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CA CHAMBÉRY (2e ch.), 7 janvier 2021

Nature : Décision
Titre : CA CHAMBÉRY (2e ch.), 7 janvier 2021
Pays : France
Juridiction : Chambery (CA), 2e ch.
Demande : 19/01035
Date : 7/01/2021
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 3/06/2019
Référence bibliographique : 5705 (imprescriptibilité de l’action), 5710 (arrêt de règlement)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8718

CA CHAMBÉRY (2e ch.), 7 janvier 2021 : RG n° 19/01035 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Il résulte des dispositions de l'article 5 du code civil qu'il est défendu au juge de se prononcer par voie de disposition générale et réglementaire sur les causes qui leur sont soumises. M. Y. et M. X. considèrent que la motivation du jugement relative au caractère abusif ou non de la clause faisant recours à l'année lombarde serait générale et réglementaire, alors que le tribunal ne fait que dégager un principe d'un certain nombre de textes qu'il cite et qu'il applique au fait de l'espèce. Il n'y a pas donc pas lieu à annulation du jugement déféré. »

2/ « L'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date du prêt litigieux, définit la clause abusive comme étant celle, qui dans un contrat conclu entre un professionnel et un non professionnel ou un consommateur, a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Le contrat stipule au paragraphe « F/REMBOURSEMENT DU CAPITAL ET PAIEMENT DES INTÉRÊTS » des conditions particulières :

« Les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et d'un mois de 30 jours ».

Il incombe aux juges du fond, examinant le caractère abusif d'une clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base d'une année de trois cent soixante jours et d'un mois de trente jours, d'apprécier concrètement quels sont les effets de cette clause sur le coût du crédit dont il s'agit, afin de déterminer si elle entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

MM. Y. et X. font valoir, afin d'illustrer le déséquilibre qu'ils allèguent, que le calcul des intérêts de la première échéance correspondant à la période du 5 janvier au 5 avril 2010 sur la base d'une année de 360 jours se ferait au détriment des emprunteurs et prétendent le démonter par le calcul selon lequel 589,950 CHF x 2,90 % x 90/360 mettrait à leur charge des intérêts de 4.277,14 CHF, alors que sur la base d'une année de 365 jours ils ne se monteraient qu'à la somme de 4.2018,55 euros (589,950 CHF x 2,90 % x 365), mais la banque souligne à juste titre que cette présentation est tendancieuse dans la mesure où la période du 5 janvier au 5 avril (le prêt étant remboursable par trimestrialités) correspond à une échéance trimestrielle d'intérêts complète, soit à 3/12 d'année d'intérêts et qu'en conséquence la fraction 90 jours / 360 jours équivaut à 3 mois / 12 mois et à (365/4) / 365 et qu'ainsi la formule de calcul de MM. Y. et X. correctement présentée est 589,950 CHF x 2,90 % x (365/4)/365 qui correspond bien à 4 277,14 CHF d'intérêts.

Les appelants ne démontrent pas le caractère abusif invoqué en l'absence de tout déséquilibre établi ; il apparaît en effet que la clause litigieuse est une clause d'équivalence financière dans la mesure où le rapport 30,41666 / 365 est égal au rapport 30 / 360.

MM. Y. et X. ne pourront, en conséquence, qu'être déboutés de leurs prétentions ainsi fondées. »

 

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 7 JANVIER 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/01035. N° Portalis DBVY-V-B7D-GHS7. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ANNECY en date du 29 mars 2019 : R.G. n° 15/01880.

 

Appelants :

M. X.

né le [date] à [ville], demeurant [adresse]

M. Y.

né le [date] à [ville], demeurant [adresse]

Représentés par Maître Sylvie C., avocat postulant au barreau de THONON-LES-BAINS et par Maître Hervé B., avocat plaidant au barreau de NANCY

 

Intimée :

SA BNP PARIBAS

dont le siège social est sis [adresse] prise en la personne de son représentant légal, Représentée par la SELARL JULIETTE C.-B. LEXAVOUE CHAMBERY, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SCP CABINET HOGAN LOVELLS, avocat plaidant au barreau de PARIS

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 27 octobre 2020 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffier,

Et lors du délibéré, par : - Monsieur Franck MADINIER, Conseiller faisant fonction de Président, à ces fins désigné par ordonnance de Madame la Première Présidente qui a procédé au rapport - Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, - Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseiller.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon offre de prêt acceptée le 5 décembre 2009, la SA BNP Paribas a consenti à M. Y. et M. X. un prêt immobilier d'un montant total de 622.485,05 CHF au taux nominal de 2,90 % hors assurances, remboursable en 80 échéances trimestrielles de 10.281,88 CHF prélevées sur le compte en francs suisses des emprunteurs.

