CA VERSAILLES (1re ch. sect. 2), 19 septembre 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 7040
CA VERSAILLES (1re ch. sect. 2), 19 septembre 2017 : RG n° 16/02822
Publication : Jurica
Extrait : « Aux termes de l'article 133-2 du code de la consommation, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible. Elles s'interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel.
En l'espèce, les clauses rappelées ci-dessus sont claires et fournissent au client une information non ambiguë sur l'étendue de sa responsabilité et les conséquences de la souscription ou de la non souscription d'un pack tranquillité plus. L'avis de la commission des clauses abusives 96-02 invoquée vise à contraindre le commerçant à informer de façon précise et expresse le consommateur en cas de limitation de sa garantie pour des dommages relatifs à la mauvaise appréciation du gabarit du véhicule. Or le contrat signé en l'espèce et le livret de location fournissent des informations claires et complètes sur ce point.
Il ne peut donc être reproché à la société Sopres d'avoir manqué à une obligation d'information (demande qui n'est pas nouvelle dans la mesure où elle tend à faire écarter la prétention adverse et qu'elle tend aux mêmes fins que ses demandes initiales). La société Sopres n'a pas à prouver qu'elle a proposé particulièrement à M. X. le pack tranquillité plus dès lors que son existence et sa portée étaient clairement indiquées au contrat et qu'il était rappelé par l'apposition d'un collant de grande taille collé à l'intérieur du véhicule sur le pare-brise quelle était la hauteur du véhicule et cet avertissement : « attention, vous êtes responsable des parties hautes ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
PREMIÈRE CHAMBRE SECTION 2
ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/02822. Code nac : 59B. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 1er mars 2016 par le Tribunal d'Instance de POISSY : R.G. n° 11-15/048.
LE DIX NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], de nationalité Française, Représenté par Maître Jean-Pierre S. de la SELARL S. ET C. ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 720
INTIMÉE :
SA SOPRES
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège, Représentée par Maître Stéphanie A., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C637 - N° du dossier 2016-020, Assistée de Maître Geneviève S. de la SARL ALIENCE AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0072
Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 6 juin 2017, Monsieur Serge PORTELLI, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de : M. Serge PORTELLI, Président, Madame Delphine BONNET, Conseiller, Madame Pauline DURIGON, Vice-présidente placée, déléguée à la Cour par ordonnance du 9 mars 2017 de la Première présidente, qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Marine COLAS
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Par acte d'huissier, la société Sopres a fait assigner M. X. devant le tribunal d'instance de Poissy et a demandé, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de le condamner à lui payer les sommes de 6.307,20 euros en principal outre les intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2014, date de la mise en demeure, de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et de 1.500 euros pour ses frais irrépétibles outre les dépens.
Cité à domicile, M. X. a conclu au débouté et a demandé reconventionnellement le remboursement de la somme de 2.100 euros au titre de la franchise indûment payée et, subsidiairement, de dire que seule la franchise était due et a été réglée et, infiniment subsidiairement, de dire que la somme due est de 5.122,08 euros. Il demandait en outre la somme de 1.000 euros pour procédure abusive et de 2.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire du 1er mars 2016, le tribunal d'instance de Poissy a :
- condamné M. X. à payer à la société Sopres la somme de 6.172,80 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné M. X. à payer à la société Sopres la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
M. X. a relevé appel du jugement. Dans ses dernières conclusions, auxquelles la Cour se réfère pour l'exposé de ses moyens et de ses prétentions, il formule les demandes suivantes :
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
- juger qu'il existe dans le contrat conclu entre M. X. et la société Sopres une ambiguïté sur la portée de la responsabilité du locataire, laquelle, compte tenu de l'énoncé, de la présentation et de l'emplacement de ces stipulations, peut être comprise en ce sens que, en souscrivant l'option de rachat de franchise dommages, le locataire ne pouvait en aucun cas être tenu au-delà de la franchise maximale de 2.100 euros,
- juger en tant que de besoin, que l'apposition du tampon encreur n'a pas date certaine au regard de celle de la signature du contrat par M. X.,
- en conséquence, débouter la société Sopres de l'ensemble de ses prétentions,
- juger que la société Sopres ne démontre pas qu'elle aurait proposé à M. X. l'option lui permettant d'être exonéré de franchise en cas d'accident,
- juger que ce manquement à son obligation de conseil a fait perdre à M. X. la chance d'économiser 2.100 euros,
- par conséquent, condamner la société Sopres à lui payer une somme de 2.100 euros en remboursement de la somme payée par lui au titre de la franchise contractuelle dont il aurait fait l'économie si son cocontractant n'avait pas manqué à son obligation de conseil,
- condamner la société Sopres à payer à M. X. une somme de 2.400 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.
