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CASS. CIV. 1re, 5 juin 2019

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 5 juin 2019
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 17-27066
Décision : 19-523
Date : 5/06/2019
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:C100523
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Legifrance
Numéro de la décision : 523
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8006

CASS. CIV. 1re, 5 juin 2019 : pourvoi n° 17-27066 ; arrêt n° 523

Publication : Legifrance ; Bull. civ.

 

Extrait : « Mais attendu, d’abord, que, par arrêt du 18 décembre 2014 (CA CONSUMER FINANCE, C-449/13), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que les dispositions de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à ce qu’en raison d’une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, cette clause entraînant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 32) ;

Que la Cour de justice précise qu’une clause type figurant dans un contrat de crédit ne compromet pas l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 si, en vertu du droit national, elle implique seulement que le consommateur atteste de la remise qui lui a été faite de la fiche d’information européenne normalisée (point 29) ; qu’elle ajoute qu’une telle clause constitue un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents et que le consommateur doit toujours être en mesure de faire valoir qu’il n’a pas été destinataire de cette fiche ou que celle-ci ne permettait pas au prêteur de satisfaire aux obligations d’informations précontractuelles lui incombant (point 30) ; que, selon le même arrêt, si une telle clause type emportait, en vertu du droit national, la reconnaissance par le consommateur de la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, elle entraînerait un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 31) ;

Attendu, ensuite, que l’arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information ; qu’il constate que celui-ci se prévaut d’une clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’information précontractuelle normalisée européenne, mais ne verse pas ce document aux débats ; qu’ayant déduit de ces constatations et appréciations que la signature de la mention d’une telle clause ne pouvait être considérée que comme un simple indice non susceptible, en l’absence d’élément complémentaire, de prouver l’exécution par le prêteur de son obligation d’information, la cour d’appel a prononcé à juste titre la déchéance du droit aux intérêts contractuels ; que le moyen n’est pas fondé ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 5 JUIN 2019

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 17-27066. Arrêt n° 523.

DEMANDEUR à la cassation : Madame X.

DÉFENDEUR à la cassation : Société Financo

Mme Batut (président), président. SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Boulloche, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat(s).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Donne acte à Mme X. du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre M. F. Y. et Mme K. Y. ;

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Rouen, 1er juin 2017), que, suivant offre préalable acceptée le 5 décembre 2012, la société Financo (le prêteur) a consenti à D. Y. et à Mme X. un prêt destiné au financement d’un camping-car ; que D. Y. a adhéré à un contrat collectif d’assurance souscrit par le prêteur auprès de la société Suravenir (l’assureur), pour la garantie du risque décès « senior » des personnes âgées de plus de 65 ans ; que D. Y. est décédé le [...] , laissant pour lui succéder ses deux enfants, F. et K. ; qu’après avoir prononcé la déchéance du terme, le prêteur a assigné Mme X. en paiement du solde du prêt ; que celle-ci a assigné l’assureur en exécution du contrat d’assurance ;

 

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche, ci-après annexé :

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’il n’y pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

 

Sur les deuxième et troisième branches de ce moyen :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que Mme X. fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevable, pour défaut de qualité pour agir, ses demandes formées à l’encontre de l’assureur, alors, selon le moyen :

1°/ qu’un codébiteur solidaire peut opposer toutes les exceptions qui résultent de la nature de l’obligation ; qu’il peut en conséquence opposer l’existence d’une garantie d’assurance-décès ayant vocation à éteindre la dette, peu important qu’il ne l’ait pas personnellement souscrite ; qu’en l’espèce, tout en relevant qu’en qualité de coemprunteur solidaire, Mme X. avait un intérêt incontesté à voir pris en charge le remboursement du prêt au titre de la garantie décès souscrite par D. Y., la cour d’appel lui a dénié la possibilité de revendiquer le bénéfice de la garantie souscrite par D. Y. ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article 1208 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°/ subsidiairement, que si le codébiteur ne peut en principe bénéficier des exceptions qui sont personnelles à un autre coobligé, il peut néanmoins se prévaloir d’une garantie assurance-décès souscrite par le coemprunteur solidaire dès lors qu’il en résulte pour ce dernier un avantage dont il peut lui-même bénéficier ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que coemprunteur solidaire, Mme X., avait un intérêt incontesté à voir pris en charge le remboursement du prêt au titre de la garantie décès souscrite par D. Y. ; qu’en la déclarant néanmoins irrecevable à agir à l’encontre de l’assureur, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des articles 1208 et 1165 du code civil, dans leur rédaction applicable en l’espèce ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mais attendu que l’exception de garantie soulevée par le débiteur solidaire poursuivi par le prêteur, créancier de l’obligation de paiement, et tirée de l’existence d’un contrat d’assurance-décès souscrit par un autre codébiteur constitue une exception purement personnelle à celui-ci, que le débiteur poursuivi ne peut opposer au créancier ; qu’après avoir constaté que D. Y. était seul signataire du contrat d’assurance, que Mme X. n’avait ni la qualité d’assurée ni celle de bénéficiaire du contrat et qu’elle ne venait pas aux droits du défunt, la cour d’appel a décidé à bon droit que sa demande était irrecevable, pour défaut de qualité pour agir ; que le moyen n’est pas fondé ;

