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CA ORLÉANS (ch. civ.), 13 décembre 2004

Nature : Décision
Titre : CA ORLÉANS (ch. civ.), 13 décembre 2004
Pays : France
Juridiction : Orléans (CA), ch. civ.
Demande : 03/02583
Date : 13/12/2004
Nature de la décision : Réformation
Date de la demande : 18/09/2003
Décision antérieure : TI ORLÉANS, 10 juin 2003
Numéro de la décision : 1556
Décision antérieure :
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 695

CA ORLEANS (ch. civ.), 13 décembre 2004 : RG n° 03/02583 ; arrêt n° 1556

 

Extrait  : « Attendu que, si, en principe, la clause de solidarité incluse au bail a pour effet que les deux colocataires restent solidairement tenus du paiement des loyers, même en cas de départ effectif de l'un d'eux suite a un congé, il en va ainsi lorsque la validité de cette clause est d'une durée raisonnable et permet seulement au bailleur de ne pas être pris au dépourvu par la perte subite du bénéfice de la solidarité, face à un locataire restant, le cas échéant insolvable, lui laissant alors le temps de prendre toutes dispositions pour faire face à cette nouvelle situation ; Que, bien que limitée dans le temps, la durée excessivement et anormalement longue attribuée ex l'espèce aux effets de la solidarité à l'égard du locataire sortant (cinq ans), rend la stipulation manifestement abusive, ledit locataire restant tenu d'assurer au bailleur, pendant plusieurs années, le maintien du revenu locatif, sans aucune contrepartie pour lui-même, toutes les prérogatives nées du bail ayant disparu à son égard, ce qui crée un déséquilibre indéniable entre les droits et obligations des parties au contrat, et ce au bénéfice du bailleur professionnel, seul instigateur de la disposition litigieuse ».

           

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ARRÊT du : 13 décembre 2004 Arrêt n° 1556. RG n° 03/02583. DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal d'Instance d'ORLÉANS en date, du 10 juin 2003.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS :

- Mademoiselle X.

Chez Madame X. [adresse]

- Monsieur X.

[adresse]

représentés par Maître Elisabeth BORDIER, avoué à la Cour, ayant pour avocat la SCP PILLAUDIN - VOLLET - OUNGRE, du barreau d'ORLÉANS, D'UNE PART

[minute page 2]

INTIMÉS :

- La SA HLM FRANCE LOIRE

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège [adresse], représentée par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour, ayant pour avocat la SCP LE MÉTAYER CAILLAUD CESAREO BONHOMME, du barreau d'ORLÉANS

- Monsieur  Y.

[adresse], DEFAILLANT, faute de constitution d'avoué,

D'AUTRE PART

 

DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 18 septembre 2003

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 27 octobre 2004

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats, à l'audience publique du 02 novembre 2004, Madame Marie-Brigitte NOLLET, Conseiller, a entendu les avocats des parties, avec leur accord, par application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Lors du délibéré : Monsieur François CRÉZÉ, Président de Chambre, Madame Marie-Brigitte NOLLET, Conseiller, qui en a rendu compte à la Collégialité, Madame Arme GONGORA, Conseiller. [minute page 3]

Greffier : Madame Anne-Chantal PELLÉ, Greffier lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

ARRÊT : Lecture de l'arrêt à l'audience publique du 13 décembre 2004 par Monsieur François CRÉZÉ, Président, lequel a signé la minute avec Madame Anne-Chantal PELLÉ, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'appel interjeté par Mademoiselle X. et Monsieur X. à l'encontre d'un jugement rendu le 10 juin 2003 par le Tribunal d'Instance d'ORLÉANS, qui a :

- constaté la résiliation du bail consenti le 8 juin 2002 par la SA HLM France-LOIRE à Mademoiselle X. et  Monsieur Y.,

- ordonné l'expulsion de Y. et de tous occupants de son chef,

- fixé l'indemnité d'occupation due jusqu'à la libération des lieux au montait du loyer et des charges.

