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CA VERSAILLES (16e ch.), 10 septembre 2020

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (16e ch.), 10 septembre 2020
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 16e ch.
Demande : 18/08121
Date : 10/09/2020
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 3/12/2018
Référence bibliographique : 5997 (pertinence des recommandations), 6638 (prêt immobilier)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8542

CA VERSAILLES (16e ch.), 10 septembre 2020 : RG n° 18/08121 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Le prêt immobilier litigieux étant soumis aux dispositions du code de la consommation, la demande de nullité de la stipulation légale d'intérêts est irrecevable, la seule sanction applicable à l'offre préalable de crédit acceptée étant la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, dans la proportion fixée par le juge. L'emprunteur consommateur ne dispose pas d'une option entre action en nullité et action en déchéance du droit aux intérêts, le texte spécial de l'article L 312-33 (ancien) du code de la consommation dérogeant pour les prêts immobiliers soumis aux dispositions du code de la consommation, au texte général de l'article 1907 du code civil. Le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action des époux X. en nullité de la stipulation d'intérêts du contrat. »

2/ « Les conditions générales de l'offre de prêt litigieuse prévoient que les intérêts conventionnels sont calculés « sur la base d'une année bancaire de 360 jours », et d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours.

M. et Mme X. soutiennent que le calcul des intérêts conventionnels sur l'année « lombarde » de 360 jours a créé un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au prêt, à leur détriment, ce calcul aboutissant en réalité, selon eux, à majorer le taux des intérêts conventionnels. Ils entendent voir dire illicite la clause relative au calcul des intérêts.

Bien que cette clause ne concerne pas la fixation du taux effectif global (TEG), et se rapporte aux seuls intérêts conventionnels, il importe de rappeler que les intérêts conventionnels constituent l'élément essentiel du TEG. Il convient dès lors de faire application de l'article R 313-1 du code de la consommation, relatif au taux effectif global, notamment en sa disposition suivante : « c) l'écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou en fractions d'années. Une année compte 365 jours, ou pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés. Un mois normalisé compte 30,41666 jours (c'est à dire 365/12) que l'année soit bissextile ou non. » Ainsi le législateur a-t-il protégé le consommateur d'une facturation d'intérêts dont il n'aurait pas été clairement informé, en lui fournissant des références de calcul homogènes et l'équivalence du rapport 30 divisé par 360, avec celui de 30,41666, - durée du mois normalisé, tenant compte à la fois du nombre différent de jours de chaque mois et du caractère bissextile ou non de l'année - divisée par 365, nombre de jours de l'année civile.

M. et Mme X. se prévalent tant de l'ancien article L. 132-1 du code de la consommation (devenu aujourd'hui L. 212-1) sur le caractère abusif et non écrit des clauses ayant pour objet de créer un déséquilibre entre les parties au détriment du non-professionnel ou du consommateur, que des recommandations n° 05-02 rendues par la Commission des clauses abusives le 22 septembre 2005, et n° 04-03 de cette même commission du 30 septembre 2004.

C'est à bon droit que le jugement a estimé inapplicables en l'espèce ces deux recommandations, la première parce qu'elle ne concerne que les conventions de compte bancaire de dépôt, la seconde parce qu'elle ne parle pas des calculs de taux d'intérêts, et encore moins du calcul des intérêts conventionnels des prêts sur la base d'une année de 360 jours. Les emprunteurs ne contestent pas que le mois normalisé a été employé pour le calcul des intérêts conventionnels, et ne rapportent donc pas la preuve du caractère abusif de la clause 30/360 et donc d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties à leur détriment.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande tendant à la reconnaissance d'une clause abusive dans les stipulations contractuelles liant les parties. »

3/ « En l'espèce, le contrat de crédit immobilier souscrit par M. et Mme X. étant soumis aux dispositions du code de la consommation, seule est recevable la demande en déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels. La clause 30/360 ne pouvant être qualifiée d'abusive en l'espèce, puisqu'elle est équivalente au calcul par le rapport 30,41666/365, qui est celui applicable aux emprunteurs, il n'y a pas davantage lieu à déchéance du droit aux intérêts du prêteur pour ce motif. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

SEIZIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/08121 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SZZT. CONTRADICTOIRE. Code nac : 53D. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 6 novembre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES : R.G. n° 16/06370.

