CA NANCY (5e ch. com.), 8 avril 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 7361
CA NANCY (5e ch. com.), 8 avril 2015 : RG n° 14/01689 ; arrêt n° 823/15
Cassé par Cass. com., 12 juillet 2017 : pourvoi n° 15-23552 ; arrêt n° 1066 ; Bull. civ.
Publication : Jurica
Extrait : « Il est par ailleurs constant, que le contrat d'abonnement Diffus'Est prévoit de manière expresse en ses articles 4 et 11, le versement de redevances mensuelles en faveur d'un organisme de financement et qu'ainsi, les contrats litigieux s'inscrivent à l'évidence, dans un même ensemble contractuel.
C'est donc à tort que les premiers juges ont dans les circonstances précises de cette espèce, estimé que cette indivisibilité permettait de considérer que la résiliation anticipée du contrat du location avait nécessairement provoqué la résiliation du contrat de prestation de services dès lors qu'il ressort des énonciations même de ce dernier contrat, conclu pour une durée fixe et irrévocable, qu'une telle résiliation était contraire à la loi convenue entre les parties.
Le jugement entrepris sera infirmé et la société B. sera en application de l'article 12, condamnée au paiement d'une indemnité contractuelle de 6.549,12 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 septembre 2011. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE NANCY
CINQUIÈME CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 8 AVRIL 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/01689. Arrêt n° 823/15. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Commerce d'EPINAL, R.G. n° 2012010118, en date du 11 février 2014.
APPELANTE :
SAS DIFFUS'EST
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, immatriculée au RCS D'EPINAL sous le n° XXX, dont le siège social est [adresse], Plaidant par Maître Denis J. de la SELARL ALINEA LEX, avocat au barreau d'EPINAL
INTIMÉE :
SARL B.
sise [adresse], Plaidant par Maître Loïc D. de la SCP J. D., avocat au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 905 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 24 février 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvie MESLIN, Président de Chambre chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Sylvie MESLIN, Président de Chambre, Madame Bénédicte SOULARD, Conseiller, Monsieur Jacques LAFOSSE, Vice-Président placé par ordonnance du Premier Président en date du 12 décembre 2014.
Greffier, lors des débats : Madame Christelle CLABAUX-DUWIQUET ;
A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 8 avril 2015, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
ARRÊT : Contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 8 avril 2015, par Madame Christelle CLABAUX-DUWIQUET, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Madame Sylvie MESLIN, Président de Chambre, et par Madame Christelle CLABAUX-DUWIQUET, greffier ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l'appel déclaré le 10 juin 2014 par la société par actions simplifiée Diffus'Est (société Diffus'Est.) contre le jugement prononcé le 11 février 2014 par le tribunal de commerce d'Épinal dans l'affaire l'opposant à la société à responsabilité limitée B. (société B.) :
Vu le jugement entrepris ;
Vu, enregistrées par ordre chronologique, les ultimes e-conclusions présentées le :
- 15 janvier 2015 par la société B., intimée,
- 2 février 2015 par la société Diffus'Est, appelante ;
Vu l'ensemble des éléments et pièces du dossier.
SUR CE,
La Cour se réfère au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales.
Il suffit, en synthèse, de rappeler les éléments constants suivants, notamment tirés des écritures d'appel des parties, la compréhension des données factuelles d'un litige servant de support à l'analyse juridique de celui-ci.
1. Données analytiques, factuelles et procédurales, du litige
La société Diffus'Est a dans le cadre d'un abonnement de surveillance électronique signé le 23 avril 2007, mis du matériel de protection à la disposition de la société B. pour une durée de 48 mois renouvelables.
Ce contrat, prévoyait l'intervention d'un organisme financier auquel était versée une redevance mensuelle, la société Grenke Location.
Une des centrales électroniques auto alimentées, équipait également le domicile voisin de M. B., ancien gérant où se trouvaient notamment un bureau et un local de stockage de l'entreprise.
Le 14 juin 2010, la société B. a souhaité changer de prestataire et a ainsi souscrit plusieurs contrats auprès de la société CEP Protection laquelle s'est engagée à prendre en charge le coût financier de la résiliation anticipée du contrat en cours auprès de la société Grenke Location.
Cette résiliation anticipée a été notifiée le 6 octobre 2010 à cette dernière, à qui le matériel a par ailleurs été restitué.
Au terme du contrat de 48 mois, la société Diffus'Est a indiqué à la société B. que le contrat avait été reconduit pour une nouvelle période de dix-huit mois et que le nouveau matériel était prêt à être installé.