 

Sur le moyen unique du pourvoi incident :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que le prêteur fait grief à l’arrêt de prononcer la déchéance du droit aux intérêts et de rejeter sa demande en paiement des intérêts contractuels, alors, selon le moyen, qu’est conforme à la directive 2008/48/CE du 23 avril 2008 concernant les crédits de contrats aux consommateurs et aux dispositions de l’article L. 311-6 du code de la consommation, la clause type aux termes de laquelle l’emprunteur atteste avoir reçu du prêteur la fiche d’information précontractuelle européenne normalisée ; qu’en estimant qu’une telle clause, qui figurait dans le contrat conclu par Mme X., ne permettait pas de faire la preuve que la fiche d’information précontractuelle européenne normalisée lui avait été remise, et en déclarant, pour cette raison, l’établissement de crédit déchu de son droit aux intérêts, la cour d’appel a violé les articles L. 311-48 et L. 311-6 du code de la consommation, ensemble la directive européenne précitée ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mais attendu, d’abord, que, par arrêt du 18 décembre 2014 (CA CONSUMER FINANCE, C-449/13), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que les dispositions de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à ce qu’en raison d’une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, cette clause entraînant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 32) ;

Que la Cour de justice précise qu’une clause type figurant dans un contrat de crédit ne compromet pas l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 si, en vertu du droit national, elle implique seulement que le consommateur atteste de la remise qui lui a été faite de la fiche d’information européenne normalisée (point 29) ; qu’elle ajoute qu’une telle clause constitue un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents et que le consommateur doit toujours être en mesure de faire valoir qu’il n’a pas été destinataire de cette fiche ou que celle-ci ne permettait pas au prêteur de satisfaire aux obligations d’informations précontractuelles lui incombant (point 30) ; que, selon le même arrêt, si une telle clause type emportait, en vertu du droit national, la reconnaissance par le consommateur de la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, elle entraînerait un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 31) ;

Attendu, ensuite, que l’arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information ; qu’il constate que celui-ci se prévaut d’une clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’information précontractuelle normalisée européenne, mais ne verse pas ce document aux débats ; qu’ayant déduit de ces constatations et appréciations que la signature de la mention d’une telle clause ne pouvait être considérée que comme un simple indice non susceptible, en l’absence d’élément complémentaire, de prouver l’exécution par le prêteur de son obligation d’information, la cour d’appel a prononcé à juste titre la déchéance du droit aux intérêts contractuels ; que le moyen n’est pas fondé ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois principal et incident ;

Condamne Mme Z., épouse X., et la société Financo aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille dix-neuf.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour Mme Z., épouse X.

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le moyen de cassation fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré irrecevables les demandes formées par Mme Z. épouse X. à l’encontre de la SA Suravenir pour défaut de qualité à agir, et de l’avoir en conséquence condamnée seule à payer à la société Financo la somme de 34.721,90 €, avec intérêts au taux légal à compter du 26 août 2014 ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux motifs que « les pièces produites aux débats font ressortir qu’au décès de M. D. Y. sa fille Mme K. Y. a adressé un courrier à Financo pour connaître les démarches à accomplir afin de bénéficier de la clause assurance décès prévue au contrat de prêt.

