CA LIMOGES (ch. civ.), 12 décembre 2019
CERCLAB - DOCUMENT N° 8268
CA LIMOGES (ch. civ.), 12 décembre 2019 : RG n° 18/01156 ; arrêt n° 578
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu que la banque reprend dans ses motifs un moyen tiré de l'irrecevabilité d'une exception de nullité de la clause de stipulation des intérêts conventionnels qui lui serait opposée par madame X. en défense à son action en paiement, mais que, d'une part, madame X. ne demande pas la nullité d'une telle clause mais seulement d'écarter comme étant abusive et réputée non écrite celle prévoyant la révision du taux d'intérêt, et que, d'autre part, une telle prétention n'est pas reprise dans le dispositif de ses conclusions, de sorte qu'au plus fort et en application de l'article 954 du code de procédure civile qui prévoit que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions, il n'y a pas lieu à statuer de ce chef ;
Attendu que madame X. demande, sur le fondement de l'ancien L. 132-1 du code de la consommation (désormais codifié article L. 212-1) de dire abusive la clause du contrat prévoyant la révision du taux d'intérêt en fonction des variations du taux de change en ce qu'elle aurait eu pour effet de créer, à son détriment, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;
Attendu qu'au sens de l'article L. 132-1 dans sa rédaction applicable à l'espèce et ainsi que l'a relevé le premier juge, l'appréciation du caractère abusif des clauses ne porte pas sur la définition de l'objet principal du contrat, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ; que le prêt a eu la caractéristique d'être octroyé en francs suisses mais remboursable en euros après conversion en francs suisses des paiements faits en euros ; que le risque de change, inhérent à ce type de prêt, a eu une incidence sur les conditions de remboursement du crédit, et que les clauses litigieuses ayant prévu une variation du taux des intérêts en fonction de la variation du taux de change et les conditions de cette variation, ont défini l'objet principal du contrat ;
Attendu que l'exigence selon laquelle une clause contractuelle doit être rédigée de manière claire et compréhensible oblige l'établissement financier à fournir aux emprunteurs des informations suffisantes pour permettre à ceux-ci de prendre leurs décisions avec prudence et en toute connaissance de cause ; que cette exigence implique que la clause soit comprise par le consommateur dans sa portée concrète, en ce sens qu'un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif puisse en évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, sur ses obligations financières ;
Attendu, s'agissant des clauses prévoyant la variation du taux d'intérêt, que le paragraphe « Charges de votre crédit » indique que le taux d'intérêt initial est de 4, 82 % l'an et sera fixe et appliqué pendant les cinq premières années ; qu'à la fin de cette période, à défaut pour l'emprunteur de choisir un changement de monnaie de compte en euros (soit à un taux fixe, soit à un taux révisable), le taux d'intérêt du crédit sera calculé sur la base de la moyenne du taux SWAP francs suisses 5 ans du mois civil précédant l'application du nouveau taux du prêt ; que cette révision aura une incidence sur la composition de l'échéance qui sera calculée sur la base des sommes restant dues sur le compte en francs suisses, de la durée résiduelle initiale du crédit et du nouveau taux d'intérêt applicable, et que sera déterminé un nouveau montant d'échéance théorique en francs suisses, laquelle sera alors convertie en euros sur la base du taux de change applicable deux jours ouvrés avant la date de révision du taux intérêt ; que se présentent alors deux hypothèses, l'une favorable au débiteur et l'autre défavorable en ce que :
- si le montant de ce règlement mensuel théorique est inférieur au règlement mensuel en euros précédemment payé, le montant des règlements en euros restera néanmoins inchangé et la durée du crédit sera raccourcie ;
- si le montant de ce règlement mensuel théorique est supérieur au règlement mensuel en euros précédemment payé, le montant des règlements en euros restera également inchangé mais la durée du crédit sera allongée dans la limite de cinq ans ; que, dans l'hypothèse où l'allongement de la durée de remboursement de cinq années ne permettrait pas de solder le compte, les échéances en euros seraient alors augmentées mais sans que cette augmentation ne puisse être supérieure à celle de l'indice INSEE des prix à la consommation, série France entière, sur la période des cinq dernières années précédant la révision du taux des intérêts ;
qu'il en résulte que le contrat a exposé de manière parfaitement claire et compréhensible les conditions de variation du taux de l'intérêt et son impact sur le plan de remboursement, en fixant une double limite de la durée supplémentaire de remboursement qui ne peut être que de cinq ans, et de la majoration des règlements en euros qui ne peut être supérieure à l'augmentation annuelle de l'indice INSEE des prix à la consommation sur la période des cinq dernières années précédant la révision du taux d'intérêt ; qu'en outre, le risque lié à la variation du taux de l'intérêt n'a pas pesé exclusivement sur l'emprunteur, et que la clause litigieuse n'a pas eu pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment de ce dernier ;
Attendu que madame X. verra donc rejeter cette prétention ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 12 DÉCEMBRE 2019
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 18/01156. Arrêt n° 578. N° Portalis DBV6-V-B7C-BH4LS. Nac : Prêt-Demande en remboursement du prêt.
