CA LYON (3e ch. A), 8 février 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7428
CA LYON (3e ch. A), 8 février 2018 : RG n° 16/07723
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu que l'article liminaire de ce code dispose que « pour l'application du présent code, on entend par : - consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ; - non-professionnel : toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles ; - professionnel : toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel. » ;
Attendu que l'extrait KBIS de la société C. mentionne une activité « d'entreprise générale de marbrerie et d'ornements funéraires pompes funèbres négoce de tous mobiliers objets décoratifs articles et accessoires se rattachant à la marbrerie funéraire. » ; Qu'elle soutient à tort qu'elle avait la qualité de non professionnelle lorsqu'elle s'est engagée à l'égard de la société Comoseo, car en s'équipant de matériels de téléphonie elle a agi dans le cadre de son activité professionnelle ; Attendu que les premiers juges ont retenu à bon droit que la société C. ne pouvait se prévaloir du caractère abusif de cette clause au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation qui suppose que l'un des cocontractants a la qualité de consommateur ou de non-professionnel ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
TROISIÈME CHAMBRE A
ARRÊT DU 8 FÉVRIER 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/07723. Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ÉTIENNE, Au fond, du 4 octobre 2016 : RG n° 2015f235.
APPELANTE :
SARL SMCP C.
Représentée par Maître Audrey T., avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE
INTIMÉE :
SAS LOCAM
Représentée par Maître Fatiha L.-H. de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE
Date de clôture de l'instruction : 13 juin 2017
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 décembre 2017
Date de mise à disposition : 8 février 2018
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Aude RACHOU, président - Hélène HOMS, conseiller - Pierre BARDOUX, conseiller, assistés pendant les débats de Mélanie JOURDAN, greffier placé. A l'audience, Pierre BARDOUX a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Aude RACHOU, président, et par Lindsey CHAUVY, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
A la fin de l'année 2011, la SARL SMCP C. (C.) a signé avec la société Comoseo un bon de commande ainsi qu'un contrat de location de divers matériels de téléphonie destinés aux besoins de son activité prévoyant 21 loyers trimestriels de 534,90 euros TTC du 30 mars 2012 au 30 mars 2017.
Ce contrat a été cédé à la SAS Locam qui s'est prévalue de sa résiliation le 21 novembre 2014 car plusieurs échéances étaient demeurées impayées.
Par acte du 18 février 2015, la société Locam a fait assigner la société C. en paiement d'une somme de 7.060,68 euros, correspondant aux loyers échus impayés et à échoir majorés d'une clause pénale de 10 %, et en restitution sous astreinte des matériels.
Par jugement en date du 4 octobre 2016, auquel il est expressément fait référence pour plus de précisions sur les faits, les prétentions et moyens des parties, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :
- rejeté les moyens soulevés par la SARL SMCP C. sur le fondement des dispositions du code de la consommation,
- débouté la SARL SMCP C. de toutes ses prétentions, y compris sa demande de dommages et intérêts,
- condamné la SARL SMCP C. à verser à la société Locam la somme de 6.418,80 euros outre intérêts au taux légal à compter de la date de mise en demeure du 21 novembre 2014 et 1 euro au titre de la clause pénale,
- ordonné la restitution par la SARL SMCP C. à la société Locam du matériel objet du contrat de location, sous astreinte définitive fixée à 70 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification du jugement,
- condamné la SARL SMCP C. à verser à la société Locam la somme de 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens sont à la charge de la société SMCP C.,
- dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire.
Par déclaration reçue le 2 novembre 2016, la société C. a relevé appel de ce jugement.
La clôture a été prononcée le 13 juin 2017.
Dans le dernier état de ses conclusions déposées le 30 janvier 2017, la société C. demande à la cour de statuer à nouveau et de :
- dire n'y avoir pas lieu pour la SARL SMCP C. de payer à la SAS Locam des sommes au titre de loyers échus et de la clause pénale figurant au contrat,
- débouter la SAS Locam de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la SAS Locam à la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, aux dépens et à la somme de 10.000 euros au titre d'une procédure abusive.
La société C. fait valoir que l'article 8 du contrat a permis la résiliation du contrat dès juillet 2014 du fait de la modification de sa situation consécutive à la cession de sa clientèle le 17 juin 2014.
Elle prétend que l'article 8 invoqué par la société Locam est une clause abusive prévue par les articles L 132-1 et R 132-1 du code de la consommation et doit être déclarée non écrite.
Elle soutient qu'il n'existe pas de rapport direct entre son objet social et la location de matériels de téléphonie, et qu'elle doit être considérée comme un non-professionnel au sens de ces articles du code de la consommation.
Dans le dernier état de ses écritures déposées le 29 mars 2017, la société Locam demande à la cour de :
- dire non fondé l'appel de la société SMCP C. et la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a réduit la clause pénale de 10 % sur les sommes dues à un euro et condamner à ce titre la société SMCP C. à lui régler la somme complémentaire de 641,88 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 novembre 2014,
- condamner la société SMCP C. à lui régler une indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens d'instance et d'appel.
La société Locam soutient que les dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives ne sont pas applicables entre commerçants et entre personnes morales en application de l'article préliminaire de ce code.
Elle affirme que la clause critiquée ne créée pas de déséquilibre et est destinée à sanctionner le comportement du locataire.
Elle ajoute que l'article 8 des conditions générales de location ne prévoit pas la cession de clientèle dans les cas permettant de se prévaloir d'une résiliation et stipule en tout état de cause le paiement d'une somme égale aux loyers impayés et de ceux à échoir majorés d'une clause pénale de 10 %.
Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties à la décision entreprise et aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées et ci-dessus visées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu que la société C. soutient que l'article 8 du contrat qu'elle a signé avec la société Comoseo lui permet de se prévaloir d'une résiliation consécutive à la cession de sa clientèle à la SARL PSM le 17 juin 2014 ;
Que cette clause stipule « Sans qu'il y ait besoin d'aucune formalité judiciaire, le locataire reconnaissant avoir été mis en demeure par les présentes, le présent contrat peut être résilié de plein droit, si bon semble au Loueur ou au Bailleur cessionnaire, dans les cas suivants :
- huit jours après une lettre recommandée avec accusé de réception demeurée infructueuse, en cas de non-respect par le Locataire en l'une quelconque de ses obligations aux termes du contrat telles que, mais sans limitation, le non-paiement de l'échéance d'un seul terme de loyer ou le défaut de déclaration de sinistre et ce, sans que les offres de payer ou d'exécuter ultérieures, le paiement ou l'exécution après le délai imparti, puissent enlever au loueur le droit d'exiger la résiliation encourue.
- immédiatement en cas de perte ou de diminution des garanties ou sûretés consenties, saisie, détérioration, destruction ou altération (apport en société, fusion absorption, session, ...) ou modification de la situation du locataire notamment décès, redressement judiciaire, liquidation amiable ou judiciaire, cessation d'activité, cession du fonds de commerce, de parts ou d'actions du locataire, changement de forme sociale.
La résiliation entraîne le versement immédiat par le Locataire au Loueur, outre les loyers échus impayés et tous leurs accessoires, une indemnité égale à la somme des loyers restant à courir jusqu'au terme du contrat, majorée d'une somme forfaitaire égale à 10 % de celle-ci et la restitution immédiate des produits dans les conditions de l'article Restitution ci-après.
Le locataire s'engage à informer immédiatement par écrit le bailleur de tout événement entrant dans les cas énoncés ci-dessus (...) » ;
Attendu que si cette clause pouvait permettre à la société C. de se prévaloir d'une résiliation de plein droit du contrat signé avec la société Comoseo, les stipulations de l'article 8 prévoient que le paiement d'une indemnité quelque soit le mode de résiliation ;
Attendu que la société C. n'a d'ailleurs pas pris l'initiative de porter cette cession de clientèle à la connaissance de son bailleur, seul l'acquéreur de cette clientèle ayant échangé des courriers les 10 et 30 juillet 2014 pour signaler qu'elle ne reprenait pas les matériels loués et qu'elle était sans pouvoir pour résilier le contrat ;
Attendu que la société appelante prétend que les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation s'appliquent en l'espèce et permettent de retenir le caractère abusif de cet article 8 du contrat ;
Attendu que l'article liminaire de ce code dispose que « pour l'application du présent code, on entend par :
- consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ;
- non-professionnel : toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles ;
- professionnel : toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel. » ;
Attendu que l'extrait KBIS de la société C. mentionne une activité « d'entreprise générale de marbrerie et d'ornements funéraires pompes funèbres négoce de tous mobiliers objets décoratifs articles et accessoires se rattachant à la marbrerie funéraire. » ;
Qu'elle soutient à tort qu'elle avait la qualité de non professionnelle lorsqu'elle s'est engagée à l'égard de la société Comoseo, car en s'équipant de matériels de téléphonie elle a agi dans le cadre de son activité professionnelle ;
Attendu que les premiers juges ont retenu à bon droit que la société C. ne pouvait se prévaloir du caractère abusif de cette clause au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation qui suppose que l'un des cocontractants a la qualité de consommateur ou de non-professionnel ;
Attendu que la société C. ne conteste pas la somme réclamée sauf à affirmer que la clause pénale doit être modérée ;
Attendu que la société Locam invoque son préjudice financier consécutif à l'arrêt des paiements des loyers et revendique toujours la restitution du matériel qu'elle a financé ;
Attendu que la société C. tout en se prévalant de la résiliation de plein droit du contrat n'a pas pris l'initiative de restituer le matériel ;
Attendu que l'indemnité réclamée par la société Locam ne peut ainsi être retenue comme manifestement excessive ;
Qu'il convient de faire droit à sa demande au titre de la clause pénale de 10 % qui doit faire courir les mêmes intérêts légaux et de confirmer les premiers juges qui ont condamné la société C. à payer les loyers échus impayés et l'indemnité de résiliation ;
Attendu que la demande indemnitaire formée par la société appelante au titre de la procédure abusive doit ainsi être rejetée ;
Attendu qu'une astreinte n'est pas nécessaire pour assurer l'efficacité de la restitution ordonnée par les premiers juges, la demande formée par la société Locam devant être rejetée ;
Attendu que la société C. succombe totalement en son appel et doit en supporter les dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, et verser à la société Locam une indemnité de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a réduit à 1 euro la clause pénale de 10 % réclamée par la SAS Locam et fixé une astreinte définitive de 70 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification du jugement,
et statuant à nouveau de ces chefs :
Condamne la SARL SMCP C. à verser à la SAS Locam la somme de 641,88 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 novembre 2014,
Déboute la SAS Locam de sa demande d'astreinte,
Condamne la SARL SMCP C. à verser à la SAS Locam une indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL SMCP C. aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,
- 5820 - Code de la consommation - Clauses abusives - Application dans le temps - Illustrations : Loi n° 2014-344 du 17 mars 2014
- 5879 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : cadre de l’activité
- 5945 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Activité administrative - Téléphonie et télécopie