Suravenir, ayant sollicité auprès des enfants de M. D. Y. des documents médicaux, a dans un premier temps indiqué à M. F. Y. qu’elle ne pouvait prendre en charge le remboursement du capital dû, le dossier étant incomplet faute de réception d’une attestation du médecin traitant, puis après réception de nouvelles pièces a fait connaître à Mme K. Y. son refus de garantie et la résiliation de l’assurance, indiquant qu’au vu des documents étudiés par son médecin conseil, M. D. Y. ne pouvait déclarer l’absence de traitement ou de surveillance médicale régulière lors de la souscription du contrat, et que sa déclaration inexacte entraînait nullité du contrat en application de l’article L 113-8 du code des assurances.

M. F. Y. et Mme K. Y. qui ont reçu du médecin conseil de Suravenir l’entier dossier médical de M. D. Y. ayant conduit l’assureur à dénier sa garantie, n’ont engagé aucune action à l’encontre de Suravenir, et n’ont pas donné suite à la demande qui leur a été faite de communiquer ce dossier, Suravenir indiquant ne pouvoir le produire étant tenue par le secret médical.

Mme X. fait grief au tribunal d’avoir déclaré son action dirigée à l’encontre de Suravenir irrecevable.

Co-emprunteur solidaire, elle a un intérêt incontesté à voir pris en charge le remboursement du prêt au titre de la garantie décès souscrite par M. D. Y.

Mais elle n’a à titre personnel ni la qualité d’assuré, ni la qualité de bénéficiaire de ce contrat d’assurance, et ne vient pas aux droits de M. D. Y.

Elle est certes co-emprunteur solidaire du prêt pour lequel l’adhésion au contrat d’assurance groupe a été souscrite, mais du fait de cette solidarité la dette née de ce prêt lui est pour le tout personnelle.

Elle ne peut, au motif de cette solidarité, revendiquer le bénéfice de la garantie souscrite sous le visa de l’article 1208 du code civil, alors que la garantie éventuellement due par Suravenir résulte de l’adhésion facultative au contrat d’assurance groupe, distincte du contrat de prêt lui-même et ne résulte pas de la nature de l’obligation de remboursement du prêt, la garantie résultant de l’adhésion facultative au contrat d’assurance groupe ne lui est pas personnelle et ne lui est pas même commune, étant relevé que celle-ci ne figure pas sur l’offre de prêt au nom de « l’emprunteur » désignant indistinctement les deux co-emprunteurs solidaires, mais résulte d’une « proposition d’adhésion aux assurances et prestations » établie distinctement de l’acte de prêt, sur un document autonome clairement établi au seul nom de M. D. Y. né le [...] , et signée par lui seul.

Le jugement doit en conséquence être confirmé, en ce qu’il a déclaré Mme X. irrecevable à agir, pour défaut de qualité, à l’encontre de Suravenir » (arrêt p 6 § 3 et suiv.).

Et aux motifs adoptés qu’» en application des articles 31 et 32 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, et est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.

En l’espèce, la SA Suravenir conteste la qualité à agir de Mme X. pour mettre en jeu l’assurance souscrite par M. D. Y. lors de la conclusion du contrat de prêt en date du 5 décembre 2012.

Il est constant que seul M. D. Y. a souscrit à l’assurance de groupe proposée par la SA Financo en garantie du contrat de prêt souscrit de sorte que Mme X. n’est ni adhérente, ni bénéficiaire de l’assurance consentie par la SA Suravenir.

Il n’est pas contesté par la SA Suravenir que la qualité de co-emprunteur de Mme X. lui confère un intérêt à agir à son encontre pour obtenir exécution du contrat d’assurance.

En revanche, la SA Suravenir conteste à Mme X. la qualité à agir, estimant que seuls les héritiers de M. Y. possèdent la capacité à poursuivre la mise en jeu de sa garantie en application des règles successorales.

En effet, dès lors que Mme X. n’est pas héritière de M. Y., elle ne peut être regardée comme ayant droit de ce dernier et ne peut dès lors se trouver saisie des droits et actions du défunt, ainsi que le stipule l’article 724 du code civil.

Par conséquent, force est de constater que Mme X. est dépourvue de la qualité à agir à l’encontre de la SA Suravenir, ne pouvant solliciter la mise en jeu de la garantie souscrite par M. Y. seul.