Le DOUZE DECEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF la chambre civile a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE :
APPELANTE :
Madame X. divorcée Y.
née le [date] à [ville], demeurant [adresse], représentée par Maître Lauranne E. de la SELARL E., avocat au barreau de BRIVE, APPELANTE d'une décision rendue le 26 OCTOBRE 2018 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BRIVE LA GAILLARDE
ET :
INTIMÉE :
Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
dont le siège social est sis : [adresse], représentée par Maître Philippe C. de la SELARL SELARL M.C., avocat au barreau de BRIVE, INTIMÉE
Suivant avis de fixation de la Présidente de chambre chargée de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 7 novembre 2019. L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 octobre 2019.
La Cour étant composée de Madame Johanne PERRIER, Présidente de chambre, de Monsieur Gérard SOURY et de Madame Géraldine VOISIN, Conseillers, assistés de Mme Mandana SAFI, greffier. A cette audience, Madame Johanne PERRIER, Présidente de chambre, a été entendue en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis Madame Johanne PERRIER, Présidente de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 12 décembre 2019 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR
Selon une offre de prêt acceptée le 20 juillet 2008, réitérée par acte authentique du 20 août 2008, les époux X.-Y., qui étaient mariés sous le régime de la séparation des biens, ont souscrit auprès de la Sa BNP Paribas Personal Finance, en vue d'acquérir en indivision un appartement à usage locatif à [ville L.] et de bénéficier d'une opération de défiscalisation, un prêt immobilier dit « Helvet Immo » d'un montant de 371.948,48 francs suisses, converti en une somme de 227.610 euros, qui a été stipulé remboursable avec un différé de 12 mois en 288 mensualités de 1.509,63 euros, au taux garanti de 4,82 % l'an les 5 premières années et révisable ensuite tous les cinq ans en fonction de l'évolution du taux de change entre le franc suisse et l'euro.
Le prêt, octroyé en francs suisses, qui est la monnaie du compte, a été stipulé remboursable après conversion en francs suisses des échéances payées en euros, qui est la monnaie de paiement.
Les époux X.-Y. ont divorcé par jugement du 14 janvier 2010 et, aux termes de la convention réglant les conséquences du divorce, le bien sis à [ville L.] a été attribué à madame X. à charge pour elle de régler seule les échéances du prêt, ce qu'elle n'a pas été en mesure de faire dès l'échéance de janvier 2010.
Par ordonnance de référé du tribunal d'instance de Brive la Gaillarde du 5 octobre 2010, madame X. a obtenu la suspension de l'exécution de son obligation à remboursement pour une durée de deux ans de manière à lui permettre de réaliser la vente du bien de [ville L.]. Par acte notarié du 7 novembre 2012, cette vente est intervenue au prix de 165.000 euros et une somme de 159.440,25 a été versée à la Sa BNP Paribas Personal Finance.
Le 10 décembre 2012, la banque a prononcé lé déchéance du terme du prêt « Helvet Immo ».
Le 31 octobre 2013, madame X. a saisi la commission de surendettement des particuliers qui a déclaré sa demande recevable le 20 décembre 2013 ; l'échec de la procédure amiable a été constaté le 20 août 2015 et madame X. a demandé à bénéficier de mesures imposées par la commission ; un jugement du tribunal d'instance en date du 21 décembre 2017 a homologué les mesures imposées par la commission et prévoyant le paiement des dettes de madame X. en une seule mensualité de 101.996,85 euros au moyen de la vente d'un bien immobilier sis à [ville M.], lui appartenant en propre, aux prix de 216.000 euros.
En vertu de l'acte notarié de prêt du 20 août 2008, la banque avait pris le 14 janvier 2014 une inscription d'hypothèque provisoire sur le bien situé à [ville M.] en sûreté d'une créance de 230.804,23 euros et cette inscription a été signifiée à madame X. par acte du 15 janvier 2014.
