CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (pôle 5 ch. 9), 19 janvier 2012

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 9), 19 janvier 2012
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 9
Demande : 07/03096
Date : 19/01/2012
Mode de publication : Jurica
Décision antérieure : CASS. COM., 2 juillet 2013
Décision antérieure :
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 7389

CA PARIS (pôle 5 ch. 9), 19 janvier 2012 : RG n° 07/03096 

Sur pourvoi Cass. com., 2 juillet 2013 : pourvoi n° 12-21394 ; arrêt n° 690

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant que la thèse de la CMED et de son mandataire ad hoc, qui n'hésitent même plus aujourd'hui à soutenir que la créance de la banque doit être admise pour 3.055.738 euros ne saurait davantage être retenue, étant écarté le moyen tiré de la novation de « la restructuration du 5 novembre 1998 » tout simplement parce que la novation ne se présume pas ; que le taux des intérêts ne peut plus aujourd'hui être contesté du fait de la prescription ; que la capitalisation des intérêts a été convenue ; que l'indemnité pour poursuite (456.764 euros) n'est pas une clause pénale ; que la clause pénale (242.047 euros) n'est pas abusive ; que le sens du présent arrêt rend sans objet la demande dommages et intérêts pour « déclaration abusive de créance » ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 9

ARRÊT DU 19 JANVIER 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/03096 (5 pages). Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 8 janvier 2007 du juge-commissaire du Tribunal de Commerce de PARIS – R.G. n° 05/3787.

 

APPELANTE :

Société anonyme BNP PARIBAS venant aux droits de la Société BANQUE PRIVÉE ANJOU anciennement dénommée Société DEXIA BANQUE PRIVÉE FRANCE venant aux droits de la BANQUE VERNES ARTESIA

ayant son siège [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, représentée par Maître Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour, assistée de Maître Jérôme DE FREMINVILLE, avocat au barreau de PARIS Toque : W15

 

INTERVENANTE VOLONTAIRE et comme telle INTIMÉE :

Maître Leila BELHASSEN - POITEAUX ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL CMED

demeurant [adresse], représentée par la SCP PETIT - LESENECHAL, avoué à la Cour, assistée de Maître Claude BADIER, avocat au barreau de PARIS Toque : R 209

 

INTIMÉE :

Maître Leïla BELHASSEN - POITEAUX ès qualités de représentant des créanciers de la SARL CMED

demeurant [adresse], représentée par la SCP PETIT-LESENECHAL, avoué à la Cour, assistée de Maître Claude BADIER, avocat au barreau de PARIS Toque R 209

 

INTIMÉ :

Maître Gérard PHILIPPOT ès qualités d'administrateur judiciaire de la SARL CMED

demeurant [adresse],  représenté par la SCP PETIT - LESENECHAL, avoué à la Cour

 

INTIMÉE :

SARL CMED

ayant son siège [adresse], prise en la personne de son mandataire ad hoc Monsieur X. domicilié en cette qualité audit siège, représentée par Maître Lionel MELUN, avoué à la Cour, assistée de Maître Olivier CUPERLIER, avocat au barreau de PARIS Toque : k 18

 

INTERVENTION VOLONTAIRE :

Monsieur X. ès qualités d'ancien gérant et de mandataire ad hoc de la SARL CMED

demeurant [adresse], représenté par Maître Lionnel MELUN, voué à la Cour, assisté de Maître Olivier CUPELIER, avocat au barreau de PARIS Toque K 18

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 10 novembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Patrice MONIN-HERSANT, Président, Monsieur Edouard LOOS, Conseiller, Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller, qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l’article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Monsieur Daniel COULON

MINISTÈRE PUBLIC : l'affaire a été communiquée au Ministère Public,

ARRÊT : - contradictoire, - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, - signé par Monsieur Patrice MONIN-HERSANT, Président, et par Monsieur Daniel COULON, Greffier présent lors du prononcé.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR,

Vu l'ordonnance du juge-commissaire du redressement judiciaire de la société CMED, rendue le 8 janvier 2007, qui a dit qu'il convenait « de surseoir à statuer sur la demande du créancier dans l'attente du rapport de l'expert »,

Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par la société DEXIA BANQUE PRIVÉE FRANCE, qui y a été autorisée par ordonnance du délégataire du premier président en date du 13 février 2007, rectifiée par ordonnance du 20 mars 2007,

Vu l'arrêt rendu par cette cour le 28 juin 2007, qui a infirmé l'ordonnance déférée, qui a dit qu'il y avait lieu d'évoquer et qui a renvoyé l'affaire en continuation à l'audience du mercredi 19 septembre 2007 à 9h30, les parties étant invitées à prendre partie, avant cette date, sur la question de conférer à la cour une mission d'amiable compositeur,

