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CA PARIS (pôle 4 ch. 1), 24 novembre 2017

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 4 ch. 1), 24 novembre 2017
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 4 ch. 1
Demande : 16/08267
Date : 24/11/2017
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2017-024344
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7252

CA PARIS (pôle 4 ch. 1), 24 novembre 2017 : RG n° 16/08267

Publication : Jurica

 

Extrait : « Toutefois, la clause dont s'agit n'est nullement abusive en ce que, limitée dans le temps à la durée du mandat et aux douze mois consécutifs suivant son expiration, elle ne crée aucun déséquilibre significatif entre les obligations des parties et est justifiée par la nécessité de rémunérer les diligences du mandataire qui, ayant rempli les obligations nées du mandat, ne saurait être frustré de son droit à honoraires par la fraude du mandant traitant directement avec un acquéreur présenté par ledit mandataire, à l'insu de ce dernier et à seule fins d'éluder le paiement des honoraires contractuellement dus ; La clause litigieuse ne sera donc pas déclarée non-écrite par application de l'article L. 132-1 du code de la consommation comme le requièrent sans fondement les appelants ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 4 CHAMBRE 1

ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/08267 (5 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 mars 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - R.G. n° 15/04112.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], Représenté par Maître Patricia H. de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, Assisté sur l'audience par Maître Jacques M. de la SCP EL K. M., avocat au barreau de PARIS

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [ville], demeurant [adresse], Représentée par Maître Patricia H. de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, Assistée sur l'audience par Maître Jacques M. de la SCP EL K. M., avocat au barreau de PARIS

 

INTIMÉE :

SAS PROPRIÉTÉS PRIVÉES

RCS de Nantes XXX, Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité. Ayant son siège au [adresse], Représentée par Maître Lucie T., avocat au barreau de PARIS, toque : C2169, Assistée sur l'audience par Maître Vincent C., avocat au barreau de NANTES, substitué sur l'audience par Maître Elodie M., avocat au barreau de NANTES

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 octobre 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Dominique DOS REIS, Présidente, Monsieur Dominique GILLES, Conseiller, Madame Christine BARBEROT, Conseillère, qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX

ARRÊT : CONTRADICTOIRE - rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Dominique DOS REIS, Présidente, et par M. Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Suivant acte sous seing privé du 23 mai 2013, M. et Mme X. ont donné mandat exclusif à la SAS Propriétés Privées agence immobilière, de rechercher un acquéreur pour le bien leur appartenant, sis [adresse], moyennant le prix de 1.166.000 euros.

Ce mandat était donné pour une durée irrévocable de trois mois et comportait une clause prévoyant :

« Pendant le cours du présent mandat et de ses renouvellements, le mandant s'interdit de de traiter directement ou par l'intermédiaire d'un autre mandataire la vente des biens ci-dessus désignés [adresse].

A défaut de respecter cette clause, le mandataire aurait droit à une indemnité forfaitaire, à titre de clause pénale, à la charge du mandant, d'un montant égal à celui de la rémunération, toutes taxes comprises, du mandataire prévue au présent mandat. En outre, dans les douze mois suivant l'expiration du mandat, le mandant s'interdit de traiter directement ou indirectement avec un acheteur présenté à lui par le mandataire ou un mandataire substitué [...].

A défaut de respecter cette clause, le mandataire aurait droit à une indemnité forfaitaire, à titre de clause pénale, à la charge du mandant, d'un montant égal à celui de la rémunération, toutes taxes comprises, du mandataire prévue au présent mandat ».

Dans la cadre de l'exécution de ce mandat, la SAS Propriétés Privées a fait visiter le bien de M. et Mme X. à Mme Z., laquelle a présenté une offre d'un million d'euros qui n'a pas été acceptée par M. et Mme X.

Après révocation du mandat consenti à la SAS Propriétés Privées, M. et Mme X. ont vendu leur bien à Mme Z., selon acte authentique du 22 janvier 2014, sans passer par l'intermédiaire de l'agence.

C'est dans ces conditions que la SAS Propriétés Privées, après avoir vainement tenté de recouvrer amiablement ses honoraires, a, par acte extra-judiciaire des 4 et 10 mars 2015, assigné M. et Mme X. à l'effet de les voir condamner au paiement d'une indemnité de 36.984 euros en exécution de la clause pénale insérée au mandat et d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.