LE DIX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant, après prorogation, dans l'affaire entre :

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité Portugaise, [adresse]

Madame Y.

née le [date] à [ville], de nationalité Portugaise, [adresse]

Représentant : Maître Hervé B., Plaidant, avocat au barreau de NANCY, Représentant : Maître Lina AL W., Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 244

 

INTIMÉE :

BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE

Société Anonyme coopérative de Banque Populaire à capital variable N° Siret : XXX (RCS Versailles) [...], [...], Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentant : Maître Thierry P. de l'AARPI B.P. ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 710 - N° du dossier 0027656

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Janvier 2020 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Patricia GRASSO, Président, Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller, Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon offre préalable émise le 3 février 2014, la société coopérative Banque populaire Val-de-France a consenti à M. X et Mme Y. un prêt d'un montant de 203.000 euros destiné à financer l'achat d'un bien immobilier situé à [ville S.], remboursable en 300 mensualités, moyennant un taux d'intérêts variable indexé sur la moyenne Euribor 1 an majoré d'un complément de taux de 2,740 points, un taux plancher de 2 % et un taux plafond de 5,302 %, ainsi qu' un taux effectif global (TEG) indicatif de 4,21 % l'an.

En page 13 de l'offre, les conditions générales du prêt, au paragraphe intitulé « conditions financières », portent indication de ce que « les intérêts seront calculés sur le montant du capital restant dû, au taux fixé aux Conditions Particulières sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours ».

Par exploit en date du 2 juin 2016, M. et Mme X. ont fait assigner la société Banque Populaire Val-de-France devant le tribunal de grande instance de Versailles aux fins de voir dire que l'offre de crédit qui leur a été adressée méconnaît formellement les exigences issues des dispositions des articles 1907 du code civil et celles des articles L. 111-1 et L. 312-1 et suivants du code de la consommation.

Par jugement rendu le 6 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Versailles a :

- déclaré irrecevable l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel ;

- débouté M. et Mme X. de l'intégralité de leurs demandes ;

- débouté la société Banque populaire Val-de-France de sa demande au titre de la procédure abusive ;

- condamné M. et Mme X. aux dépens qui pourront être recouvrés directement par Maître Thierry P. conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- condamné M. et Mme X. à payer à la société Banque populaire Val-de-France la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le 3 décembre 2018, M. et Mme X. ont interjeté appel de la décision.

[*]

Dans leurs conclusions transmises le 15 mai 2019, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. et Mme X., appelants, demandent à la cour de :

À titre principal,

- réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Sur les demandes tirées de l'inexécution du contrat par la société Banque populaire Val-de-France :

- juger que le prêteur qui n'exécute pas le contrat, en ses dispositions relatives au taux d'intérêts et qui ne respecte pas la période de calcul des intérêts entre deux échéances de paiement, ne peut prétendre à plus que l'intérêt légal, faute de fondement contractuel à la perception des intérêts à un autre taux que celui que la loi prévoit ;

- ordonner le retour à l'intérêt légal ;

- condamner la société Banque populaire Val-de-France à restituer les sommes qu'il aurait reçues en sus de l'application de l'intérêt légal ;

Sur les demandes en déclaration de clauses non écrites :

- rappeler que la demande en déclaration de clause non écrite n'est pas une demande en annulation et n'est pas enserrée dans des délais particuliers, le déséquilibre causé au préjudice du consommateur étant actuel et s'appréciant au moment où le tribunal a été saisi ;

- juger que les informations données à l'emprunteur sur le coût total de la dette par l'offre de crédit immobilier critiquée devant la cour, sont incomplètes, incompréhensibles et ambiguës, créant un déséquilibre significatif au détriment d'un consommateur profane normalement vigilant, et que, privé par conséquent d'informations adéquates sur les caractéristiques essentielles de l'opération de crédit proposée, il n 'a pas valablement consenti au coût global du prêt ni à l'obligation à la dette ;

- juger que le recours à un diviseur de marchés financiers de 360 jours pour calculer les intérêts produits par l'amortissement crée un déséquilibre manifeste au détriment du consommateur, puisqu'il renchérit le coût du crédit à l'insu de l'emprunteur ;

