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TI ORLÉANS, 10 juin 2003

Nature : Décision
Titre : TI ORLÉANS, 10 juin 2003
Pays : France
Juridiction : Orleans (TI)
Demande : 11-02-000928
Décision : 10106/03
Date : 10/06/2003
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 10/07/2002
Décision antérieure : CA ORLÉANS (ch. civ.), 13 décembre 2004
Numéro de la décision : 10106
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 689

TI ORLEANS, 10 juin 2003 : RG n° 11-02-000928 ; jugement n° 10106/03

(sur appel CA Orléans (ch. civ.), 13 décembre 2004 : RG n° 03/02583 ; arrêt n° 1556)

 

Extrait : « En ce qui concerne Melle Y., il convient de rappeler que le bail qu'elle a signé stipulait expressément que les preneurs étaient « soumis solidairement entre eux, à l'égard du bailleur du paiement de tous les loyers, charges et taxes qui seront dus en application des présentes ainsi qu'à toutes les obligations leur incombant en vertu du présent contrat. Précision étant faite que la présente solidarité expressément stipulée comme condition substantielle et déterminante du consentement du bailleur, oblige les preneurs ci-dessus qui acceptent de manière à ce que chacun soit obligé à l'égard du bailleur pour la totalité, quand bien même un des copreneurs viendrait à quitter les lieux loués, il n'en demeurera pas moins solidaire du paiement des sommes ci-dessus pendant un délai de 5 ans à compter de son départ des lieux dûment constaté par le bailleur. »

Melle Y. soutient en premier lieu que cette clause doit être qualifiée d'abusive et en conséquence réputée non écrite en application de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, en ce qu'elle l'obligerait à continuer à payer un loyer sans bénéficier d'aucune contrepartie. Cependant, son obligation trouve sa contrepartie dans le maintien dans les lieux de l'autre preneur. En outre, elle se trouve limitée dans le temps. Elle n'apparaît donc pas abusive. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL D’INSTANCE D’ORLÉANS

JUGEMENT DU 10 JUIN 2003

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n°11-02-000928.

COMPOSITION DU TRIBUNAL : PRÉSIDENT : Madame PORTMANN.

GREFFIER : Madame MOREAU.

 

DEMANDEUR (S) :

SA HLM FRANCE LOIRE

dont le siège est [adresse], représenté(e) par la SCP LE METAYER CAILLAUD CESAREO BONHOMME, avocat du barreau de Orléans

 

DÉFENDEUR (S) :

Monsieur X.

[adresse], non comparant

Mademoiselle Y.

[adresse] - chez sa mère, représenté(e) par la SCP PILLAUDIN VOLLET OUNGRE, avocat du barreau de Orléans

 

INTERVENANT VOLONTAIRE :

Monsieur Y.

[adresse], représenté(e) par la SCP PILLAUDIN VOLLET OUNGRE, avocat du barreau de Orléans

 

A l'audience du 13 mai 2003, les parties ont comparu comme il est mentionné ci-dessus et l'affaire a été mise en délibéré à ce jour.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Par acte sous seing privé en date du 31 juillet 2000, la société d'HLM FRANCE LOIRE a donné à bail à Melle Y. et M. X. un logement sis à [adresse], moyennant un loyer principal mensuel de 2.197 francs outre 210,25 francs pour le stationnement.

Ce contrat contenait une clause de résiliation de plein droit pour défaut de paiement du loyer.

M. Y. s'est porté caution pour le paiement du loyer. Melle Y. a quitté le logement le 1er août 2001.

Le 8 avril 2002, la société FRANCE LOIRE a fait délivrer aux preneurs un commandement de lui payer la somme de 1549,74 euros en principal, au titre de loyers et charges impayés.

Vu l'exploit introductif d'instance en date du 10 juillet 2002, par lequel la société d'HLM a fait assigner les consorts Y. X., aux fins de :

- voir constater la résiliation du bail par application de la clause résolutoire,

- voir prononcer l'expulsion des locataires,

- voir condamner les preneurs et la caution à lui payer :

* la somme de 3.168 euros au titre des loyers, charges et frais impayés, avec les intérêts au taux légal à compter du commandement pour la somme visée par celui-ci et de l'assignation pour le surplus, outre une clause pénale de 266,28 euros,

* une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges, en deniers ou quittances,

* la somme de 304,90 euros, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

et ce, avec le bénéfice de l'exécution provisoire,

Vu les écritures responsives de Melle et M. Y., lesquels concluent à titre principal au rejet des demandes présentées à leur encontre, sollicitent subsidiairement des délais de paiement et la condamnation de M. X. à garantir Melle Y. de la moitié des condamnations mises à sa charge, et, reconventionnellement, la condamnation de la société d'HLM ou de M. X. à leur payer une somme de 1.000 euros chacun au titre de leurs frais irrépétibles,

Vu les conclusions de la société d'HLM FRANCE LOIRE, qui maintient ses demandes tout en actualisant sa créance à la somme de 5.349,48 euros,

L'affaire a été examinée à l'audience du 13 mai 2003 à laquelle les parties s'en sont référées oralement à leurs écritures.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] MOTIFS :

I - Sur les demandes dirigées à l'encontre de M. X. et Melle Y. :

La partie demanderesse justifie que l'assignation aux fins de constat de la résiliation du bail a été notifiée au représentant de l'État dans le département, conformément aux dispositions de l'article 24 alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 29 juillet 1998.

