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CA VERSAILLES (14e ch.), 29 mars 2019

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (14e ch.), 29 mars 2019
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 14e ch.
Demande : 18/06550
Date : 29/03/2019
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 20/09/2018
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7914

CA VERSAILLES (14e ch.), 29 mars 2019 : RG n° 18/06550 

Publication : Jurica

 

Extrait (arguments de l’appelant) : « - que la clause d'exclusion de responsabilité du bailleur doit être réputée non écrite, comme étant abusive au sens des dispositions du code de la consommation ; que toute personne morale qui n'agit pas à des fins professionnelles est considérée comme un non-professionnel, ce qui est le cas en l'espèce, puisqu'elle a décidé d'équiper ses locaux commerciaux et d'habitation d'un système de télésurveillance suite à deux cambriolages, »

Extrait (motifs) : « Il résulte des éléments versés aux débats : - que la société les Douceurs de Conflans a signé un contrat de location financière le 2 mai 2017 avec la société Viatelease portant sur un matériel de sécurité destiné à équiper et protéger son magasin, fourni par la société Elinks, comportant une centrale, trois détecteurs radio, deux « bips », un contacteur d'ouverture de porte, deux contacteurs d'ouverture fenêtres et un back up GSM, - qu'un procès-verbal de réception du 2 mai 2017 signé par la locataire, sans réserve, atteste de la livraison de l'équipement, de son installation par la société Elinks et de son bon fonctionnement à cette date,- que par courrier recommandé en date du 11 décembre 2017, adressé à la société Elinks, la société Les Douceurs de Conflans a « dénoncé de plein droit le contrat de télésurveillance établi avec la société Elinks », invoquant l'absence de signature de son contrat et d'un numéro de client, l'absence de toute prestation de maintenance malgré ses appels, un défaut du système d'alarme se déclenchant de manière intempestive, informant son cocontractant que les prélèvements seraient rejetés, - qu'une copie de ce courrier a été adressée à la société Viatelease le 18 avril 2018, - que par courrier recommandé avec avis de réception du 17 mai 2018, la société Viatelease a notifié à la société locataire la résiliation du contrat de location financière, les loyers n'étant plus réglés depuis le 1er février 2018.

Pour s'opposer à la résiliation de plein droit du contrat de location financière et aux conséquences qui en découlent, la société appelante se prévaut tout d'abord de la résiliation unilatérale du contrat qu'elle a notifiée le 11 décembre 2017 à la société Elinks et le 18 avril 2018 à la société Viatelease pour manquement grave du bailleur à son obligation de délivrance d'une chose exempte de tout vice telle que prévue à l'article 1721 du code civil, soutenant que l'équipement qui a été mis à sa disposition était défectueux depuis l'origine et n'a jamais pu être réparé.

[*]

La cour relève que, s'il n'est pas contesté que la société Elinks a fourni et installé le matériel choisi par la locataire et qu'elle était en charge de l'entretien et de la maintenance de l'équipement, aucun élément du dossier ne permet toutefois de connaître les conditions contractuelles liant la locataire à son prestataire, alors même qu'il n'est pas allégué que le coût de la location financière inclurait le coût de la maintenance.

La société Les Douceurs de Conflans a notifié à la seule société Elinks, le 11 décembre 2017, la résiliation unilatérale du « contrat de télésurveillance », pour manquements à ses obligations d'entretien et de maintenance, et cette résiliation porte sur un contrat distinct de celui conclu avec la société Viatelease, lequel a été résilié à l'initiative du bailleur, la locataire n'évoquant que l'arrêt des prélèvements dus au titre des prestations de maintenance, étant relevé par la cour qu'elle a poursuivi le paiement des loyers jusqu'au 1er février 2018.

Ainsi la société Les Douceurs de Conflans ne peut soutenir, avec l'évidence requise en référé, qu'elle a résilié le contrat de location financière avant que la société Viatelease ne lui notifie elle-même cette résiliation.

N'est pas plus sérieuse la contestation tirée de l'existence d'un manquement grave du bailleur à son obligation de délivrance d'une chose exempte de tout vice, telle que prévue à l'article 1721 du code civil, au motif que l'équipement qui a été mis à sa disposition s'est avéré défectueux depuis l'origine et n'a jamais pu être réparé, et ce, indépendamment du caractère éventuellement abusif de la clause d'exclusion de responsabilité du bailleur prévue à l'article 9 du contrat de location financière, alors même que la société locataire ne justifie pas d'une quelconque réclamation auprès de la société Viatelease, qu'elle s'est acquittée du paiement des loyers du 11 mai 2017 au 1er février 2018, qu'elle n'a jamais répondu aux courriers de mise en demeure de payer qui lui ont été adressés par la bailleresse à compter du 2 mars 2018 et qu'elle n'a émis aucune contestation jusqu'à la présente procédure.

De plus, et sans entrer dans le détail de la discussion opposant les parties sur la recevabilité des pièces produites et leur valeur probante, la cour relève qu'en tout état de cause l'attestation établie le 11 décembre 2017 par Mme A., salariée de la boulangerie, qui dit avoir été témoin « 1 ou 2 fois » d'un déclenchement intempestif de l'alarme et qui ajoute que le technicien n'a pu remédier à la panne, relate des faits peu précis et sans gravité qui n'établissent nullement la défectuosité du matériel.

Le vice de conception allégué n'est pas plus caractérisé à la lumière du procès-verbal de constat dressé le 3 décembre 2018, l'huissier de justice ayant, certes, constaté à cette date que l'activation de l'alarme ne s'enclenchait pas ou difficilement, mais ces constatations ont été faites un an après que la société locataire a résilié son contrat d'entretien et de maintenance avec la société Elinks, sans avoir recours à un nouveau prestataire.

Enfin, s'il est exact qu'est sans portée une clause de divisibilité stipulée au contrat en contradiction avec l'économie générale de contrats interdépendants et que l'anéantissement du contrat principal entraîne la caducité de l'autre contrat, au cas d'espèce, dès lors que la résiliation du contrat de prestation n'est pas prononcée, qu'elle ne peut résulter du seul courrier adressé au fournisseur le 11 décembre 2017, lequel n'a pas été attrait en la cause, et de la seule volonté de la locataire, qui ne démontre pas, avec l'évidence requise en référé, que la société Elinks a manqué à ses obligations contractuelles, cette contestation tirée de l'interdépendance contractuelle ne revêt pas de caractère sérieux.

Il résulte de l'ensemble de ces constatations et énonciations que c'est à bon droit que la société Viatelease se prévaut de la résiliation de plein droit du contrat de location financière pour défaut de paiement des loyers, telle que notifiée à la société Les Douceurs de Conflans le 17 mai 2018 conformément aux stipulations contractuelles (article 12.2). »

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 29 MARS 2019