Il convient donc de faire droit à la fin de non-recevoir invoquée par la SA Suravenir et de déclarer les demandes de Mme X. à son encontre irrecevables » (jugement p 5 § 1 et suiv.) ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1/ Alors que Mme X. a fait valoir que le fait qu’elle puisse se prévaloir de l’assurance décès souscrite par M. D. Y. avait été déterminant de son consentement au contrat de prêt (conclusions p 5 § 6) ; qu’en déclarant irrecevables les demandes formées par Mme X. à l’encontre de la SA Suravenir pour défaut de qualité à agir, sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

2/ Alors qu’un codébiteur solidaire peut opposer toutes les exceptions qui résultent de la nature de l’obligation ; qu’il peut en conséquence opposer l’existence d’une garantie d’assurance-décès ayant vocation à éteindre la dette, peu important qu’il ne l’ait pas personnellement souscrite ; qu’en l’espèce, tout en relevant qu’en qualité de co-emprunteur solidaire, Mme X. avait un intérêt incontesté à voir pris en charge le remboursement du prêt au titre de la garantie décès souscrite par M. D. Y., la cour d’appel lui a dénié la possibilité de revendiquer le bénéfice de la garantie souscrite par M. Y. ; qu’en statuant ainsi, la cour a violé l’article 1208 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3/ Alors subsidiairement que si le codébiteur ne peut en principe bénéficier des exceptions qui sont personnelles à un autre coobligé, il peut néanmoins se prévaloir d’une garantie assurance-décès souscrite par le co-emprunteur solidaire dès lors qu’il en résulte pour ce dernier un avantage dont il peut lui-même bénéficier ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que co-emprunteur solidaire, Mme X., avait un intérêt incontesté à voir pris en charge le remboursement du prêt au titre de la garantie décès souscrite par M. D. Y. ; qu’en la déclarant néanmoins irrecevable à agir à l’encontre de la société Suravenir, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des articles 1208 et 1165 du code civil, dans leur rédaction applicable en l’espèce.

 

Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Financo.

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a retenu la déchéance du droit aux intérêts, et d’AVOIR condamné Madame Z. épouse X. à payer à la SA FINANCO la somme de 34.371,90 € avec intérêts au taux légal à compter du 26 août 2014, déboutant ainsi l’établissement de crédit de sa demande en paiement des intérêts contractuels.

