CA VERSAILLES (12e ch. sect. 2), 13 juin 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 7097
CA VERSAILLES (12e ch. sect. 2), 13 juin 2017 : RG n° 16/02915
Publication : Legifrance
Extrait : « L’action des époux X., s’analysant en une action indemnitaire exercée par un consommateur contre une société de transport professionnelle, commerciale par nature, les dispositions du code de commerce sont applicables au contrat litigieux, qu’il s’agisse d’un contrat de pur transport ou d’un contrat de déménagement. Les dispositions du code de la consommation, lorsqu’elles existent, s’appliquent également et l’emportent sur celles du code de commerce. Il suit par ailleurs des dispositions légales sus-rappelées, claires et précises, que la question de la qualification du contrat de déménagement est résolue par le législateur dès lors que le contrat de déménagement est assimilé dans son régime à un contrat de transport lorsque la prestation, objet du contrat, comprend même seulement pour partie, une prestation de transport. Telle est la situation dans laquelle se sont trouvés en l’espèce, les époux X. qui se prévalent donc à tort d’une différence entre le régime du contrat de pur transport et celui du contrat de déménagement.
Les époux X. établissent avoir fait constater par huissier le lendemain de la livraison du tableau litigieux-voir cote 5, la dégradation du papier bulle entourant ce tableau et le fait que cette toile était « percée » à l’emplacement de cette déchirure. Ils établissent également, avoir élevé le même jour auprès du voiturier, une réclamation à ce sujet. Ayant respecté les exigences de l’article L. 224-63 du code de la consommation imposant au consommateur un délai de dix jours après réception des objets transportés pour formuler des réserves, ils sont fondés à agir en justice pour tenter de renverser la présomption de livraison conforme découlant de la réception sans réserves portée sur la lettre de voiture qu’ils produisent aux débats […]. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
DOUZIÈME CHAMBRE SECTION 2
ARRÊT DU 13 JUIN 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/02915. Code nac : 55B. REPUTÉ CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 janvier 2016 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE (3e ch.) : R.G. n° 2013F03363.
LE TREIZE JUIN DEUX MILLE DIX SEPT, La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
APPELANTS :
Monsieur X.
Chez sa fille M. L. X. [adresse], Représentant : Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625- N° du dossier 1655889, Représentant : Maître Nicolas ANCEL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0299
Madame Y.
Chez sa fille M. L. X. [adresse], Représentant : Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625- No du dossier 1655889, Représentant : Maître Nicolas ANCEL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0299
INTIMÉES :
SARL TITANIUM AFFRETEMENT anciennement dénommée FORCE DE FRET
(DA signifiée le 30.05.2016 à personne habilitée et conclusions signifiées le 20.07.2016 à personne habilitée), [adresse], Défaillante
Société HELVETIA
RCS de NANTERRE n° XX, ayant son siège social [adresse]. Représentant : Maître Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623- N° du dossier 16000143, Représentant : Maître Frédéric Z. de la SELARL CLB Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1851
Composition de la cour : L’affaire a été débattue à l’audience publique du 18 avril 2017, Madame Dominique LOTTIN, Premier président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de : Madame Dominique LOTTIN, Premier président, Madame Sylvie MESLIN, Président, Mme Estelle JOND-NECAND, Vice-Présidente placée déléguée à la cour d’appel par ordonnance du 24 août 2015, qui en ont délibéré,
Greffier f. f., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
M. X. et son épouse née Y. (les époux X.) qui résident en Polynésie Française ont acquis fin 2012/début 2013, par téléphone et par internet, quinze tableaux dont huit auprès de M. A., commissaire-priseur à [ville C.], pour un montant total de 103.460 € hors honoraires et sept auprès de la maison de vente aux enchères L. située à [ville M.], pour un total de 1.860 € hors honoraires. L’un des tableaux vendus par l’intermédiaire de l’étude B., du peintre B., a été acquis pour la somme de 34.500 €.
Les époux X. ont chargé leur fille, Mme M.-L. X., d’organiser le transport de ces tableaux, celle-ci a choisi la société à responsabilité limitée Force de Fret (société Force de Fret.) actuellement dénommée société à responsabilité limité Titanium Affrètement (société Titanium Affrètement.), pour effectuer le transport de [ville C.], depuis l’étude A., jusqu’à Paris avec assurance pour 553,99 € toutes taxes comprises et de [ville M.] à Paris hors assurance pour 143,52 € toutes taxes comprises.