Par exploit du 7 octobre 2015, MM. Y. et X. ont fait assigner la SA BNP Paribas devant le tribunal de grande instance d'Annecy poursuivant la responsabilité de la banque et l'allocation de la somme de 116.662,44 euros à titre de dommages et intérêts, la déchéance de la banque du droit aux intérêts contractuels, subsidiairement l'annulation de la clause d'indexation et la réouverture des débats avec injonction à la banque de produire un nouveau tableau d'amortissement substituant le taux d'intérêts légal au taux conventionnel et, en tout état de cause, l'allocation de la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 29 mars 2019, le tribunal de grande instance d'Annecy a :

- déclaré prescrites les demandes de MM. Y. et X. au titre de la responsabilité contractuelle, de la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels ou de la déchéance du droit aux intérêts conventionnels,

- débouté les mêmes de leurs demandes formées au titre des clauses abusives,

- condamné, in solidum, les mêmes à verser à la SA BNP Paribas la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire de la décision.

Outre la prescription des demandes, il a été jugé que le recours à l'année dite lombarde était licite et que la stipulation d'intérêts en cause ne créait aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. Le juge a ainsi retenu qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne faisait obstacle à ce que le taux d'intérêt conventionnel soit calculé sur une base d'une année de 360 jours dès lors que le remboursement s'effectuait par mensualités, grâce à la notion de mois « normalisé », et non grâce à un taux quotidien.

MM. Y. et X. ont interjeté appel de la décision par déclaration au greffe de la cour le 3 juin 2019.

[*]

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 18 août 2019, MM. Y. et X. demandent à la cour de :

- annuler le jugement au visa des dispositions de l'article 5 du code civil et statuer à nouveau, ou à défaut, réformer en toutes ses dispositions le jugement attaqué par la voie de l'appel,

- déclarer abusive la clause recourant à l'utilisation de l'année dite lombarde, et en conséquence faire application du taux de change fixe à la date de l'achat de devises, soit 1,512 euros/ 1 CHF, sur toute la durée du crédit,

- ordonner l'émission d'un nouveau tableau d'amortissement et condamner le prêteur à restituer les sommes perçues en sus de l'application de l'intérêt légal,

- subsidiairement, déclarer nulle la stipulation d'intérêt conventionnelle et ordonner que l'amortissement du capital mis à disposition soit calculé, depuis l'origine :

- soit au taux de l'intérêt légal applicable pour l'année 2010, année de l'achat des devises prêtées et de fixation du taux de change et partant, du montant des trimestrialités de remboursement,

- soit au taux de l'intérêt légal appliqué année par année, en fonction des variations que la loi fait subir à ce taux,

- ordonner la déchéance du droit aux intérêts et condamner le prêteur à restituer les sommes qu'il aurait reçues en sus de l'application du taux conventionnel diminué du taux de déchéance,

- juger que la SA BNP Paribas ne peut se prévaloir de la clause de non-responsabilité relative à la variation du change entre les monnaies et dire que cette clause est réputée non écrite,

- juger que la perte de change au 15 juillet 2019 s'élève à 85.100 euros, et condamner la SA BNP Paribas à leur payer cette même somme à titre de dommages et intérêts.

- en tout état de cause, condamner la SA BNP PARIBAS à leur payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et laisser à sa charge les dépens de l'instance, avec faculté de recouvrement direct au profit de Maître C.

MM. Y. et X. exposent, s'agissant des délais pour agir, qu'en leur qualité de non professionnels, ils ne disposaient d'aucune compétence pour percevoir la portée des clauses litigieuses au jour de la signature du contrat et que le point de départ du délai de prescription devrait être fixé au jour de leur information.