- déclarer cette stipulation abusive et partant, non écrite ;

- ordonner que l'amortissement du capital mis à disposition sera poursuivi sans qu'il y ait lieu à substitution d'un autre taux d'intérêt, la stipulation étant réputée non écrite ;

- ordonner l'émission d'un nouveau tableau d'amortissement des sommes mises à la disposition de l'emprunteur, sur la durée conventionnelle de l'amortissement, expurgé des conséquences des stipulations abusives ;

- condamner la société Banque populaire Val-de-France à restituer les sommes qu'elle a reçues en sus de l'application de l'intérêt légal ;

Sur les demandes en nullité de la stipulation d'intérêts et en restitution :

- juger, à titre subsidiaire, que la stipulation d'intérêts conventionnels est nulle ;

- ordonner le retour à l'intérêt légal ;

- condamner la société Banque populaire Val-de-France à restituer les sommes qu'elle aurait reçues en sus de l'application de l'intérêt légal ;

Sur les demandes en déchéance :

- juger que faute d'avoir intégré au calcul du taux effectif global les coûts exacts de la dette, charges auxquelles la société Banque populaire Val-de-France a subordonné l'octroi du crédit, la déchéance des intérêts au taux conventionnel sera également prononcée, et les intérêts au taux légal applicable pour l'année de l'acceptation de l'offre y seront substitués ;

- condamner la société Banque populaire Val-de-France à restituer les sommes qu'elle aurait reçues en sus de l'application de l'intérêt légal ;

En tout état de cause,

- condamner la société Banque populaire Val-de-France à leur payer la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'instance, avec faculté de recouvrement direct au profit de Maître Lina Al W., avocat au barreau des Hauts-de-Seine, sur son affirmation de droit.

Au soutien de leurs demandes, M. et Mme X. font valoir :

- que la stipulation de calcul des intérêts conventionnels sur une durée autre que l'année civile est nulle ; que le contrat de prêt n'a pas été exécuté par le prêteur s'agissant du taux d'intérêts ; que le prêteur ne leur a pas communiqué la durée de la période appliquée pour le calcul des intérêts entre deux échéances de paiement, de sorte que le prêteur doit être déchu de son droit aux intérêts ;

- que la stipulation d'intérêts conventionnels est abusive et doit être réputée non écrite ; qu' en l'espèce, les incidences financières du mode de calcul des intérêts choisi par la banque sur la base de l'année lombarde ne leur ont pas été communiquées, de sorte la clause litigieuse est constitutive d'un déséquilibre significatif entre les parties ;

[*]

Dans ses conclusions comportant un appel incident, transmises le 12 août 2019, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Banque populaire Val-de-France, intimée, demande à la cour de :

À titre principal,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. et Mme X. de l'ensemble de leurs demandes ;

À titre subsidiaire,

- dire et juger qu'en l'absence de démonstration par les emprunteurs d'un trop-perçu d'intérêts conventionnels, aucune sanction ne saurait être prononcée à son encontre ;

- débouter M. et Mme X. du surplus de leurs demandes ;

À titre infiniment subsidiaire,

- débouter M. et Mme X. de leur demande d'application du taux légal en vigueur en 2014, la nature même du taux légal étant d'être un taux révisable fixé par décret ;

- l'infirmer pour le surplus en ses dispositions non contraires ;

Statuant à nouveau,

- condamner M. et Mme X. au paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée, outre la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. et Mme X. aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Thierry P., avocat, et ce conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, la société Banque populaire Val-de-France fait valoir :

- que la clause de stipulation des intérêts conventionnels ne peut être réputée non écrite en ce que la recommandation n° 2005-02 n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce puisqu'elle concerne les conventions de compte de dépôt et non les contrats de prêt immobilier ;

- que la demande en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels est irrecevable en ce que le prêt en cause est un prêt soumis aux dispositions du code de la consommation, de sorte que seule la déchéance du droit du prêteur aux intérêts peut être sollicitée ;

