CA METZ (ch. civ. com.), 27 septembre 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 8080
CA METZ (ch. civ. com.), 27 septembre 2018 : RG n° 15/03022 ; arrêt n° 18/00208
Publication : Jurica
Extrait (motifs) : 1/ « Sur la demande en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels : Les époux X. demandent à hauteur de cour à ce que soit prononcé la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels figurant au prêt en cause, ces intérêts conventionnels ayant été calculés sur la base de l'année lombarde et non sur celle de l'année civile et ce aux fins de voir condamner la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE à leur restituer un trop perçu d'un montant de 65.222,40 euros.
L'exception de nullité invoquée par la partie défenderesse à l'instance en exécution d'un acte juridique introduite à son encontre, constitue un moyen de défense qui peut être présenté pour la première fois à hauteur de cour en application de l'article 563 du code de procédure civile.
Aux termes de l'article 1304 ancien du code civil applicable en la cause, l'action en nullité se prescrit par cinq ans. La règle selon laquelle l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte qui n'a pas encore été exécuté ne s'applique qu'à compter de l'expiration du délai de prescription de l'action ; après cette date l'exception n'est recevable que si l'acte n'a pas commencé à être exécuté (Cass. com. 31 janvier 2017 : n° 14-29474).
En l'espèce, la mention du calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de 360 jours ayant été portée en page 3 du contrat en date du 22 octobre 2008 liant les parties, les époux X. auraient dû avoir connaissance de l'irrégularité de ce calcul à la date de conclusion du contrat qui constitue le point de départ du délai de prescription. L'exception de nullité formulée par conclusions du 22 juin 2016 a bien été présentée à l'issue du délai de prescription de l'action soit au 22 octobre 2013. Elle n'est toutefois pas recevable, le contrat de prêt du 22 octobre 2008 portant stipulation d'intérêts conventionnels ayant reçu partiellement exécution à l'expiration du délai de prescription de l'action.
En tout état de cause, l'exception de nullité qui au-delà du simple rejet des prétentions adverses tend à ce que soient tiré les conséquences de la nullité par la condamnation du demandeur au paiement d’une somme en restitution des montants versés, s'analyse en une demande reconventionnelle au sens de l'article 64 du code de procédure civile et en tant que telle est soumise au délai de prescription imparti pour exercer l'action, délai qui en l'espèce est écoulé au jour de la demande. (Cass. Ass. plénière, 22 avril 2011).
L'exception de nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts sera donc déclarée irrecevable et les époux X. seront déboutés de leur demande en paiement de la somme de 65.222,40 euros. »
2/ « Sur le bien-fondé du prononcé de la déchéance du terme : L'alinéa 1er de l'article 1134 du code civil dispose « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » L'article 1152 ancien du code civil (devenu article 1231-5) applicable à la cause, stipule « lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre. Néanmoins, le juge peut même d'office augmenter ou modérer la peine qui avait été convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire ».
En l'espèce, il est indiqué en page 4 du contrat de prêt liant les parties que « toute somme non payée à son échéance ou à sa date d'exigibilité donnera lieu de plein droit sans mise en demeure préalable au paiement d'intérêts de retard dont le taux est précisé au paragraphe « taux des intérêts de retard ». Il a été porté en page 7 du contrat la clause selon laquelle « si le prêteur n'exige pas le remboursement immédiat du capital restant dû en cas de défaillance de l'emprunteur, celui-ci produira de plein droit à compter du jour de retard, un intérêt majoré de trois points qui se substituera au taux d'intérêt annuel pendant toute la période du retard. »
La stipulation selon laquelle le taux de l'intérêt sera majoré de trois points en cas de défaillance de l'emprunteur constitue indéniablement une clause pénale susceptible de révision judiciaire en application de l'article 1152 ancien du code civil, devenu article 1231-5.
