CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 17 mai 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6883
CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 17 mai 2017 : RG n° 14/18290
Publication : Jurica
Extrait : « Comme précédemment indiqué, la société PC Com ne peut contester l'existence même du réseau de franchise en soulignant qu'un seul autre franchisé en faisait partie, alors qu'elle en avait été informée par le DIP.
Le contrat de franchise précise que la redevance forfaitaire pour la formation initiale est versée en contrepartie de la concession de franchise, du droit d'utilisation des marques, du droit d'utilisation du savoir-faire et de la formation initiale, soit des éléments constituant du concept proposé par le franchiseur ; le fait que ce concept ait été développé par la société SM Com est indifférent dans la mesure où les droits de la société Presse Taux sur le concept ne sont pas contestés et qu'elle a été créée pour développer la franchise. Dès lors, la société PC Com ne peut soutenir que ce versement est intervenu sans contrepartie, au sens de l'article L. 442-6-I-1er du code de commerce, et le tribunal de commerce a justement rappelé que l'existence de mensualités à côté du droit d'entrée est courant dans les contrats de franchise. De même, la baisse du coût de la formation initiale, passée de 40.000 à 25.000 euros alors que le réseau se développait, ne peut suffire à démontrer qu'il s'agissait d'un « avantage manifestement disproportionné », ou sans contrepartie réelle reçue par la société PC Com.
La cour observe que la société PC Com était libre de conclure le contrat de franchise qu'elle a signé le 25 août 2011 par l'intermédiaire de son gérant Monsieur X., elle n'était pas liée avec la société Presse Taux, de sorte qu'il n'est pas démontré que celle-ci l'ait soumise ou tenté de la soumettre à des obligations déséquilibrées, ce qui suppose l'existence d'un certain rapport de dissymétrie entre les parties, alors que la société PC Com souligne que le réseau n'était constitué que d'un seul autre franchisé lorsqu'elle l'a rejoint. Par conséquent, sa demande présentée sur ce fondement ne saurait prospérer. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 4
ARRÊT DU 17 MAI 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/18290 (11 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 juillet 2014 -Tribunal de Commerce de LILLE - RG n° 13/05325.
APPELANTE :
SARL PC COM
ayant son siège social [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Florence G. de la SELARL P. - DE M. - G., avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, Ayant pour avocat plaidant Maître Bertrand C., avocat au barreau de LILLE
INTIMÉE :
SAS PRESSE TAUX DEVELOPPEMENT
ayant son siège social [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Marie-Catherine V. de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010, Ayant pour avocat plaidant Maître Rémi DE B. de la SCP D, M & D, avocat au barreau de PARIS, toque : P0052
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 8 mars 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Irène LUC, Présidente et Monsieur François THOMAS, Conseiller, chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Irène LUC, Présidente de chambre, Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère, Monsieur François THOMAS, Conseiller, rédacteur, qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François THOMAS dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile,
Greffier, lors des débats : M. Vincent BRÉANT
ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Irène LUC, Présidente et par Madame Julie PERRETIN, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DES FAITS :
La société Presse Taux Développement (ci-dessous, la société Presse Taux) promeut depuis début 2010 au travers d'un réseau de franchise un concept de courtage en prêt immobilier, prêt de restructuration et prêt professionnel.
La société PC Com est spécialisée dans le secteur d'activité de la négociation de crédits. Elle est gérée par Monsieur X.
Au cours de l'année 2011, Monsieur X. s'est rapproché de la société Presse Taux Développement afin d'intégrer son réseau de franchise.
Le 31 mai 2011, Monsieur X. a reçu un document d'information précontractuel contenant un prévisionnel.
Le 25 août 2011, la société en cours d'immatriculation représentée par Monsieur X. (la société PC Com, qu'il a constituée afin d'intégrer le réseau de franchise) a signé un contrat de franchise avec la société Presse Taux Développement.