- condamné Mademoiselle X., Monsieur X. et  Monsieur Y., solidairement, à payer à la SA HLM FRANCE LOIRE :

*  la somme de 5.349,48 €, au titre des sommes dues au 28 février 2003, avec intérêts au taux légal à compter du 8 avril 2002 sur 1244,74 € et à compter du 11 octobre 2002 sur 1.418,04 €,

*  une indemnité d'occupation à compter du mois de mars 2003, en deniers ou quittances, étant précisé que celle-ci cessera d'être due par Monsieur X. le 30 juillet 2005 et par Mademoiselle X. le 1er août 2006,

- condamné Monsieur Y. à payer à la SA HLM FRANCE LOIRE, d'une part, et à Mademoiselle X., d'autre part, la somme de 152 €, chacun, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

- condamné Monsieur Y. à garantir Mademoiselle X. de la moitié des condamnations mises à sa charge,

- accordé à Mademoiselle X. un délai de grâce de deux ans,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné les défendeurs, in solidum, aux dépens ;

[minute page 4]

Vu les conclusions signifiées le 12 octobre 2004 par les consorts X., aux termes desquelles ils poursuivent la réformation du jugement entrepris et demandent à la Cour, statuant à nouveau, de :

- dire et juger régulier le congé donné par Mademoiselle X.,

- dire que le contrat de bail n'a pas été reconduit à son égard,

- déclarer non écrite la clause contractuelle relative à la solidarité entre les locataires,

- débouter la SA HLM FRANCE LOIRE de l'ensemble de ses demandes à l'encontre des consorts X.,

- condamner la SA HLM FRANCE LOIRE à restituer à Monsieur X. le dépôt de garantie, soit la somme de 366,94 €, avec intérêts au taux légal à compter du 10 juin 2003,

- condamner la SA HLM FRANCE LOIRE à payer à Mademoiselle X. et à Monsieur X. la somme de 2.000 €, chacun, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- la condamner, in solidum avec Monsieur Y., aux dépens de première instance, en ce compris le coût des commandements du 8 avril 2002, et d'appel,

- subsidiairement,

- dire que le cautionnement de Monsieur X. ne peut être étendu au-delà du 31 juillet 2001, date d'expiration du contrat .litigieux,

- débouter la SA HLM FRANCE LOIRE de toutes demandes à l'encontre de ce dernier,

- confirmer le jugement en ce qu'il a accordé à Mademoiselle X. un délai de grâce de deux ans et accorder un même délai à Monsieur X.,

- dire que Monsieur Y. devra garantir Mademoiselle X. intégralement de toutes sommes qu'elle pourrait être condamnée à payer à la SA H.L.M_ FRANCE LOIRE

- condamner Monsieur Y. à payer aux consorts X. la somme de 1.000 € [chacun ?], sur le fondement de 1'article 700 du nouveau code de procédure civile

- le condamner aux dépens de première instance, en ce compris le coût des commandements du 8 avril 2002, et d'appel ;

 

Vu les conclusions signifiées le 28 septembre 2004 par la SA HLM FRANCE LOIRE, tendant à voir confirmer la décision déférée, à voir condamner, solidairement, Mademoiselle X., Monsieur X. et Monsieur Y., à lui payer, selon décompte arrêté au 1er septembre 2004, la sommé de 12.602,13 €, avec intérêts au taux légal à compter du 8 avril 2002 sur la somme de 1.244,74 € et à compter de l'assignation sur le surplus, à voir ordonner la capitalisation des intérêts, à voir condamner, sous la même solidarité, Monsieur Y. et les consorts X. à lui payer la somme de 500 €, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens ;

[minute page 5] Vu le défaut de constitution d'avoué de Monsieur Y., assigné à comparaître devant la Cour par acte du 29 janvier 2004 et réassigné par acte du 19 février suivant ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Attendu que, par acte sous seing privé du 31 juillet 2000, la SA H.L.M, FRANCE LOIRE a donné en location à Mademoiselle X. et à Monsieur Y., pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, un logement, sis  [adresse] ;

Que Monsieur X. s'est porté caution solidaire de sa fille Mademoiselle X., pour, le paiement des loyers ;