La société B. n'a pas donné suite à ce courrier.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 septembre 2011, la société Diffus'Est l'a alors mise en demeure de procéder à l'installation du matériel ou de lui régler 6.549,12 euros hors taxes au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation anticipée.
Malgré plusieurs entretiens téléphoniques entre les deux sociétés, aucune solution amiable n'a pu aboutir.
La société Diffus'Est a saisi le tribunal de commerce d'Épinal pour obtenir la condamnation de la société B.
Aux termes du jugement du 11 février 2014, le tribunal de commerce d'Épinal a énoncé sa décision sous forme de dispositif dans les termes suivants :
- vu l'article 1134, 1217 et 1218 du code civil,
- vu les deux arrêts du 17 mai 2013 (n° 11-22768 et 11-22927) par la Chambre mixte de la Cour de cassation,
- vu les pièces produites,
- dit que la SARL B. a valablement résilié le contrat d'abonnement du 3 avril 2007,
- déboute la société Diffus'Est de l'ensemble de ses demandes,
- condamne la société Diffus'Est à payer à la SARL B. la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et déboute la SARL B. du surplus de sa demande,
- condamne la société Diffus'Est aux entiers dépens de l'instance,
- ordonne l'exécution provisoire pour l'ensemble des condamnations prononcées.
La société Diffus'Est a déclaré appel de cette décision.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 11 février 2015 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience tenue en formation de juge rapporteur du 24 février 2015.
A cette date, les débats ont été ouverts et l'affaire a été mise en délibéré.
2. Prétentions et Moyens des Parties
Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile.
La Cour renvoie aux écritures ci-dessus visées pour un exposé complet des argumentaires des parties, dont l'essentiel sera développé lors de l'analyse des moyens et prétentions qui y sont articulés.
Ces écritures récapitulent les demandes par l'énoncé des dispositifs suivants :
La société Diffus'Est prie la Cour de :
- recevoir la SAS Diffus'Est en son appel et le déclarer bien fondé,
- vu les articles 1108, 1134 et 1147 du code civil,
- dire et juger que la SARL B. n'a pas respecté les conditions de résiliation du contrat souscrit auprès de la société Diffus'Est le 23 avril 2007,
- en conséquence,
- infirmer le jugement entrepris,
- condamner la SARL B. à verser à la SAS Diffus'Est la somme de 6.549,12 euros, soit 48 mensualités de 136,44 euros outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 septembre 2011,
-condamner la SARL B. à verser à la SAS Diffus'Est la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,
-condamner la SARL B. en tous les dépens d'instance et d'appel.
La société B. demande pour sa part, qu'il plaise à la Cour de :
- vu l'article 1134 du code civil,
- vu l'article L. 136-1 du code de la consommation,
- vu les pièces produites,
- dire et juger que les Etablissements B. ont valablement résilié le contrat d'abonnement du 23 avril 2007 et n'ont commis aucun manquement à leurs obligations contractuelles,
- dire et juger subsidiairement que la société Diffus'Est n'a pas respecté les dispositions de l'article L. 136-1 du code de la consommation et prononcer en conséquence la résiliation du contrat d'abonnement du 23 avril 2007, sans frais pour les Établissements B.,
- en conséquence :
- déclarer la société Diffus'Est mal fondée en son appel,
- l'en débouter ainsi que de l'ensemble de ses fins, moyens et conclusions,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- condamner la société Diffus'Est aux entiers frais et dépens d'appel,
- condamner la société Diffus'Est à payer aux Établissements B. une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC [code de procédure civile].
La société Diffus'Est a déclaré appel de cette décision.
La clôture de l'instruction a ordonnée le 11 février 2015 et l'affaire a été renvoyée à l'audience tenue en formation de juge rapporteur le 24 février 2015 pour y être plaidée.
A cette date, les débats ont été ouverts et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
CELA ETANT EXPOSÉ, LA COUR,
La Cour statue sur les conditions de résiliation d'un contrat de mise à disposition d'un matériel de surveillance et de protection signé par la société B. exploitant un restaurant, avec la société Diffus' Est, fournisseur du dit matériel par ailleurs loué auprès d'une autre société, la société Grenke Location précision étant faite que les parties sont contraires sur l'incidence de la résiliation de ce contrat de location sur le contrat de prestation d'abonnement et de mise à disposition et non sur la situation inverse.