La société PC Com ne parvenant à réaliser que 15,15 % du chiffre d'affaires prévu dans les comptes prévisionnels, considérant que ces derniers étaient grossièrement erronés et que le savoir-faire et la qualité de la formation faisaient défaut, a décidé d'agir en justice afin d'obtenir l'annulation du contrat de franchise.
Par assignation du 4 avril 2013, elle a saisi le tribunal de commerce de Lille Métropole afin d'obtenir le prononcé de la nullité du contrat de franchise pour dol, en toute hypothèse pour erreur, et aussi à raison du déséquilibre significatif ressortant du contrat de franchise.
Par jugement en date du 16 juillet 2014, le tribunal de commerce de Lille :
- a dit recevable mais mal fondée l'exception d'incompétence soulevée par la société Presse Taux Développement,
- a débouté la société Presse Taux Développement de son exception d'incompétence,
- s'est déclaré compétent pour trancher le litige,
- a débouté la société PC Com de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- a prononcé la résiliation du contrat de franchise à la date du 1er janvier 2013,
- a débouté la société Presse Taux Développement de sa demande reconventionnelle,
- a condamné la société PC Com à payer à la société Presse Taux Développement la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- a condamné la société PC Com aux entiers frais et dépens, taxés et liquidés à la somme de 81,12 euros en ce qui concerne les frais de greffe.
La cour est saisie de l'appel interjeté par la société PC Com le 3 septembre 2014.
Par conclusions du 2 février 2017, la société PC Com demande à la cour de :
- confirmer la décision déférée en ce que le tribunal de commerce de Lille Métropole s'est déclaré compétent pour connaître du litige,
- infirmer la décision en toutes ses autres dispositions,
et statuant à nouveau,
Vu les dispositions des articles 1109, 1110 et 1116 du code civil,
Vu les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce,
- prononcer la nullité du contrat de franchise liant les parties,
- débouter la société Presse Taux développement en toutes ses demandes, fins et conclusions,
subsidiairement,
Vu les dispositions des articles 1134, 1184 et 1315 du code civil,
- prononcer la résolution du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Presse Taux Développement avec effet au 1er janvier 2013,
- débouter la société Presse Taux Développement en toutes ses demandes, fins et conclusions,
Et en toute hypothèse,
- condamner la société Presse Taux Développement à restituer à la société PC Com la somme de 66 .201,77 euros,
- la condamner au paiement de la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudices commercial et moral réunis,
- la condamner au paiement de la somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL P. De M. G., Avocats aux offres de droit.
Par conclusions du 24 janvier 2015, la société Presse Taux demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société PC Com de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et a condamné cette dernière à payer à la société Presse Taux Développement la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat de franchise à la date du 1er janvier 2013,
- faisant droit à l'appel incident,
- réformant le jugement, dire et juger que la résiliation du contrat de franchise est intervenue aux torts exclusifs de la société PC Com,
- condamner la société PC Com à payer à la société Presse Taux Développement la somme de 15.000 euros à titre d'indemnité pour manque à gagner du fait de la résiliation anticipée du contrat de franchise,
en tout état de cause,
- condamner la société PC Com à payer à la société Presse Taux Développement la somme de 80.00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société PC Com aux dépens et autoriser Maître V. à en poursuivre le recouvrement conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture est intervenue le 14 février 2017.
La société Presse Taux a déposé des écritures en réplique le 18 février 2017, postérieurement à l'ordonnance de clôture, tout en sollicitant la révocation de celle-ci.
Le 24 février 2017, la société PC Com a sollicité le rejet des débats des conclusions de l'intimé notifiées postérieurement à l'ordonnance de clôture et a conclu au rejet de la demande de révocation de l'ordonnance de clôture.
Le 8 mars 2017, la société Presse Taux a signifié de nouvelles conclusions.