Que ledit bail contenait une clause de résiliation de plein droit pour défaut le paiement du loyer et des charges ;

Que, par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 juillet 2001, Mademoiselle X. a informé la SA HLM. FRANCE LOIRE de ce que, ensuite de sa séparation d'avec Monsieur Y., elle quitterait le logement le 1er août 2001, « sous réserve de changement de garant (le garant actuel étant Monsieur X., mon père) » ;

Que, par acte du 8 avril 2002, la SA HLM FRANCE LOIRE a fait délivrer à Monsieur Y. et Mademoiselle X. un commandement de payer visant la clause résolutoire contenue au bail, puis a fait assigner ces derniers et Monsieur X. devant le Tribunal, aux fins de voir constater la résiliation du bail, ordonner l'expulsion des locataires et condamner les intéressés, ainsi que la caution, au paiement des loyers arriérés et des indemnités d'occupation continuant à courir ;

Que c'est dans ces conditions qu'a été rendue la décision dont appel ;

Attendu que les consorts X. allèguent que, en donnant congé avant le terme du bail, Mademoiselle X. s'est utilement opposée à la tacite reconduction de celui-ci, qu'il s'est opéré du fait de son congé et du maintien dans les lieux de Monsieur Y. un nouveau bail, que ledit bail n'a pas été reconduit à son égard, qu'elle ne peut dès lors être tenue au paiement des sommes échues après son départ des lieux loués, que la validité du congé qu'elle a délivré n'a jamais été contestée par le bailleur, de sorte que celui-ci a renoncé à se prévaloir du délai légal de préavis et que c'est à tort que le premier Juge a déclaré irrégulier ledit congé ;

Que les appelants soutiennent que la clause du bail, obligeant le co-preneur quittant les lieux loués, à rester solidairement tenu, pendant cinq années, sans contrepartie pour lui, du paiement des sommes dues par le co-preneur restant en place, est manifestement abusive, au sens de la directive européenne n° 93/13 du 5 avril 1993, transposée en droit français, en ce qu'elle crée un déséquilibre [minute page 6] significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, alors qu'elle n'a pu faire préalablement audit contrat, intégralement rédigé par le bailleur, 1’objet d'aucune négociation individuelle et qu'elle était stipulée comme étant une condition substantielle et déterminante du consentement du bailleur, de sorte que ladite clause doit être déclarée non écrite, peu important à cet égard que la clause litigieuse ne figure pas parmi celles que l'article 4 de la loi du 6 juillet 1989 répute non écrites, ce texte ne faisant pas obstacle au pouvoir du juge de déclarer abusive toute autre clause contractuelle soumise à son appréciation ;

Que, subsidiairement, Mademoiselle X. fait valoir les difficultés de sa situation économique et sa bonne foi, pour solliciter des délais de paiement et réclame, en tout état de cause, la garantie intégrale de Monsieur Y. pour les sommes qu'elle pourrait être amenée à payer de son chef ;

Que Monsieur X. allègue que son cautionnement ne portait expressément que sur les engagements de sa fille, et non sur ceux de Monsieur Y., que, par application des dispositions de 1'article 1740 du code civil, ce cautionnement ne pourra âtre étendu au-delà du bail initial, soit du 31 juillet 2000 et, subsidiairement, qu'il est également bien fondé à solliciter des délais de paiement ;

Que Monsieur X. sollicite enfin la restitution du dépôt de garantie qu'il a été amené à payer pour le compte de sa fille, la SA HLM FRANCE LOIRE ayant elle-même indiqué que Monsieur Y. avait quitté les lieux le 22 juin 2004 et qu'aucune stipulation du bail ne subordonne la restitution du dépôt de garantie à la clôture définitive du compte, pas plus qu'il n'est permis d'imputer le dit dépôt sur la dette locative ;

 

Attendu que la SA HLM FRANCE LOIRE allègue en réplique que le congé délivré par Mademoiselle X. ne respectait pas le délai de trois mois prescrit par l'article 15-1 alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989, qu'il n'a produit aucun effet et que le contrat s'est trouvé reconduit à l'égard de l'intéressée ;

