CA LYON (3e ch. A), 14 janvier 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 8747
CA LYON (3e ch. A), 14 janvier 2021 : RG n° 18/06295
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « M. X. n'est ensuite pas fondé à soutenir l'irrecevabilité de la demande de Locam au motif que le nom de celle-ci n'est pas mentionné sur le contrat, qui porte sa signature et alors que Locam justifie que la clause B.13.2 des conditions générales de cet acte stipule, ce qui est opposable à l'appelant, une possible cession du contrat de la part de la société Citycare cocontractante de M. X. au profit notamment de Locam. En effet, par sa signature du contrat, M. X. a accepté ces conditions générales. Aussi, Locam est recevable à agir à l'encontre de son cocontractant. »
2/ « En revanche, M. X. est fondé à solliciter, à titre principal, la nullité du contrat pour défaut de mention du droit de rétractation et de respect des dispositions issues du code de la consommation, et notamment de celle de l'article L. 121-16-1 dans sa version applicable au litige qui instaure un délai de rétraction de 14 jours même au profit du professionnel personne morale, contrairement à la thèse développée par Locam reprise à tort par le premier juge, dès lors que le contrat a été souscrit hors établissement, que l'objet du contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale du client et que le nombre de salariés que celui-ci emploie est inférieur ou égal à 5, conditions cumulatives.
En effet en l'espèce, en premier lieu, il n'est pas discuté que le contrat a été souscrit hors du siège de Locam comme étant conclu sur le lieu d'exploitation de la boucherie par l'intermédiaire du commercial de la société Citycare.
En deuxième lieu, M. X. justifie par une attestation de son expert-comptable qu'au 31 décembre 2014 correspondant à l'époque de la conclusion du contrat, il employait en moyenne un effectif salarial de 4 salariés.
En troisième lieu, si les parties s'opposent sur l'appréciation du champ de l'activité principale de l'appelante, il est affirmé, comme le dit M. X., que l'usage d'un défibrillateur ne relève pas de l'activité principale d'une boucherie, peu important par ailleurs une éventuelle clause contraire du contrat que Locam, qui l'invoque dans ses écritures, ne précise pas et qui n'est en tous cas pas opposable au cocontractant dès lors que les dispositions précitées sont d'ordre public.
Par ailleurs, ce contrat de location n'entre pas, contrairement à ce que soutient Locam, dans la catégorie des services financiers exclus du champ d'application des dispositions précitées du code de la consommation par l'article L. 221-2, et visés par les articles L. 311-2 ou L. 511-21 du code monétaire et financier, encore par la directive communautaire du 25 octobre 2011, transposée en droit interne par les articles précités, qui qualifie de service financier « tout service ayant trait à la banque, au crédit ». En effet, peu important que Locam se qualifie de société de financement, il s'avère que le contrat litigieux est un simple contrat de location d'un matériel moyennant paiement de loyers mensuels au propriétaire du bien qu'est en l'espèce Locam et ne correspond pas à une opération connexe à une opération de banque qui relèverait de la catégorie des services financiers. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
TROISIÈME CHAMBRE A
ARRÊT DU 14 JANVIER 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 18/06295. N° Portalis DBVX-V-B7C-L5BA. Décision du : - Tribunal de Commerce de SAINT-ÉTIENNE, Au fond du 24 juillet 2018, RG n° 2015j00666.
APPELANT :
M. X.
[...], [...], Représenté par Maître Emilie R., avocat au barreau de LYON, toque : 1739
INTIMÉE :
SAS LOCAM
[...], [...], Représentée par Maître Michel T. de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE
Date de clôture de l'instruction : 12 juin 2019
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 18 novembre 2020
Date de mise à disposition : 14 janvier 2021
Audience présidée par Anne-Marie ESPARBES, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Elsa MILLARY, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré : - Anne-Marie ESPARBES, président, - Hélène HOMS, conseiller, - Catherine CLERC, conseiller.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Anne-Marie ESPARBES, président, et par Fabienne BEZAULT-CACAUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par jugement du 24 juillet 2018 non assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Saint-Étienne :
- a rejeté la demande de nullité de l'assignation,
- s'est déclaré compétent pour juger le litige opposant la société Locam à M. X.,
- dit que Locam a bien intérêt et qualité à agir,
- déclaré Locam recevable en ses demandes,
- débouté M. X. de sa demande de nullité du contrat de location fondée sur l'application des dispositions du code de la consommation,
- et de sa demande de nullité fondée sur le vice du consentement,
- débouté M. X. du surplus de ses demandes,
- condamné M. X. à verser à Locam la somme de 7.308,94 € outre intérêts au taux légal à compter de la date de mise en demeure du 9 mars 2015 et de 1 € au titre de la clause pénale,
- outre 100 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- et charge des dépens,
- en déboutant Locam du surplus de ses demandes.
