquelle il n’est pas intervenu, ne peut voir sa responsabilité engagée au titre d’un manquement à un devoir d’information ou de mise en garde tant au regard de la non-conformité de l’offre de crédit proposée par la banque par rapport à la proposition figurant dans son étude que concernant les risques particuliers liés aux variations du taux de change ;

Attendu que Mme X. soutient par ailleurs que l’analyse réalisée par M. Y. s’est avérée erronée quant aux charges foncières de l’immeuble acquis, soit un différentiel de 1.068,12 euros par an entre les charges réelles et les charges évaluées dans l’étude ; qu’il a en outre omis d’envisager le coût d’une assurance loyer ;

Attendu que l’étude réalisée par M. Y. et le projet qu’il a présenté à Mme X. le 12 février 2009, prévoyait, au titre des charges à déduire des revenus de l’opération, les taxes foncières et annexes à raison de 500 euros par an, indexée à 1 % à compter du 1er décembre 2009 (Mme X. bénéficiant d’une exonération de ces taxes pendant les deux premières années à hauteur de 50 %), des frais de gestion d’un montant égal à 10 % des loyers à compter du 1er décembre 2009, les primes d’assurance de 45 % par an, indexées à 1 % à compter du 1er décembre 2009, des charges diverses de 45 euros par an, indexées à 1 % à compter du 1er décembre 2009 ainsi que des charges non déductibles d’un montant annuel de 85 euros, indexées à 1 % à compter du 1er décembre 2009 ;

Attendu que Mme X. se prévaut de l’analyse effectuée le 2 juillet 2011 par le cabinet F. qui relève que les frais de gestion s’établissent en réalité à 9,57 % des loyers et qu’elle s’acquitte également de frais de gestion d’assurance, non prévus dans l’étude de M. Y., d’un montant de 109,80 euros par an et de cotisations d’assurance couvrant les loyers impayés, non prévues dans l’étude de M. Y., d’un montant de 1.329,77 euros par an, soit un surplus annuel de charges de 80,44 % par rapport à la simulation effectuée par M. Y. ;

Attendu que s’il ne peut être reproché à l’intimé de ne pas avoir tenu compte dans sa simulation, des frais d’assurance couvrant les loyers impayés, s’agissant d’une assurance facultative laissée à l’appréciation du propriétaire, en revanche, il lui incombait d’envisager, au nombre des charges venant en déduction de revenus de l’opération, les frais de gestion d’assurance ainsi que les charges de copropriété, ou à tout le moins, s’il n’était pas en mesure d’en faire une estimation, d’attirer l’attention de la future bailleresse sur l’existence de telles charges ; que le premier juge a exactement relevé à cet égard que le projet portait sur l’acquisition d’un bien immobilier, plus précisément d’un lot situé dans une résidence fonctionnant de toute évidence en copropriété, laquelle génère des charges obligatoires et incompressibles pour le propriétaire ;

Que le jugement sera confirmé en ce qu’il a considéré que M. Y. avait commis une faute en ne fournissant pas à Mme X. une information complète concernant les charges susceptibles de venir en déduction des revenus de l’investissement ;

Attendu toutefois, que le préjudice subi par l’appelante s’analyse en une seule perte de chance de ne pas avoir réalisé l’investissement proposé ;

Attendu qu’il y a lieu dans le souci du principe de la contradiction, d’inviter avant dire droit Mme X. à évaluer son préjudice et M. Y. à faire valoir ses observations ;

Attendu qu’il convient de réserver à statuer sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,

Déclare recevable l’appel formé par Mme X. contre le jugement rendu le 14 septembre 2015 par le tribunal de grande instance de Nancy ;

Confirme ce jugement en ce qu’il a condamné la Bnp Paribas Personal Finance à procéder à la conversion du prêt souscrit par Mme X. le 29 avril 2009 dans une monnaie de compte en euros, à taux fixe, avec effet rétroactif au 10 août 2012, sous astreinte provisoire de cents euros (100 euros) par jour de retard après ce délai pour une période de trois mois, dit que passé ce délai, il devra à nouveau être statué sur l'astreinte, dit qu’il appartiendra au juge de l'exécution de liquider l'astreinte, dit que les frais de change découlant de ce changement de monnaie de compte seront à la charge de l'emprunteur, dit que les autres frais pouvant résulter de cette opération resteront à la charge exclusive de la Sa Bnp Paribas ;

Dit que l’astreinte courra à compter du 15ème jour suivant la signification du présent arrêt ;

Confirme également le jugement entrepris en ce qu’il a :

- déclaré licite la clause d’indexation figurant au contrat de prêt souscrit par Mme X. le 29 avril 2009

- débouté Mme X. de ses demandes tendant à voir engager la responsabilité contractuelle de la Sa Bnp Paribas Personal Finance pour non respect du délai de réflexion prévu à l'article L. 312-10 du code de la consommation, pour manquement à ses obligations d’information, de mise en garde et de conseil

- débouté Mme X. de sa demande tendant à voir engager la responsabilité de M. Y. pour manquement à son devoir d’information et de conseil, à l’occasion de la souscription par Mme X. du prêt proposé par la Sa Bnp Paribas Personal Finance

- dit que M. Y. a commis une faute envers Mme X. lors de la réalisation de l’étude patrimoniale ;

Infirme ce jugement en ce qu’il a déclaré Mme X. irrecevable en sa demande dirigée contre la Sa Bnp Paribas Personal Finance et M. Y., fondée sur les articles L. 120-1 et L. 121-1 du Code de la consommation et statuant à nouveau sur ce point :

Déclare Mme X. recevable mais non fondée en ses prétentions et la déboute de sa demande de ce chef ;

Infirme également le jugement entrepris en ses dispositions concernant l’indemnisation du préjudice subi par Mme X. du fait de la faute commise par M. Y. lors de la réalisation de son étude patrimoniale, et statuant à nouveau sur ce point ;

Dit que le préjudice subi par Mme X. s’analyse en la perte de chance de ne pas avoir contracté l’investissement litigieux ;

Avant dire droit tous droits des parties réservés,

Invite Mme X. à évaluer son préjudice correspondant à la perte de chance et invite M. Y. à faire valoir ses observations ;

Renvoie à l’audience de mise en état du 3 mai 2017 ;

Réserve à statuer sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Le présent arrêt a été signé par Madame CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Monsieur Ali ADJAL, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,                   LE PRÉSIDENT,

Minute en vingt trois pages.