Sur le fond du droit, ils soutiennent tout d'abord que le juge s'est prononcé de façon générale et réglementaire sur une question de droit en violation de l'article 5 du code civil, qu'en statuant ainsi par voie d'arrêt de règlement le jugement encourrait la nullité.

Sur la stipulation d'intérêts, ils reprochent au tribunal d'avoir jugé que les échéances n'avaient pas été calculées en taux quotidien, alors que s'agissant de la première échéance, le contrat de prêt énonce que « les intérêts sont calculés sur la base du nombre de jours écoulés entre le jour anniversaire et le jour de paiement de cette première échéance ».

Ils prétendent qu'en appliquant un taux d'intérêt calculé sur une base annuelle de 360 jours et d'un mois de 30 jours, le prêteur a facturé des intérêts liquidés à 4.227,14 CHF pour la période de mise à disposition du 5 janvier 2010 au 5 avril 2010, alors que calculée sur 365 jours, la facturation d'intérêts n'aurait été que de 4.218,55 CHF. Dès lors, ils estiment que la stipulation d'intérêts doit être annulée et que doit être appliqué le taux d'intérêt légal de l'année 2010.

En tout état de cause, ils considèrent que la stipulation étant abusive, elle doit être réputée non écrite, de sorte que le taux de change fixe à la date de l'achat de devises doit être appliqué sur toute la durée du crédit, soit au taux fixe de 1,512 euro/ 1 CHF.

Sur la responsabilité contractuelle du prêteur, ils soutiennent que M. X., dont la rémunération constitue l'essentiel des revenus des emprunteurs, n'était pas rémunéré en CHF contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, mais en USD au moment de l'acceptation de l'offre et qu'il subit dès lors un impact négatif de change contre lequel il n'a pas été mis en garde, pas plus que M. Y. dont la rémunération était en euros lors de l'émission de l'offre.

[*]

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 14 novembre 2019, la SA BNP Paribas demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 29 mars 2019 en toutes ses dispositions,

- débouter MM. Y. et X. de leurs demandes à toutes fins qu'elles comportent,

- les condamner solidairement au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

La SA BNP Paribas soutient que l'annulation de la stipulation d'intérêts n'est pas encourue, la seule sanction prévue par les textes étant la déchéance du droit aux intérêts, conformément à l'ordonnance n° 2019-740 du 17 juillet 2019 relative aux sanctions civiles applicables en cas de défaut ou d'erreur du TEG, susceptible d'application immédiate.

Elle prétend que les actions en nullité, déchéance et responsabilité sont prescrites dès lors que l'offre de prêt du 20 novembre 2009 a été acceptée le 5 décembre 2009, et que les appelants disposaient, selon elle, de compétences suffisantes pour déceler l'irrégularité alléguée.

Elle invoque la régularité de la liquidation des intérêts de la première échéance du 5 janvier au 5 avril 2010, qui correspondrait, selon elle, à une échéance trimestrielle d'intérêts complète, c'est-à-dire à 3/12ème d'année d'intérêts.

En outre, la banque estime que son devoir de mise en garde ne portait que sur le risque d'endettement excessif qui, en l'espèce, serait inexistant, le risque de change étant bien stipulé être à la charge des emprunteurs par les conditions générales du contrat de prêt.

Enfin, elle soutient que la clause en devises et celle relative à l'année lombarde sont claires et compréhensibles et ne créent aucun déséquilibre entre les parties dès lors que la variation du cours du change ne favorise pas plus la banque que les emprunteurs et que le recours à l'année lombarde n'a pas d'incidence pour les échéances complètes.

[*]

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 octobre 2020.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'annulation du jugement déféré :

Il résulte des dispositions de l'article 5 du code civil qu'il est défendu au juge de se prononcer par voie de disposition générale et réglementaire sur les causes qui leur sont soumises.

M. Y. et M. X. considèrent que la motivation du jugement relative au caractère abusif ou non de la clause faisant recours à l'année lombarde serait générale et réglementaire, alors que le tribunal ne fait que dégager un principe d'un certain nombre de textes qu'il cite et qu'il applique au fait de l'espèce.

Il n'y a pas donc pas lieu à annulation du jugement déféré.