Vu l'arrêt rendu par cette cour le 6 décembre 2007, qui a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée du jugement du 13 mars 2007 et qui, avant dire droit, a ordonné une mesure d'instruction confiée à M. T., avec mission de se faire remettre par les parties tous documents utiles et d'entendre contradictoirement toutes personnes qui lui paraîtraient utiles, notamment parmi les auteurs d'attestations versées aux débats, afin de donner son avis sur les relations qu'a entretenues la banque avec son client, sur les accords que la première a pu prendre pour diminuer la dette de la seconde, sur la manière dont ces accords se sont ou pouvaient se traduire dans la comptabilité de la société CMED, sur la question des « intérêts réservés » et de donner tous éléments pour permettre de déterminer, en principal et intérêts, le montant de la créance de la banque à admettre au passif de la société CMED, toutes les hypothèses devant être envisagées eu égard aux différentes contestations de la société CMED, qui pourraient être retenues par la cour,

Vu l'arrêt rendu par cette cour le 14 octobre 2010, qui a invité les parties à conclure sur l'application dans le présent litige du dernier alinéa de l’article 12 du code de procédure civile,

Vu l'arrêt rendu par cette cour le 16 décembre 2010, qui a désigné le CENTRE DE MEDIATION ET D'ARBITRAGE DE PARIS et agréé M. F. pour procéder, par voie de médiation, à la confrontation des points de vue respectifs des parties et, si possible, à la négociation d'un protocole manifestant l'accord amiable intervenu,

Vu les dernières conclusions déposées le 12 octobre 2011 par la société BNP PARIBAS venant aux droits de la BANQUE PRIVÉE ANJOU anciennement dénommée DEXIA BANQUE PRIVÉE FRANCE, appelante,

Vu les dernières conclusions déposées le 29 septembre 2011 par la société CMED, intimée, et par M. X., ès qualités de mandataire ad hoc de la CMED, intervenant volontairement,

Vu les conclusions déposées le 4 avril 2007 par Maître Gérard Philippot, intimé ès qualités d'administrateur judiciaire de la société CMED.

Vu les dernières conclusions déposées le 21 avril 2010 par v Leïla Belhassen, intimée ès qualités de représentant des créanciers de la société CMED et intervenant volontairement en qualité de liquidateur de cette même société,

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Considérant qu'il est constant qu'une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la SARL CMED (activité de location immobilière) par un jugement rendu le 31 octobre 2005 sur déclaration de cessation des paiements ; que la DEXIA BANQUE PRIVÉE, dénommée ensuite BANQUE PRIVÉE ANJOU et aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la BNP PARIBAS, la DEXIA BANQUE PRIVÉE étant elle-même venue aux droits et obligations de la BANQUE VERNES ARTESIA, anciennement dénommée BANQUE VERNES, elle-même anciennement dénommée BANQUE INDUSTRIELLE ET COMMERCIALE DU MARAIS, a régulièrement produit au passif le 14 novembre 2005, déclaration rectifiée le 3 février 2006, pour 13.385.769,84 euros à titre privilégié et hypothécaire, outre intérêts à échoir, et 3.457,64 euros à titre chirographaire ;

Considérant que la banque, dans sa déclaration rectificative du 3 février 2006, se prévaut, au titre de sa créance à titre privilégié et hypothécaire, d'une ouverture de crédit de 3.109.959,95 euros consentie par un acte notarié du 16 octobre 1989, d'une ouverture de crédit de 3.003.245,64 euros consentie par un acte notarié du 23 juin 1993, d'une ouverture de crédit de 914.694,10 euros consentie par un acte notarié du 25 novembre 1993 et d'un prêt de 1.056.471,69 euros au taux de 6 % consenti par un acte notarié du 31 mai 1996, la dernière échéance de remboursement étant fixée au 31 mai 2014, étant précisé, d'une part, que les trois ouvertures de crédit ont fait l'objet d'une prorogation de délais au 31 mai 2014 par trois actes notariés du 31 mai 1996, d'autre part que, le 31 mai 2000, la banque a adressé des tableaux d'amortissements desquels il ressort que la dette a été une nouvelle fois réaménagée le 30 novembre 1998 avec la mise en place d'un crédit à long terme de 8.338.961,20 euros, la dernière échéance de remboursement étant fixée au 15 novembre 2013 ;

Considérant que la créance a été contestée en totalité le 19 juin 2006 ; que la banque a répondu à la contestation le 18 juillet 2006, maintenant sa créance à titre privilégié pour 13.317.239 euros ; que c'est dans ces conditions qu'a été rendue l'ordonnance de sursis à statuer dont la banque a été autorisée à faire appel, sursis motivé par une ordonnance rendue le même jour par le juge-commissaire sur requête de Maître Philippot, administrateur judiciaire de la CMED, et ayant désigné un expert pour faire les comptes entre les parties ; qu'il convient de préciser, d'une part, que les parties avaient vainement tenté de parvenir à un accord avant l'ouverture de la procédure collective, d'autre part, que le tribunal a, par jugement rendu le 13 mars 2007 sur le recours formé par la banque contre l’ordonnance du 8 janvier 2007 ayant désigné un expert, annulé cette ordonnance, enfin, que la CMED est aujourd'hui définitivement liquidée ;