La société Force de Fret a procédé le 29 janvier 2013 à l’enlèvement des tableaux à [ville C.] et les a déposés à son entrepôt. Après avoir récupéré les autres tableaux à [ville M.] le 5 février suivant, elle a livré l’ensemble le lendemain à 18 heures 32 à [ville R.], au domicile de M. C.-M. X., fils des époux X., qui a réceptionné ces tableaux sans réserves. La lettre de voiture portant mention de cette réception stipule encore « 8 tableaux. Déjà emballés, impossible contrôle marchandises » outre « tableaux emballés par le cabinet A. ».
M. C.-M. X. aurait le soir même de cette livraison, contacté par téléphone la société Force de Fret, transporteur, pour se plaindre de ce que l’une des toiles, le tableau peint par B., serait détériorée par une déchirure de plusieurs centimètres.
Mme X., acheteur et propriétaire des tableaux, a selon lettre recommandée avec accusé de réception du 7 février 2013, élevé une réclamation contre le transporteur en raison de la dégradation irréversible de ce tableau dont elle a sollicité la prise en charge. Elle a, avec son époux, également fait dresser un constat par huissier, lequel a été établi dès le 7 février 2013 à 13 heures 35.
La société Force de Fret ayant selon courriel du 7 mars 2013, fait part de son refus de supporter la responsabilité d’un sinistre qu’elle estimait être inventé de toutes pièces, Mme X. a le 5 août 2013, fait assigner la société Force de Fret ainsi que son assureur, la société Helvétia Compagnie Suisse d’Assurances (société Helvétia Assurances.) devant le tribunal de commerce de Nanterre, pour obtenir l’indemnisation de son préjudice et partant, la condamnation solidaire des sociétés défenderesses au paiement de 42.752,40 € correspondant au prix d’acquisition du tableau endommagé, frais d’enchères inclus outre, les intérêts au taux légal à compter du 11 février 2013 et 2.000 € à titre de frais irrépétibles.
M. X. est intervenu volontairement à la procédure.
Dans le dernier état de leurs écritures, les époux X. ont demandé aux premiers juges de :
- vu les dispositions des articles 1782 et suivants du code civil, L. 133-1, L. 133-3 et L. 133-6 du code de commerce, L. 211-7 et L. 216-1 du code de la consommation,
- recevoir Mme X. en son exploit introductif d’instance et M. X. en son intervention volontaire et les y déclarer bien fondés ;
- dire FFret et Helvetia CH mal fondées en leurs conclusions en toutes fins qu'elles comportent,
- les en débouter ;
- condamner solidairement, FFret et Helvetia CH à leur payer la somme de 42.752,40 € ainsi que le remboursement de la facture du constat d’huissier pour un montant de 340 € TTC au titre du préjudice subi, majorée des intérêts de droit à compter du 11 février 2013 ;
- condamner solidairement FFret et Helvetia CH à leur payer la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
- ordonner l’exécution provisoire nonobstant appel et sans caution ;
- condamner solidairement FFret et Helvetia CH aux entiers dépens.
Par jugement du 21 janvier 2016, le tribunal de commerce de Nanterre a tranché le litige en ces termes :
- constate que Helvetia Assurances SA n’est pas concernée par l’action des époux X.,
- met Helvetia Assurances SA hors de cause ;
- donne acte à Helvetia Compagnie Suisse d’Assurance de son intervention volontaire ;
- dit que Mme Y. épouse X. justifie de son intérêt à agir ;
- déboute Helvetia Compagnie Suisse d’Assurance de sa fin de non-recevoir ;
- constate l’intervention volontaire de Monsieur X. ;
- déboute Monsieur et Madame X. de 1’intégralité de leurs demandes au titre du préjudice subi ;
- condamne Mme Y. épouse X. à payer la somme de 1.000 € à la fois à la SARL Force de Fret et aussi à Helvetia Compagnie Suisse d’Assurances au titre de l’article 700 du CPC ;
- dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire ;
- condamne Mme Y. épouse X. aux entiers dépens ;
- liquide les dépens du Greffe à la somme de 152,64 € dont TVA 25,44 €.
