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CA BOURGES (ch. civ.), 16 juillet 2020

Nature : Décision
Titre : CA BOURGES (ch. civ.), 16 juillet 2020
Pays : France
Juridiction : Bourges (CA), ch. civ.
Demande : 19/00861
Date : 16/07/2020
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 12/07/2019
Référence bibliographique : 5889 (art. L. 221-3 C. consom.), 5944 (site internet)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8505

CA BOURGES (ch. civ.), 16 juillet 2020 : RG n° 19/00861

Publication : Jurica

 

Extrait : « Que c'est en vain que l'appelante soutient devant la cour que les contrats portant sur des services financiers se trouvent exclus du champ d'application du code de la consommation aux termes de l'article L 121-16 - 1, dès lors que l'anéantissement du contrat de location de site Web conclu entre Madame Y.-X. et la société LOCAM a été prononcée par le premier juge - qui a constaté que l'intimée avait valablement exercé son droit de rétractation par courrier du 1er octobre 2017 réitéré par un courrier recommandé de son avocat du 9 novembre suivant - non pas au titre de l'exercice d'un droit de rétractation qui aurait affecté ce contrat de location, mais en application de l'article L. 221-27 alinéa 2 précité qui retient comme corollaire automatique de l'exercice du droit de rétractation du contrat principal la fin de «tout contrat accessoire» ce qui est le cas, en l'espèce, du contrat conclu entre les parties afin d'assurer le financement du site Internet qui avait été commandé initialement par Madame Y.-X. auprès de la société 2FCI ».

 

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 16 JUILLET 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/00861. N° Portalis DBVD-V-B7D-DFZ6. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de NEVERS en date du 30 avril 2019.

 

PARTIES EN CAUSE :

I - SAS LOCAM

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social : N° SIRET : XXX, [...], Représentée par Maître Aurore T. de la SCP S., avocat au barreau de BOURGES - timbre fiscal acquitté - APPELANTE suivant déclaration du 12/07/2019

 

II - Mme X. épouse Y.

née le [date] à [ville], [adresse], non représentée, à laquelle la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées suivant acte d'huissier du 15 octobre 2019 remis à l'étude d'huissier - INTIMÉE

 

L'audience du 2 juin 2020 n'a pu se tenir compte tenu de l'état d'urgence sanitaire déclaré par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020. La Cour statue sans audience au vu des pièces et des conclusions produites (les avocats ne s'y étant pas opposés).

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. SARRAZIN Président de Chambre, M. PERINETTI Conseiller, Mme CIABRINI Conseiller

ARRÊT : RENDU PAR DÉFAUT, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Exposé :

Le 18 juin 2017, Madame Y.-X. exerçant sous le statut d'auto entrepreneur, a été démarchée à domicile par la SARL 2FCI et a signé avec celle-ci un bon de commande portant sur la création d'un site Internet dédié à son activité professionnelle d'énergéticienne.

Le même jour, elle a signé avec la SAS LOCAM un contrat de location de site Internet, aux termes duquel elle devait s'acquitter de 48 loyers mensuels d'un montant de 180 € chacun, et destiné à financer ce site Internet.

Le site Internet a été livré le 7 septembre 2017.

Le 1er octobre 2017, par courrier adressé à la SARL 2FCI, Madame Y.-X. a indiqué qu'elle entendait exercer son droit de rétractation en application des articles L. 221-18 et L. 221-20 du code de la consommation.

Par courrier recommandé du 13 novembre 2017, Madame Y.-X. a réitéré sa demande par l'intermédiaire de son conseil auprès de la SARL 2FCI et a demandé la restitution des sommes déjà versées.

Le 29 décembre 2017, la SARL 2FCI a indiqué que Madame Y.-X. ne disposait pas d'un droit de rétractation.

Le 16 février 2018, la SAS LOCAM a mis Madame Y.-X. en demeure de s'acquitter des échéances impayées depuis le 30 novembre 2017, puis a assigné cette dernière devant le tribunal d'instance de Nevers par acte d'huissier du 24 avril 2018 aux fins de condamnation en paiement.

Madame Y.-X. a assigné la SARL 2FCI en intervention forcée devant le tribunal afin que la nullité du contrat qu'elle a conclu avec cette dernière soit prononcée.

Par jugement rendu le 30 avril 2019, le tribunal d'instance a :

- Constaté l'anéantissement du contrat de commande d'un site Internet professionnel conclu le 18 juillet 2017 entre Madame Y.-X. et la SARL 2FCI et de ses contrats accessoires, en l'occurrence un contrat de licence d'exploitation de site Internet conclu entre Madame Y.-X. et la SARL 2FCI et un contrat de location de site Web conclu entre celle-ci, la SARL 2FCI et la SAS LOCAM, ces deux derniers contrats ayant été également conclus le 18 juillet 2017,

- Condamné in solidum la SARL 2FCI et la SAS LOCAM à verser à Madame Y.-X. la somme de 1.098 € avec intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 2017 date de la mise en demeure,

- Débouté la SAS LOCAM de sa demande de condamnation en paiement dirigée contre Madame Y.-X.,

- Débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- Condamné in solidum la SARL 2FCI et la SAS LOCAM à verser à Madame Y.-X. une indemnité de 800 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Le tribunal a principalement considéré, en effet, que le contrat avec la SARL 2FCI avait été conclu hors établissement, que Madame Y.-X. n'employait aucun salarié et qu'il n'entrait pas dans le champ de l'activité principale de cette dernière qui exerce l'activité d'énergéticienne.