Qu'elle fait valoir que la clause du bail relative à la solidarité entre les preneurs ne fait nullement partie de celles répertoriées par l'article 4 de la loi du 6 juillet 1989 comme étant des clauses abusives, que ladite clause est limitée dans le temps, que l'obligation qu'elle crée à la charge de X. trouve sa contrepartie dans le maintien dans les lieux de l'autre preneur, ainsi que dans le contrat, les locataires s'étant engagés solidairement pour toutes les obligations leur incombant en vertu de celui-ci, que l'appelante reste solidairement tenue des loyers et charges échus après son départ, à raison du maintien dans les lieux de Monsieur Y., qu'en l'occurrence, ce dernier a quitté définitivement les lieux le 22 juin 2004, de sorte que le compte définitif s'élève désormais à 12.602,13 €, lequel incombe solidairement aux deux preneurs ;

[minute page 7] Que la SA HLM FRANCE LOIRE soutient qu'il importe peu que Monsieur X. se soit porté caution des seules obligations contractées par sa fille, puisque celle-ci se trouve tenue de la totalité des sommes réclamées, que l'intéressé a contracté un engagement pour une durée de cinq ans, de sorte qu'il ne peut prétendre que celui-ci aurait pris fin au terme du bail initial, qu'il doit donc être condamné, solidairement avec les autres parties, au paiement du solde locatif, qu'il ne peut prétendre au remboursement du dépôt de garantie, tant que la clôture définitive du compte n'a pas été effectuée, que, compte tenu de la dette locative, Monsieur X. ne peut espérer aucune restitution et que, en raison de l'ancienneté de la dette, il ne peut être accordé de délais de paiement ;

* * *

Attendu que le présent arrêt sera réputé contradictoire à l'égard de Monsieur Y., par application des dispositions de l'article 474 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile, dès lors que l'autre intimé comparait ;

Attendu que, aux termes de l'article 12 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire peut résilier le bail à tout moment, à condition des respecter les formes et délai; édictés par l'article 15 de la même loi ;

Qu'en l'occurrence, le congé donné par Mademoiselle X. devait donc observer un préavis de trois mois, celui-ci courant à compter de la date à laquelle la lettre recommandée avec accusé de réception, par laquelle ledit congé a été régulièrement délivré, a été distribuée, soit en l'espèce du 27 juillet 2001 ;

Que ledit congé n'a donc pris effet que le 27 octobre 2001, postérieurement à l'expiration du bail initial, de sorte qu'il n'a pu contrairement à ce que prétend l'appelante, faire obstacle à la tacite reconduction de celui-ci :

Que c'est également en vain que Mademoiselle X. soutient encore que la SA HLM FRANCE LOIRE n'aurait pas contesté la validité du congé qu'elle lui avait délivré et aurait ainsi renoncé à se prévaloir du non respect dû délai de préavis

Que, en effet, si une telle renonciation de la part du bailleur est possible, elle doit être dépourvue de toute équivoque, ce qui n’est pas le cas en l'espèce, les lettres adressées par la SA HLM FRANCE LOIRE à Monsieur Y. les 30 août, 26 septembre et 4 décembre 2001, ensuite de la réception du congé litigieux, précisant expressément qu'à défaut pour l'intéressé de produire tous documents demandés, permettant d'envisager la reprise à son seul nom, le bail initial continuerait à produire ses effets, ce qui a été confirmé à Mademoiselle X. par lettre du 4 décembre 2001, ce dont il se déduit que le bailleur n'a nullement entendu renoncer au bénéfice qu'il pouvait tirer de l'irrégularité du dit congé ;

[minute page 8] Que, par application des dispositions des articles 12 et 15 de la loi du 6 juillet 1989, Mademoiselle X. a perdu la qualité de locataire, par l'effet du congé délivré, à la date du 27 octobre 2001 seulement ;