Pour statuer ainsi, le tribunal a notamment retenu que :
- le contrat litigieux n’est pas un contrat de déménagement soumis au code de la consommation mais un contrat de transport soumis au code de commerce, notamment aux articles L. 133-1 et suivants du dit code ;
- dès lors, conformément aux dispositions du code de commerce et à la jurisprudence, lorsque le destinataire appose comme dans les circonstances de cette espèce sa signature sans émettre de réserves sur la lettre de voiture, la marchandise est présumée avoir été en bon état ;
- les époux X. qui n’apportent pas la preuve que les dommages subis par la toile ont été causés pendant le transport, doivent être déboutés de leur demande.
Les époux X. ont déclaré appel de cette décision.
La société Titanium Affrétement n’ayant pas constitué avocat, les appelants lui ont fait signifier cette déclaration d’appel par acte d’huissier du 30 mai 2016 (signification à personne morale.) ainsi que leurs ultimes conclusions selon acte du 24 mars suivant.
La société Helvetia a fait signifier ses propres écritures par acte d’huissier du 14 mars 2017.
La clôture de l’instruction a finalement été ordonnée le 28 mars 2017 et l’affaire a été fixée à l’audience tenue en formation collégiale le 18 avril suivant pour y être plaidée. A cette date, les débats ont été ouverts et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
CELA ETANT EXPOSÉ,
Vu les articles 474 alinéa 1 et 472 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Vu les ultimes conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 17 mars 2017 par les époux X. et le 24 février 2017 par la société Helvetia, auxquelles il est renvoyé par application des articles 455 et 954 du code de procédure civile pour une synthèse argumentative de la position de chaque partie, dont l’essentiel sera développé dans le cadre des motifs ci-après.
La Cour est saisie à titre principal, d’une demande d’indemnisation de préjudice que soutiennent subir les acquéreurs d’un tableau « [titre] » attribué à B., prétendument détérioré lors de son transport routier de [ville C.] à Paris, cette demande étant dirigée contre un voiturier, opérateur professionnel, et l’assureur de celui-ci.
Les époux X. précisent à l’appui de leur demande d’infirmation, que les premiers juges ont qualifié à tort le contrat litigieux de contrat de pur transport alors qu’aucun contrat écrit n’a été établi au mépris des dispositions légales applicables issues de l’article 8 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 dans sa rédaction applicable à la cause, la lettre de voiture n’ayant ainsi été présentée pour la première fois qu’après le dépôt des tableaux litigieux à destination, et alors que la prestation exécutée ne peut d’évidence relever que d’un contrat de transport déménagement.
Ils ajoutent fonder leur demande, en l’absence de contrat écrit, sur les dispositions du code civil relatives à la responsabilité quasi-délictuelle ou extracontractuelle excluant tout type de limitation de responsabilité et instituant le principe de la réparation intégrale et soulignent que :
- il appartient à la société Titanium Affrètement venant aux droits de la société Force de Fret d’établir qu’elle a rempli ses obligations et qu’elle a ainsi, fourni une information claire et non ambigüe sur sa prestation de service ;
- cette société, spécialisée dans le transport des œuvres d’art, pour les particuliers comme pour les professionnels, devait effectuer un transport avec tous les soins nécessaires et veiller à un emballage soigneux des tableaux transportés, conforme à la publicité rappelée sur l’en-tête de ses factures ;
- les règles de la profession auraient été que la société Titanium Affrètement procède au déballage des œuvres transportées pour les vérifier avant de les ré-emballer, afin de pouvoir exprimer d’éventuelles réserves faute de quoi, elle est présumée avoir pris les tableaux, même emballés, en bon état ;
- le prix payé inclut l’emballage, et le déménageur était redevable envers eux d’une obligation de résultat ;
- les dispositions du code de la consommation et les présomptions y afférentes, s’appliquent sans restriction de sorte que l’absence de réserves sur la lettre de voiture est sans portée et que la présomption de responsabilité découlant de l’article L. 133-1 du code de commerce pesant sur le transporteur doit trouver application, à l’instar de l’article L. 211-7 du code de la consommation [devenu article L. 217-7 du même code] ;