 

Sur la recevabilité des prétentions de M. Y. et de M. X. :

M. Y. et M. X. invoquent plusieurs fondements à leurs contestations de la stipulation d'intérêts et de la souscription du prêt en devises : la nullité des clauses, le caractère abusif des clauses et la responsabilité de la banque.

Ces différents fondements ne sont pas tous soumis au même régime de prescription.

 

Sur la recevabilité de l'action en responsabilité contractuelle de la banque au titre de ses obligations de conseil et de mise en garde :

Il résulte des dispositions de l'article 2224 du code civil, dans sa version issue de la loi du 17 juin 2008 immédiatement applicable aux prescriptions en cours, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le crédit immobilier souscrit en l'espèce résultant d'une offre de prêt faite par la SA BNP Paribas le 20 novembre 2009, acceptée le 5 décembre 2009 par M. Y. et M. X., ces dispositions lui sont parfaitement applicables.

Le délai de prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance, mais il est constant que le dommage résultant d'un manquement de la banque à ses obligations d'information, de conseil et de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter se manifeste, envers l'emprunteur, dès l'octroi des crédits.

En l'espèce, MM. Y. et X. reprochent à la SA BNP Paribas un manquement à ses devoirs de conseil et de mise en garde concernant le risque de surendettement lié au change qu'ils estiment inhérent au contrat de prêt qu'elle leur a consenti en franc suisse, justifiant l'allocation de la somme de 85.100 euros au titre de la perte de change au 15 juillet 2019.

Mais le contrat de crédit ayant été souscrit le 5 décembre 2009, l'action en responsabilité contractuelle initiée par les emprunteurs suivant exploit introductif d'instance délivré le 7 octobre 2015 ne pourra qu'être déclarée irrecevable en raison de sa prescription retenue à bon droit par le tribunal.

 

Sur la recevabilité des actions en annulation et en déchéance du droit aux intérêts :

La recevabilité de l'action en nullité de la clause d'intérêt du contrat de prêt souscrit le 5 décembre 2009 intentée par M. Y. et M. X. est soumise aux dispositions de l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, en vigueur à la date de souscription du contrat, qui dispose que l'action en nullité ou en rescision d'une convention dure cinq ans dans tous les cas où cette action n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière.

Pareillement, mais en application des dispositions de l'article L. 110-4-I du code de commerce, applicables aux actions en déchéance du droit aux intérêts et en restitutions d'intérêts, l'action intentée par M. Y. et M. X. à l'encontre de SA BNP Paribas à ces fins, est soumise à une prescription quinquennale.

Le point départ de ces délais quinquennaux de prescription est le jour où le requérant a connu, ou aurait dû connaître, l'irrégularité fondant son action, date qui s'apprécie en fonction de la capacité de l'emprunteur à appréhender les clauses qu'il critique, mais également de la visibilité et de la clarté des stipulations contestées.

MM. Y. et X., aux termes des différents fondements qu'ils invoquent, critiquent le recours par l'établissement de crédit à l'année de 360 jours, dite année lombarde, pour procéder au calcul des intérêts et le risque lié à la variation du taux de change inhérent aux prêts en devises.

Or, il ressort du contrat qu'il est mentionné de manière apparente que le prêt est souscrit en francs suisses (page 2, conditions particulières, paragraphe E, pièce 1 de la banque), qu'en première page du contrat figure toute une série de définition dont celle circonstanciée du « Cours du change », que le paragraphe F des conditions particulières, mentionne de manière apparente au sein d'un texte aéré que « Les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et d'un mois de 30 jours » et que « les échéances du prêt devront être acquittées en CHF ».

Du fait de la clarté de ces clauses, la connaissance de ces caractéristiques du prêt, aujourd'hui dénoncées, étaient parfaitement accessible à la date de souscription du contrat.

MM. Y. et X. produisent un rapport d'analyse financière daté du 7 novembre 2017 qu'ils ont fait réaliser par une experte en mathématiques financières et un courrier de la banque du 15 juillet 2019 (pièce 4 des appelants) qui les auraient alerté quant au risque du change, or force est de constater qu'aucun de ces deux éléments ne concerne le recours à l'année de 360 jours pour le calcul des intérêts, de sorte qu'ils ne produisent aucun élément qui justifierait que le point de départ de leur l'action relative à ce mode de calcul des intérêts ne soit pas la date de conclusion du contrat.