Considérant que la Cour, dans son précédent arrêt du 28 juin 2007, a relevé que les motifs du sursis avaient disparu et a en conséquence infirmé l'ordonnance déférée ; qu'elle a estimé de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive et a fait droit à la demande d'évocation, invitant les parties à donner leur accord pour lui permettre de statuer en amiable compositeur ; qu'un accord de toutes les parties n'a pu être obtenu ; que c'est ainsi qu'a été ordonnée une mesure d'instruction confiée à M. T. par arrêt avant dire droit du 6 décembre 2007 ; que l'expert a clos son rapport le 30 juin 2009 ; que l'expertise a au moins eu le mérite de renforcer, notamment avec les auditions auxquelles M. T. a procédé, la thèse de la CMED reprise par Maître Belhassen, ès qualités, en ce que les rapports que la banque, plus précisément la banque VERNES, a entretenu avec son client ont été pour le moins particuliers, quand bien même la DEXIA BANQUE PRIVÉE, aujourd'hui la BNP PARIBAS, refuse-t-elle de l'admettre ; que l'expert, qui a retenu 3 hypothèses nommées thèse de la BNP PARISBAS, thèse de la CMED et thèse de l'expert, est parvenu à trois montants successifs de la créance de la banque : 13.294.628 euros, 6.903.963 euros et 8.968.615 euros ; que ce sont ces écarts non négligeables, la particularité du dossier et les nouvelles prétentions de la débitrice et de son mandataire ad hoc, qui ont fait que la cour s'est crue autorisée à tenter d'obtenir l'accord des parties, d'abord une nouvelle fois pour statuer comme amiable compositeur, ensuite pour nommer un médiateur ; que l'amiable composition a été refusée ; que la médiation une fois ordonnée n'a pu être mise en place ;

Considérant que la cour retiendra la thèse de l'expert qui a pu, des pièces produites et des auditions qu'il a menées, notamment celle de M. C., ancien directeur du groupe Banque Vernes, responsable du service juridique immobilier et du contentieux, apprécier que le dossier de la CMED avait été étroitement suivi par la Banque Vernes qui a adapté les concours mis en place à l'évolution de la situation économique d'une cliente tout à fait particulière, que M. T. a estimé que c'est en 2002 que le rachat de la Banque Vernes avec son changement de dirigeants et de politique a eu pour conséquence la remise en cause de dispositions et accords tant écrits que verbaux, relatifs aux abandons de créances appliqués sur les intérêts réservés ; que l'expert a encore justement relevé que « l'analyse bilantielle de la période 1998 à 2001 montre que la situation des capitaux propres de la Sarl CMED, du fait de son changement de méthode comptable et d'activité, tendrait à confirmer l'accord qui aurait été « oralement » passé entre les deux parties » ;

Considérant que la thèse de la banque qui s'arc-boute sur l'absence « d'écrits ou d'actes clairs et non équivoques » et qui oublie que la procédure est commerciale ne saurait être retenue tout simplement parce que la présente affaire est atypique, étant observé qu'il est compréhensible que l'appelante ne veuille pas l'admettre puisqu'elle subit aujourd'hui les conséquences de décisions qui n'ont pas été les siennes ; que ses développements sur le retour à meilleure fortune ne sont pas pertinents alors que la CMED est liquidée ;

Considérant que la thèse de la CMED et de son mandataire ad hoc, qui n'hésitent même plus aujourd'hui à soutenir que la créance de la banque doit être admise pour 3.055.738 euros ne saurait davantage être retenue, étant écarté le moyen tiré de la novation de « la restructuration du 5 novembre 1998 » tout simplement parce que la novation ne se présume pas ; que le taux des intérêts ne peut plus aujourd'hui être contesté du fait de la prescription ; que la capitalisation des intérêts a été convenue ; que l'indemnité pour poursuite (456.764 euros) n'est pas une clause pénale ; que la clause pénale (242.047 euros) n'est pas abusive ; que le sens du présent arrêt rend sans objet la demande dommages et intérêts pour « déclaration abusive de créance » ;

Considérant de ce qui précède que la créance de la banque sera admise au passif de la CMED pour 8.968.615 euros à titre privilégié et hypothécaire outre intérêts conventionnels ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Met d'office hors de cause Maître Phillipot, intimé en sa qualité d'administrateur judiciaire de la CMED ;

Admet au passif de la CMED la créance de la BNP PARIBAS pour 8.968.615 euros à titre privilégié et hypothécaire, outre intérêts conventionnels ;

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes ;

Dit que les entiers dépens comprenant les frais d'expertise seront compris en frais privilégiés de liquidation judiciaire à l'exception de la totalité des frais d'expertise, dont la moitié sera supportée pour moitié par la banque, et admet les avoués de la cause en droit d'y prétendre au bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,                   LE PRESIDENT,

D. COULON                         P. MONIN-HERSANT