- le contrat de déménagement est un contrat d’entreprise, se différenciant du contrat de transport en ce que son objet n’est pas limité au déplacement du mobilier ;
- la livraison même en matière de transport exige la réunion de trois conditions soit, une acceptation manifeste par le destinataire de ce qui est livré, la possibilité pour ce destinataire de vérifier la qualité de ce qui est livré et enfin, celle de prendre matériellement possession de ce qui est livré ;
- le bon état de ce qui est l’objet de la livraison ne résulte pas de l’absence de constat de détérioration mais du constat de l’absence de détérioration ;
- tout indique en l’espèce, que la lettre de voiture présentée lors de la livraison n’est pas la lettre de voiture originelle signée par le remettant lors de l’enlèvement ;
- l’inscription portée de la main même du transporteur sur la lettre de voiture « 8 tableaux emballés, impossible contrôle marchandises » et « tableaux emballés par le Cabinet A. » établit ainsi qu’aucune présomption de livraison conforme ne peut jouer en faveur de la société Force de Fret/ Titanium dès lors que le transporteur reconnaît qu’il ne peut, contrairement à son obligation de résultat, garantir le bon état des tableaux ;
- une telle mention prive les époux X. de la possibilité de déterminer le responsable contre lequel ils pourraient se retourner, cette circonstance caractérisant une faute lourde du déménageur, présumé responsable des dégâts constatés sur le tableau transporté ;
- il incombe à la société Titanium Affrètement, tenue de procéder au déplacement sans détérioration des tableaux transportés, d’établir l’existence d’une cause exonératoire de responsabilité, le doute profitant au consommateur ;
- en l’espèce, le comportement du chauffeur-livreur et le retard mis par la société Force de Fret/ Titanium pour répondre à leur lettre de protestation adressée en lettre recommandée avec accusé de réception, sont de nature à établir que le transporteur et son préposé connaissaient pertinemment les dégâts dont la présence a été confirmée par le constat d’huissier établi le 7 février ;
- la mauvaise foi de cet opérateur professionnel est patente ;
- au vu des photos prises par l’huissier constatant, l’avarie a été manifestement commise par une manipulation brutale de colis à l’occasion d’un chargement et/ ou déchargement durant lequel un « coin » d’un autre tableau a été enfoncé dans la toile causant cet accroc ;
- il est constant que les tableaux ont fait l’objet de plusieurs transbordements, entre leur prise en charge ([ville C.] embarquement vers [ville M.], puis embarquement à [ville M.] vers [ville R.]) alors qu’entre le déchargement par le chauffeur-livreur et le constat par huissier, aucun des tableaux emballés n’a été déplacé ;
- l’antériorité de l’avarie par rapport à la livraison est corroborée par tous les éléments soumis à la Cour.
Les époux X. récapitulent leurs demandes selon le dispositif suivant :
- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- condamner in solidum ou solidairement la société Titanium Affrètement et la société Helvetia Compagnie Suisse d’Assurances, en sa qualité d’assureur, à payer, à Monsieur et Madame X., la somme de 42.752,40 €, ainsi que le remboursement de la facture du constat d’huissier pour un montant de 340 € TTC au titre du préjudice subi, majorée des intérêts de droit à compter du 11 février 2013,
- condamner la société Titanium Affrètement et la société Helvetia Compagnie Suisse d’assurances à payer, chacune, aux époux X.la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum ou solidairement la société Titanium Affrètement et la société Helvetia Compagnie Suisse d’Assurances aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction, dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile au profit de la Selarl Lexavoué Paris-Versailles.
La société Helvetia répond que les dispositions de l’article L. 211-7 du code de la consommation que les époux X. paraissent vouloir appliquer entre eux et la société Force de Fret/ Titanium, n’ont en réalité vocation à régir que les relations entre eux et le commissaire-priseur B. et ne traitent que de l’obligation du vendeur de livrer à l’acheteur un bien conforme à sa commande ;
- cet article n’a donc pas vocation à s’appliquer au cas d’espèce, qu’il s’agisse d’un contrat de transport ou d’un contrat de déménagement.