- que le résultat du calcul des intérêts mensuels est le même que l'on utilise le rapport 30,41666/365 ou le rapport 30/360 ; que la seule mention relative à l'année lombarde de 360 jours dans l'offre de prêt ne suffit pas à caractériser l'erreur, les emprunteurs devant prouver que le montant des intérêts conventionnels n'aurait pas été effectivement calculé sur la base d' une année de 365 jours ; que la clause litigieuse n'est pas abusive et n'a aucune incidence sur le montant total d'intérêts intégré au calcul du taux effectif global ;

- que la demande fondée sur l'absence du taux de période dans le contrat de prêt est irrecevable en ce qu'il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel ; qu'au surplus, l'offre de prêt fait mention d'un taux effectif global de 4,21 %, soit un taux de 0,351 % par période mensuelle ; qu'en tout état de cause, il n'est prévu aucune sanction particulière en raison d'un taux de période supposé erroné ; qu’en l'espèce, le TEG est proportionnel au taux de période ;

- que les emprunteurs ne justifient pas avoir sollicité d'autres établissements bancaires avant de contracter avec elle et ne communiquent aucune offre de prêt d'un établissement concurrent ;

- que les emprunteurs ne démontrent pas qu'ils ont subi un préjudice en ce que l'offre de prêt litigieuse ne concerne pas un prêt inférieur à 365 jours, n'a pas été négocié sur la base de fractions d'années et n'a pas fait l'objet d'un remboursement anticipé ; qu' en tout état de cause, le taux d'intérêt légal applicable à la date de conclusion du contrat n'existe plus ;

- qu'elle sollicite la condamnation des emprunteurs au paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée en ce qu'il résulte des éléments du dossier que les emprunteurs sont de mauvaise foi.

[*]

La clôture de l'instruction a été prononcée le 17 décembre 2019.

L'audience de plaidoiries a été fixée au 30 janvier 2020.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité de la demande en nullité de la stipulation d'intérêts :

Le prêt immobilier litigieux étant soumis aux dispositions du code de la consommation, la demande de nullité de la stipulation légale d'intérêts est irrecevable, la seule sanction applicable à l'offre préalable de crédit acceptée étant la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, dans la proportion fixée par le juge. L'emprunteur consommateur ne dispose pas d'une option entre action en nullité et action en déchéance du droit aux intérêts, le texte spécial de l'article L 312-33 (ancien) du code de la consommation dérogeant pour les prêts immobiliers soumis aux dispositions du code de la consommation, au texte général de l'article 1907 du code civil. Le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action des époux X. en nullité de la stipulation d'intérêts du contrat.

 

Sur la clause abusive :

Les conditions générales de l'offre de prêt litigieuse prévoient que les intérêts conventionnels sont calculés « sur la base d'une année bancaire de 360 jours », et d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours.

M. et Mme X. soutiennent que le calcul des intérêts conventionnels sur l'année « lombarde » de 360 jours a créé un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au prêt, à leur détriment, ce calcul aboutissant en réalité, selon eux, à majorer le taux des intérêts conventionnels. Ils entendent voir dire illicite la clause relative au calcul des intérêts.

Bien que cette clause ne concerne pas la fixation du taux effectif global (TEG), et se rapporte aux seuls intérêts conventionnels, il importe de rappeler que les intérêts conventionnels constituent l'élément essentiel du TEG. Il convient dès lors de faire application de l'article R 313-1 du code de la consommation, relatif au taux effectif global, notamment en sa disposition suivante :

« c) l'écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou en fractions d'années. Une année compte 365 jours, ou pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés. Un mois normalisé compte 30,41666 jours (c'est à dire 365/12) que l'année soit bissextile ou non. »

Ainsi le législateur a-t-il protégé le consommateur d'une facturation d'intérêts dont il n'aurait pas été clairement informé, en lui fournissant des références de calcul homogènes et l'équivalence du rapport 30 divisé par 360, avec celui de 30,41666, - durée du mois normalisé, tenant compte à la fois du nombre différent de jours de chaque mois et du caractère bissextile ou non de l'année - divisée par 365, nombre de jours de l'année civile.