Toutefois, les appelants n'indiquant pas en quoi la clause visée serait manifestement excessive, il n'y a pas lieu de la réduire en sorte que les montants réclamés au titre des intérêts supplémentaires contractuels de retard restent dus. Il a été expressément stipulé en page 7 de l'offre de prêt acceptée le 22 octobre 2008 liant les parties sous le paragraphe intitulé « déchéance du terme » que le prêteur aura la possibilité de se prévaloir de l'exigibilité immédiate du prêt, en capital, intérêts et accessoires sans qu'il soit besoin d'aucun préavis et d'aucune formalité judiciaire en cas de non- paiement des sommes exigibles ou d'une seule échéance malgré une mise en demeure de régulariser adressée à l'emprunteur par tous moyens et restée sans effet pendant quinze jours. Par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 août 2013, la banque a régulièrement mis en demeure les défendeurs d'avoir à régler les montants restant dus au titre de chacun des prêts contractés soit un montant total de 5.705,47 euros. Dès lors que ces montants sont demeurés impayés plus de quinze jours après délivrance de la mise en demeure, la déchéance du terme a été valablement prononcée par la banque le 18 septembre 2013.
Les appelants recherchent en vain la responsabilité de la caisse de Crédit Agricole qui aurait manqué à son obligation de conseil en ne les informant pas en dépit de leurs demandes d'explications de ce qu'elle appliquait les dispositions contractuelles stipulant l'exigibilité d'indemnités de retard du fait d'impayés alors que ces dispositions contractuelles et leurs conditions de mise en œuvre étaient connues des débiteurs qui ont paraphé chaque page des actes de prêt, étant rappelé que Monsieur X., en sa qualité d'agent d'assurances, professionnel averti, ne peut prétendre être demeuré dans l'ignorance des dispositions contractuelles dont il était parfaitement à même de prendre lui-même connaissance et d'apprécier la teneur.
Par ailleurs ainsi que l'ont exactement relevé les premiers juges, il ne peut être fait reproche à la banque de ne pas avoir prélevé sur le compte bancaire de l'emprunteur les sommes correspondantes aux mensualités manquantes en l'absence de fonds et appliqué un taux d'agios de 19,79 % sur le solde débiteur alors que les époux X. n'établissent pas avoir été titulaires d'une autorisation de découvert, la mention indicative figurant sur les relevés bancaires selon laquelle le taux d'intérêts débiteurs associé au compte en cause est de 19,79 % ne permettant pas à elle seule de justifier de la réalité de l'existence d'une autorisation de découvert.
Enfin, il n'est nullement justifié du prétendu engagement personnel de Monsieur Z., cadre bancaire, quant à la remise des intérêts de retard.
Attendu en définitive, que le prononcé de la déchéance du terme apparaît fondé, étant observé que dès le 29 juillet 2013, Monsieur Z. invitait les débiteurs à régler les montants impayés incluant les intérêts de retard et que le règlement de ces sommes aurait évité l'issue dont se plaignent les époux X.
Les époux X. seront en conséquence de l'ensemble de ce qui précède déboutés de leurs demandes en paiement à titre de dommages et intérêts des sommes de 15.818,84 euros et de 10.000 euros, faute pour eux d'établir l'existence d'une faute imputable à la banque en relation avec leur préjudice. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE METZ
CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/03022. Arrêt n° 18/00208. N° Portalis DBVS-V-B67-D5YS.
APPELANTS :
Monsieur X.
Représentant : Maître Yves R., avocat au barreau de METZ
Madame Y. épouse X.
Représentant : Maître Yves R., avocat au barreau de METZ
INTIMÉE :
CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE LORRAINE
prise en la personne de son représentant légal, Représentant : Maître Gilles R., avocat au barreau de METZ
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Monsieur DAVID, Présidente de Chambre
ASSESSEURS : Madame MARTINO, Président de chambre, Madame DEVIGNOT, Conseiller
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS ET AU PRONONCÉ DE L'ARRÊT : Madame ADELAKOUN
DATE DES DÉBATS : Audience publique du 21 juin 2018 tenue en application des articles 786 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame MARTINO, Présidente de chambre, chargée du rapport et qui a rendu compte à la Cour dans son délibéré. L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 27 septembre 2018 par sa mise à disposition au greffe, Conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte sous seing privé en date du 22 octobre 2008, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LORRAINE (ci-après dénommée CAISSE DE CREDIT AGRICOLE) a consenti à M. X. et à Mme Y. épouse X. (ci-après dénommés les époux X.), un prêt n° 864XX60 d'un montant de 42.000 euros à taux variable et remboursable en 120 mensualités correspondant aux intérêts, le capital devant être remboursé in fine.
