CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-4), 1er octobre 2020
CERCLAB - DOCUMENT N° 8574
CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-4), 1er octobre 2020 : RG n° 17/12941 ; arrêt n° 2020/108
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « La seule référence à un calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours et un mois de 30 jours, qui n'est pas légalement sanctionnée, ne peut, entraîner la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels. Seul le calcul des intérêts sur une base autre que l'année civile, dont la preuve incombe aux emprunteurs, est susceptible de sanction, ce à la condition que ce calcul ait généré à leur détriment une modification du taux supérieure à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation.
Or, M. X. et Mme Y., qui ne fondent leurs prétentions que sur la seule présence dans l'offre de prêt des clauses ci-dessus reproduites, ne justifient aucunement que la Caisse d'épargne ait effectivement calculé les intérêts sur une base autre que l'année civile.
En effet, l'année civile est définie, pour le TEG et par conséquent pour le calcul des intérêts conventionnels, conformément au principe rappelé ci-dessus, à l'annexe de l'article R. 313-1 du code de la consommation comme comportant 365 ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés, un mois normalisé comptant 30,41666 jours (soit 365/12), que l'année soit bissextile ou non. Si, comme le soutiennent M. X. et Mme Y. l'annexe d) à l'article R. 313-1 du code de la consommation concernait, avant le décret d'application n° 2016-607 du 13 mai 2016 portant sur l'ordonnance du 25 mars 2016, les prêts à la consommation, il est cependant de jurisprudence constante qu'elle était applicable aux prêts immobiliers. C'est donc vainement qu'ils allèguent que le mois normalisé n'est pas applicable au prêt en litige.
Le prêt, dans sa période d'amortissement, étant remboursable en 300 échéances mensuelles, les intérêts doivent être calculés par mois normalisés et non par jour. Il en résulte que le calcul des intérêts mensuels, en application de l'année civile, doit être effectué en appliquant au taux annuel de l'intérêt le rapport 30,41666/365, sans tenir compte du nombre exact de jours ayant couru entre deux échéances. Or, un calcul par application d'un rapport 30,41666/365 ou 30/360 ou 1/12 revient arithmétiquement à un résultat équivalent. »
2/ « Il résulte de la recommandation n° 05-02 du 14 avril 2005 de la commission des clauses abusives que la stipulation d'un calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours est, dans les contrats d'ouverture de comptes de dépôt, de nature à créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur, en ce qu'elle ne lui permet pas d'évaluer le surcoût d'intérêts susceptible d'en résulter par rapport à un calcul d'intérêts sur la base d'une année civile. Une telle analyse ne peut cependant être transposée qu'aux calculs d'intérêts faisant intervenir un taux journalier. Or le prêt qui a été consenti par la Caisse d'épargne à M. X. et Mme Y. est remboursable mensuellement et les emprunteurs ne justifient pas avoir bénéficié d'une période de préfinancement. Comme précédemment développé, dans un prêt remboursable par mensualités, un calcul des intérêts sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équivalent à un calcul des intérêts sur la base de l'année civile. La clause querellée qui ne crée donc aucun déséquilibre significatif au détriment des emprunteurs ne saurait être déclarée abusive. »
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
CHAMBRE 3-4
ARRÊT DU 1er OCTOBRE 2020
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 17/12941. Arrêt n° 2020/108. N° Portalis DBVB-V-B7B-BA3AL. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 8 juin 2017 enregistrée au répertoire général sous le R.G. n° 16/06403.
APPELANTS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville] de nationalité française, demeurant [...] [...], représenté par Maître Xavier G. de la SELARL LEX PHOCEA, avocat au barreau de MARSEILLE
Madame Y.
née le [date] à [ville] de nationalité française, demeurant [...], [...], représentée par Maître Xavier G. de la SELARL LEX PHOCEA, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE :
SA CAISSE D'ÉPARGNE CEPAC
Prise en la personne de son représentant légal en exercice, Dont le siège est sis [adresse], représentée par Maître Gilles M., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR : Madame Laure BOURREL, Président, Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller- rapporteur, Mme Anne FARSSAC, Conseiller, qui en ont délibéré.