Par jugement du 11 mars 2016, le tribunal de grande instance de Paris a :

- condamné conjointement M. et Mme X. à verser à la SAS Propriétés Privées la somme de 36.984 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 mars 2015 pour M. X. et du 10 mars 2015 pour Mme X.,

- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

- débouté la SAS Propriétés Privées de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. et Mme X. in solidum aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

 

M. et Mme X. ont relevé appel de ce jugement dont ils poursuivent l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions du 5 juillet 2016, de :

au visa des articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et 78 du décret du 20 juillet 1972, L. 132-1 et R. 132-2 du code de la consommation, 1152 du code civil,

- dire la clause pénale nulle et débouter la SAS Propriétés Privées de ses prétentions,

- dire subsidiairement ladite clause non-écrite et débouter la SAS Propriétés Privées de ses prétentions,

- plus subsidiairement, modérer la clause pénale et la fixer à un montant qui ne saurait excéder la somme de 3.600 euros,

- rejeter toutes autres prétentions de la SAS Propriétés Privées,

- la condamner aux dépens.

 

La SAS Propriétés Privées prie la Cour, par dernières conclusions du 20 juillet 2016, de :

au visa des articles 1134 et suivants du code civil, 78 du décret du 20 juillet 1972,

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en celle l'ayant déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum M. et Mme X. à lui payer les sommes de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de 3.000 euros au titre de ceux d'appel, en sus des dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Sur la validité de la clause pénale :

M. et Mme X., au soutien de leur appel, prétendent que la clause pénale insérée au mandat serait nulle parce que ses caractères, identiques à ceux des autres stipulations du mandat, ne seraient pas libellés de façon très apparente, contrairement aux exigences de la loi du 2 janvier 1970 et de son décret d'application du 20 juillet 1972 ;

Toutefois, la clause litigieuse qui figure au mandat, sous un titre en couleur rouge relatif aux obligations du mandant, est libellée en caractères gras et se détache nettement des autres paragraphes du mandat libellés en caractères ordinaires, de sorte que, rédigée en caractères très apparents, elle est valable et opposable à M. X. qui a paraphé pour lui-même et pour son épouse, la page du mandat mentionnant cette clause ;

 

Sur le caractère abusif de la clause :

M. et Mme X. soutiennent que le droit spécial de la consommation, qui interdit l'insertion dans un contrat de clauses interdisant au mandant, sous peine d'une indemnité, de traiter directement ou indirectement avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire, déroge au droit commun et conduit à déclarer non-écrite la clause pénale litigieuse ;

Toutefois, la clause dont s'agit n'est nullement abusive en ce que, limitée dans le temps à la durée du mandat et aux douze mois consécutifs suivant son expiration, elle ne crée aucun déséquilibre significatif entre les obligations des parties et est justifiée par la nécessité de rémunérer les diligences du mandataire qui, ayant rempli les obligations nées du mandat, ne saurait être frustré de son droit à honoraires par la fraude du mandant traitant directement avec un acquéreur présenté par ledit mandataire, à l'insu de ce dernier et à seule fins d'éluder le paiement des honoraires contractuellement dus ;

La clause litigieuse ne sera donc pas déclarée non-écrite par application de l'article L. 132-1 du code de la consommation comme le requièrent sans fondement les appelants ;

 

Sur le montant excessif de la clause pénale :

M. et Mme X. soutiennent que le montant de la clause pénale est disproportionné et doit être réduit ;

Toutefois, ce montant, égal aux honoraires dont l'agent immobilier a été frustré par la fraude des mandants n'apparaît nullement excessif ni disproportionné, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. et Mme X. à payer à la SAS Propriétés Privées une indemnité de 36.984 euros correspondant aux honoraires qui lui auraient été dus si les vendeurs étaient passés par son intermédiaire au lieu de traiter directement la vente de leur bien avec Mme Z. en violation de leurs engagements ;

Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions, excepté celle par laquelle il a rejeté la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par la SAS Propriétés Privées, et, statuant à nouveau, la Cour condamnera M. et Mme X. in solidum à lui payer les sommes de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de 3.000 euros au titre de ceux d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions, excepté celle par laquelle il a rejeté la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par la SAS Propriétés Privées,

Statuant à nouveau,

Condamne M. et Mme X. in solidum à payer à la SAS Propriétés Privées les sommes de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de 3.000 euros au titre de ceux d'appel,

Rejette toute autre prétention,

Condamne in solidum M. et Mme X. aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,                           La Présidente,