M. et Mme X. se prévalent tant de l'ancien article L. 132-1 du code de la consommation (devenu aujourd'hui L. 212-1) sur le caractère abusif et non écrit des clauses ayant pour objet de créer un déséquilibre entre les parties au détriment du non-professionnel ou du consommateur, que des recommandations n° 05-02 rendues par la Commission des clauses abusives le 22 septembre 2005, et n° 04-03 de cette même commission du 30 septembre 2004.

C'est à bon droit que le jugement a estimé inapplicables en l'espèce ces deux recommandations, la première parce qu'elle ne concerne que les conventions de compte bancaire de dépôt, la seconde parce qu'elle ne parle pas des calculs de taux d'intérêts, et encore moins du calcul des intérêts conventionnels des prêts sur la base d'une année de 360 jours.

Les emprunteurs ne contestent pas que le mois normalisé a été employé pour le calcul des intérêts conventionnels, et ne rapportent donc pas la preuve du caractère abusif de la clause 30/360 et donc d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties à leur détriment.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande tendant à la reconnaissance d'une clause abusive dans les stipulations contractuelles liant les parties.

 

Sur la déchéance du droit aux intérêts de l'établissement prêteur :

En l'espèce, le contrat de crédit immobilier souscrit par M. et Mme X. étant soumis aux dispositions du code de la consommation, seule est recevable la demande en déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels.

La clause 30/360 ne pouvant être qualifiée d'abusive en l'espèce, puisqu'elle est équivalente au calcul par le rapport 30,41666/365, qui est celui applicable aux emprunteurs, il n'y a pas davantage lieu à déchéance du droit aux intérêts du prêteur pour ce motif.

M. et Mme X. soulèvent pour la première fois devant la cour le défaut de mention dans le contrat de prêt du taux et de la durée de période. Cette demande n'est cependant pas irrecevable, la déchéance du droit aux intérêts ayant été soulevée subsidiairement en première instance.

En l'espèce, l'offre de prêt indiquait un TEG de 4,21 % soit un taux de 0,351 % par période mensuelle constante sur toute la durée du prêt. La durée de la période est donc d'un mois.

La multiplication du taux de période par le rapport entre la durée annuelle et la durée de la période unitaire aboutit à un TEG annuel de 4,212%, arrondi à 4,21 % dans l'offre de prêt ainsi que le permet la loi.

Le TEG apparaissant proportionnel au taux de période, n'est pas susceptible de critique et la demande de déchéance du droit aux intérêts du prêteur doit, par même motif, être rejetée.

Pour prétendre justifier d'un préjudice, les appelants allèguent que la banque aurait omis d'évaluer « le coût associé à la stipulation d'intérêts ».

Or il est bien mentionné dans la rubrique « coût total dû par l'emprunteur » :

- montant du prêt : (...)

- intérêts : (...)

Le coût de la stipulation d'intérêts a bien été évalué, et aucun préjudice n'est démontré.

M. et Mme X. ne peuvent qu'être déboutés de leur demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels et d'application du taux légal, ainsi que de toutes leurs prétentions accessoires à cette demande.

 

Sur la demande de dommages-intérêts de la SAC Banque Populaire :

La société Banque Populaire Val de France, qui a vu le tribunal rejeter sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts de 3.000 €, reprend cette demande en appel en l'élevant à 5.000 €.

Pas davantage qu'en première instance, la société intimée ne fait la démonstration du caractère abusif de la procédure engagée par les époux X.

Il y a lieu de rappeler que l'appréciation inexacte qu'une partie opère de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté la banque intimée de cette demande.

 

Sur les demandes accessoires :

L'équité et la solution du litige commandent d'allouer à la SAC BPVF une somme ainsi qu'il sera dit au dispositif au titre des frais irrépétibles de procédure qu'elle a été contrainte d'exposer en défense à l'appel.

Succombant en leur recours, M. et Mme X. supporteront les dépens d'appel comme de première instance.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

DÉBOUTE M. X. et Mme Y. épouse X. de toutes leurs demandes ;

REJETTE la demande de dommages-intérêts fomulée par l'intimée devant la cour ;

CONDAMNE in solidum M. X et Mme Y. épouse X. à verser à la SAC Banque Populaire Val de France une somme complémentaire de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

CONDAMNE in solidum M. et Mme X. aux entiers dépens, qui pourront être directement recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller pour le Président empêché et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,                           Le Président,