Ledit prêt était par ailleurs assorti de la délégation d'un contrat d'assurance-vie n° 202XX8866 souscrit par M. X. auprès de la compagnie d'assurances GENERALI VIE.
Reprochant aux époux X. d'avoir manqué au règlement des mensualités depuis le 5 mai 2013, la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE a prononcé la déchéance du terme par lettre recommandée en date du 18 septembre 2013 dont l'avis de réception a été signé le 21 septembre 2013.
Par acte d'huissier de justice en date du 11 décembre 2013, la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE a fait assigner les époux X. devant le Tribunal de Grande Instance de METZ afin de les voir, à titre principal, condamner au paiement du solde du contrat de prêt.
Par jugement du 10 septembre 2015, le Tribunal de Grande Instance, 1ère chambre civile, de METZ a :
- Condamné solidairement les époux X. à payer à la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE la somme de 46.017,95 euros, avec intérêts au taux légal de 1,65 % l'an à compter du 15 novembre 2013, au titre du prêt n° 864XX60 d'un montant initial de 42.000 euros ;
- Dit que, sur présentation de la copie exécutoire du jugement, la compagnie d'assurances GENERALI VIE versera entre les mains de la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE le capital du contrat d'assurance-vie n° 202XX8866 correspondant au montant existant au jour de la demande de paiement, dans la limite des sommes dues ;
- Condamné solidairement les époux X. à payer à la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouté les époux X. de leur demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné solidairement les époux X. aux dépens ;
- Ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Pour se déterminer ainsi, le Tribunal a relevé que la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE avait, conformément au contrat de prêt, mis en demeure les époux X. d'avoir à régler la somme de 5.009,17 euros, dont 630 euros au titre du prêt n° 864XX60, et prononcé la déchéance du terme plus de 15 jours après ladite mise en demeure. Il a également relevé que les époux X. ne contestaient pas ne pas avoir réglé les mensualités réclamées par le prêteur. Il a considéré que par le mécanisme d'imputation des paiements sur les échéances impayées les plus anciennes, le prêt litigieux n'avait plus été remboursé à compter du mois de mai 2013, précisant que les règlements intervenus postérieurement à cette date ont été effectués au titre d'un autre prêt. Il a en outre précisé que la mention d'un taux d'intérêt débiteur associé au compte des époux ne saurait valoir autorisation de découvert, et que les époux X. ne démontraient pas que M. X. bénéficiait d'une telle autorisation. Il a par ailleurs indiqué que les éventuelles manœuvres frauduleuses qu'aurait pu commettre ce dernier étaient indifférentes et que la déchéance du terme n'avait pas été prononcée pour ce motif. Il a ensuite relevé que le décompte établi n'était pas contesté par les époux X., lequel incluait notamment les sommes dues au titre de la clause pénale. Il a cependant, pour retenir un taux d'intérêt de 1,65 %, écarté les pénalités de retard fixées au taux de 3 % en considérant qu'elles ne s'appliquaient, selon le contrat de prêt, qu'en l'absence de déchéance du terme. Il a enfin estimé que par application du contrat de prêt et de l'acte de délégation du contrat d'assurance-vie de M. X., il convenait de prononcer une condamnation solidaire à l'égard des époux X. et de faire figurer au jugement la mention du nantissement consenti et de la possibilité pour le prêteur de s'en prévaloir à l'égard de l'organisme assureur, dans la limite des sommes dues.