Aucune demande de report de l'ordonnance de clôture n'ayant été déposée entre le 2 février 2017 et le 14 février 2017, date de l'ordonnance de clôture, et ce délai apparaissant suffisant pour permettre à la société Presse Taux d'intégrer des éléments de réponse aux dernières conclusions de la société PC COM, signifiées 12 jours avant l'ordonnance de clôture, il ne sera pas fait droit à la demande de révocation de l'ordonnance de clôture, et les conclusions et pièces postérieures seront écartées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIVATION :
La cour constate que la compétence du tribunal de commerce de Lille n'est plus contestée par aucune des parties.
Sur la nullité du contrat de franchise pour dol :
La société PC Com soutient que le prévisionnel transmis par le franchiseur, quand bien même celui-ci ne serait pas obligatoire, doit être établi de façon sérieuse et sincère, et que celui qui lui a été transmis était grossièrement erroné aux seules fins de tromper le candidat à la franchise, ce qui constitue des manœuvres dolosives. Elle reproche également au provisionnel de ne pas tenir compte de la situation particulière du franchisé et de ses compétences, Monsieur X. n'ayant aucune expérience dans le domaine du courtage de crédits.
Elle estime que la société Presse Taux s'est rendue coupable de réticence dolosive, en lui cachant l'incidence de la loi du 22 octobre 2010 obligeant les intermédiaires en opération bancaire de justifier d'une formation spécifique de 150 heures à défaut d'expérience professionnelle, et souligne qu'elle n'a reçu aucune proposition de formation complémentaire en adéquation avec la loi de la part de son franchiseur.
Enfin, elle avance que le savoir-faire dont se prévaut le réseau Presse Taux est artificiel en l'absence d'éléments secrets, substantiels et personnels.
La société Presse Taux Développement soutient que le provisionnel fourni n'était nullement erroné ou trompeur au regard des résultats des autres membres du réseau ; elle estime avoir fait preuve de prudence dans l'établissement du prévisionnel, et que les résultats réalisés par son franchisé ne sont dus qu'à sa seule gestion et à son manque d'implication dans l'activité objet de la franchise.
Elle ajoute que son savoir-faire est réel, original, substantiel et identifié au travers d'un manuel opératoire dont les franchisés ont vanté l'efficacité. Elle affirme que sa formation est consistante et en conformité avec la loi du 22 octobre 2010 obligeant les intermédiaires en opération bancaire à justifier d'une formation spécifique à défaut d'expérience professionnelle, soutient avoir rempli l'ensemble de ses engagements de franchiseur, et que la société PC Com est infondée à arguer de la nullité de son contrat dont il lui appartenait de faire produire son plein et entier effet.
Sur ce
En application des dispositions des articles 1108 et 1109 du code civil, le consentement de la partie qui s'oblige est une condition essentielle de la validité d'une convention et il n'y a point de consentement valable si ce consentement a été surpris par dol ; l'article 1116 du même code dispose que le dol est une cause de nullité lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté, qu'il ne se présume pas et qu'il doit être prouvé.
L'article L. 330-3 du code de commerce dispose que « toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque, ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document contenant des informations sincères, qui lui permettent de s'engager en connaissance de cause. Ce document dont le contenu reste fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités ».
L'article R. 330-1 du même code contient une liste des informations qui doivent être contenues dans ce document.
Au vu de la combinaison des articles L. 330-3 et R. 330-1 du code de commerce, le manquement à l'obligation d'information pré contractuelle prévue à l'article L. 330-3 n'entraîne la nullité du contrat de franchise que s'il a eu pour effet de vicier le consentement du franchisé.
Comme l'indique la société PC Com, les articles précités n'imposent pas au franchiseur de communiquer au futur franchisé un prévisionnel, mais lorsque le franchiseur verse un document prévisionnel au titre de l'information pré-contractuelle, les informations qu'il contient doivent être sincères et établies sérieusement.
Le DIP reçu par Monsieur X. le 31 mai 2011 précise que la société Presse Taux Développement a été immatriculée le 16 février 2010 et son annexe 5 « liste des franchisés » ne fait apparaître qu'un nom, de sorte que le futur franchisé ne pouvait ignorer qu'il participait à la constitution du réseau qui était alors très récemment constitué.