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS PROPRES QUE « FINANCO fait grief au tribunal d’avoir retenu une déchéance du droit aux intérêts par application de l’article L.311-48 du Code de la consommation au motif qu’aucune justification n’était apportée de la remise de la fiche d’information précontractuelle normalisée européenne dans les conditions prévues par l’article L.311-6 du Code de la consommation. Elle se prévaut de la mention figurant au contrat de prêt dans l’encadré « acceptation de l’offre de contrat de crédit » dans lequel les co-emprunteurs ont apposé leurs signatures, aux termes de laquelle « l’emprunteur reconnaît avoir reçu préalablement à l’émission de la présente offre une fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs ». Mais ainsi que le premier juge l’a déjà relevé en d’autres termes parfaitement pertinents, il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information. Reconnaître à la signature de la mention ci-dessus rappelée la valeur d’une présomption qu’il appartiendrait à l’emprunteur de combattre, alors qu’il se trouve dans l’impossibilité matérielle de rapporter la preuve du fait négatif que constitue le défaut de remise d’une telle fiche d’information, reviendrait, par une inversion de la charge de la preuve, à permettre au prêteur de contourner ses obligations. La signature d’une telle mention ne peut être considérée que comme ayant simple valeur d’indice qui, en l’absence d’élément complémentaire, ne permet pas de justifier de l’exécution par le prêteur de son obligation d’information ; le jugement doit en conséquence être confirmé, en ce que faisant application des dispositions de l’article L.311-48 du même code, il a retenu la déchéance du droit aux intérêts. Selon le calcul opéré par le tribunal, en lui-même non contesté, la somme restant due en principal au paiement de laquelle FINANCO peut prétendre, correspondant au capital prêté de 36.500 € dont à déduire les versements effectués pour un montant total de 2.128,10 €, s’établit à la somme de 34.371,90 €. La déchéance prévue par l’article L. 311-48 (L.311-33 avant loi Lagarde) ne vise expressément que les intérêts conventionnels, pour priver le prêteur de la rémunération du prêt, et non l’indemnité de 8 % qui sanctionne la défaillance de l’emprunteur, laquelle ne peut être supprimée ou réduite qu’à raison de son caractère manifestement excessif susceptible d’être relevé d’office par application de l’article 1152 alinéa 2 devenu 1231-5 alinéa 2 du code civil. L’indemnité de 8 % a pour objet l’indemnisation forfaitaire du préjudice résultant pour le prêteur de la défaillance de l’emprunteur, constitué, pour partie, par la perte du bénéfice des intérêts conventionnels inclus dans les échéances de remboursement à échoir après mise en œuvre de la déchéance du terme ; FINANCO étant déchue de tout droit à intérêts conventionnels, l’indemnité de 8 % sur le capital restant dû de 34.371,90 € apparaît manifestement excessive, et sera en conséquence réduite à la somme de 350 €. Madame X. sera en conséquence condamnée à payer à FINANCO la somme totale de 34.721,90 €, le jugement étant réformé en ce sens ; cette somme par application des dispositions de l’article 1153 ancien devenu 1231-6 du code civil, produit de plein droit intérêts au taux légal, à compter de l’assignation valant mise en demeure, en l’absence de justification d’une mise en demeure antérieure faisant suite à la mise en œuvre de la déchéance du terme ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE « sur la déchéance du droit aux intérêts : Aux termes de l’article L. 141-4 du Code de la consommation, le Juge peut soulever d’office toutes tee dispositions dudit code dans les litiges nés de son application. En application de l’article L. 311-6 du Code de la Consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le préteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les Informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement. Il résulte de l’article L. 311-48 du même code que le préteur qui accorde un crédit sans communiquer à l’emprunteur les Informations précontractuelles dans les conditions fixées par l’article L. 311-6 est déchu du droit aux intérêts. En l’espèce, force est de constater que la SA FINANCO ne verse pas aux débats la fiche d’information précontractuelle normalisée européenne pouvant établir le respect de son obligation d’information à l’égard de l’emprunteur. La SA FINANCO se prévaut de la présence au contrat d’une clause type selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu et avoir pris connaissance d’un tel document. Toutefois, ainsi que le souligne Ferret rendu par la Cour de Justice de l’Union Européenne le 18 décembre 2014, SA CA CONSUMER FINANCE contre H. R. et autres, dans le cas où la charge de la preuve de la non-exécution des obligations prescrites aux articles 5 et 8 de la directive 2008/48 (informations précontractuelles données au consommateur en matière de crédit à la consommation) reposerait sur le consommateur, le principe d’effectivité des normes européennes serait compromis. La cour souligne dans cet arrêt qu’un préteur diligent doit avoir conscience de la nécessité de collecter et de conserver des preuves de l’exécution des obligations d’Information et d’explication lui incombant. Dès lors, ta Cour de Justice de l’Union de Européenne estime que la clause type stipulant que le consommateur reconnaît avoir reçu la fiche d’information précontractuelle normalisée ne constitue qu’un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer per un ou plusieurs éléments de preuve pertinents. Elle considère que si une telle clause type emportait la reconnaissance par le consommateur de la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, elle entraînerait un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48. Au regard de cette jurisprudence, il convient de considérer qu’il appartient au prêteur, indépendamment de la présence d’une telle clause type, de rapporter la preuve de ce qu’il a intégralement rempli son obligation d’information, notamment en donnant à connaître à l’emprunteur l’ensemble des mentions prévues aux articles L. 311-8, L. 311-43 et R. 311-3 du Code de la Consommation, et qu’il s’est ainsi conformé aux obligations légales qui lui sont posées. Forte est de constater en l’espèce que la SA FINANCO ne verse aux débats aucun document permettant de corroborer la présomption de remise des informations requises à l’emprunteur. Elle ne justifie donc pas avoir satisfait à son obligation d’information précontractuelle. Dès lors, il y a lieu de déchoir la SA FINANCO de son droit aux intérêts depuis l’origine du contrat » ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QU’ est conforme à la directive 2008/48 CE du 23 avril 2008 concernant les crédits de contrats aux consommateurs et aux dispositions de l’article L. 311-6 du Code de la consommation, la clause type aux termes de laquelle l’emprunteur atteste avoir reçu du prêteur la Fiche d’Information Précontractuelle Européenne Normalisée ; qu’en estimant qu’une telle clause, qui figurait dans le contrat conclu par Madame X., ne permettait pas de faire la preuve que la Fiche d’Information Précontractuelle Européenne Normalisée lui avait été remise, et en déclarant, pour cette raison, l’établissement de crédit déchu de son droit aux intérêts, la Cour d’appel a violé les articles L. 311-48 et L. 311-6 du Code de la consommation, ensemble la directive européenne précitée.