La demande est donc recevable.

Le commandement délivré le 8 avril 2002 mentionnait l'intention du bailleur de se prévaloir de la clause résolutoire prévue au bail. Il reproduisait les dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 et celles de l'article 6 de la loi du 31 mai 1990. Il est donc régulier.

Il est constant que les preneurs n'ont pas régularisé la situation dans les deux mois de la signification dudit commandement. En ne comparaissant pas, M. X. n'offre pas de rapporter la preuve qu'il est en mesure d'apurer sa dette locative dans le délai prescrit à l'article 1244-1 du code civil.

Il convient en conséquence de constater la résiliation du bail à effet du 8 juin 2002, et d'ordonner l'expulsion de la partie défenderesse selon des modalités qui seront précisées au dispositif.

Des décomptes produits il résulte qu'au 28 février 2003, il restait dû une somme de 5.349,48 euros (y compris le coût du commandement).

M. X. sera condamné au paiement de cette somme, outre les intérêts au taux légal ainsi qu'il sera dit ci-dessous.

En outre, il sera mis à sa charge une indemnité d'occupation d'un montant mensuel équivalent à celui du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s'était poursuivi, du jour de la résiliation de celui-ci jusqu'à la libération effective des lieux.

En ce qui concerne Melle Y., il convient de rappeler que le bail qu'elle a signé stipulait expressément que les preneurs étaient « soumis solidairement entre eux, à l'égard du bailleur du paiement de tous les loyers, charges et taxes qui seront dus en application des présentes ainsi qu'à toutes les obligations leur incombant en vertu du présent contrat.

Précision étant faite que la présente solidarité expressément stipulée comme condition substantielle et déterminante du consentement du bailleur, oblige les preneurs ci-dessus qui acceptent de manière à ce que chacun soit obligé à l'égard du bailleur pour la totalité, quand bien même un des copreneurs viendrait à quitter les lieux loués, il n'en demeurera pas moins solidaire du paiement des sommes ci-dessus pendant un délai de 5 ans à compter de son départ des lieux dûment constaté par le bailleur. »

[minute page 4] Melle Y. soutient en premier lieu que cette clause doit être qualifiée d'abusive et en conséquence réputée non écrite en application de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, en ce qu'elle l'obligerait à continuer à payer un loyer sans bénéficier d'aucune contrepartie.

Cependant, son obligation trouve sa contrepartie dans le maintien dans les lieux de l'autre preneur. En outre, elle se trouve limitée dans le temps.

Elle n'apparaît donc pas abusive.

La défenderesse fait valoir en deuxième lieu qu'en faisant parvenir à sa bailleresse une lettre recommandée dont elle a accusé réception le 27 juillet 2001, et lui précisant qu'elle quittait les lieux le 1er août suivant, elle a fait obstacle à ce que le contrat se reconduise à son égard. Néanmoins, il appartenait à Melle Y., en application de l'article 10 alinéa 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 de respecter un préavis de trois mois, ce qu'elle n'a pas fait, de sorte que le contrat s'est trouvé reconduit à son égard.

Enfin, il convient de souligner que son engagement vise « toutes les obligations lui incombant en vertu du [...] contrat ». Or celui stipule expressément que le montant du loyer et des charges demeurera exigible « si le locataire se maintient dans les lieux au-delà de l'expiration de son titre d'occupation, consécutif à un congé ou à une résiliation ». Dès lors, il apparaît que le paiement de l'indemnité d'occupation trouve aussi sa cause dans le contrat et doit également être supportée par Melle Y.

En conséquence, cette dernière sera condamnée solidairement avec M. X. à payer la somme de 5.349,48 euros, outre l'indemnité d'occupation restant à courir jusqu'à la libération des lieux, et au plus tard jusqu'au 1er août 2006, date à laquelle l'engagement de Melle Y. prendra fin. Puisqu'elle a quitté les lieux, il n'apparaît pas nécessaire d'ordonner son expulsion.

La clause pénale réclamée apparaît manifestement excessive compte tenu du montant de l'indemnité d'occupation et du taux des intérêts moratoires de sorte qu'elle sera réduite à néant.

Compte tenu de la situation de Melle Y., qui justifie être étudiante, avoir un enfant à charge et travailler seulement 65 heures par mois, il convient de lui accorder des délais de paiement de deux ans.

