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CASS. CIV. 1re, 27 novembre 2019

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 27 novembre 2019
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 18-14575
Décision : 19-1009
Date : 27/11/2019
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:C101009
Nature de la décision : Rejet
Mode de publication : Legifrance
Numéro de la décision : 1009
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8244

CASS. CIV. 1re, 27 novembre 2019 : pourvoi n° 18-14575 ; arrêt n° 1009 

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Mais attendu qu’ayant relevé que le contrat de mandat ne précisait pas la rémunération du mandataire, la cour d’appel a fait ressortir que la fixation de la commission litigieuse procédait d’une clause qui n’était pas rédigée de façon claire et compréhensible ; qu’elle a, dès lors, à bon droit, procédé à l’appréciation de son caractère abusif, peu important que celle-ci ait porté sur l’adéquation de la rémunération au service offert ; que le moyen, inopérant en ce qu’il s’attaque à des motifs erronés, mais surabondants, n’est pas fondé pour le surplus ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2019

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 18-14575. Arrêt n° 1009.

DEMANDEUR à la cassation : Société Cap détente

DÉFENDEUR à la cassation : Monsieur et Madame X.

Mme Batut (président), président. Maître Balat, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat(s).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Poitiers, 17 octobre 2017), que, le 11 mai 2014, M. et Mme X. (les mandants) ont conclu avec la société Cap détente (le mandataire) un contrat de mandat de vente de leur mobil-home ; qu’après avoir perçu la somme de 10.500 euros au titre de la vente du bien, ils ont assigné le mandataire aux fins, notamment, de voir constater que la clause ayant fixé une commission de 7.000 euros à son profit était abusive et de le voir condamner à leur payer une somme de même montant ;

 

Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que le mandataire fait grief à l’arrêt d’accueillir cette demande, alors, selon le moyen :

1°/ que l’appréciation du caractère abusif d’une clause ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert, pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ; qu’en considérant comme abusive la clause du mandat du 11 mai 2014 permettant au mandataire de conserver à titre de rémunération la part du prix de vente du mobil-home excédant 10.500 euros, « quand bien même cette rémunération n’aurait-elle eu aucune contrepartie », sans rechercher si l’appréciation du caractère abusif de cette clause ne portait pas sur l’adéquation de la rémunération du mandataire au service qu’il rendait aux mandants et si cette clause était rédigée de manière claire et compréhensible, la cour d’appel a violé l’article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version alors en vigueur ;

2°/ que, dans les contrats synallagmatiques, la cause de l’obligation de chacune des parties réside dans l’objet de l’obligation de l’autre, peu important un éventuel défaut d’équivalence des prestations ; qu’en retenant, pour priver d’effet la clause du mandat du 11 mai 2014 permettant au mandataire de conserver à titre de rémunération la part du prix de vente du mobil-home excédant 10.500 euros, que celle-ci est dépourvue de cause en l’absence de toute contrepartie, tout en relevant que le mandataire avait été mandaté par M. et Mme X. – qui plus est après que ces derniers aient trouvé un potentiel acquéreur – pour faire toutes les démarches en vue de vendre leur résidence mobile et qu’il avait établi la facture, perçu les fonds et restitué une partie de ceux-ci à ses mandants, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 1108, 1126 et 1131 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mais attendu qu’ayant relevé que le contrat de mandat ne précisait pas la rémunération du mandataire, la cour d’appel a fait ressortir que la fixation de la commission litigieuse procédait d’une clause qui n’était pas rédigée de façon claire et compréhensible ; qu’elle a, dès lors, à bon droit, procédé à l’appréciation de son caractère abusif, peu important que celle-ci ait porté sur l’adéquation de la rémunération au service offert ; que le moyen, inopérant en ce qu’il s’attaque à des motifs erronés, mais surabondants, n’est pas fondé pour le surplus ;

 

Sur la deuxième branche du moyen, ci-après annexé :

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cap détente aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. et Mme X. la somme globale de 3.000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille dix-neuf.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la société Cap détente