Il a estimé par ailleurs que le contrat de commande d'un site Internet professionnel ne pouvait être considéré comme constituant un contrat de fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés au sens de l'article L. 221- 28 du code de la consommation.

En conséquence, le tribunal a estimé que Madame Y.-X. disposait bien d'un droit de rétractation de 14 jours à compter de la conclusion du contrat mais, qu'en l'absence de toute information relative à ce droit au moment de la conclusion du contrat, elle disposait d'un délai supplémentaire de 12 mois.

Estimant que ce droit de rétractation avait été valablement exercé, le tribunal a en conséquence débouté la SAS LOCAM de sa demande en paiement.

[*]

La SAS LOCAM a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 12 juillet 2019 à l'encontre de Madame Y.-X.

Elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de condamner Madame Y.-X. à lui verser la somme de 9.108 € avec intérêts au taux légal et autres accessoires de droit à compter de la mise en demeure du 16 février 2018, outre une indemnité de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société appelante fait principalement valoir au soutien de son appel que :

- Madame Y.-X. est parfaitement engagée à son égard puisqu'elle a dûment signé le contrat de location de site Web ainsi que le procès-verbal de livraison et de conformité,

- elle ne disposait d'aucune faculté de rétractation, dès lors que les dispositions du code de la consommation ne peuvent s'appliquer puisque Madame Y.-X. a agi dans le cadre de son activité professionnelle,

- selon l'article L. 121-16-1 du code de la consommation, les contrats portant sur les services financiers sont exclus de l'application des dispositions du code de la consommation,

- les opérations connexes de location simple qu'elle réalise participent des services financiers qu'elle dispense en tant que société de financement.

[*]

Madame Y.-X. n'a pas constitué avocat devant la cour.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI :

Attendu que dans sa déclaration d'appel du 12 juillet 2019, la société LOCAM a interjeté appel à l'encontre de l'intégralité des dispositions du jugement rendu le 30 avril 2019 par le tribunal d'instance de Nevers, lequel a notamment débouté cette dernière de sa demande de condamnation en paiement dirigée à l'encontre de Madame Y.-X. après avoir considéré que celle-ci avait valablement exercé son droit de rétractation qui lui était conféré par l'article L. 221-3 du code de la consommation, ce qui avait eu pour effet d'anéantir le contrat souscrit par celle-ci auprès de la SARL 2FCI et, en application de l'article L. 221-7 du même code, de mettre fin au contrat accessoire de location de site Web conclu avec l'appelante ;

Que selon l'article L. 121-16 du même code, un contrat hors établissement est un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d'une sollicitation ou d'une offre faite par le consommateur, ou dans le lieu où le professionnel exerce son activité en permanence de manière habituelle au moyen d'une technique de communication à distance, immédiatement après que le consommateur a été sollicité personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce en permanence de manière habituelle son activité et où les parties étaient, physiquement et simultanément, présentes ;

Attendu qu'il résulte de l'article L. 221-3 du code de la consommation appliqué par le premier juge, figurant dans le chapitre Ier de ce code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance numéro 2016-301 du 14 mars 2016, que «les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à 5» ;

Que selon la section 6 du chapitre Ier du titre II du livre II du code de commerce, à laquelle il est ainsi renvoyé, le consommateur dispose d'un délai de 14 jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision (article L. 221-18), ce délai étant prolongé de 12 mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial lorsque les informations relatives au droit de rétractation n'ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° de l'article L. 221-5 (article L. 221-20 du même code) ;

Qu'il résulte par ailleurs de l'article L. 221-27 du même code que l'exercice du droit de rétractation met fin à l'obligation des parties soit d'exécuter le contrat à distance ou le contrat hors établissement, soit de le conclure lorsque le consommateur a fait une offre et que l'exercice du droit de rétractation d'un contrat principal met automatiquement fin à tout contrat accessoire sans frais pour le consommateur autres que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25 ;

Que c'est en vain que l'appelante soutient devant la cour que les contrats portant sur des services financiers se trouvent exclus du champ d'application du code de la consommation aux termes de l'article L 121-16 - 1, dès lors que l'anéantissement du contrat de location de site Web conclu entre Madame Y.-X. et la société LOCAM a été prononcée par le premier juge - qui a constaté que l'intimée avait valablement exercé son droit de rétractation par courrier du 1er octobre 2017 réitéré par un courrier recommandé de son avocat du 9 novembre suivant - non pas au titre de l'exercice d'un droit de rétractation qui aurait affecté ce contrat de location, mais en application de l'article L. 221-27 alinéa 2 précité qui retient comme corollaire automatique de l'exercice du droit de rétractation du contrat principal la fin de «tout contrat accessoire» ce qui est le cas, en l'espèce, du contrat conclu entre les parties afin d'assurer le financement du site Internet qui avait été commandé initialement par Madame Y.-X. auprès de la société 2FCI ;

Qu'en conséquence, les moyens soulevés par l'appelante ne sauraient prospérer et la décision dont appel devra être confirmée ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

- Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

- Dit que les entiers dépens d'appel seront à la charge de la société LOCAM.

L'arrêt a été signé par M. SARRAZIN, Président, et par Mme GUILLERAULT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,                   LE PRÉSIDENT,

V. GUILLERAULT            L. SARRAZIN