Par ailleurs, si la société PC Com soutient que l'étude de marché versée dans le DIP est lacunaire, en ne précisant pas l'état de la concurrence sur la zone d'implantation et en ne fournissant pas d'éléments sur son dynamisme économique, il revient également au franchisé de procéder lui-même à une analyse d'implantation précise lui permettant d'apprécier le potentiel et, par là, la viabilité du fonds de commerce qu'il envisage de créer.
Un tel manquement à l'obligation pré-contractuelle d'information qui reposait sur le franchiseur ne peut suffire à caractériser le dol pour défaut d'information, si ne s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante qu'il aurait provoqué.
La société PC Com reproche une présentation exagérément optimiste dans ce document, qui indique un chiffre d'affaires pour la 1ère année de 154.000 euros pour 56 affaires traitées, alors qu'elle n'aurait réalisé lors de son premier exercice qu'un chiffre d'affaires de 36.440 euros pour 10 affaires traitées, soit un pourcentage de 15,15 % du prévisionnel annoncé.
Si le DIP contenait une « simulation de comptes prévisionnels », la cour relève que figurait, dans un encart en tête de cette simulation, l'indication suivante :
« Attention : il ne s'agit là que d'une simple simulation. Il appartient au candidat à la franchise, comme tout entrepreneur, de réaliser ses propres prévisionnels en vue de se décider en toute connaissance de cause »
de sorte que l'attention du futur franchisé était appelé à considérer ces comptes avec prudence.
La société PC Com justifie par les bilans de la société SM COM, société créée en 2004 qui mettait en œuvre le savoir-faire de la société Presse Taux, qu'elle a dégagé en 2008 un résultat de 189.000 euros, en 2009 de 346.000 euros, en 2010 de 307.000 euros, et que son chiffre d'affaires était en 2008 de 1.252.000 euros, en 2009 de 1.405.000 euros, en 2010 de 1.399.000 euros.
Si la cour observe que ces chiffres ne correspondent pas strictement aux trois premières années de la société SM COM, ils correspondent aux résultats de cette société dans les premières années de son exploitation, et sont supérieurs aux résultats et chiffres d'affaires présentés dans la simulation de comptes prévisionnels pour les trois premières années d'exercice figurant au DIP, la société Presse Taux expliquant avoir appliqué une décote de près de 20 % sur la marge moyenne par dossier et sur le nombre de dossiers traités.
La société DL Com, autre franchisé immatriculé en août 2010 et implanté à [ville B.], a réalisé un chiffre d'affaire de 166.180 euros au cours de son 1er exercice, et de 211.130 euros pour le 2ème exercice, plus proches du prévisionnel fourni à la société PC Com puisque les résultats atteints pour la 1èreannée étaient supérieurs.
De même, le franchisé installé à [ville A.] a réalisé un chiffre d'affaires pour la 1ère année de 215.000 euros (exercice clos le 30 juin 2013), alors que le prévisionnel était également de 154.000 euros.
Il s'en suit que des franchisés installés dans la même zone géographique, ou dans une zone proche, ont, au cours de la même période, dépassé les chiffres figurant au prévisionnel fourni par la société PC Com ou s'en sont approchés beaucoup plus que la société PC Com, quand bien même les données figurant au prévisionnel concernaient la société SM Com dans laquelle le concept de la franchise a été développé.
Le fait que le prévisionnel n'ait pas précisé les conditions dans lesquelles les chiffres qu'ils présentent ont été déterminés, et qu'ils étaient fondés sur ceux réalisés par la société SM Com, ne saurait constituer un manquement du franchiseur ni démontrer que les données du prévisionnel n'étaient pas réalistes.
L'existence d'un écart entre le prévisionnel et le résultat obtenu ne suffit pas à démontrer l'irréalisme du prévisionnel, et il appartenait à la société PC Com de le compléter avec les données locales.