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir condamné la société Cap Détente à rembourser aux époux X. la somme de 7.000 euros au titre de la commission perçue sur la vente de la résidence mobile avec intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 2014, outre celle de 1.800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « B - SUR LA DEMANDE EN PAIEMENT DE LA SOMME DE 7.000 EUROS : l’article 1134 ancien du code civil dispose que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » et « doivent être exécutées de bonne foi » ; l’article L 132-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige dispose que « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat”; que des décrets en Conseil d’Etat déterminent les listes de clauses présumées irréfragablement ou non abusives et que “les clauses abusives sont réputées non écrites » ; la commission des clauses abusives a le 27 janvier 2005, dans une recommandation n° 05-01 relative à l’hôtellerie de plein air et aux locations d’emplacements de résidences mobiles, recommandé « que soient éliminées des contrats de d’hôtellerie de plein air les clauses ayant pour objet ou pour effet : [...] 8 – d’obliger le consommateur qui vend sa résidence mobile à verser une rémunération au professionnel, sans contrepartie de la part de ce dernier » ;

par acte sous seing privé en date du 11 mai 201(4), les époux X. et Y. ont confié à la société CAP DETENTE un mandat de vente de leur mobil home, « consenti et accepté en exclusivité pour une durée indéterminée, durée qui expirera au moment de la vente du bien », avec faculté pour chacune des parties d’y mettre fin à tout moment ; qu’il a été stipulé à l’article 1 de ce contrat que « le bien...devra être réglé par le Mandataire au Mandant, lorsque la vente sera définitivement conclue, au prix de 10.500 € TTC net vendeur » ;

ce contrat, de mandat et de vente du mobil home à la société CAP DETENTE aux fins de sa revente, ne précise pas la rémunération du mandataire, notamment qu’il conserverait l’excédent du prix de vente à titre de commission ;

l’article 4 de ce contrat stipulant par ailleurs que « le mandant... s’interdit, pendant toute la durée du présent mandat, de conclure directement ou indirectement avec tout acquéreur ayant visité le bien à vendre par l’intermédiaire du mandataire », n’exclut pas expressément la faculté pour le vendeur de vendre à un acquéreur qu’il aurait approché sans l’entremise du mandataire;

les époux X. et Y. justifient avoir posté sur le site internet leboncoin.fr une annonce aux fins de vente de leur mobil home; l’annonce telle que produite aux débats comporte la date du 26 avril 2014; cette date, qui est soit celle de l’annonce, soit celle de son impression, est antérieure au contrat de mandat ; la facture de vente du bien éditée par la société CAP DETENTE, à en tête du Camping [...], est en date du 3 juillet 2014 (n° 1152); le prix de vente mentionné est de 10.500 euros, outre une « marge » de 7.000 euros; la société CAP DETENTE a reversé par chèque en date du 9 septembre 2014 la somme de 10.500 euros aux époux X. et Y. ; elle a ainsi conservé la somme de 7.000 euros sur celle versée par les acquéreurs; elle n’a justifié d’aucune diligence en vue de la vente, son activité s’étant limitée à l’établissement de la facture, la perception des fonds et leur restitution partielle aux vendeurs;

dès lors, et ainsi que retenu par le premier juge, la clause permettant au mandataire de conserver en toutes hypothèses à titre de rémunération la part du prix de vente excédant 10.500 euros, quand bien même cette rémunération n’aurait-elle eu aucune contrepartie, doit être regardée abusive au sens des dispositions précitées et dépourvue de cause; la société CAP DETENTE doit en conséquence restitution de cette part du prix de vente, peu important qu’elle se soit cru tenue de reverser le montant de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur la facture;

le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu’il a condamné la société CAP DETENTE à rembourser aux époux X. et Y. la somme de 7.000 euros au titre de la commission perçue sur la vente de la résidence mobile » ;

ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE « Sur la demande de remboursement de la somme de 7 000 € au titre de la commission sur la vente du mobil-home le 3 juillet 2014 :

les époux X. demandent encore la restitution de la somme de 7.000 € retenue par la SARL CAP DETENTE à titre de commission ;

ils rappellent que le mobil-home a été vendu 17.500 € aux consorts Z., tandis qu’ils ont perçu une somme de 10.500 € ;

ils soutiennent que le mandat de vente conclu avec la SARL CAP DETENTE contient donc une clause non écrite et manifestement abusive, tenant en une « commission » perçue sur le prix de vente, d’un montant de 7.000 €, soit 40 % du prix de vente ;

l’article L 132-1 du Code de la consommation dispose que: « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » ;