Statuant selon la procédure sans audience en application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, modifiée, sans opposition des parties, après avis adressé le 26 mai 2020 précisant que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2020.
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2020, Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Mme Rime GHORZI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Selon offre acceptée le 20 mai 2011, la Caisse d'épargne CEPAC (la caisse d'épargne) a accordé un prêt à M. X. et Mme Y. destiné à l'acquisition d'un bien immobilier d'un montant total de 193 887,82 euros se décomposant en :
- Un prêt à taux zéro de 31.600 euros
- Un prêt primolis 3 phases de 162.287,82 euros remboursable en 300 mensualités au taux fixe de 4,100 % avec mention d'un taux effectif global de 4,75 %.
Faisant valoir qu'il était stipulé dans le contrat de prêt que les intérêts étaient calculés sur la base d'une année bancaire de 360 jours, M. X. et Mme Y. ont par acte en date du 4 mars 2016 fait assigner la Caisse d'épargne devant le tribunal de grande instance de Marseille pour voir prononcer la nullité du taux d'intérêts et y voir substituer le taux légal au jour de la conclusion du contrat soit 10,38 %, obtenir le remboursement de la somme de 28.003,81 euros, voir la banque condamnée à lui remettre un échéancier rectifié sous astreinte et obtenir une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 8 juin 2017 le tribunal de grande instance de Marseille a notamment :
- débouté M. X. et Mme Y. de l'ensemble de leurs demandes,
- débouté la SA Caisse d'épargne CEPAC de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- condamné M. X. et Mme Y. à payer à la SA Caisse d'épargne CEPAC la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X. et Mme Y. aux dépens, recouvrables conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration reçue le 5 juillet 2017 M. X. et Mme Y. ont relevé appel de cette décision.
[*]
Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 27 janvier 2020 M. X. et Mme Y. demandent à la cour de :
« Vu l'article 1907, alinéa 2, du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation
A titre principal :
- infirmer le jugement rendu le 8 juin 2017 par le tribunal de grande instance de Marseille,
- constater la violation de la règle d'ordre public selon laquelle les modalités du calcul de l'intérêt conventionnel doit être fixée par écrit sur la base d'une année civile de 365 ou 366 jours pour les années bissextiles,
- constater que le taux d'intérêt n'a pas été indiqué sur une année civile dans le contrat,
- déclarer l'action recevable,
Subsidiairement, constater que le taux d'intérêts n'a pas été calculé sur la base d'une année civile,
En conséquence,
- prononcer la nullité du taux d'intérêt et substituer le taux d'intérêt légal au jour de la conclusion du contrat soit 0,38 %.
- condamner la société Caisse d'épargne au remboursement de la somme de 28.003,81 euros, à parfaire au jour de la décision.
- condamner la société Caisse d'épargne à remettre au requérant un échéancier rectifié en tenant compte d'une part du remboursement des intérêts et d'autre part du taux légal de 0,38 % sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
A titre subsidiaire :
- désigner un expert judiciaire qu'il plaira à la cour avec pour missions de :
* prendre connaissance des documents de la cause et entendre les parties ainsi que le cas échéant tout sachant à condition de le nommer,
* déterminer le taux effectif global réel réellement pratiqué ;
* recalculer la créance de restitution résultant de l'application des intérêts au taux légal en tenant compte des modalités de la substitution d'intérêts,
A titre subsidiaire :
- prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts à hauteur de l'intérêt légal en vigueur au jour du prêt, soit 0,38 %,
- condamner la banque à leur payer la somme de 28.003,81 euros au titre des intérêts indûment perçus depuis la conclusion du prêt jusqu'aux présentes, sauf à parfaire (sic),
- enjoindre à la banque de produire un nouveau tableau d'amortissement du prêt immobilier prenant en compte la substitution au taux conventionnel du taux légal applicable au jour de la signature du prêt, soit 0,38 %,
En tout état de cause
- condamner la société Caisse d'épargne au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Caisse d'épargne aux entiers dépens,
- dire que les condamnations produiront intérêt à compter de la demande en justice,
A titre infiniment subsidiaire
- supprimer ou réduire la condamnation prononcée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par le tribunal de grande instance de Marseille.