Elle précise que :
- le contrat litigieux est au demeurant un contrat de pur transport et non pas un contrat de déménagement ainsi qu’en attestent, les courriels échangés préalablement au transport entre la société Force de Fret et Mme X. ;
- aucun emballage n’a été commandé puisqu’il y avait déjà été procédé lors de la prise en charge par le transporteur des tableaux chez le commissaire-priseur ;
- nulle prestation d’entreposage n’a été sollicitée et la facture établie vise le « Transporteur : Navette Force de Fret » ;
- la présomption de livraison conforme, au demeurant non contestée par les appelants, est donc acquise à la société Force de Fret qui n’était pas garantie pour les activités de déménageur, d’emballeur, d’entrepositaire ou de manutentionnaire ;
- le tribunal a donc à bon droit, retenu la qualification de pur contrat de transport et fait application des seules dispositions des articles L. 133-1 et suivants du code de commerce.
Elle ajoute à titre subsidiaire, qu’à supposer que le contrat litigieux soit qualifié ainsi que le soutiennent les époux X., de « contrat de déménagement, contrat d’entreprise », l’action en réparation qu’ils exercent, serait mal fondée dès lors que, selon l’article L. 133-9 du code de commerce créé par la loi n° 2009-1053 du 8 décembre 2009, les entreprises de déménagement sont désormais soumises au régime de la responsabilité des transporteurs lorsque, comme dans les circonstances de cette espèce, la prestation objet du contrat comprend pour partie une prestation de transport ;
- il incombe au particulier de rapporter la preuve que le dommage s’est produit alors que le bien confié était sous la garde du voiturier sauf à se voir débouter de sa demande de réparation de préjudice ;
- les époux X. ne combattent nullement la présomption de livraison conforme et en bon état et paraissent même, être dans l’incapacité d’établir l’identité de la personne ayant véritablement réceptionné le tableau endommagé.
La société Helvetia récapitule finalement ses demandes par l’énoncé du dispositif qui suit :
- déclarer les consorts X. mal fondés en leur appel et les en débouter à toutes fins qu’il comporte,
- confirmer le jugement entrepris, au besoin par substitution de motifs,
En conséquence,
- dire et juger que la Société Titanium Affrètement bénéficie de la présomption de livraison conforme et en bon état,
- constater que les consorts X. ne contestent pas cette présomption, et/ ou au besoin dire et juger qu’ils n’apportent aucun élément susceptible de la combattre,
- les déclarer en conséquence mal fondés en leur action et les en débouter,
- dire et juger que la garantie de la Société Helvetia ne peut être recherchée en l’espèce,
- Très subsidiairement, dire et juger que les consorts X. ne justifient pas du préjudice qu’ils invoquent et que la garantie de la Compagnie Helvetia ne saurait de toute façon excéder la somme de 34.500 €,
- Et ajoutant, condamner solidairement les consorts X. à payer à la Société Helvetia Compagnie Suisse d’Assurances la somme de 15.000 € en remboursement des frais non taxables exposés en première instance et devant la Cour, ainsi qu’en tous les dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés directement, pour ceux le concernant, par Maître Pierre Guttin, avocat, conformément à l’article 699 du CPC [code de procédure civile].
[*]
Vu l’article L. 133-9 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause issue de la loi n° 2009-1503 du 8 décembre 2009 dont il ressort que, sans préjudice des articles L. 121-95 et L. 121-96 du code de la consommation [devenus les articles L. 224-63 et L. 224-64 du dit code], les dispositions des articles L. 133-1 à L. 133-8 [du code de commerce] relatives au voiturier s’appliquent aux entreprises de transport de déménagement dès lors que la prestation objet du contrat de déménagement comprend pour partie une prestation de transport ; vu l’article L. 224-63 du code de la consommation ainsi que les articles 1147 et 1382 du code civil [devenus 1231 et 1240 du dit code] ;
La Cour constate qu’après avoir précisément visé dans les conclusions soumises aux premiers juges, les articles 1782 et suivants du code civil, L. 133-1, L. 133-3 et L. 133-6 du code de commerce outre les articles L. 211-7 [devenu L. 217-7] et L. 216-1 du code de la consommation comme constituant l’assise juridique de leur demande, les époux X. ne visent plus aucun texte dans le dispositif de leurs écritures à hauteur de cour, se bornant à faire référence dans le corps de leur argumentaire, de manière indifférenciée et désordonnée, aux anciens articles 1147 et 1382 du code civil mais également, aux dispositions spécifiques du code de la consommation et du code de commerce.
L’action des époux X., s’analysant en une action indemnitaire exercée par un consommateur contre une société de transport professionnelle, commerciale par nature, les dispositions du code de commerce sont applicables au contrat litigieux, qu’il s’agisse d’un contrat de pur transport ou d’un contrat de déménagement. Les dispositions du code de la consommation, lorsqu’elles existent, s’appliquent également et l’emportent sur celles du code de commerce.