Attendu que pour réclamer, néanmoins, à l'intéressée et à sa caution le paiement des loyers et indemnités d'occupation postérieurs, la SA HLM. FRANCE LOIRE se prévaut de la clause du bail instituant la solidarité entre les co-preneurs, dans les termes suivants : ces derniers sont « soumis solidairement entre eux, à l'égard du bailleur, du paiement de tous les loyers, charges et taxes qui seront dus en application des présentes, ainsi qu'à toutes les obligations leur incombant en vertu du présent contrat. Précision faite que la présente solidarité, expressément stipulée comme condition substantielle et déterminante du consentement du bailleur, oblige les preneurs ci-dessus, qui acceptent, de manière à ce que chacun soit obligé à l’égard du bailleur pour la totalité, quand bien même un des co-preneurs viendrait à quitter les lieux loués, il n'en demeurera pas moins solidaire du paiement des sommes ci-dessus pendant un délai de cinq ans à compter de son départ des lieux dûment constaté par le bailleur » ;

Attendu que les appelants estiment que cette clause présente les caractéristiques d'une clause abusive et qu'elle doit être déclarée non écrite ;

Attendu que les clauses abusives sont celles qui sont déterminées ainsi par la Commission des clauses abusives ou que le Juge qualifie de telles ;

Qu'il est donc inopérant en l'espèce que la clause litigieuse ne figure pas au nombre de celles que l'article 4 de la loi du 6 juillet 1989 répute non écrites, cette liste ne présentant pas un caractère exhaustif et, la Cour, dès lors qu'elle en est saisie, devant rechercher si ladite clause présente ou non les caractéristiques d'une clause abusive ;

Attendu que, aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, sont abusives les clauses qui, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, ont pour objet ou pour effet de causer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;

Attendu qu'en l'espèce, il est clair, et d'ailleurs non contesté, que l'ensemble des dispositions du bail ont été rédigées par la SA HLM FRANCE LOIRE, bailleur professionnel, qui les a imposées à ses cocontractants, lesquels n'avaient d'autre choix que d'adhérer à la totalité des clauses du bail ou de renoncer à la location proposée ;

[minute page 9] Que cela résulte d'ailleurs de la lettre que l'intimée a adressée le 7 juin 2000 à Mademoiselle X. et Monsieur Y., les invitant à retourner signé l'engagement de location joint, l'offre de bail étant considérée comme nulle et non avenue à défaut d'une telle signature dans un délai de 45 jours, ce qui ne laissait aucune place aux candidats locataires pour une éventuelle négociation des conditions du bail proposé.

Attendu que, si, en principe, la clause de solidarité incluse au bail a pour effet que les deux colocataires restent solidairement tenus du paiement des loyers, même en cas de départ effectif de l'un d'eux suite a un congé, il en va ainsi lorsque la validité de cette clause est d'une durée raisonnable et permet seulement au bailleur de ne pas être pris au dépourvu par la perte subite du bénéfice de la solidarité, face à un locataire restant, le cas échéant insolvable, lui laissant alors le temps de prendre toutes dispositions pour faire face à cette nouvelle situation ;

Que, bien que limitée dans le temps, la durée excessivement et anormalement longue attribuée ex l'espèce aux effets de la solidarité à l'égard du locataire sortant (cinq ans), rend la stipulation manifestement abusive, ledit locataire restant tenu d'assurer au bailleur, pendant plusieurs années, le maintien du revenu locatif, sans aucune contrepartie pour lui-même, toutes les prérogatives nées du bail ayant disparu à son égard, ce qui crée un déséquilibre indéniable entre les droits et obligations des parties au contrat, et ce au bénéfice du bailleur professionnel, seul instigateur de la disposition litigieuse ;

Que, en raison du caractère excessif de la durée d'application imposée, ladite clause doit être déclarée abusive et, par application des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation, réputée non écrite ;

Attendu, en conséquence, que X. ne pouvait être tenue au paiement des loyers que jusqu'au 31 octobre 2001 ;

Qu'il ne résulte pas des pièces produites qu'il ait existé à cette date un arriéré locatif, la lettre adressée le 20 décembre 2001 à Monsieur Y. par la SA HLM FRANCE LOIRE faisant au contraire état d'un arriéré de 763 €, correspondant à deux mois de loyers impayés, ce qui visait donc les seuls loyers de novembre et décembre 2001, postérieurs à la date d'effet du congé donné par X.