De même, si la société PC Com fait état de l'inexpérience de son gérant dans le domaine du courtage, elle ne peut en tirer argument pour soutenir qu'il était dans l'incapacité d'apprécier la faisabilité du projet, alors qu'il lui revenait de procéder lui-même à une analyse d'implantation précise lui permettant d'apprécier le potentiel et, par là, la viabilité du fonds de commerce qu'il envisageait de créer, ce qu'il n'a pas réalisé.
La cour relève que le curriculum vitae de Monsieur X. révèle une longue expérience dans la relation avec la clientèle, qu'il y mettait en avant notamment sa capacité à la définition tant d'une stratégie commerciale adaptée aux besoins de ses clients que d'actions pour accroître la performance, et qu'il avait travaillé dans deux secteurs d'activité différents.
Ainsi, Monsieur X., qui avait été gérant d'une autre société, disposait d'une expérience commerciale certaine et pouvait, comme entrepreneur, réaliser ses propres prévisionnels et analyse du marché.
S'agissant du grief tiré par la société PC Com du défaut d'information du franchiseur sur la loi du 22 octobre 2010 obligeant les intervenants en opérations bancaires à justifier d'une formation spécifique, le seul courriel d'un franchisé adressé à l'animateur du réseau et aux autres membres de celui-ci ne saurait établir que Monsieur X. n'en avait pas été informé avant.
Le contrat de franchise prévoyait une possibilité de formation complémentaire, et la société PC Com ne conteste pas que le décret d'application de la loi précité n'avait pas été publié lors de la signature du contrat de franchise, de sorte que l'absence de mention de cette loi dans ce contrat ne peut révéler une négligence fautive de la société Presse Taux, et que dans ces conditions, le défaut d'information du franchisé sur une future formation en vue d'obtenir un agrément ne saurait caractériser une manœuvre dolosive.
La société Presse Taux Développement justifie que ses franchisés ont obtenu l'agrément nécessaire par l'ORIAS, soit le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance, agrément délivré après la formation spécifique ; aussi, la société PC Com ne peut soutenir qu'elle a dû cesser toute activité au début 2013 du fait de la carence du franchiseur, ou que celui-ci l'a empêchée de bénéficier de la formation exigée par la loi, alors que les autres franchisés ont vu leur agrément délivré après l'assignation.
L'appelante ne peut d'avantage avancer que les autres franchisés auraient bénéficié d'une formation spécifique qu'elle n'aurait pas reçue car ils se seraient engagés postérieurement, alors que le premier franchisé du réseau en a aussi bénéficié, ce d'autant que -comme l'ont relevé les premiers juges - le franchiseur a un intérêt à la réussite, et donc à l'agrément, des franchisés.
S'agissant du savoir-faire, la société PC Com soutient que le « book » qui lui a été remis est constitué de documents provenant de sources tierces, dénué de réponse à ses demandes et insusceptible de constituer un savoir-faire, qu'il ne contient aucune information sur l'état de son réseau, le nombre de franchisé ou les perspectives de développement. Elle souligne que la communication d'un savoir-faire doit intervenir dès la conclusion du contrat.
Cependant, si le « book » remis à l'issue de la formation (pièce 2 appelante) contient des documents émanant de tiers, il est de nature à aider le franchisé dans l'exercice de son activité, et le franchisé disposait ainsi d'un document lui permettant d'acquérir immédiatement des connaissances utiles qu'il n'aurait pu acquérir autrement que dans un temps beaucoup plus long.
Par ailleurs, la société PC Com ne peut soutenir utilement que l'intimée entretient une confusion entre le savoir-faire de la société originelle SM Com et la société Presse Taux, animatrice du réseau de franchise, alors que la société Presse Taux justifie de la réussite de franchisés et produit notamment deux courriels émanant de franchisés faisant état de leur satisfaction quant à la formation reçue, ou imputant leurs résultats au soutien reçu (pièces 18 et 19 intimée).