Par acte du 27 mai 2016, la Sa BNP Paribas Personal Finance a fait assigner madame X. en paiement devant le tribunal de grande instance de Brive la Gaillarde, lequel, par jugement du 26 octobre 2018 :
- a dit la Sa BNP Paribas Personal Finance recevable en son action en paiement ;
- a dit madame X. également recevable en son action en nullité de la clause relative au risque de change de l'euro en franc suisse, mais l'en a déboutée ;
- a également débouté madame X. de sa demande en déchéance de la banque de son droit aux intérêts, ainsi qu'en paiement de dommages et intérêts pour manquement à son obligation d'information et de mise en garde,
- a condamné madame X. à payer à la la Sa BNP Paribas Personal Finance la somme de 238.472,09 euros avec intérêt au taux de 1,94% l'an à compter du 18 septembre 2014 sur la somme de 212.822,03 euros et au taux légal sur le surplus,
- a condamné madame X. aux dépens, en ce compris les frais d'inscription d'hypothèque provisoire et définitive et à payer à la Sa BNP Paribas Personal Finance la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .
Le 29 novembre 2018, madame X. a interjeté appel de ce jugement.
[*]
Par ses dernières conclusions déposées le 24 septembre 2019 et auxquelles il est renvoyé, madame X. demande à la cour ;
* à titre principal, de dire la Sa BNP Paribas Personal Finance prescrite en son action en paiement ;
* à titre subsidiaire :
- de dire la clause prévoyant la révision du taux des intérêts en fonction de la variation du taux de change réputée non écrite comme étant abusive ;
- de dire qu'elle est emprunteur non averti, que la Sa BNP Paribas Personal Finance a manqué à son obligation de mise en garde et de la condamner à lui payer la somme de 112.684,87 euros en réparation de sopn préjudice, cette somme venant en compensation de sa dette ;
- de condamner la Sa BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens et à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
[*]
Par ses dernières conclusions déposées le 23 mai 2019 et auxquelles il est renvoyé, la Sa BNP Paribas Personal Finance demande à a cour la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de madame X. à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Sur la recevabilité de l'action en paiement de la banque :
Attendu que madame X. fait valoir que la déchéance du terme a été prononcée le 10 décembre 2012, que l'action de la banque en paiement du capital restant dû est soumise à la prescription biennale de l'ancien article L. 137-2 du code de la consommation (désormais article L. 218-2 en vertu de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016), que seule la saisine de la commission de surendettement le 31 octobre 2013 a interrompu la prescription et non la date du 9 septembre 2015 à laquelle elle a demandé à bénéficier des mesures imposées par la commission, au demeurant par un courrier qui n'est pas produit aux débats, et que l'assignation en paiement, qui lui a été délivrée le 27 mai 2016, l'a été alors que la prescription lui était acquise ;
Mais attendu que c'est par de justes motifs que le premier juge a retenu que la prescription de deux ans, qui a commencé à courir le 10 décembre 2012, a été interrompue une première fois, en application de l'article 2241 du code civil, par l'inscription d'hypothèque provisoire dénoncée à la débitrice le 15 janvier 2014, qu'un nouveau délai de deux ans à recommencé à courir à compter de cette date et que la prescription a à nouveau été interrompue, en application de l'article L. 331-7 du code de la consommation alors en vigueur, par la demande de madame X. du 9 septembre 2015 de bénéficier de mesures imposées par la commission de surendettement, ce dont la banque justifie en produisant le courrier recommandé qui lui a été adressé par la commission de surendettement le 10 septembre 2015 pour l'informer de cette saisine et recueillir ses observations, et qu'elle a reçu le 14 septembre 2015;
que le jugement sera donc confirmé de ce chef ;
Sur la demande de madame X. portant sur la clause prévoyant la révision du taux de l'intérêt :
Attendu que la banque reprend dans ses motifs un moyen tiré de l'irrecevabilité d'une exception de nullité de la clause de stipulation des intérêts conventionnels qui lui serait opposée par madame X. en défense à son action en paiement, mais que, d'une part, madame X. ne demande pas la nullité d'une telle clause mais seulement d'écarter comme étant abusive et réputée non écrite celle prévoyant la révision du taux d'intérêt, et que, d'autre part, une telle prétention n'est pas reprise dans le dispositif de ses conclusions, de sorte qu'au plus fort et en application de l'article 954 du code de procédure civile qui prévoit que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions, il n'y a pas lieu à statuer de ce chef ;
Attendu que madame X. demande, sur le fondement de l'ancien L. 132-1 du code de la consommation (désormais codifié article L. 212-1) de dire abusive la clause du contrat prévoyant la révision du taux d'intérêt en fonction des variations du taux de change en ce qu'elle aurait eu pour effet de créer, à son détriment, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;