La SA BNP Paribas produit un courrier de sa direction générale adressé le 17 avril 2015 à MM. Y. et X., qui n'en démentent nullement les termes, précisant, s'agissant de la compétence des emprunteurs, que M. X., salarié d'une organisation internationale à Genève, percevait des revenus payables en dollars américains retraités chaque mois sur ses bulletins de salaire en deux opérations de change distinctes, une partie de sa rémunération étant convertie en francs suisses et déposée à la banque cantonale de Genève, l'autre partie en euros.

La banque produit des bulletins de salaire de M. X. (pièce 13) qui confirme ce mécanisme de rémunération qui fait que M. X. était indiscutablement rompu aux opérations de change du franc suisse et aux risques liés à ses fluctuations.

Ce courrier fait également état de ce que M. X. avait, à la date du contrat, déjà souscrit un prêt en francs suisses.

Il est donc parfaitement justifié de fixer le point de départ de la prescription au 5 décembre 2009, date de souscription du contrat de prêt, de sorte que les actions en annulation de la stipulation d'intérêts et en déchéance du droit aux intérêts, intentées par assignation signifiée le 7 octobre 2015, sont prescrites.

Le jugement déféré sera, en conséquence, également confirmé de chef.

 

Sur le caractère abusif du recours à une année de 360 jours :

L'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date du prêt litigieux, définit la clause abusive comme étant celle, qui dans un contrat conclu entre un professionnel et un non professionnel ou un consommateur, a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Le contrat stipule au paragraphe « F/REMBOURSEMENT DU CAPITAL ET PAIEMENT DES INTÉRÊTS » des conditions particulières :

« Les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et d'un mois de 30 jours ».

Il incombe aux juges du fond, examinant le caractère abusif d'une clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base d'une année de trois cent soixante jours et d'un mois de trente jours, d'apprécier concrètement quels sont les effets de cette clause sur le coût du crédit dont il s'agit, afin de déterminer si elle entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

MM. Y. et X. font valoir, afin d'illustrer le déséquilibre qu'ils allèguent, que le calcul des intérêts de la première échéance correspondant à la période du 5 janvier au 5 avril 2010 sur la base d'une année de 360 jours se ferait au détriment des emprunteurs et prétendent le démonter par le calcul selon lequel 589,950 CHF x 2,90 % x 90/360 mettrait à leur charge des intérêts de 4.277,14 CHF, alors que sur la base d'une année de 365 jours ils ne se monteraient qu'à la somme de 4.2018,55 euros (589,950 CHF x 2,90 % x 365), mais la banque souligne à juste titre que cette présentation est tendancieuse dans la mesure où la période du 5 janvier au 5 avril (le prêt étant remboursable par trimestrialités) correspond à une échéance trimestrielle d'intérêts complète, soit à 3/12 d'année d'intérêts et qu'en conséquence la fraction 90 jours / 360 jours équivaut à 3 mois / 12 mois et à (365/4) / 365 et qu'ainsi la formule de calcul de MM. Y. et X. correctement présentée est 589,950 CHF x 2,90 % x (365/4)/365 qui correspond bien à 4 277,14 CHF d'intérêts.

Les appelants ne démontrent pas le caractère abusif invoqué en l'absence de tout déséquilibre établi ; il apparaît en effet que la clause litigieuse est une clause d'équivalence financière dans la mesure où le rapport 30,41666 / 365 est égal au rapport 30 / 360.

MM. Y. et X. ne pourront, en conséquence, qu'être déboutés de leurs prétentions ainsi fondées.

 

Sur les demandes annexes :

M. Y. et M. X., qui succombent, seront condamnés à payer à la SA BNP Paribas la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils supporteront les dépens exposés en appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la Loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Déboute, en conséquence, M. Y. et M. X. de l'intégralité de leurs prétentions.

Y ajoutant,

Condamne, in solidum, M. Y. et M. X. à payer à la SA BNP Paribas la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne, in solidum, M. Y. et M. X. à supporter les dépens exposés en appel et autorise la SELARL Juliette Cochet B., avocat, à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Ainsi prononcé publiquement le 07 janvier 2021 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Monsieur Franck MADINIER, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Sylvie DURAND, Greffier.