Il sera enfin relevé que la société Presse Taux produit aussi un document portant la mention « formation 2011 », mais la société PC Com conteste l'avoir reçu, comme elle soutient que les documents 38 de l'intimée (portant sur la formation initiale de Monsieur X.) et 42 (travail de la tête de réseau à l'époque de l'implantation de Monsieur X.) sont des documents internes contenant des observations a posteriori constituées pour les besoins de la cause.
Comme il a précédemment indiqué, le DIP révélait que le réseau était en phase de lancement et contenait les coordonnées de l'autre franchisé, au jour où Monsieur X. a signé le contrat de franchise pour la société PC Com, de sorte que l'appelante était informée de l'état du réseau et du nombre de franchisés. Elle ne peut utilement faire état de propos tenus par le représentant de la société Presse Taux lors d'un « salon virtuel de la franchise » pour caractériser un défaut de transmission de savoir-faire, d'autant que ce représentant n'indique pas de chiffres dans la pièce versée par l'appelante, contrairement à ce qu'elle prétend.
Si la société PC Com relève que la société Presse Taux ne lui a pas durant l'exécution du contrat adressé des griefs quant au respect de ses obligations, la cour observe que l'appelante ne justifie pas de son côté avoir alors adressé à la société PC Com de reproches quant à l'ineffectivité du savoir-faire transmis.
Il ressort des éléments fournis que la société PC Com a reçu un document à l'issue de sa formation initiale, a été accompagné sur le terrain (au moins en janvier 2013, voir sa pièce 26), et que la méthode dispensée par la société Presse Taux dans le cadre de son contrat de franchise a été reconnue par certains franchisés faisant état de leur développement.
Dès lors, le dol n'apparaît pas caractérisé, et il ne sera pas fait droit à la demande présentée à ce titre par la société PC Com.
Sur la nullité du contrat de franchise pour erreur sur la substance :
La société PC Com considère que l'erreur sur les prévisions porte sur la substance même du contrat et doit entraîner l'annulation du contrat de franchise.
La société Presse Taux Développement soutient que le provisionnel fourni n'était nullement erroné ou trompeur au regard des résultats des autres membres du réseau et estime même avoir fait preuve de prudence dans l'établissement du prévisionnel.
Sur ce
Cependant, et comme précédemment relevé, la société DL Com sise à Béthune, franchisée de la société Presse Taux, a réalisé un chiffre d'affaire au cours de son 1er exercice supérieur au montant de 154.000 euros contenu dans le prévisionnel indiqué dans le DIP remis à la société PC Com, et à la même époque.
Un autre franchisé sis à Arras a réalisé un chiffre d'affaires au cours de son 1er exercice de 215.000 euros (exercice clos le 30 juin 2013), alors que son prévisionnel était aussi de 154.000 euros.
Ainsi, ces deux franchisés ont, au cours de la même période et dans une zone géographique identique ou limitrophe, dépassé les chiffres figurant à leur prévisionnel, à tout le moins réalisé des chiffres d'affaires beaucoup plus en concordance avec ceux figurant dans leur prévisionnel qui étaient les mêmes que ceux de la société PC Com.
Dès lors, la société PC Com ne peut déduire de l'écart important entre ses résultats et le prévisionnel l'existence d'une erreur sur la substance de son engagement.
Il y a donc lieu de confirmer le jugements entrepris en ce qu'il a débouté la société appelante de sa demande d'annulation du contrat de franchise.
Sur la nullité du fait du déséquilibre significatif :
La société PC Com soutient que le contrat de franchise est affecté d'un déséquilibre significatif, en violation de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, en raison de l'obligation qu'elle avait de verser un droit d'entrée et de l'obligation qu'avait le franchisé de consacrer l'intégralité de son temps à l'exploitation de la franchise alors même qu'en tant que commerçant indépendant, il est sensé jour d'une totale liberté d'agir et d'entreprendre, et ce, sans aucune contrepartie.