Il suit par ailleurs des dispositions légales sus-rappelées, claires et précises, que la question de la qualification du contrat de déménagement est résolue par le législateur dès lors que le contrat de déménagement est assimilé dans son régime à un contrat de transport lorsque la prestation, objet du contrat, comprend même seulement pour partie, une prestation de transport.
Telle est la situation dans laquelle se sont trouvés en l’espèce, les époux X. qui se prévalent donc à tort d’une différence entre le régime du contrat de pur transport et celui du contrat de déménagement.
Les époux X. établissent avoir fait constater par huissier le lendemain de la livraison du tableau litigieux-voir cote 5, la dégradation du papier bulle entourant ce tableau et le fait que cette toile était « percée » à l’emplacement de cette déchirure. Ils établissent également, avoir élevé le même jour auprès du voiturier, une réclamation à ce sujet.
Ayant respecté les exigences de l’article L. 224-63 du code de la consommation imposant au consommateur un délai de dix jours après réception des objets transportés pour formuler des réserves, ils sont fondes à agir en justice pour tenter de renverser la présomption de livraison conforme découlant de la réception sans réserves portée sur la lettre de voiture qu’ils produisent aux débats-voir cote 19.
Force est cependant de leur faire observer qu’ils échouent dans cette démonstration, aucun élément technique ou circonstanciel du dossier ne permettant de considérer avec certitude, que l’avarie incriminée est survenue durant le transport.
Le fait de soutenir qu’il y aurait eu substitution d’une lettre de voiture à une autre, après avoir au demeurant soutenu qu’aucune lettre de voiture n’a été établie au départ des marchandises transportées-voir p. 9 des conclusions des parties appelantes, ou que la belle-fille des époux X., seule présente au domicile du fils de ces derniers, destinataire des dits tableaux, a signé naïvement la lettre de voiture sans avoir été à même de vérifier les œuvres déchargées ou encore, que le chauffeur-livreur aurait adopté lors de la livraison, un comportement de nature à dissuader le réceptionnaire à vérifier l’état des tableaux, sont de simples allégations et restent au demeurant, inopérantes sur le plan probatoire.
Il est en effet constant, que les dégâts constatés sur le tableau peint par B. par le fils des époux X., ont à tout le moins, été décelés dans la demie heure ayant suivi sa livraison au domicile de ce dernier.
Il ne peut donc, être totalement exclu que la détérioration du tableau soit intervenue dans cet intervalle de temps.
A supposer même que les règles de la responsabilité contractuelle ou délictuelle aient vocation à s’appliquer, la responsabilité du voiturier n’apparaîtrait pas davantage pouvoir être établie par les circonstances de l’affaire puisque notamment, la société Titanium Affrètement justifie avoir satisfait à son obligation de résultat par la lettre de voiture portant mention d’une réception sans réserves et puisque par ailleurs, aucune faute précise du voiturier, qui soit en rapport direct avec la détérioration incriminée, n’est établie.
La responsabilité de la société Titanium Affrètement anciennement dénommée société Force de Fret n’étant pas retenue, la question de la mise en œuvre de la garantie de la société Helvetia Assurances est sans objet.
Le jugement entrepris sera donc purement et simplement confirmé.
Vu les articles 696 et 699 du code de procédure civile ;
Les époux X., parties perdantes au sens de ces dispositions, seront in solidum condamnées aux entiers dépens d’appel avec faculté de recouvrement direct en faveur de Maître Pierre Guttin, avocat.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Statuant en audience publique et par arrêt réputé contradictoire.
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Y AJOUTANT :
CONDAMNE in solidum M. X. et son épouse née Y. aux entiers dépens d’appel avec faculté de recouvrement direct en faveur de Maitre Pierre Guttin, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Vu l’article 700 du code de procédure civile ; CONDAMNE in solidum M. X. et son épouse née Y., à verser à la société Helvetia Compagnie Suisse d’Assurances, une indemnité de cinq mille euros (5.000 €.) à titre de frais irrépétibles d’appel.
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Dominique LOTTIN, Premier président et par Monsieur BOUTEMY, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier f. f., Le président,