La société Sopres, intimée, dans ses dernières conclusions, auxquelles la Cour se réfère pour l'exposé de ses moyens et de ses prétentions, formule les demandes suivantes :
- juger M. X. mal fondé en son appel et le débouter de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- vu l'article 564 du code de procédure civile, juger irrecevable la demande indemnitaire formulée en cause d'appel au titre de la violation d'une obligation de conseil,
- à titre extrêmement subsidiaire, débouter M. X. de toutes ses demandes à ce titre,
- condamner M. X. à lui payer la somme principale de 6.307,20 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 octobre 2014,
- juger que ces intérêts porteront eux-mêmes intérêts au taux légal à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date,
- condamner M. X. au paiement d'une indemnité de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité supplémentaire de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Le 21 mars 2014, M. X. a loué auprès de la société Sopres un véhicule utilitaire de marque Iveco modèle 35C10 pour une durée d'une journée.
M. X. était victime d'un accident matériel pendant la durée de la location. Avec la partie haute du véhicule, il heurtait le balcon d'une maison ce qui occasionnait des dégâts importants au véhicule.
Le lendemain 22 mars 2014, M. X. remettait un constat amiable.
Une expertise était diligentée à la demande de la Sopres. Les dégâts étaient évalués à 7.999,20 euros TTC.
Le litige porte sur la rédaction du contrat et la portée des clauses concernant la franchise applicable.
Le contrat mentionnait au recto : « je confirme que la déclaration du client (figurant au verso de ce dossier de location ou ci-dessous) que j'ai lue et comprise est exacte. Voir carnet de location pour désignation complète et détails ».
Le verso du contrat mentionnait : « J'ai lu et compris les conditions générales de location contenues dans mon carnet de location. »
Le recto stipulait une franchise de 2.100 euros par événement en cas de vol ou de dégât subi par le véhicule.
Le contrat prévoit en page 4 en caractères gras que « votre responsabilité pour tout dommage résultant d'une mauvaise appréciation de la hauteur du véhicule ou d'un choc avec des objets placés ou suspendus en hauteur ne peut être couverte par une garantie optionnelle à l'exception de la garantie Pack Tranquillité plus ».
Il indique également : « vous pouvez acheter nos produits d'assurance et garantie optionnelle pour couvrir les risques suivants,
- votre responsabilité envers nous pour toute perte ou dommage subi par le véhicule,
- les dommages corporels ainsi que la perte ou le dommage dont vos effets personnels ou ceux de vos passagers ont fait l'objet ».
Il prévoit enfin : « à moins que vous achetiez nos garanties optionnelles, vous serez tenu responsable de toute perte ou dommage subi par le véhicule en sachant que votre responsabilité pourra être engagée à hauteur de la valeur totale du véhicule. Vous serez exonéré de cette responsabilité à hauteur de la franchise indiquée sur le dossier de location si vous souscrivez à l'une des garanties optionnelles suivantes ».
Les garanties optionnelles sont précisées. Elles sont intitulées PP ou CDW. À avoir, pour PP, suppression partielle de la franchise vol, pour CDW, suppression partielle de la franchise dommage.
Le contrat stipule à ce sujet : « si vous souscrivez ces deux options, vous pouvez également acheter le produit suivant :
- garantie bris de glace et pneu,
- pack confort ou pack tranquillité pour les véhicules utilitaires. Il élimine votre responsabilité envers nous en vous exonérant totalement de chaque franchise en relation avec la CDW et la PP pour tout dommage aux véhicules utilitaire, ou
- pack tranquillité plus pour les véhicules utilitaires autres que les véhicules frigorifiques. Il élimine votre responsabilité pour tous dommages notamment aux parties hautes résultant notamment d'une mauvaise appréciation de la hauteur et/ou du gabarit du véhicule ».
Sur le contrat avait été apposé avec un tampon la mention : « attention les parties hautes et basses ne sont pas assurées ; attention aux ponts et tunnels ».
La lecture du contrat établit donc clairement que :
- Le locataire est responsable de tout dommage causé au véhicule,
- sa responsabilité peut être engagée à hauteur de la valeur totale du véhicule,
- il existe une franchise de 2.100 euros,
- le locataire put s'exonérer partiellement de sa responsabilité en souscrivant une garantie CDW concernant les dommages,
- le locataire est exonéré de toute responsabilité pour tout dommage résultant d'une mauvaise appréciation de la hauteur du véhicule ou d'un choc avec des objets placés ou suspendus en hauteur en souscrivant une garantie dite Pack Tranquillité plus.
M. X. n'a pas souscrit une telle garantie.
La société Sopres lui a réclamé le paiement de la facture de remise en état (7.999,20 euros) outre des frais d'immobilisation, d'expertise et de dossier, diminuée de la franchise de 2.100 euros déjà réglée lors de la souscription du contrat, soit 6.307,20 euros.
Le tribunal, à l'analyse du contrat en son entier, a écarté l'argument de M. X. soutenant que les clauses du contrat entraînant sa responsabilité étaient abusives et l'a condamné au paiement des sommes réclamées par le loueur.