En outre, il sera fait droit à sa demande de garantie à concurrence de la moitié, étant précisé que le tribunal ne peut de ce chef excéder la demande, alors pourtant que M. X. occupe seul les lieux.

L'intérêt, pour la partie bailleresse de pouvoir retrouver rapidement l'usage des lieux loués commande que soit ordonnée l'exécution provisoire, laquelle est compatible avec la nature de l' affaire.

[minute page 5] Il n'apparaît pas inéquitable de mettre à la charge de M. X., la somme de 152 euros au titre des frais irrépétibles exposés par la société d'HLM, et la somme de 152 euros au titre des frais irrépétibles exposés par son ex-compagne.

 

II - Sur les demandes dirigées à l'encontre de M. Y. :

En application de l'article 838 du nouveau code de procédure civile, le Tribunal d'instance est saisi par la remise au secrétariat-greffe d'une copie de l'assignation.

Force est de constater qu'en l'espèce, cette remise n'a pas eu lieu. Cependant, en prenant des conclusions, M. Y. a accepté implicitement mais nécessairement d'intervenir volontairement à la procédure.

En premier lieu, il importe peu qu'il se soit, comme il le soutient, uniquement porté caution des obligations contractées par sa fille, puisque de toute façon, celle-ci reste tenu des sommes réclamées par la société d'HLM, ainsi qu'il vient d'être dit ci-dessus.

En deuxième lieu, il a contracté un engagement d'une durée de cinq ans à compter du 31 juillet 2000, de sorte que c'est en vain qu'il prétend que celui-ci a pris fin comme le bail initial et ne couvre pas les sommes échues après sa reconduction.

En troisième lieu, il s'est expressément engagé à régler les indemnités d'occupation. Il sera par suite condamné solidairement avec M. X. et Melle Y. à payer la somme de 5.349,48 euros, ainsi que les indemnités d'occupation à échoir jusqu'à la libération des lieux et au plus tard le 31 juillet 2005, outre les intérêts, ainsi qu'il sera dit au dispositif, le commandement de payer lui ayant été dénoncé le 19 avril 2002.

En outre, il ne peut prétendre au remboursement du dépôt de garantie tant que les lieux n'ont pas été restitués.

Enfin, s'il est au chômage, il perçoit des indemnités calculées au taux brut de 161,74 euros par jour et ne justifie pas de ses charges. Dans ces conditions, il ne peut lui être accordé de délais de paiement et sa demande pour frais irrépétibles sera pareillement rejetée.

Parties succombantes, les trois défendeurs seront condamnés in solidum aux dépens, en ce y compris le coût du commandement de payer (déjà inclus dans le principal) et de sa dénonciation à la caution. Leur demande pour frais irrépétibles dirigées contre la société d'HLM sera subséquemment rejetée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et en premier ressort,

- CONSTATE l'intervention volontaire de M. Y.,

- [minute page 6] CONSTATE la résiliation du bail consenti par la société d'HLM FRANCE LOIRE à M. X. et Melle Y., et ce à effet du 8 juin 2002,

- ORDONNE l'expulsion de M. X. ainsi que de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique et d'un serrurier si besoin est, faute de délaissement volontaire dans les deux mois de la signification du commandement d'avoir à libérer les lieux (articles 61 et 62 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991),

- DIT que les meubles et objets se trouvant sur les lieux suivront le sort prévu à l'article 65 de ladite loi,

- FIXE l'indemnité d'occupation due depuis la résiliation du bail jusqu'à la libération effective des lieux au montant du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s'était poursuivi,

- CONDAMNE M. X., Melle Y. et M. Y. solidairement à payer à la société d'HLM FRANCE LOIRE :

* la somme de cinq mille trois cent quarante neuf euros et quarante huit centimes (5.349,48 €) au titre des sommes dues au 28 février 2003, outre les intérêts au taux légal à compter du 8 avril 2002 sur 1.244,74 euros et à compter du 11 octobre 2002 sur 1.418,04 euros,

* l'indemnité d'occupation à compter du mois de mars 2003, en deniers ou quittances, étant précisé que celle-ci cessera d'être due par M. Y. le 30 juillet 2005 et par Melle Y. le 1er août 2006,

- CONDAMNE M. X. à payer à la société d'HLM FRANCE LOIRE une somme de cent cinquante deux (152) euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- CONDAMNE M. X. à payer à Melle Y. une somme de cent cinquante deux (152) euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- CONDAMNE M. X. à garantir Melle Y. de la moitié des condamnations mises à sa charge,

- ACCORDE à Melle Y. un délai de grâce de deux ans,

- ORDONNE l'exécution provisoire,

- REJETTE les demandes pour le surplus,

- CONDAMNE la partie défenderesse in solidum aux dépens.

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ EN AUDIENCE PUBLIQUE LES JOURS, MOIS ET AN QUE DESSUS.

Le Greffier                   Le Président