CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 15 mars 2019
CERCLAB - DOCUMENT N° 7720
CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 15 mars 2019 : RG n° 17/13193
Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2019-003962
Extrait : « Considérant qu’il convient de confirmer le jugement entrepris qui a fait une appréciation juste et pertinente des faits et de l'application de la règle de droit tant sur la première et deuxième période, en jugeant notamment que la clause de « take or pay » ci-dessus reprise était opposable à la société B., cette clause n'ayant pas été biffée du contrat,
que le contrat était rédigé de manière claire et paraphé à chaque page, que les conditions générales sont assorties d'une annexe chiffrée et personnalisée et que de nombreux échanges ont eu lieu entre les parties pour finaliser l'accord,
que le moyen de la société B. consistant à dire qu'elle n'était pas une professionnelle de l'énergie ne peut être accueilli alors qu'elle avait déjà contracté avec d'autres fournisseurs de gaz et que son activité était fortement consommatrice d'énergie,
que le moyen de la société B. consistant à dire que son consentement avait été vicié par erreur ne peut être accueilli les premiers juges ayant justement relevé qu'omettre de lire une clause de tarif avant de la signer n'était pas une erreur excusable pour un commerçant, que rappelant la règle que le dol ne se présume pas et qu'il doit être prouvé par la partie qui s'en prévaut, les premiers juges ont légitimement écarté le dol invoqué par la société B. en l'absence de preuve d'intention dolosive de la société EDF et de manœuvres déterminantes de son consentement,
et enfin, ils ont écarté la qualification de clause abusive au motif que la liste fixée par décret ne vise pas les clauses « take or pay » ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 11
ARRÊT DU 15 MARS 2019
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 17/13193 (9 pages). N° Portalis 35L7-V-B7B-B3U22. Décision déférée à la Cour : Jugement du 8 juin 2017 - Tribunal de Commerce de PARIS : R.G. n° 2016039071.
APPELANTE :
SARL ÉTABLISSEMENTS B. FORÊT ENERGIE
prise en la personne de ses représentants légaux, N° SIRET : XXX, représentée par Maître Sophie V. de l'ASSOCIATION T.V., avocat au barreau de PARIS, toque : J119
INTIMÉE :
SA ÉLECTRICITÉ DE FRANCE - EDF
prise en la personne de ses représentants légaux, N° SIRET : YYY, représentée par Maître Jean-Didier M. de la SCP B.- C. - M. - G. - M., avocat au barreau de PARIS, toque : P0240
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 janvier 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Michèle LIS SCHAAL, Présidente de la chambre. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Michèle LIS SCHAAL, Présidente de la chambre, Madame Françoise BEL, Présidente de chambre, Madame Agnès COCHET-MARCADE, Conseillère.
Greffier, lors des débats : Madame Saoussen HAKIRI.
ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Michèle LIS SCHAAL, Présidente et par Madame Cyrielle BURBAN, Greffière présente lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
La société ÉTABLISSEMENTS B. (ci-après B.) a conclu avec la société ÉLECTRICITÉ DE FRANCE (ci-après EDF) un contrat de fourniture de gaz en date du 5 avril 2012.
Ledit contrat comporte une clause « take or pay » stipulant que, quelle que soit la consommation réelle, le client devra payer, à la société EDF les quantités de gaz non consommées en dessous de l'engagement de consommation déterminé, au prix unitaire moyen de la saison réduit de moitié.
En application de cette clause, la société EDF a vainement réclamé à la société B. les sommes de :
- 1.989,55 euros TTC pour la période 1 allant du 1er octobre 2012 au 1er octobre 2013,
- 33.246,37 euros HT pour la période 2 allant du 1er octobre 2013 au 1er octobre 2014.
Par assignation délivrée le 17 juin 2016 à la société B., la société EDF a saisi le Tribunal de commerce de Paris d'une demande visant à faire condamner la société B. au paiement de la somme de 54.299,25 euros avec application des intérêts de retard au taux légal à compter du 14 janvier 2016, date de la mise en demeure.
Par jugement rendu le 8 juin 2017, le Tribunal de commerce de Paris a :
- condamné la société B. à payer à la société EDF la somme de 42.309,70 euros TTC, avec application des intérêts de retard au taux légal à compter du 14 janvier 2016, date de la mise en demeure et déboutant pour le surplus de sa demande ;
- débouté la société B. de sa demande de dommages et intérêts ;
- condamné la société B. à verser la somme de 4.000 euros à la société EDF en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit les parties mal fondées dans leurs demandes plus amples ou contraires et les en débouté ;
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;
- condamné la société B. aux dépens.
Sur la deuxième période,
Le Tribunal de commerce a jugé que la clause de « take or pay » était opposable à la société B. Les premiers juges ont en effet constaté que le contrat était rédigé de manière claire et paraphé à chaque page ; que les conditions générales sont assorties d'une annexe chiffrée et personnalisée et que de nombreux échanges ont eu lieu entre les parties pour finaliser l'accord. Ils ont également écarté le moyen de la société B. consistant à dire qu'elle n'était pas une professionnelle de l'énergie en relevant qu'elle avait déjà contracté avec d'autres fournisseurs de gaz et que son activité était fortement consommatrice d'énergie. Le Tribunal de commerce a de même écarté le moyen de la société B. consistant à dire que son consentement avait été vicié par erreur au motif qu'omettre de lire une clause de tarif avant de la signer n'était pas une erreur excusable pour un commerçant. Les premiers juges ont aussi écarté le dol dont se prévaut la société B. en l'absence de preuve d'intention dolosive de la société EDF et de manœuvres déterminantes de son consentement. Enfin, ils ont écarté la qualification de clause abusive au motif que la liste fixée par décret ne vise pas les clauses « take or pay ».
Sur la première période,
Le Tribunal de commerce a relevé que la société EDF ne s'était pas manifestée au titre de l'engagement de consommation juste après la fin de la première période mais seulement plus de trente mois après en émettant une facture le 28 avril 2016. Les premiers juges ont également décidé que la facture afférente à cette période manquait de précision et de transparence au sens de l'article L. 441-3 du code de commerce car n'y figuraient pas le rappel du taux d'engagement. Ils ont par conséquent débouté la société EDF de sa demande de paiement au titre de la première période.
La société B. a régulièrement interjeté appel par déclaration du 30 juin 2017.
Prétentions des parties
Par ses conclusions signifiées par RPVA le 24 janvier 2018, auxquelles il est fait référence pour plus amples exposé des motifs, de leurs moyens et de leur argumentation, la société B. sollicite de la Cour de :
A titre principal,
- infirmer le jugement de première instance, sauf en ce qu'il a débouté la société EDF du paiement par la société B. de la somme de 11.989,55 euros,
- constatant que la société EDF a accepté une limitation du contrat à la consommation effective lors de la signature du contrat,
- juger que la clause de « take or pay » n'est pas opposable à la société B.,
- débouter la société EDF de ses demandes non justifiées en paiement,
- débouter la société EDF de l'ensemble de ses autres demandes,
- condamner la société EDF à verser à la société B. la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
A titre subsidiaire,
- infirmer le jugement de première instance sauf en ce qu'il a débouté la société EDF du paiement par la société B. de la somme de 11.989,55 euros,
- constater que la société EDF a manqué à ses obligations d'information et devoir de conseil lors de la signature du contrat,
- constater que la société EDF a commis une faute contractuelle en ne laissant pas à la société B. un délai de réflexion suffisant,
- constater que la clause opposée à la société B. n'a pas été portée à sa connaissance de sorte que le consentement de cette dernière n'est pas valablement donné faute d'être éclaire,
- constater que le consentement de la société B. a été donné par erreur,
- constater que le consentement de la société B. a été obtenu au moyen d'une réticence dolosive commise par la société EDF,
- constater la carence de la société EDF dans la charge, lui incombant, d'établir sa créance par la production de documents justificatifs probants,
- juger que la clause de « take or pay » est réputée non écrite,
- débouter la société EDF de ses demandes non justifiées en paiement,
- débouter la société EDF de l'ensemble de ses autres demandes,
- condamner la société EDF à verser à la société D. 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
A titre infiniment subsidiaire,
- infirmer le jugement de première instance sauf en ce qu'il a débouté la société EDF du paiement par la société B. de la somme de 11.989,55 euros,
- constater que la clause litigieuse constitue une clause abusive créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au profit de la société EDF,
- juger que la clause de « take or pay » est réputée non écrite,
- débouter la société EDF de ses demandes non justifiées en paiement,
- débouter la société EDF de l'ensemble de ses autres demandes,
- condamner la société EDF à verser à la société B. 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
En tout état de cause,
- condamner la société EDF aux entiers dépens de l'instance et à payer à la société B. la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur la demande à titre principal,
La société B. soutient que la société EDF a accepté une limitation de la facturation à la consommation effective. Elle indique en effet qu'elle a apposé sur le contrat, à côté de sa signature, une formule manuscrite correspondant à un tarif binôme et que la société EDF, en signant à son tour le contrat, a accepté une telle tarification.
Sur la demande à titre subsidiaire,
La société B. soutient que son consentement n'était pas éclairé en l'absence de lisibilité du contrat. Elle explique que les conditions générales n'expliquent pas le principe de la clause « take or pay » et que les formules mathématiques exposées sont incompréhensibles.
La société B. affirme également qu'en concluant dans un domaine étranger à son activité, elle a conclu en tant que non professionnelle. Elle explique que la société EDF avait donc le devoir de la renseigner sur le prix réel de sa prestation et sur la clause « take or pay ». Elle explique encore qu'elle n'a eu qu'une demi-heure pour signer et renvoyer le contrat définitif et qu'elle n'a donc pas eu l'occasion de prendre connaissance de la clause « take or pay ». Elle assure qu'elle n'a pris connaissance de ladite clause que deux ans plus tard, à la réception de la dernière facture contractuelle pour la période de septembre 2014.
La société B. prétend que son consentement a été vicié par erreur. Elle explique qu'elle n'aurait jamais pu se douter de l'existence d'une clause « take or pay » puisque qu'elle n'avait jamais été confrontée à de telle clause dans les contrats conclus précédemment avec d'autres fournisseurs. En outre, elle ajoute que la société EDF a, pendant 24 mois, facturé uniquement le gaz consommé créant ainsi l'apparence d'une tarification limitée à la consommation effective.
La société B. soutient également que son consentement été vicié par la réticence dolosive commise par la société EDF qui lui a caché l'existence de la clause « take or pay ». Elle explique qu'elle n'aurait jamais contracté si l'engagement de consommation avait été mis en relief et présenté sur le même tableau et sur la même que les prix.
Sur la demande à titre infiniment subsidiaire,
La société B. considère que la clause « take or pay » est une clause abusive car elle a pour effet de créer un déséquilibre significatif en lui imposant de payer du gaz non consommé.
Par ses conclusions signifiées par RPVA le 27 novembre 2017, auxquelles il est fait référence pour plus amples exposé des motifs, de leurs moyens et de leur argumentation, la société EDF sollicite de la Cour de :
Confirmer le jugement rendu le 8 juin 2017 par le Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a :
- condamné la société B. au paiement de la somme de 42.309,70 euros TTC outre intérêts de retard au taux légal à compter du 14 janvier 2016,
- condamné la société B. au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société B. aux entiers dépens,
- débouté la société B. de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts,
- ordonné l'exécution provisoire,
Infirmer le jugement rendu le 8 juin 2017 par le Tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a débouté la société EDF de sa demande de paiement de la somme de 11.989,55 euros TTC, outre intérêts de retard au taux légal à compter du 14 janvier 2016, au titre du non-respect de son engagement de consommation « été » par l'appelante pour la première période contractuelle courant du 1er octobre 2012 au 1er octobre 2013,
Condamner la société B. au paiement de la somme de 11.989,55 euros TTC, outre intérêts de retard au taux légal à compter du 11 mai 2016, au titre du non-respect de son engagement de consommation « été » pour la première période contractuelle courant du 1er octobre 2012 au 1er octobre 2013,
Condamner la société B. au paiement d'une somme complémentaire de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Sur la condamnation de la société B. au paiement de la somme principale de 54.299,25 euros
La société EDF constate que la société B. a paraphé chaque page du contrat signé et en déduit que la clause dite « take or pay » a été lue et acceptée en pleine connaissance de cause.
Elle rappelle, que la société B., a procédé au règlement d'une facture relative au non-respect de son engagement de consommation de la première période contractuelle à hauteur de 4.416,84 euros. La société EDF en déduit que la société B. n'est pas en mesure de contester le principe de cette créance.
La société EDF précise qu'aucune règle légale, règlementaire ou jurisprudentielle n'impose qu'un engagement de consommation soit mentionné de manière plus « apparente » que les autres clauses du contrat.
La montant de 54.299,25 euros demandé correspond à la somme de :
la confirmation du jugement attaqué à hauteur de 42.309,70 euros TTC, outre intérêts de retard au taux légal à compter du 14 janvier 2016, et ;
la somme complémentaire de 11.989,55 euros, outre intérêts de retard au taux légal à compter du 11 mai 2016, au titre du non-respect de l'engagement de consommation « été » par l'appelante pour la première période contractuelle courant du 1er octobre 2012 au 1er octobre 2013
Sur l'irrecevabilité de l'apposition de la formule mathématique manuscrite
La société EDF estime que la mention manuscrite soulevée par la société B. en cause d'appel est un moyen nouveau dont l'invocation est contraire au principe de concentration des moyens. Elle déclare ce moyen irrecevable.
Elle ajoute que si la Cour venait à recevoir ce moyen, son caractère en serait infondé. Selon elle, cette apposition signifie que la société B. avait compris le mode de calcul du tarif binôme.
De plus, si les parties avaient véritablement voulu exclure la clause comportant l'engagement de consommation, ils l'auraient rayée. L'apposition manuscrite n'est présente que sur l'Annexe 3 au contrat. Enfin, l'appelante mentionne à plusieurs reprises que le contrat conclu serait un « contrat d'adhésion », contredisant alors ses propres assertions.
Sur le caractère autonome de chaque relation contractuelle
La société B. oppose à la société EDF qu'elle n'a jamais été confrontée à une clause d'engagement de consommation dans ses contrats conclus précédemment avec d'autres fournisseurs. La société EDF rétorque que chaque relation contractuelle est autonome et doit s'analyser in concreto.
Sur le prétendu irrespect de l'obligation d'information et de conseil
La société EDF conteste avoir laissé une demi-heure à la société B. pour signer le contrat et précise que ces dernières ont échangé des informations quant aux prix proposés par rapport aux besoins de l'appelante.
Sur l'inégalité entre les parties en matière de compétence technique
La société EDF remarque que c'est l'inexactitude de l'évaluation de la consommation prévisionnelle effectuée par la société B. qui a engendré non-respect de son engagement de consommation par cette dernière. Or, seule la société B., professionnelle avertie, disposait des connaissances lui permettant d'élaborer ladite évaluation.
Sur la demande de dommages et intérêts à hauteur de 10.000 euros
La société EDF constate que la société B. ne démontre aucunement l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité. La société EDF remarque qu'aucun délai supplémentaire pour signer le contrat n'a été demandé et qu'aucune contestation pendant plus de deux ans après la signature du dit contrat n'a été émise.
Sur les prétendus vices du consentement
La société EDF rejette l'hypothèse selon laquelle le consentement de la société B. aurait été vicié par une erreur. La société EDF rappelle que la clause de l'engagement de consommation fait l'objet d'un article spécifique et n'est en aucun cas « hermétique ». Elle ajoute que la société B. aurait commis une erreur inexcusable si elle n'avait pas lu les clauses du contrat.
De même, la société EDF écarte toute possibilité de manœuvres dolosive en ce qu'elle n'a pas passé sous silence l'existence de la clause comportant l'engagement de consommation. Cette clause, qu'elle considère parfaitement lisible, claire et univoque fait l'objet d'une clause à part entière et est rappelée en Annexe.
Sur le prétendu déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties
La société B. s'appuie sur les nouvelles dispositions de l'article 1171 du Code civil relatives aux clauses abusives afin de démontrer un déséquilibre significatif dans le contrat. Cependant, la société EDF rétorque que cet article est inapplicable au contrat en l'espèce puisqu'il a été conclu en 2012, soit antérieurement à l'entrée en vigueur de la réforme du droit des obligations.
D'autre part, la clause querellée n'est nullement mentionnée dans les clauses considérées comme abusives. De plus, le tribunal de commerce et la cour d'appel de Paris, ont tous deux consacré la validité de ce type de clause.
Sur la prétendue inexactitude des sommes réclamées au titre du non-respect de l'engagement de consommation
La société EDF rappelle qu'elle a établi ses factures sur la base des relevés de consommation réalisés par la société GRDF sur le compteur de la société B. La société EDF s'en remet à son tableau récapitulatif précisant l'engagement de consommation, le volume de consommation facturé pour la saison, la quantité de gaz non consommé, le prix unitaire moyen etc.
Elle ajoute que la facture correspondant à la première période contractuelle du 1er octobre 2012 au 1er octobre 2013 n'est pas contestable. Selon elle, l'envoi tardif d'une facture ne peut être sanctionné par la disparition de la créance.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Considérant qu'en application de l'article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi,
qu'à hauteur d'appel la société B. soutient qu'elle a apposé sur le contrat, à côté de sa signature, une formule manuscrite (2,38+PEGN) X E+3057,86) correspondant à un tarif binôme et que la société EDF, en signant à son tour le contrat, a accepté une telle tarification, mention qui signifie que la société EDF a accepté une limitation de la facturation à la consommation effective,
que ce moyen tend aux même fins que celles soumises au premier juge,
qu'il est donc recevable ;
Considérant que l'article 8.3 du contrat intitulé « Engagement de consommation » stipule :
« Pour chaque période contractuelle, le Client s'engage à consommer et à payer à EDF une quantité de gaz naturel au moins égale à 80% du volume de consommation prévisionnel Eté (respectivement du volume de consommation prévisionnel hiver) précisé à l'Annexe 1.
A l'issue de chaque période contractuelle, pour la/les saisons(s) concernées, les quantités de gaz naturel non consommées en dessous de ces engagements seront facturés au client au prix unitaire moyen de la saison, minoré de 50 %.
Le prix unitaire est au moins égal à la moyenne arithmétique des prix unitaires tes que prévus à l'article 8.1 appliqués chaque mois sur la saison. »,
que cette clause signifie que le client s'engage à consommer au moins 80 % du volume prévisionnel (TAKE) et que s'il ne les consomme pas, il s'engage à les payer à un prix convenu (OR PAY) ;
Considérant qu’il convient de confirmer le jugement entrepris qui a fait une appréciation juste et pertinente des faits et de l'application de la règle de droit tant sur la première et deuxième période, en jugeant notamment que la clause de « take or pay » ci-dessus reprise était opposable à la société B., cette clause n'ayant pas été biffée du contrat,
que le contrat était rédigé de manière claire et paraphé à chaque page,
que les conditions générales sont assorties d'une annexe chiffrée et personnalisée et que de nombreux échanges ont eu lieu entre les parties pour finaliser l'accord,
que le moyen de la société B. consistant à dire qu'elle n'était pas une professionnelle de l'énergie ne peut être accueilli alors qu'elle avait déjà contracté avec d'autres fournisseurs de gaz et que son activité était fortement consommatrice d'énergie,
que le moyen de la société B. consistant à dire que son consentement avait été vicié par erreur ne peut être accueilli les premiers juges ayant justement relevé qu'omettre de lire une clause de tarif avant de la signer n'était pas une erreur excusable pour un commerçant,
que rappelant la règle que le dol ne se présume pas et qu'il doit être prouvé par la partie qui s'en prévaut, les premiers juges ont légitimement écarté le dol invoqué par la société B. en l'absence de preuve d'intention dolosive de la société EDF et de manœuvres déterminantes de son consentement,
et enfin, ils ont écarté la qualification de clause abusive au motif que la liste fixée par décret ne vise pas les clauses « take or pay »,
que la clause manuscrite apposée sur l'annexe 3 par la société ÉTABLISSEMENTS B. FORÊT ENERGIE (2,38+PEGN) X E+3057,86) qui signifie un calcul alors que la clause 8.3 établit un minimum (plancher de facturation), ne contredit pas la clause inscrite dans le contrat (8.3), le client devant payer le calcul sauf s'il n'atteint pas le minimum auquel cas il devra payer le minimum,
que le jugement entrepris sera également confirmé sur le rejet de la demande d’EDF portant sur sa demande de paiement pour la deuxième période en relevant que la société EDF ne s'était pas manifestée au titre de l'engagement de consommation juste après la fin de la première période mais seulement plus de trente mois après en émettant une facture le 28 avril 2016 et que la facture afférente à cette période manquait de précision et de transparence au sens de l'article L. 441-3 du code de commerce car n'y figuraient pas le rappel du taux d'engagement ;
Considérant que l'équité impose de condamner la société ÉTABLISSEMENTS B. FORÊT ENERGIE à payer à la société ÉLECTRICITÉ de FRANCE la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
DÉCLARE le moyen reposant sur la clause manuscrite recevable ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
CONDAMNE la société ÉTABLISSEMENTS B. FORÊT ÉNERGIE à payer à la société ÉLECTRICITÉ de FRANCE la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
LA CONDAMNE aux dépens.
Le greffier Le président
- 5806 - Code de la consommation - Clauses abusives - Évolution de la protection (5) - Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 - Décret n° 2009-302 du 18 mars 2009
- 6389 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs - Acceptation et opposabilité des clauses
- 8327 - Code de commerce (L. 442-6-I-2° C. com.) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat – Énergie (électricité, gaz)