Attendu qu'au sens de l'article L. 132-1 dans sa rédaction applicable à l'espèce et ainsi que l'a relevé le premier juge, l'appréciation du caractère abusif des clauses ne porte pas sur la définition de l'objet principal du contrat, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ; que le prêt a eu la caractéristique d'être octroyé en francs suisses mais remboursable en euros après conversion en francs suisses des paiements faits en euros ; que le risque de change, inhérent à ce type de prêt, a eu une incidence sur les conditions de remboursement du crédit, et que les clauses litigieuses ayant prévu une variation du taux des intérêts en fonction de la variation du taux de change et les conditions de cette variation, ont défini l'objet principal du contrat ;
Attendu que l'exigence selon laquelle une clause contractuelle doit être rédigée de manière claire et compréhensible oblige l'établissement financier à fournir aux emprunteurs des informations suffisantes pour permettre à ceux-ci de prendre leurs décisions avec prudence et en toute connaissance de cause ; que cette exigence implique que la clause soit comprise par le consommateur dans sa portée concrète, en ce sens qu'un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif puisse en évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, sur ses obligations financières ;
Attendu, s'agissant des clauses prévoyant la variation du taux d'intérêt, que le paragraphe « Charges de votre crédit » indique que le taux d'intérêt initial est de 4, 82 % l'an et sera fixe et appliqué pendant les cinq premières années ; qu'à la fin de cette période, à défaut pour l'emprunteur de choisir un changement de monnaie de compte en euros (soit à un taux fixe, soit à un taux révisable), le taux d'intérêt du crédit sera calculé sur la base de la moyenne du taux SWAP francs suisses 5 ans du mois civil précédant l'application du nouveau taux du prêt ; que cette révision aura une incidence sur la composition de l'échéance qui sera calculée sur la base des sommes restant dues sur le compte en francs suisses, de la durée résiduelle initiale du crédit et du nouveau taux d'intérêt applicable, et que sera déterminé un nouveau montant d'échéance théorique en francs suisses, laquelle sera alors convertie en euros sur la base du taux de change applicable deux jours ouvrés avant la date de révision du taux intérêt ; que se présentent alors deux hypothèses, l'une favorable au débiteur et l'autre défavorable en ce que :
- si le montant de ce règlement mensuel théorique est inférieur au règlement mensuel en euros précédemment payé, le montant des règlements en euros restera néanmoins inchangé et la durée du crédit sera raccourcie ;
- si le montant de ce règlement mensuel théorique est supérieur au règlement mensuel en euros précédemment payé, le montant des règlements en euros restera également inchangé mais la durée du crédit sera allongée dans la limite de cinq ans ; que, dans l'hypothèse où l'allongement de la durée de remboursement de cinq années ne permettrait pas de solder le compte, les échéances en euros seraient alors augmentées mais sans que cette augmentation ne puisse être supérieure à celle de l'indice INSEE des prix à la consommation, série France entière, sur la période des cinq dernières années précédant la révision du taux des intérêts ;
qu'il en résulte que le contrat a exposé de manière parfaitement claire et compréhensible les conditions de variation du taux de l'intérêt et son impact sur le plan de remboursement, en fixant une double limite de la durée supplémentaire de remboursement qui ne peut être que de cinq ans, et de la majoration des règlements en euros qui ne peut être supérieure à l'augmentation annuelle de l'indice INSEE des prix à la consommation sur la période des cinq dernières années précédant la révision du taux d'intérêt ; qu'en outre, le risque lié à la variation du taux de l'intérêt n'a pas pesé exclusivement sur l'emprunteur, et que la clause litigieuse n'a pas eu pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment de ce dernier ;
Attendu que madame X. verra donc rejeter cette prétention ;
Sur le manquement de la banque à son obligation d'information :
Attendu que le contrat a précisé que le crédit sera géré d'une part en francs suisses (monnaie de compte) et d'autre part en euros (monnaie de paiement); que l'amortissement du capital évoluera en fonction des variations du taux de change appliqué aux règlements mensuels, après paiement des charges annexes, en valeur au jour de la réception des paiements en euros ; que s'il résulte de l'opération de change une somme inférieure à l'échéance en francs suisses exigible, l'amortissement du capital sera moins rapide et l'éventuelle part de capital non amorti au titre d'une échéance sera inscrite au solde débiteur du compte en francs suisses ; qu'en revanche s'il résulte de l'opération de change une somme supérieure à l'échéance en francs suisses exigible, l'amortissement du capital sera plus rapide ; que les articles ' compte interne en euros' et ' compte interne en francs suisses' ont en outre prévu de détailler les opérations effectuées à chaque paiement d'échéance au crédit et au débit du compte ;