Ils font notamment valoir que leur action est recevable dès lors que le taux de l'intérêt conventionnel qui n'est pas calculé sur la base de l'année civile est sanctionné par la nullité de la stipulation d'intérêts et la substitution du taux légal au taux conventionnel. Ils soutiennent que la seule présence d'une clause aux termes de laquelle les intérêts sont calculés sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours justifie l'annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel. Ils contestent l'application du mois normalisé au calcul des intérêts et en conséquence l'équivalence financière entre la clause querellée et un calcul des intérêts sur la base de l'année civile. Ils soutiennent également que cette clause est abusive et doit être réputée non écrite ce dont résulte, selon eux, la nullité de la stipulation d'intérêts. Ils estiment enfin que le taux de l'intérêt légal au moment de la conclusion du contrat doit être substitué au taux conventionnel et demandent à défaut une déchéance du droit aux intérêts à hauteur de l'intérêt légal au jour du prêt soit 0,38 %.
[*]
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 3 décembre 2019 la Caisse d'épargne demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ses dispositions,
A titre liminaire
- déclarer Mme Y. et M. X. irrecevables en leur action en annulation de la stipulation des intérêts conventionnels, sur le fondement des articles L. 312-8, L. 313-1 et R. 313-1 du code de la consommation,
Vu les articles R. 313-1 et L. 313-1 du code de la consommation,
- dire et juger que le prétendu calcul sur 360 jours n'a aucune conséquence sur la validité du taux effectif global et du taux d'intérêt conventionnel mentionné et calculé par la banque, les intérêts conventionnels étant calculés sur une année civile,
- dire et juger que le TEG mentionné dans les offres de prêt a été calculé conformément aux dispositions de l'article L. 313-1 du code de la consommation et à l'annexe de l'article R. 313-1 du code de la consommation,
- dire et juger que le taux effectif global mentionné dans l'offre de prêt de 4,75 % est parfaitement exact,
- dire et juger que les intérêts conventionnels, au taux de 4,100 %, ont été calculés de façon parfaitement exacte,
- condamner M. X. et Mme Y. à régler à la Caisse d'épargne CEPAC la somme de 5.000 euros du fait de cette procédure abusive en application de l'article 1240 du code civil,
- condamner M. X. et Mme Y. à régler à la Caisse d'épargne CEPAC la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
assortie de l'exécution provisoire ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Maître Gilles M.,
A titre subsidiaire :
- dire et juger qu'en l'absence de démonstration d'un quelconque préjudice subi, le prononcé de la déchéance partielle du droit aux intérêts n'est pas justifié en l'espèce,
- débouter les appelants de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- dire et juger que le taux légal qui devra substituer le taux contractuel devra suivre les évolutions dans le temps du taux légal,
- débouter M. X. et Mme Y. de leur demande de production d'un nouvel échéancier sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- débouter M. X. et Mme Y. de leur éventuelle demande subsidiaire tendant à la désignation d'un expert judiciaire formulée par devant tribunal de grande instance de Marseille.