Que la SA HLM FRANCE LOIRE doit être déboutée de toute demande en paiement à l'égard de cette dernière ;

Attendu, sur les demandes formées par la SA HLM FRANCE LOIRE à l'encontre de Monsieur X., que le cautionnement ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ;

Qu'il résulte en l'occurrence des termes exprès de l'engagement de caution, souscrit par Monsieur X. que celui-ci s'est porté caution solidaire de sa fille X. ;

[minute page 10] Qu'il ne peut dès lors être tenu de garantir le paiement de sommes dues par tout autre que cette dernière, et en particulier de la dette constituée par Monsieur Y. après la date d'effet du congé donné par X. ;

Que la SA HLM FRANCE LOIRE sera dès lors déboutée de toutes demandes également à l'égard de Monsieur X. ;

Attendu, en définitive, que le jugement entrepris sera confirmé, en ses dispositions, non contestées, relatives à la résiliation du bail et en ses condamnations prononcées à l'encontre de Monsieur Y., mais infirmé pour le surplus, étant précisé que le compte locatif étant désormais définitivement arrêté par suite du départ de Monsieur Y., la condamnation au paiement de l'arriéré à l'égard de ce dernier sera portée à la somme de 12.602,13 €, outre les intérêts de droit ;

Qu'il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts, en application de l'article 1154 du code civil

Attendu qu'il ne résulte pas du bail que le dépôt de garantie ait été versé par Monsieur X. personnellement, de sorte que ce dernier ne peut prétendre à son remboursement, alors même que le bailleur est bien fondé à imputer dessus le montant des sommes qui lui restent dues ;

Attendu que la SA HLM FRANCE LOIRE, qui succombe en appel à l'égard de Mademoiselle X. et de Monsieur X., sera condamnée à payer à ces derniers, ensemble, une indemnité de procédure de 1.500 €

Attendu que Monsieur Y., dont la défaillance est à l'origine de la procédure supportera quant à lui les dépens de première instance et d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

RÉFORMANT le jugement entrepris,

DIT que le congé donné par Mademoiselle X. a pris effet le 27 octobre 2001,

DÉCLARE abusive, et par conséquent, non écrite, la clause du bail relative à la solidarité entre les colocataires, telles qu'énoncée au contrat et rappelée aux motifs du présent arrêt,

[minute page 11] DÉBOUTE la SA HLM FRANCE LOIRE de ses demandes à l'encontre de Mademoiselle X., ainsi que de celles à l'encontre de Monsieur X.,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions relatives à la résiliation du bail, à l'expulsion de Monsieur Y. et aux condamnations prononcées à l'encontre de ce dernier, sauf à porter celle concernant le solde locatif à la somme de DOUZE MILLE SIX CENT DEUX EUROS TREIZE CENTIMES (12.602,13 €), avec intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2002 sur 1.244,74 €, du 11 octobre 2002 sur 1.415,04 €, du 1er juin 2004 sur 7.904,64 € et du [16 ?] septembre 2004 sur le surplus,

Y AJOUTANT,

ORDONNE la capitalisation des intérêts échus et dus depuis plus d'un an, à compter du 28 septembre 2004, date des premières conclusions qui en font la demande,

CONDAMNE la SA HLM FRANCE LOIRE à payer à Mademoiselle X. et à Monsieur X., ensemble, la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 €), sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

REJETTE le surplus des demandes,

CONDAMNE  Y. aux dépens de première instance et d'appel et, pour ces derniers, accorde à Maître BORDIER et la SCP LAVAL-LUEGER avoués, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Et le présent arrêt a été signé par Monsieur CRÉZÉ, Président, lequel a signé la minute avec Madame PELLÉ, Greffier.

LE GREFFIER                                 LE PRÉSIDENT