Par déclaration enregistrée au greffe de la Cour d'appel de METZ le 28 septembre 2015 sous les références DA n°15/02546 et RG n°15/03022, les époux X. ont interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions en date du 21 novembre 2017, les époux X. demandent à la Cour de :
- recevoir leur appel et le dire bien fondé ;
- infirmer le jugement entrepris ;
- prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels ;
- dire et juger que la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE ne pouvait prétendre qu'au remboursement des capitaux empruntés d'un montant total de 414.321,17 euros (372.321,17 euros + 42.000 euros) ;
- mais constater que la banque a encaissé 52.103,49 euros d'intérêts conventionnels ainsi qu'une somme de 427.440,08 euros le 7 novembre 2017 ;
- condamner en conséquence la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE à leur rembourser la somme de 65.222,40 euros ;
Subsidiairement, et si par impossible la Cour considérait qu'il n'y a pas lieu à annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels,
- Dire et juger que la stipulation, en cas de défaillance de l'emprunteur, d'un intérêt majoré de 3 point constitue une clause pénale ;
- Constater que cette stipulation a permis à la banque de réclamer 5.003,17 euros d'intérêts (au titre des deux prêts), nonobstant la régularisation le 1er mars 2013 de l'impayé du 5 février 2013 d'un montant de 87,15 euros ;
- Dire et juger que cette clause pénale était manifestement excessive ;
- la réduire à 1 euro ;
En conséquence,
- Dire et juger qu'il n'y avait pas lieu à application de la déchéance du terme des deux prêts ;
- Dire et juger que la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE a mis en œuvre de mauvaise foi et de façon déloyale la déchéance du terme des deux prêts ;
- Dire et juger que la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE ne pouvait porter en compte une somme égale à 7 % des sommes dues ;
- Constater que la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE a encaissé depuis 2013 au titre des deux prêts 12.043,18 euros d'intérêts conventionnels alors qu'il n'était dû que 9.343,25 euros et qu'il en résulte ainsi un paiement indu de 2.699,93 euros ;
- Constater que la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE a perçu une somme de 427.440,08 euros le 7 novembre 2017 ;
- Condamner en conséquence la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE à leur rembourser la somme de 15.118,91 euros + 2.699,93 euros) ;
- Débouter la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE de ses demandes ;
A titre infiniment subsidiaire, réduire à de plus justes proportions l'indemnité de 7 % ;
- Condamner la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE au paiement d'une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires ;
- Condamner la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE en tous les frais et dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement d'une somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
Au soutien de leurs prétentions et au visa de la recommandation n° 2055-2 du 14.04.2005 de la commission des clauses abusives, de l'article 1907 alinéa 7 du code civil, et des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation, ils exposent que le taux d'intérêt conventionnel stipulé ne peut qu'être calculé sur la base de l'année civile, et qu'en l'espèce il l'a été sur la base de l'année lombarde (360 jours), de sorte que la banque en serait déchue. Ils affirment avoir payé à ce titre 52.103,49 euros, de sorte que la déchéance du terme aurait été injustifiée.
A titre subsidiaire, ils exposent que la déchéance du terme et l'indemnité de 7 % ont été appliqués de manière abusive par la banque. S'agissant du mois de février 2013 pour lequel les premiers juges ont relevé un défaut de paiement, ils soutiennent que l'échéance a bien été réglée et qu'ils n'ont été en retard dans le remboursement de leurs deux prêts qu'à hauteur de 87,15 euros et pendant 25 jours. Ils estiment que la bonne foi contractuelle aurait justifié que cet incident soit régularisé par l'application d'un taux d'agios de 19,79% applicable au compte courant sur lequel étaient prélevées les mensualités des deux prêts. Ils affirment que les échéances des deux prêts n'ont jamais cessé d'être réglées, y compris en cours de procédure. Ils estiment que la banque a manqué à son devoir de loyauté et avait l'obligation de répondre à leurs interrogations quant à l'arriéré dont ils ignoraient la consistance. Ils affirment par ailleurs avoir approvisionné leur compte à hauteur de 170 euros par mois de février à octobre 2017 tandis que les échéances des deux prêts ne s'élevaient plus qu'à la somme 40,25 euros sur cette période. Ils ajoutent que M. Z., en qualité d'interlocuteur de la banque, s'était engagé à annuler ou remiser les intérêts de retard suite à une réunion du 24 juillet 2013. Ils concluent en indiquant que la banque a manqué à son devoir de conseil, à son devoir de loyauté, et a manqué à l'exécution habituelle du taux d'agios sur la somme de 87,15 euros au prorata de 25 jours de découverts non autorisés, outre la mise en œuvre abusive de la déchéance du terme.
