CA PARIS (pôle 1 ch. 5 - 1er pdt), 6 décembre 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 7297
CA PARIS (pôle 1 ch. 5 - 1er pdt), 6 décembre 2017 : RG n° 17/16329
Publication : Jurica
Extrait : « Le risque de non restitution des sommes, d'ores et déjà établi, est renforcé par l'absence à la présente procédure de la société Vestale qui, bien que régulièrement assignée n'apporte donc aucun élément de nature à contredire les affirmations et pièces produites par la société Amundi PEF. Dès lors, il y a lieu, en présence d'un risque de non restitution des sommes, de constater que les conséquences manifestement excessives exigées par le texte susvisé sont établies et d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce de Paris du 10 juillet 2017. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 1 CHAMBRE 5 – PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 6 DÉCEMBRE 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 17/16329.Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 juillet 2017 du Tribunal de Commerce de PARIS - R.G. n° 2015014888. Nature de la décision : Réputée contradictoire.
NOUS, Sylvie KERNER-MENAY, Présidente, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Cécilie MARTEL, Greffière.
Vu l'assignation en référé délivrée à la requête de :
DEMANDERESSE :
SA AMUNDI PRIVATE EQUITY FUNDS
Représentée par la SCP AFG, avocats postulants au barreau de PARIS, toque : L0044, Assistée de Maître Gwénaëlle DE G., avocat au barreau de PARIS, toque : P0372
à
DÉFENDERESSE :
SAS VESALE CONSEIL, anciennement VESALE PARTNERS
Non comparante ni représentée à l'audience
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 8 novembre 2017 :
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La SA Amundi Private Equity Funds (Amundi PEF) est une société de gestion agréée par l'Autorité des marchés financiers ayant pour activité la gestion de différents types de produits d'investissement.
Par une convention du 13 juillet 2011 homologuée par l'Inspection du travail, cette société a formalisé avec l'un de ses salariés M. X. les modalités d'une rupture conventionnelle du contrat de travail effective à compter du 28 juillet 2011.
Le 25 juillet 2011, M. X. et la société Amundi PEF ont formalisé un accord en vertu duquel les parties décident l'externalisation, dans une société de gestion à créer par M. X. (SAS Vesale Partners), des trois fonds SGAM AI Biotechnology Funds FCPR, GENAVENT FCPR et GENAVENT LP jusqu'alors gérés par ce dernier et son équipe au sein de la société Amundi PEF sous la condition, notamment, de l'obtention de l'accord de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) et des porteurs de parts des fonds concernés.
Il était également prévu que M. X. réalise une mission transitoire de prestation de conseil au titre de ces trois fonds, rémunérée forfaitairement sur la base d'un montant mensuel de 10.000 euros HT dans l'attente du transfert effectif des fonds, ce qui sera formalisé par une convention du 8 septembre 2011 couvrant la période du 1er septembre 2011 au 31 janvier 2012, convention sera prorogée par 3 avenants successifs.
Le 25 septembre 2012, une nouvelle convention de conseil était formalisée entre la société Amundi et Vesale Partners au titre des prestations de conseil pour les fonds GENAVENT FCPR et GENAVENT LP dont le transfert n'était pas encore réalisé. Celle-ci énonçait le contour de la mission et les conditions de rémunération jusqu'au 31 décembre 2013. Cette convention laissait aux parties le soin de négocier le montant des rémunérations de conseil au-delà de cette date.
Les parties se sont opposées sur la mise en œuvre de leurs obligations contractuelles et par acte du 16 janvier 2015, la SAS Vesale Partners et M. X. ont fait assigner la société Amundi PEF devant le tribunal de commerce de Paris, aux fins principalement d'obtenir de celui-ci qu'il juge que la société Amundi PEF a engagé sa responsabilité civile en méconnaissant ses obligations contractuelles d'avoir à apporter en gestion l'ensemble des fonds convenus tel que cela ressortait expressément des conventions conclues, notamment la convention-cadre du 25 juillet 2011, et en modifiant gravement l'économie de la convention-cadre au préjudice de la société Vesale Partners ; qu'il juge que la société Amundi PEF a brutalement rompu la convention de conseil établie du 25 septembre 2012 sans aucun préavis préalable en violation de la loi et de la convention des parties ; que le comportement de la société Amundi PEF qui a consisté à imposer à la société Vesale Partners, sur le plan financier, et sans négociation préalable, des modifications dans l'économie de la convention des parties, a été à l'origine d'un déséquilibre significatif préjudiciable entre les parties, et condamne en tout état de cause la société Amundi PEF à régler à la société Vesale Partners la somme de 58.302 euros TTC au titre des 6 mois de commissions prévues par le règlement du fonds Biotechnology Fund. La société Amundi PEF a conclu au rejet de ces demandes et à titre subsidiaire a sollicité la désignation d'un expert afin de déterminer le préjudice éventuellement subi par la société Vesale Partners et par M. X.