que le contrat a expliqué sans équivoque le fonctionnement du prêt en devises, a détaillé les opérations effectuées à chaque paiement d'échéance et a décrit les opérations de change pouvant avoir un impact sur le plan de remboursement ; que madame X. a été éclairée sur le risque inhérent à une opération de cette nature et sur l'influence de la variation du taux de change sur la durée du prêt, sur la charge totale de remboursement et sur le coût total du crédit ; qu'elle n'est donc pas fondée à reprocher à la banque d'avoir failli à son obligation d'information ;
Attendu, surabondamment, que madame X. a été représentée à l'acte du 20 août 2008 par un clerc de notaire en vertu d'une procuration donnée par acte authentique et qu'en page 27 de cet acte (curieusement non produite par elle en sa pièce n°1) elle a reconnu avoir été spécialement informée par le notaire du risque d'emprunter dans une devise étrangère lorsqu'il n'est perçu aucun revenu dans cette monnaie, eu égard aux risques importants de changes, ainsi qu'aux fluctuations des monnaies qui peuvent entraîner un remboursement beaucoup plus important en cours de prêt que lors de sa régularisation, et vouloir persister dans son intention de réaliser ledit emprunt ;
Sur le manquement de la banque à son devoir de mise en garde :
Attendu que le banquier dispensateur de crédit est tenu à l'égard de l'emprunteur non averti d'un devoir de mise en garde, consistant en l'obligation de se renseigner sur les capacités financières de l'emprunteur afin de proposer un crédit adapté à la situation de ce dernier, et de l'alerter sur les risques de l'endettement né de l'octroi du prêt lorsque l'analyse de ses facultés contributives laisse apparaître qu'il ne sera pas en mesure d'en supporter la charge de remboursement; qu'en l'absence de justification par la banque d'avoir satisfait à cette obligation, l'emprunteur non averti peut rechercher la responsabilité de l'établissement de crédit, à charge pour lui de démontrer que le crédit consenti était inadapté à ses capacités financières ou comportait un risque d'endettement ;
Attendu que, pour réclamer la somme de 112.634,97 euros en réparation d'un préjudice qui ne peut consister qu'en la perte de chance de ne pas contracter, madame X. fait valoir qu'aucune étude de solvabilité des emprunteurs n'a été réalisée et que la banque n'a pas attiré son attention sur un risque d'endettement en cas de variation brutale du taux de change alors qu'au 20 août 2008, elle-même et son époux étaient engagés :
- au titre d'un prêt immobilier à taux 0 d'un montant de 100.000 francs souscrit en 1999, de 0 euros pendant 10 ans et de 317,60 euros pendant 48 mois ;
- au titre de d'un prêt épargne logement de 2002 d'un montant de 7.378 euros sur 156 mois, avec des échéances de 61,01 euros par mois;
- au titre d'un prêt de son époux de 2005 pour la construction d'un garage et de son atelier de 53.000 euros, remboursable en 144 mensualités de 489,24 euros ;
Attendu que madame X. ne donne pas la moindre indication sur la situation de ressources qu'était non seulement la sienne mais également celle de son époux à la date de conclusion du prêt, qui a été destiné, dans le cadre d'une opération de défiscalisation, à un investissement, en indivision entre eux, dans un immeuble à usage locatif dont les échéances de remboursement étaient prévues pour être au moins partiellement couvertes par des revenus locatifs et qui ont été normalement honorées entre août 2008 et janvier 2010, soit jusqu'à la date de prononcé du divorce entre elle et son époux ; que c'est à propos que le premier juge a relevé que les difficultés de remboursement rencontrées par madame X. n'ont pas trouvé leur cause dans un endettement excessif du ménage mais dans le fait que celle-ci, dans ses rapports avec son ex-mari, ait été seule tenue au remboursement du prêt;
que madame X. ne peut, dans ces circonstances, être suivie en sa demande en dommages et intérêts ;
Sur le montant de la créance :
Attendu que le jugement dont appel, qui a fait une exacte appréciation du montant de la créance de la Sa BNP Paribas Personal Finance Personal Finance, arrêtée à la somme de 238.472,09 euros, outre les intérêts aux taux contractuel de 1,94 % l'an à compter du 18 septembre 2014 sur la somme de 212.822,03 euros en capital, n'encourt aucune critique à cet égard et qu'il sera donc confirmé ;
Sur les frais et dépens :
Attendu que madame X. qui succombe en son appel, doit en supporter les dépens ;
que l'équité ne commande pas de faite droit à la demande de la banque en application de l'article 7 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant par décision contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Brive la Gaillarde en date du 26 octobre 2018 ;
Condamne madame X. aux dépens de l'appel,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Mandana SAFI. Johanne PERRIER.