Elle souligne le fait que ce n'est pas la société Presse Taux mais la société SM Com qui est à l'origine du concept et a investi les moyens pour sa mise en œuvre, et conteste le fait de régler à la fois une redevance forfaitaire initiale et des redevances mensuelles proportionnelles à son chiffre d'affaires, d'autant que s'agissant de la redevance initiale elle devrait être versée avant toute formation et transmission d'un savoir-faire. Elle souligne que le droit d'entrée versé par les nouveaux franchisés est inférieur à celui dont elle s'est acquittée.
La société Presse Taux Développement soutient que, outre le fait que le contrat de franchise n'est nullement entaché d'un déséquilibre significatif, l'article L. 442-6 du code de commerce ne saurait servir de fondement à l'annulation ou à la résolution d'un contrat mais simplement à engager sa responsabilité, ce que ne cherche pas à faire la société PC Com.
Elle ajoute que le paiement d'un droit d'entrée est insusceptible de révéler un déséquilibre significatif, et que la volonté de Monsieur X. de mener plusieurs activités en parallèle l'empêchait de connaître le succès.
Sur ce
L'article L. 442-6 du code de commerce indique
« Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
1° d'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu...
2° de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; ».
Comme précédemment indiqué, la société PC Com ne peut contester l'existence même du réseau de franchise en soulignant qu'un seul autre franchisé en faisait partie, alors qu'elle en avait été informée par le DIP.
Le contrat de franchise précise que la redevance forfaitaire pour la formation initiale est versée en contrepartie de la concession de franchise, du droit d'utilisation des marques, du droit d'utilisation du savoir-faire et de la formation initiale, soit des éléments constituant du concept proposé par le franchiseur ; le fait que ce concept ait été développé par la société SM Com est indifférent dans la mesure où les droits de la société Presse Taux sur le concept ne sont pas contestés et qu'elle a été créée pour développer la franchise.
Dès lors, la société PC Com ne peut soutenir que ce versement est intervenu sans contrepartie, au sens de l'article L. 442-6-I-1er du code de commerce, et le tribunal de commerce a justement rappelé que l'existence de mensualités à côté du droit d'entrée est courant dans les contrats de franchise.
De même, la baisse du coût de la formation initiale, passée de 40.000 à 25.000 euros alors que le réseau se développait, ne peut suffire à démontrer qu'il s'agissait d'un « avantage manifestement disproportionné », ou sans contrepartie réelle reçue par la société PC Com.
La cour observe que la société PC Com était libre de conclure le contrat de franchise qu'elle a signé le 25 août 2011 par l'intermédiaire de son gérant Monsieur X., elle n'était pas liée avec la société Presse Taux, de sorte qu'il n'est pas démontré que celle-ci l'ait soumise ou tenté de la soumettre à des obligations déséquilibrées, ce qui suppose l'existence d'un certain rapport de dissymétrie entre les parties, alors que la société PC Com souligne que le réseau n'était constitué que d'un seul autre franchisé lorsqu'elle l'a rejoint.
Par conséquent, sa demande présentée sur ce fondement ne saurait prospérer.
Sur la demande subsidiaire en résiliation du contrat de franchise présentée par la société PC Com :
La société PC Com soutient qu'aucun des critères du contrat de franchise, soit la concession d'un savoir-faire secret, substantiel et identifié, ainsi qu'une assistance lors de l'exécution du contrat de franchise afin de permettre au franchisé de se développer, n'était rempli.
Elle dénonce un défaut d'assistance et de formation, conteste la transmission d'un véritable savoir-faire, et soutient que le choix de son emplacement a nécessairement été validé par le franchiseur.
Sur ce
Comme il a été déjà indiqué, la société PC Com n'a pas démontré que la société Presse Taux avait failli ou l'avait trompée s'agissant de la transmission d'un savoir-faire, contrepartie dans le contrat de franchise du paiement des redevances par le franchisé.