Par jugement du 10 juillet 2017, le tribunal de commerce de Paris a :
- condamné la société Amundi Private Equity Funds à payer à la société Vesale Partners la somme de 58.302 euros au titre de la facture 3 janvier 2016 ;
- dit que la société Amundi Private Equity Funds a manqué à son obligation de loyauté contractuelle et a créé un déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6-I-2 du code de commerce qui engage sa responsabilité ;
- dit n'y avoir lieu à désignation d'un expert ;
- condamné la société Amundi Private Equity Funds à verser à la société Vesale Partners la somme de 313.533 euros à titre de dommages et intérêts ;
- condamné la société Amundi private Equity Funds à verser à la société Vesale Partners la somme de 10.000 euros en réparation de la perte de chance découlant de la perte de l'agrément AMF ;
- débouté M. X. de sa demande en réparation de son préjudice personnel ;
- condamné la société Amundi Private Equity Funds à verser à la société Vesale Partners la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- condamné la société Amundi Private Equity Funds aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 144,84 euros dont 23,92 euros de TVA.
Par déclaration du 24 juillet 2017, la société Amundi PEF a interjeté appel de cette décision.
Par acte extra-judiciaire du 24 août 2017, la société Amundi PEF a fait assigner en référé devant le premier président de la cour d'appel de Paris la société Vesale Partners aux fins d'obtenir, à titre principal, la suspension de l'exécution provisoire du jugement du 10 juillet 2017 en raison du risque de non-recouvrement par la société Amundi PEF en cas d'infirmation de cette décision, ou à titre subsidiaire, la consignation des sommes que la société Amundi PEF a été condamnée à payer.
La société Amundi PEF fait valoir à l'audience, selon les termes de son assignation, que l'exécution provisoire du jugement du 10 juillet 2017 entraînerait pour elle des conséquences manifestement excessives en raison d'un risque de non-recouvrement des sommes en cas d'infirmation de la décision première instance. En effet elle soutient que la société Vesale Partners a été dissoute suivant une décision prise par son assemblée générale extraordinaire le 27 novembre 2015. Par ailleurs, la situation financière de la société Vestale Partners est irrémédiablement compromise puisqu'elle ne perçoit plus de revenus depuis le 1er janvier 2016, son résultat net pour l'exercice 2015 s'élevant à 27.792 euros, et M. X., pris en sa qualité d'actionnaire et de liquidateur de la société Vesale Conseil étant en droit d'organiser une remontée de dividendes d'un montant égal aux sommes versées par la société Amundi en application du jugement attaqué.
La société Amundi PEF sollicite par ailleurs la condamnation de la société Vesale Partners à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Assignée à l'adresse de son siège social, entre les mains de Mme T., employée habilitée de la société Vesale Partners, cette dernière ne s'est pas présentée et ne s'est pas fait représenter.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LE PREMIER PRÉSIDENT :
En vertu de l'article 524 du code de procédure civile, lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, par le premier président statuant en référé que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.
Les conséquences manifestement excessives doivent être appréciées par rapport à la situation du débiteur compte tenu de ses facultés par rapport à celles de remboursement de la partie adverse.
Il n'appartient pas au premier président de porter une appréciation sur le fond du litige et ce quelles que soient les critiques éventuellement encourues par la décision attaquée. Il s'ensuit que les développements et nombreuses pièces produites sur le fond du litige sont inopérants.
La société Amundi PEF invoque, à l'appui de sa demande, le risque de non-restitution par la société Vestale Partners de la somme totale de 396.979,84 euros au paiement de laquelle elle a été condamnée en vertu du jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 10 juillet 2017.
La somme à recouvrer de 396.979,84 euros est importante et il est justifié que la société Vesale Partners a fait l'objet d'une liquidation amiable en vertu d'un procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire en date du 27 novembre 2015, M. X. étant désigné liquidateur amiable. Par ailleurs, il est établi que cette société Vesale Partners n'a enregistré que des pertes pour les exercices 2013 à 2015 et a présenté un chiffre d'affaires en diminution constante.
Le risque de non restitution des sommes, d'ores et déjà établi, est renforcé par l'absence à la présente procédure de la société Vestale qui, bien que régulièrement assignée n'apporte donc aucun élément de nature à contredire les affirmations et pièces produites par la société Amundi PEF.
Dès lors, il y a lieu, en présence d'un risque de non restitution des sommes, de constater que les conséquences manifestement excessives exigées par le texte susvisé sont établies et d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce de Paris du 10 juillet 2017.
L'équité commande de condamner la Vesale Partners à payer à la société Amundi PEF la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. Elle supportera également la charge des dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Arrêtons l'exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 10 juillet 2017 ;
Condamnons la SAS Vesale Partners devenue la SAS Vesale Conseil à payer à la SA Amundi Private Equity Funds la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons la SAS Vesale Partners devenue Vesale Conseil aux dépens de la présente instance.
ORDONNANCE rendue par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente