CA RIOM (3e ch. civ. com.), 28 novembre 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7768
CA RIOM (3e ch. civ. com.), 28 novembre 2018 : RG n° 17/00576
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « En application combinée de l'article 1907 alinéa 2 du code civil, des articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur à la date de souscription des prêts, le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel. L'annexe de l'article R. 313-1 du code de la consommation précise qu'une année compte 365 jours, ou pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés. Un mois normalisé compte 30,41666 jours (c'est-à-dire 365/12) que l'année soit bissextile ou non.
En l'espèce, le contrat de prêt consenti à M. et Mme X. signé le 6 juillet 2012, constitue un crédit immobilier soumis expressément aux dispositions des « articles L. 312 à L. 312-36 du code de la consommation ». Il obéit au régime du crédit immobilier consenti à un consommateur ou à un non-professionnel. Les conditions générales de ce contrat (article 2 alinéa 3) stipulent que « Les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. En cas de remboursement anticipé les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exact de la période écoulée, rapportés à 360 jours l'an. Nous vous précisons que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an. »
Néanmoins, l'année civile compte douze mois et les intérêts dus pour une échéance mensuelle représentent un douzième de l'intérêt conventionnel : aussi, calculer les intérêts courus entre deux échéances sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équivalent à calculer ces intérêts sur la base d'un douzième de l'intérêt conventionnel ou sur la base d'un mois normalisé de 30,41666 jours et d'une année de 365 jours. Ainsi, le calcul des intérêts de chaque mensualité, tel que défini par la clause précitée, n'est pas en soi, contraire aux prescriptions légales sus-mentionnées.
Le principe selon lequel « le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel », énonce une règle de calcul des intérêts sur la base de l'année civile et non une règle de rédaction des contrats.
Toutefois, le calcul des intérêts courus pendant une période de moins d'un mois diffère selon qu'il est rapporté à une année lombarde (360 jours) ou à une année civile (365 jours).
Il convient pour l'emprunteur qui sollicite l'annulation de la stipulation de la clause d'intérêts conventionnels de démontrer que les intérêts ont été calculés sur la base d'une année de 360 jours, ce que ne font pas les époux X. : ils se contentent d'affirmer que la clause est en elle-même entachée de nullité.
Néanmoins, le Crédit Lyonnais expose que la première période, entre le déblocage des fonds et le quantième choisi pour les remboursements mensuels, peut être de plus ou moins d'un mois, et la période entre le remboursement anticipé et l'échéance précédente est par définition inférieure à un mois ; que les intérêts de ces périodes sont calculés par jour et il a été appliqué un taux d'intérêt quotidien égal au taux d'intérêt annuel divisé par 360. Il admet que la clause ne s'est appliquée que pour la première période, d'une durée de 31 jours, et a eu pour les époux X. une incidence totale de 8,08 euros. »
2/ « - Par ailleurs, M. et Mme X. soutiennent que la clause contenue dans l'acte de prêt relative au calcul des intérêts conventionnels est constitutive d'une clause abusive. A l'appui de leur argumentation, ils invoquent la Recommandation n° 2005-02 de la Commission des clauses abusives.
Outre le fait que cette recommandation concerne les conventions de comptes de dépôt en application desquelles les intérêts sont calculés quotidiennement et non pas les crédits immobiliers de sorte qu'elle ne saurait faire présumer le caractère abusif de la clause d'intérêts conventionnels du prêt litigieux, il convient d'observer que les modalités de calcul prévues par la clause sont conformes aux dispositions légales, qu'il s'agit d'une clause de rapport ou d'équivalence financière et, M. et Mme X. ne démontrent pas que cette clause créerait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive. »
3/ « - La cour ayant retenu que la clause relative au calcul des intérêts conventionnels n'était pas nulle en soi, mais qu'il était établi que les intérêts avaient été calculés pour partie sur la base d'une année lombarde, il convient de déterminer la sanction applicable.
M. et Mme X. n'ont pas pu valablement consentir au mode de calcul de l'intérêt conventionnel sur la base de l'année lombarde. Toutefois, ce mode de calcul se distingue de l'énonciation elle-même du taux d'intérêt conventionnel qui doit être fixé par écrit conformément à l'article 1907 alinéa 2 du code civil, et dont seul le défaut ou ce qui lui est assimilé, est sanctionné par la nullité de la stipulation d'intérêts.
Dans ces conditions, le Crédit Lyonnais sera tenu de restituer les intérêts trop perçus, sans substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt contractuel régulièrement fixé par écrit, soit la somme de 8,08 euros. »
COUR D’APPEL DE RIOM
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2018
- 5997 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Recommandations de la Commission des clauses abusives - Vérification de la pertinence de la recommandation
- 6638 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit immobilier - Présentation générale
- 9744 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit immobilier – Année civile et lombarde