La Caisse d'épargne soutient que l'action en nullité de la stipulation des intérêts conventionnels est irrecevable au motif que seule la déchéance du droit du prêteur aux intérêts peut être sollicitée, ce qu'a consacré le législateur dans l'ordonnance du 17 juillet 2019 relativement aux sanctions civiles applicables en cas de défaut ou d'erreur du TEG. Elle fait valoir, au fond, que la seule présence d'une clause de calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours ne justifie pas l'annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel ou une déchéance du prêteur du droit aux intérêts et que les emprunteurs ne rapportent pas la preuve que les intérêts aient été calculés sur une base autre que l'année civile. Elle souligne que les emprunteurs ne démontrent pas que l'application de la clause litigieuse a généré à leur détriment un surcoût supérieur à la première décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation. Elle estime que si leur caractère erroné était démontré, la cour dans le cadre de son pouvoir d'appréciation devrait débouter M. X. et Mme Y. de leur demande de déchéance du droit aux intérêts faute de préjudice. Elle soutient en tout état de cause que le taux légal s'appliquant en cas de nullité de la stipulation d'intérêts est celui en vigueur au moment où il est acquis ce qui exclut l'application du taux en vigueur lors de la conclusion du prêt pendant toute sa durée. Elle s'oppose au prononcé d'une astreinte faisant valoir que l'absence de suite favorable à la mise en demeure des emprunteurs ne s'analyse pas en une résistance abusive et conclut au rejet de la demande d'expertise. Elle fait valoir au soutien de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive que M. X. et Mme Y. partent du postulat fantaisiste que la banque a vendu un crédit en faussant les éléments de calcul des intérêts, tentent de convaincre les juges du bien-fondé de ce postulat déloyal, que l'intention de nuire est évidente puisque cette procédure porte atteinte à son image de marque et qu'elle est prise en otage par la masse d'action formée à son encontre.
[*]
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 janvier 2020.
Les parties ont accepté que la présente procédure soit jugée sans audience, en application de l'article 8 de l'ordonnance 2020/304 du 25 mars 2020.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur la recevabilité de la demande de nullité de la stipulation des intérêt conventionnels :
Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut du droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfixe, la chose jugée.
Il résulte de l'application des dispositions de l'article 31 du même code que d'une part, le droit d'agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action, et que d'autre part, l'existence du droit invoqué par le demandeur n'est pas une condition de recevabilité de l'action mais de son succès.
En conséquence la demande de la nullité de la stipulation d'intérêt contenue dans l'offre de crédit formée par M. X. et Mme Y. sera déclarée recevable.
Au fond :
Il résulte de l'application combinée des articles 1907 alinéa 2 du code civil, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation que le taux de l'intérêt conventionnel, stipulé annuel et mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non professionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile.
Il a été stipulé en page 3 de l'offre de prêt : « Durant le préfinancement les intérêts sont calculés sur le montant des sommes débloquées, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours.
Durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours. »
La seule référence à un calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours et un mois de 30 jours, qui n'est pas légalement sanctionnée, ne peut, entraîner la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels. Seul le calcul des intérêts sur une base autre que l'année civile, dont la preuve incombe aux emprunteurs, est susceptible de sanction, ce à la condition que ce calcul ait généré à leur détriment une modification du taux supérieure à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation.
Or, M. X. et Mme Y., qui ne fondent leurs prétentions que sur la seule présence dans l'offre de prêt des clauses ci-dessus reproduites, ne justifient aucunement que la Caisse d'épargne ait effectivement calculé les intérêts sur une base autre que l'année civile.
En effet, l'année civile est définie, pour le TEG et par conséquent pour le calcul des intérêts conventionnels, conformément au principe rappelé ci-dessus, à l'annexe de l'article R. 313-1 du code de la consommation comme comportant 365 ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés, un mois normalisé comptant 30,41666 jours (soit 365/12), que l'année soit bissextile ou non. Si, comme le soutiennent M. X. et Mme Y. l'annexe d) à l'article R. 313-1 du code de la consommation concernait, avant le décret d'application n° 2016-607 du 13 mai 2016 portant sur l'ordonnance du 25 mars 2016, les prêts à la consommation, il est cependant de jurisprudence constante qu'elle était applicable aux prêts immobiliers. C'est donc vainement qu'ils allèguent que le mois normalisé n'est pas applicable au prêt en litige.