La société PC Com a reçu du franchiseur une formation puisqu'elle indique qu'à l'issue lui a été délivré un certificat d'aptitude, que lui a aussi été remis un « book » (sa pièce 2) ; par ailleurs, l'organisation d'une tournée auprès de la clientèle est de nature à lui permettre d'acquérir du franchiseur son savoir-faire du franchiseur.
Elle ne justifie pas d'une carence de la société Presse à son obligation de conseil lors du choix de son emplacement et ne peut se limiter à soutenir qu'il ne s'agissait pas d'un emplacement économiquement viable et tirer de conclusions de l'absence d'implantation d'un nouveau franchisé Presse Taux jusqu'en août 2016.
Aussi, faute de démonstration de la réalité de ces griefs, de défaut de formation et d'assistance, la société PC Com sera déboutée de sa demande.
Sur la demande reconventionnelle en résiliation du contrat de franchise aux torts de la société PC Com :
À titre reconventionnel, la société Presse Taux sollicite de la cour qu'elle prononce la résiliation du contrat de franchise aux tort exclusifs de la société PC Com et demande la condamnation de la société PC Com au paiement d'une somme de 15.000 euros à titre d'indemnité pour manque à gagner en redevances du franchiseur, par rapport aux années restant à courir jusqu'à l'arrivée du terme du contrat.
La société PC Com s'y oppose en soutenant qu'aucune faute ne peut lui être reprochée et que le non-respect par la société Presse Taux de ses obligations l'a mise dans l'impossibilité de poursuivre son activité de franchisé. Elle relève que la société Presse Taux ne lui a adressé aucune demande jusqu'alors, et ne justifie pas du chiffrage qu'elle sollicite.
Sur ce
Il ressort des éléments que la société PC Com a délivré l'assignation introductive d'instance le 4 avril 2013 en sollicitant la nullité du contrat de franchise, manifestant ainsi sa volonté de cesser son exploitation.
L'article 10-2 du contrat de franchise prévoyant la possibilité pour le franchiseur de résilier le contrat notamment « en cas d'inexécution ou de manquement du franchisé à l'une quelconque de ses obligations, ou en cas d'agissement du franchisé de nature à porter un préjudice au franchiseur », et la société PC Com indiquant dans ses conclusions qu'elle a arrêté au 15 janvier 2013 son activité de franchisé, la société PC Com paraît à l'origine de la résiliation du contrat de franchise.
L'article 10-3 du contrat prévoit qu’« en cas de rupture du contrat pour faute, aux torts du franchisé, ce dernier versera au franchiseur une somme calculée sur le manque à gagner en redevances du franchiseur, par rapport aux années à courir jusqu'à l'arrivée du contrat » ; cependant, et comme le tribunal de commerce l'a justement relevé, la société Presse Taux n'a pas fait état de ses griefs à l'encontre de la société PC Com dans les formes expressément prévues au contrat, soit l'envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception non suivie d'effet dans un délai de quinze jours.
Elle n'a pas davantage adressé de facture à la société PC Com, et ne justifie aucunement du calcul de la somme de 15.000 euros qu'elle sollicite.
Au vu de ce qui précède, le contrat sera résilié aux torts de la société PC Com, mais il ne sera pas fait droit à la demande d'indemnité de la société Presse Taux au titre du manque à gagner.
Sur les autres demandes :
La société PC Com, succombant au principal, sera condamnée au paiement des dépens.
Elle sera également condamnée au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole du 16 juillet 2014, en ce qu'il a débouté la société PC Com de toutes ses demandes,
REÇOIT la demande de la société Presse Taux en sa demande tendant à voir prononcer la résiliation du contrat de franchise aux torts de la société PC Com,
DÉBOUTE la société Presse Taux de sa demande d'indemnisation du fait de la résiliation anticipée,
CONFIRME le jugement en toute ses autres dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE la société PC Com au paiement des dépens, et autorise Maître V. à en poursuivre le recouvrement conformément à l'article 699 du code de procédure civile
CONDAMNE la société PC Com au paiement à la société Presse Taux d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente
Julie PERRETIN Irène LUC