S'agissant des intérêts de retard stipulés au taux de 3% du capital emprunté, ils estiment qu'il s'agit d'une clause pénale ayant permis à la banque de réclamer 5.009,17 euros d'intérêts supplémentaires au titre des deux prêts à la date du 30 août 2013 au lieu de 87,15 euros, ce qui constituerait une atteinte à l'équilibre contractuel. Ils ajoutent par ailleurs que, dès lors qu'il n'y avait pas lieu au prononcé de la déchéance du terme, le prêteur ne saurait prétendre à l'indemnité de 7 %. Ils entendent préciser avoir, du fait de la banque, dû procéder à la cession anticipée de l'immeuble financé par les deux prêts. Ils affirment à ce titre avoir payé à la banque 13.118,91 euros en sus des prévisions contractuelles pour les deux prêts, et indiquent que cette dernière leur réclame encore la somme de 62.872,60 euros. En y intégrant les intérêts excédentaires affectés au compte spécial qu'ils chiffrent au montant de 2.699,93 euros, ils évaluent leur préjudice à la somme de 78.699,44 euros.
A titre infiniment subsidiaire, ils sollicitent la révision de l'indemnité de 7% en ce qu'elle constituerait une clause pénale manifestement excessive.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 24 avril 2017, la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE demande à la Cour de :
- Débouter les époux X. de leurs appels et de l'ensemble de leurs demandes, moyens et fins ;
- Dire et juger que le prétendu moyen tenant à la stipulation d'intérêts conventionnels irrégulière comme prescrit, à tout le moins infondé ;
- Confirmer le jugement entrepris, au besoin par substitution de motifs ;
- Condamner solidairement les époux X. à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner solidairement les époux X. aux entiers frais et dépens d'appel.
Au soutien de ses prétentions, elle expose que les appelants ne développent aucun moyen nouveau et affirme que le prêt immobilier a cessé d'être effectivement réglé à compter de mai 2013 faute de fonds suffisants sur le compte consacré aux remboursements. Elle entend préciser que lesdits fonds étaient accaparés par l'autre prêt, et que le versement effectué par M. X. pour apurer le passif ne l'a couvert que partiellement. Elle ajoute que les emprunteurs ont reconnu au contrat avoir pris connaissance des conséquences des retards de paiement, et soutient que M. X. était un client averti et familier avec les contrats. Elle affirme qu'un taux d'intérêt de 3% a vocation a se substituer au taux d'intérêt annuel, en l'espèce 1,65 %. Elle fait également valoir qu'aucune information préalable n'était due à ce titre, et que le devoir de conseil ne s'exerce que dans la phase de conclusion du contrat. Elle entend également préciser que les époux X. ne disposaient pas d'autorisation de découvert et qu'il n'y avait pas lieu à application d'un taux d'agios. Elle estime en outre que les intérêts contractuels et pénalités de retard sont dûs. Elle affirme par ailleurs avoir répondu à toutes les interrogations des emprunteurs et n'avoir jamais offert d'annuler ou de remiser les intérêts de retard. Elle soutient ensuite que le moyen tiré de l'irrégularité de la stipulation d'intérêts conventionnels est prescrit, et affirme que le calcul des intérêts a bien été fait sur la base de 365 jours selon un montant d'intérêts mensuels moyen. Elle estime encore que l'indemnité conventionnelle ne doit pas être considérée comme une clause pénale à réduire.
Aux termes de leurs dernières conclusions, les époux X. entendent répliquer d'une part que le moyen tiré de l'irrégularité de la stipulation d'intérêts conventionnels constitue une défense au fond qui serait recevable en tout état de cause, et d'autre part qu'il résulte de l'application d'un montant d'intérêts mensuel moyen une inexactitude en chaîne des montants amortis ainsi qu'un renchérissement du coût du crédit de 1,388 % en année ordinaire.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels :
Les époux X. demandent à hauteur de cour à ce que soit prononcé la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels figurant au prêt en cause, ces intérêts conventionnels ayant été calculés sur la base de l'année lombarde et non sur celle de l'année civile et ce aux fins de voir condamner la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE à leur restituer un trop perçu d'un montant de 65.222,40 euros.
L'exception de nullité invoquée par la partie défenderesse à l'instance en exécution d'un acte juridique introduite à son encontre, constitue un moyen de défense qui peut être présenté pour la première fois à hauteur de cour en application de l'article 563 du code de procédure civile.
Aux termes de l'article 1304 ancien du code civil applicable en la cause, l'action en nullité se prescrit par cinq ans.
La règle selon laquelle l'exception de nullité peut seulement jouer pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte qui n'a pas encore été exécuté ne s'applique qu'à compter de l'expiration du délai de prescription de l'action ; après cette date l'exception n'est recevable que si l'acte n'a pas commencé à être exécuté (Cass. com. 31 janvier 2017 : n° 14-29474).