Le prêt, dans sa période d'amortissement, étant remboursable en 300 échéances mensuelles, les intérêts doivent être calculés par mois normalisés et non par jour. Il en résulte que le calcul des intérêts mensuels, en application de l'année civile, doit être effectué en appliquant au taux annuel de l'intérêt le rapport 30,41666/365, sans tenir compte du nombre exact de jours ayant couru entre deux échéances. Or, un calcul par application d'un rapport 30,41666/365 ou 30/360 ou 1/12 revient arithmétiquement à un résultat équivalent.
Selon le premier alinéa de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Ce même article dispose, en son sixième alinéa, que les clauses abusives sont réputées non écrites, et, en son septième alinéa, que l'appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération du bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.
Il résulte de la recommandation n° 05-02 du 14 avril 2005 de la commission des clauses abusives que la stipulation d'un calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours est, dans les contrats d'ouverture de comptes de dépôt, de nature à créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur, en ce qu'elle ne lui permet pas d'évaluer le surcoût d'intérêts susceptible d'en résulter par rapport à un calcul d'intérêts sur la base d'une année civile. Une telle analyse ne peut cependant être transposée qu'aux calculs d'intérêts faisant intervenir un taux journalier. Or le prêt qui a été consenti par la Caisse d'épargne à M. X. et Mme Y. est remboursable mensuellement et les emprunteurs ne justifient pas avoir bénéficié d'une période de préfinancement. Comme précédemment développé, dans un prêt remboursable par mensualités, un calcul des intérêts sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équivalent à un calcul des intérêts sur la base de l'année civile. La clause querellée qui ne crée donc aucun déséquilibre significatif au détriment des emprunteurs ne saurait être déclarée abusive.
Les emprunteurs ne développent aucun moyen de nature à établir que le taux effectif global énoncé par la banque dans l'offre de prêt soit inexact. Une expertise ne peut être ordonnée pour pallier la carence d'une partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe. M. X. et Mme Y. seront en conséquence déboutés de leur demande subsidiaire de désignation d'un expert pour déterminer le taux effectif global réellement pratiqué.
Il résulte de ce qui précède que le jugement en ce qu'il a débouté M. X. et Mme Y. de l'ensemble de leurs demandes sera en conséquence confirmé. Y ajoutant ils seront déboutés de leur demande subsidiaire en déchéance du prêteur du droit aux intérêts et de leurs prétentions subséquentes.
Sur la demande de dommages et intérêts :
L'intention de nuire ne peut se déduire de la seule circonstance qu'une action en justice s'inscrit dans un courant d'actions similaires de nature à porter atteinte à l'image d'un établissement de crédit. La preuve d'un abus de M. X. et Mme Y. dans leur droit d'agir en justice n'est pas rapportée, c'est donc à juste titre que le premier juge a rejeté la demande en paiement de dommages-intérêts formée par la Caisse d'épargne.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Succombant M. X. et Mme Y. seront condamnés aux dépens d'appel et pour ce motif déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles. Il serait inéquitable que la Caisse d'épargne conserve à sa charge les frais exposés pour se défendre en justice. L'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile accordée à la Caisse d'épargne sera confirmée.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement et contradictoirement
Déclare la demande de nullité de la stipulation des intérêts recevables,
Confirme le jugement rendu le 8 juin 2017 par le tribunal de grande instance de Marseille en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute M. X. et Mme Y. de leur demande de déchéance de la Caisse d'épargne du droit aux intérêts et de leurs prétentions subséquentes,
Déboute M. X. et Mme Y. de leurs prétentions sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne in solidum M. X. et Mme Y. aux dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Gilles M.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 5997 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Recommandations de la Commission des clauses abusives - Vérification de la pertinence de la recommandation
- 6638 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit immobilier - Présentation générale
- 9744 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit immobilier – Année civile et lombarde