La société Diffus'Est fait grief aux premiers juges d'avoir décidé que les contrats de mise à disposition et de location étaient interdépendants et que le fait pour le bailleur du matériel litigieux d'avoir accepté la restitution du matériel loué valait nécessairement, résiliation du contrat de fourniture de ce même matériel alors que par surcroît, le preneur a, au mépris de ses obligations contractuelles, fait appel à son nouveau partenaire, la société CEP Protection, pour procéder au démontage et à la restitution du matériel.
Elle observe : - que la société B. l'a, en se retranchant derrière une prétendue légitimité de la société bailleresse, sciemment et en toute mauvaise foi, évincée du processus de résiliation du contrat de prestation signé entre elles pour pouvoir librement s'adresser à une société concurrente' alors qu'elle ne pouvait lui imputer à faute, aucun manquement contractuel ; - que c'est donc à bon droit, qu'elle lui a demandé de respecter ses obligations contractuelles et qu'à défaut, elle a fait usage de la clause résolutoire prévue à l'article 12 du contrat signé le 23 avril 2007.
La société B. réplique que dès lors qu'elle a informé en temps utile son interlocuteur naturel, le loueur, de sa volonté de mettre fin par anticipation au contrat litigieux, cette résiliation anticipée impliquait par définition, le non-renouvellement de ce contrat à son terme et ce, d'autant plus qu'il ressort des clauses du contrat litigieux que ce dernier formait un ensemble indivisible. Elle ajoute que les causes ou les motifs de cessation des contrats concernés qui ne peuvent exister l'un sans l'autre et réciproquement, importent peu dans ces conditions et qu'il ne saurait quoi qu'il en soit lui être fait grief, d'avoir restitué le matériel litigieux au loueur puisque celui-ci en était le propriétaire.
Vu l'article 1134 du code civil dont il ressort que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et qu'elles doivent être exécutées de bonne foi.
Il ressort des éléments et pièces versées aux débats que la société B. a le 23 avril 2007, signé auprès de la société Diffus'Est, un contrat de prestation de service de surveillance électronique portant notamment sur la fourniture et l'installation de deux centrales électroniques auto alimentées pour une « durée fixe et irrévocable » de 48 mois renouvelables et qu'elle a par ailleurs, signé le 2 mai suivant, pour une durée identique, un contrat de location du matériel nécessaire auprès de la société Grenke Location ; qu'une convention de résiliation de ce contrat de location est intervenue le 11 octobre 2010 soit plus de six mois avant l'échéance convenue sous condition de paiement du solde des loyers à échoir soit 979,09 euros toutes taxes comprises ; qu'enfin, le matériel a été restitué à cette dernière le 29 avril 2011 après démontage de ce matériel au mépris des stipulations de l'article 5 in fine du contrat.
Il est par ailleurs constant, que le contrat d'abonnement Diffus'Est prévoit de manière expresse en ses articles 4 et 11, le versement de redevances mensuelles en faveur d'un organisme de financement et qu'ainsi, les contrats litigieux s'inscrivent à l'évidence, dans un même ensemble contractuel.
C'est donc à tort que les premiers juges ont dans les circonstances précises de cette espèce, estimé que cette indivisibilité permettait de considérer que la résiliation anticipée du contrat du location avait nécessairement provoqué la résiliation du contrat de prestation de services dès lors qu'il ressort des énonciations même de ce dernier contrat, conclu pour une durée fixe et irrévocable, qu'une telle résiliation était contraire à la loi convenue entre les parties.
Le jugement entrepris sera infirmé et la société B. sera en application de l'article 12, condamnée au paiement d'une indemnité contractuelle de 6.549,12 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 septembre 2011.
Vu l'article 696 du code de procédure civile.
La société B. qui succombe à titre principal sera condamnée au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.
Vu l'article 700 du code de procédure civile.
L'issue du litige et l'équité commande de condamner la société B. au paiement d'une indemnité de 3.000 euros à titre de frais irrépétibles.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire.
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT
CONDAMNE la société à responsabilité limitée B., à payer à la société par actions simplifiée Diffus'Est, la somme de six mille cinq cent quarante-neuf euros douze centimes (6.549,12 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2011.
CONDAMNE la société à responsabilité limitée B. aux entiers dépens de première instance et d'appel.
CONDAMNE la société à responsabilité limitée B. à payer à la société par actions simplifiée Diffus'Est, une indemnité de trois mille euros (3.000 euros.) à titre de frais irrépétibles de première instance et d'appel.
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Minute en cinq pages.