la COMMISSION DES CLAUSES ABUSIVES dans sa recommandation n° 05-01 relative aux contrats d’hôtellerie de plein air et aux contrats de location d’emplacements de résidence mobile « Recommande que soient éliminées des contrats d’hôtellerie de plein air les clauses ayant pour objet ou pour effet: (...) – d’obliger le consommateur qui vend sa résidence mobile à verser une rémunération au professionnel, sans contrepartie de la part de ce dernier » ;

les époux X. font la preuve suffisante qu’au mois d’avril 2014, ils ont passé sur le site « LE BON COIN » une annonce aux fins de vendre leur mobil-home au prix de 17.500 €; parallèlement, ils ont signé le 14 mai 2014 avec la SARL CAP DETENTE un document intitulé « Mandat de Vente » aux termes duquel le camping « [...] » était mandaté pour faire toutes les démarches en vue de vendre la résidence mobile de loisirs pour le compte des mandants, à savoir les époux X.;

l’article 1 de ce contrat stipule que « le bien ci-dessus devra être réglé par le mandataire au mandant, lorsque la vente sera définitivement conclue au prix de 10 500 net vendeur ;

l’article 4 interdit au mandataire de conclure directement ou indirectement avec tout acquéreur ayant visité le bien à vendre par l’intermédiaire du mandataire ;

l’interprétation a contrario de cette clause permet de considérer que le mandant était libre de conclure la vente de son bien avec un acquéreur trouvé grâce à ses démarches personnelles ;

l’échange de messages électroniques entre les époux X. et Monsieur et Madame Z. atteste que la vente s’est conclue à la suite de la parution de cette annonce sur le site Internet et de la visite du mobil-home à l’initiative des époux X.; que la SARL CAP DETENTE ne démontre pas pour sa part qu’elle aurait procédé à des démarches personnelles, s’avérant déterminantes de l’accord de volonté des parties à concrétiser la vente; qu’au contraire, la commission de 7.000 € que la SARL CAP DETENTE a perçu sur cette vente ne correspond à aucune prestation correspondante de sa part puisque l’acquéreur a été trouvé par le propriétaire de la résidence mobile ;

dans la mesure où la vente n’est pas intervenue par l’entremise de la SARL CAP DETENTE la commission perçue ne correspond à aucune contrepartie effective et n’est pas causée de sorte que la clause prévoyant ce paiement est abusive dans ce cas de figure et doit être déclarée non écrite ;

en conséquence, la SARL CAP DETENTE doit être condamnée à rembourser cette commission indue, outre intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 2014, date de la distribution de la mise en demeure » ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) ALORS QUE l’appréciation du caractère abusif d’une clause ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert, pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ; qu’en considérant comme abusive la clause du mandat du 11 mai 2014 permettant au mandataire de conserver à titre de rémunération la part du prix de vente du mobil-home excédant 10 500 euros, « quand bien même cette rémunération n’aurait-elle eu aucune contrepartie » (arrêt p.7 §2), sans rechercher si l’appréciation du caractère abusif de cette clause ne portait pas sur l’adéquation de la rémunération de la société Cap Détente, mandataire, au service qu’elle rendait aux époux X. et si cette clause était rédigée de manière claire et compréhensible, la cour d’appel a violé l’article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version alors en vigueur ;

2°) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en retenant, pour priver d’effet la clause du mandat du 11 mai 2014 permettant au mandataire de conserver à titre de rémunération la part du prix de vente du mobil-home excédant 10.500 euros, que celle-ci est dépourvue de cause en l’absence de toute contrepartie, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce fondement qu’elle a substitué d’office, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, A TITRE SUBISIDIAIRE, QUE dans les contrats synallagmatiques, la cause de l’obligation de chacune des parties réside dans l’objet de l’obligation de l’autre, peu important un éventuel défaut d’équivalence des prestations ; qu’en retenant, pour priver d’effet la clause du mandat du 11 mai 2014 permettant au mandataire de conserver à titre de rémunération la part du prix de vente du mobil-home excédant 10.500 euros, que celle-ci est dépourvue de cause en l’absence de toute contrepartie, tout en relevant que la société Cap Détente avait été mandatée par les époux X. – qui plus est après que ces derniers aient trouvé un potentiel acquéreur – pour faire toutes les démarches en vue de vendre leur résidence mobile et qu’elle avait établi la facture, perçu les fonds et restitué une partie de ceux-ci à ses mandants, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 1108, 1126 et 1131 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.