L'appelant soutient que :
- les clauses critiquées ont déjà été écartées par la jurisprudence et jugées abusives par la commission des clauses abusives,
- la date à laquelle le tampon encreur a été apposé sur le contrat n'est pas déterminée,
- il appartenait à la société Sopres de démontrer qu'elle lui a proposé le pack tranquillité plus,
- elle n'arrive pas à le démontrer et dès lors elle a manqué à son obligation de conseil.
La société Sopres fait valoir que :
- il n'y a pas de difficulté d'interprétation du contrat,
- les mentions expliquant l'économie du contrat sont particulièrement visibles,
- elle avait tout intérêt à faire souscrire le pack tranquillité plus,
- il appartenait au souscripteur d'être attentif au contrat qu'il signait,
- la recommandation 96-02 de la commission des clauses abusives n'est pas applicable en l'espèce,
- le manquement à l'obligation de conseil est une demande nouvelle en appel et comme telle irrecevable.
Aux termes de l'article 133-2 du code de la consommation, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible. Elles s'interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel.
En l'espèce, les clauses rappelées ci-dessus sont claires et fournissent au client une information non ambiguë sur l'étendue de sa responsabilité et les conséquences de la souscription ou de la non souscription d'un pack tranquillité plus. L'avis de la commission des clauses abusives 96-02 invoquée vise à contraindre le commerçant à informer de façon précise et expresse le consommateur en cas de limitation de sa garantie pour des dommages relatifs à la mauvaise appréciation du gabarit du véhicule. Or le contrat signé en l'espèce et le livret de location fournissent des informations claires et complètes sur ce point.
Il ne peut donc être reproché à la société Sopres d'avoir manqué à une obligation d'information (demande qui n'est pas nouvelle dans la mesure où elle tend à faire écarter la prétention adverse et qu'elle tend aux mêmes fins que ses demandes initiales). La société Sopres n'a pas à prouver qu'elle a proposé particulièrement à M. X. le pack tranquillité plus dès lors que son existence et sa portée étaient clairement indiquées au contrat et qu'il était rappelé par l'apposition d'un collant de grande taille collé à l'intérieur du véhicule sur le pare-brise quelle était la hauteur du véhicule et cet avertissement : « attention, vous êtes responsable des parties hautes ».
M. X. soutient qu'il n'est pas prouvé qu'une mention informative apposée sur le contrat au moyen d'un tampon l'ait été avant qu'il le signe. Cette mention indique : « attention, les parties hautes et basses ne sont pas assurées. Attention aux ponts et tunnels ». Mais il apparaît que cette mention figurait sur le contrat que M. X. lui-même a produit en première instance.
Il y a donc lieu de faire droit à la demande principale de la société Sopres telle qu'elle a été appréciée par le premier juge à savoir à hauteur de la somme de 6.172,80 euros sans y inclure les frais d'expertise et de dossier mais en faisant courir les intérêts à compter de la mise en demeure du 23 octobre 2014 et non du jugement.
La société Sopres demande de juger que ces intérêts porteront eux-mêmes intérêts au taux légal à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date. Aux termes de l'article 1343-2 du code civil, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise. Les seules conditions posées par cet article pour que les intérêts échus des capitaux produisent des intérêts sont que la demande en ait été judiciairement formée et qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière. Il y a donc lieu de faire droit à la demande.
La société Sopres demande la condamnation de M. X. pour résistance abusive mais ne caractérise pas de faute à l'encontre de l'appelant qui a développé devant la cour comme devant le tribunal des arguments sérieux. Cette demande sera donc rejetée et le jugement confirmé sur ce point.
Le jugement ayant été confirmé sur le fond, il le sera également en ce qu'il a condamné M. X. à payer à la société Sopres la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
M. X. ayant succombé dans ses demandes en cause d'appel, les dépens exposés devant la cour seront à sa charge.
S'agissant de la procédure d'appel, il apparaît équitable de condamner M. X., tenu aux dépens, à payer, conformément à l'article 700 du code de procédure civile, à la société Sopres la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et contradictoirement,
* confirme le jugement en ce qu'il a :
- condamné M. X. à payer à la société Sopres la somme de 6.172,80 euros avec intérêts au taux légal,
- condamné M. X. à payer à la société Sopres la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
* infirme le jugement en ce qu'il a dit que les intérêts au taux légal courront à compter du jugement et, statuant à nouveau, dit que les intérêts courront à compter de la mise en demeure du 23 octobre 2014,
* y ajoutant, dit que les intérêts susvisés porteront eux-mêmes intérêts au taux légal à chaque échéance annuelle à compter du 23 octobre 2014,
* rejette les demandes plus amples ou contraires des parties,
* y ajoutant, condamne M. X. à payer à la société Sopres la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne M. X. aux dépens d'appel
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Serge PORTELLI, Président et par Mme SPECHT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
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