En l'espèce, la mention du calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de 360 jours ayant été portée en page 3 du contrat en date du 22 octobre 2008 liant les parties, les époux X. auraient dû avoir connaissance de l'irrégularité de ce calcul à la date de conclusion du contrat qui constitue le point de départ du délai de prescription.
L'exception de nullité formulée par conclusions du 22 juin 2016 a bien été présentée à l'issue du délai de prescription de l'action soit au 22 octobre 2013. Elle n'est toutefois pas recevable, le contrat de prêt du 22 octobre 2008 portant stipulation d'intérêts conventionnels ayant reçu partiellement exécution à l'expiration du délai de prescription de l'action.
En tout état de cause, l'exception de nullité qui au-delà du simple rejet des prétentions adverses tend à ce que soient tiré les conséquences de la nullité par la condamnation du demandeur au paiement d’une somme en restitution des montants versés, s'analyse en une demande reconventionnelle au sens de l'article 64 du code de procédure civile et en tant que telle est soumise au délai de prescription imparti pour exercer l'action, délai qui en l'espèce est écoulé au jour de la demande. (Cass. Ass. plénière, 22 avril 2011).
L'exception de nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts sera donc déclarée irrecevable et les époux X. seront déboutés de leur demande en paiement de la somme de 65.222,40 euros.
Sur le bien-fondé du prononcé de la déchéance du terme :
L'alinéa 1er de l'article 1134 du code civil dispose « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites »
L'article 1152 ancien du code civil (devenu article 1231-5) applicable à la cause, stipule « lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre. Néanmoins, le juge peut même d'office augmenter ou modérer la peine qui avait été convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire ».
En l'espèce, il est indiqué en page 4 du contrat de prêt liant les parties que « toute somme non payée à son échéance ou à sa date d'exigibilité donnera lieu de plein droit sans mise en demeure préalable au paiement d'intérêts de retard dont le taux est précisé au paragraphe « taux des intérêts de retard ».
Il a été porté en page 7 du contrat la clause selon laquelle « si le prêteur n'exige pas le remboursement immédiat du capital restant dû en cas de défaillance de l'emprunteur, celui-ci produira de plein droit à compter du jour de retard, un intérêt majoré de trois points qui se substituera au taux d'intérêt annuel pendant toute la période du retard. »
La stipulation selon laquelle le taux de l'intérêt sera majoré de trois points en cas de défaillance de l'emprunteur constitue indéniablement une clause pénale susceptible de révision judiciaire en application de l'article 1152 ancien du code civil, devenu article 1231-5.
Toutefois, les appelants n'indiquant pas en quoi la clause visée serait manifestement excessive, il n'y a pas lieu de la réduire en sorte que les montants réclamés au titre des intérêts supplémentaires contractuels de retard restent dus.
Il a été expressément stipulé en page 7 de l'offre de prêt acceptée le 22 octobre 2008 liant les parties sous le paragraphe intitulé « déchéance du terme » que le prêteur aura la possibilité de se prévaloir de l'exigibilité immédiate du prêt, en capital, intérêts et accessoires sans qu'il soit besoin d'aucun préavis et d'aucune formalité judiciaire en cas de non- paiement des sommes exigibles ou d'une seule échéance malgré une mise en demeure de régulariser adressée à l'emprunteur par tous moyens et restée sans effet pendant quinze jours.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 août 2013, la banque a régulièrement mis en demeure les défendeurs d'avoir à régler les montants restant dus au titre de chacun des prêts contractés soit un montant total de 5.705,47 euros.
Dès lors que ces montants sont demeurés impayés plus de quinze jours après délivrance de la mise en demeure, la déchéance du terme a été valablement prononcée par la banque le 18 septembre 2013.
Les appelants recherchent en vain la responsabilité de la caisse de Crédit Agricole qui aurait manqué à son obligation de conseil en ne les informant pas en dépit de leurs demandes d'explications de ce qu'elle appliquait les dispositions contractuelles stipulant l'exigibilité d'indemnités de retard du fait d'impayés alors que ces dispositions contractuelles et leurs conditions de mise en œuvre étaient connues des débiteurs qui ont paraphé chaque page des actes de prêt, étant rappelé que Monsieur X., en sa qualité d'agent d'assurances, professionnel averti, ne peut prétendre être demeuré dans l'ignorance des dispositions contractuelles dont il était parfaitement à même de prendre lui-même connaissance et d'apprécier la teneur.
Par ailleurs ainsi que l'ont exactement relevé les premiers juges, il ne peut être fait reproche à la banque de ne pas avoir prélevé sur le compte bancaire de l'emprunteur les sommes correspondantes aux mensualités manquantes en l'absence de fonds et appliqué un taux d'agios de 19,79 % sur le solde débiteur alors que les époux X. n'établissent pas avoir été titulaires d'une autorisation de découvert, la mention indicative figurant sur les relevés bancaires selon laquelle le taux d'intérêts débiteurs associé au compte en cause est de 19,79 % ne permettant pas à elle seule de justifier de la réalité de l'existence d'une autorisation de découvert.
Enfin, il n'est nullement justifié du prétendu engagement personnel de Monsieur Z., cadre bancaire, quant à la remise des intérêts de retard.
Attendu en définitive, que le prononcé de la déchéance du terme apparaît fondé, étant observé que dès le 29 juillet 2013, Monsieur Z. invitait les débiteurs à régler les montants impayés incluant les intérêts de retard et que le règlement de ces sommes aurait évité l'issue dont se plaignent les époux X.
Les époux X. seront en conséquence de l'ensemble de ce qui précède déboutés de leurs demandes en paiement à titre de dommages et intérêts des sommes de 15.818,84 euros et de 10.000 euros, faute pour eux d'établir l'existence d'une faute imputable à la banque en relation avec leur préjudice.
Sur la révision de la clause pénale constituée par l'exigibilité d'une indemnité de 7 % :
Il a été stipulé au contrat liant les parties l'exigibilité en cas de défaillance de l'emprunteur avec déchéance du terme, d'une indemnité égale à 7 % des sommes dues en capital et intérêts.
Cette clause pénale est révisable en application des dispositions de l'article 1152 ancien devenu article 1231-5 du code civil.
Il n'y a toutefois pas lieu à minoration de la dite clause dont le montant n'apparaît pas manifestement excessif.
Les époux X. seront donc déboutés de leur demande de réduction de la dite clause pénale.
C'est en définitive par des motifs précis, complets et pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont condamné les époux X. à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine la somme de 46.017,95 euros avec intérêts au taux de 1,65 % l'an à compter du 15 novembre 2013 au titre du prêt n° 864XX60.
Il y aura donc lieu de confirmer le jugement entrepris.
Sur les demandes annexes :
Il y a lieu de confirmer les dispositions du jugement entrepris par lesquelles les époux X. ont été condamnés aux dépens de la procédure de première instance et au paiement d'une somme de 1.500 euros par application de s dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Les appelants seront condamnés en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile au paiement des dépens de la présente procédure et au paiement d'une somme de 1.500 euros
par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort
DECLARE irrecevable la demande en nullité de la stipulation d'intérêts contractuels formée par Monsieur X. et Madame X., née Y. et en conséquence,
DEBOUTE Monsieur X. et Madame X., née Y. de leur demande en restitution des intérêts versés.
DEBOUTE Monsieur X. et Madame X., née Y. de leur demande en révision de la clause pénale contractuelle prévoyant en cas de défaillance de l'emprunteur l'exigibilité d'un intérêt majoré de 3 % sur le capital restant dû en l'absence de déchéance du terme, et de leur demande en révision de la clause pénale contractuelle prévoyant l'exigibilité d'une indemnité de 7 % sur le montant des sommes dues après déchéance du terme.
DEBOUTE Monsieur X. et Madame X., née Y. de leur demande tendant à ce qu'il soit dit que la déchéance du terme des deux prêts a été mise en œuvre de mauvaise foi et de façon déloyale et en conséquence,
DEBOUTE Monsieur X. et Madame X., née Y. de leurs demandes en paiement des sommes de 15.818,84 euros et de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts.
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
CONDAMNE Monsieur X. et Madame X., née Y. à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine la somme de 1500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE Monsieur X. et Madame X., née Y. aux dépens de la procédure d'appel.
Le Greffier La Présidente