M. X. a interjeté appel par acte du 6 septembre 2018.
[*]
Par conclusions du 5 avril 2019, M. X. demande à la cour de :
- réformer le jugement déféré sauf en ce qui concerne la clause pénale,
statuant à nouveau,
- vu l'article 56 du code de procédure civile, constater la nullité de l'assignation,
- vu les articles 31 et 32 du code de procédure civile et 1216 du code civil, de dire Locam irrecevable faute d'intérêt à agir,
- vu les articles L. 121-16-1 et suivants du code de la consommation, constater la nullité du contrat faute de mention du droit de rétractation dans le contrat et « constater la caducité du contrat de l'exercice [de son] droit de rétractation »,
- vu l'article 1110 du code civil, constater la nullité du contrat pour vice de consentement,
- vu l'article 1152 du code civil, constater le caractère excessif de la clause pénale,
- en conséquence, débouter Locam de toutes ses demandes,
- condamner Locam à lui payer une somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- ainsi qu'en tous les dépens.
[*]
Par conclusions du 17 janvier 2019 fondées sur les articles 56, 127, 14 du code de procédure civile, L. 121-16 et suivants du code de la consommation, 1108 et suivants, 1134 et suivants, 1149 anciens du code civil, et L. 311-2 et L. 511-21 du code monétaire et financier, la SAS Locam demande à la cour de :
- dire non fondé l'appel de M. X., à débouter de toutes ses demandes,
- confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a réduit à l'euro symbolique la clause pénale de 10 % sur les sommes dues, condamner à ce titre M. X. à lui régler la somme complémentaire de 730,90 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 9 mars 2015,
- condamner M. X. à lui régler 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- outre tous les dépens de première instance et d'appel.
[*]
Après débats à l'audience du 30 septembre 2020, par mention au dossier du même jour notifiée aux parties, la cour a rouvert les débats à l'audience du 12 novembre 2020 pour, s'interrogeant sur la qualité à agir de Locam à l'encontre de M. X., lire les observations des parties sur la détermination juridique du cocontractant, personne physique exerçant en nom propre ou personne morale et inviter M. X. à produire un extrait Kbis de son immatriculation commerciale et Locam à communiquer l'assignation portée devant le tribunal.
M. X. et Locam ont respectivement répondu par notes des 13 et 28 octobre 2020 joignant pour le premier, l'extrait de son immatriculation et pour la seconde, l'assignation.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
A titre liminaire, d'une part, eu égard à la date du contrat, s'appliquent les dispositions anciennes du code civil.
D'autre part, il résulte de l'extrait Kbis produit par M. X. et l'assignation communiquée par Locam que M. X. a été assigné en sa qualité de commerçant exerçant son activité commerciale en nom propre, sous un numéro de Siret non discuté, le nom commercial de la boucherie qu'il exploite à [ville A.] étant « Boucherie M. », de sorte qu'il est compris que la mention manuscrite de « gérant » de cette boucherie que M. X. s'est attribuée avant de signer le contrat litigieux daté du 2 décembre 2014 n'est qu'une erreur de langage, M. X. ayant manifestement entendu signaler sa qualité d'exploitant.
Sans solliciter la nullité du jugement (puisqu'il conclut au seul débouté de Locam), M. X. est mal fondé à soulever la nullité de l'assignation au motif d'une absence de diligence de la part de Locam en vue de parvenir à la résolution amiable du litige au visa de l'article 56 du code de procédure civile, dès lors que, comme bien dit par le premier juge, cette irrégularité est constitutive d'une nullité de forme exigeant la preuve d'un grief ce que M. X. n'apporte pas au débat. Le dire de l'appelant selon lequel une telle tentative aurait peut-être permis de parvenir à une solution amiable, ne constitue pas cette démonstration. En cet état, sa demande de nullité de l'assignation est rejetée.
M. X. n'est ensuite pas fondé à soutenir l'irrecevabilité de la demande de Locam au motif que le nom de celle-ci n'est pas mentionné sur le contrat, qui porte sa signature et alors que Locam justifie que la clause B.13.2 des conditions générales de cet acte stipule, ce qui est opposable à l'appelant, une possible cession du contrat de la part de la société Citycare cocontractante de M. X. au profit notamment de Locam. En effet, par sa signature du contrat, M. X. a accepté ces conditions générales. Aussi, Locam est recevable à agir à l'encontre de son cocontractant.
Le jugement est confirmé de ces deux chefs.
En revanche, M. X. est fondé à solliciter, à titre principal, la nullité du contrat pour défaut de mention du droit de rétractation et de respect des dispositions issues du code de la consommation, et notamment de celle de l'article L. 121-16-1 dans sa version applicable au litige qui instaure un délai de rétraction de 14 jours même au profit du professionnel personne morale, contrairement à la thèse développée par Locam reprise à tort par le premier juge, dès lors que le contrat a été souscrit hors établissement, que l'objet du contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale du client et que le nombre de salariés que celui-ci emploie est inférieur ou égal à 5, conditions cumulatives.
En effet en l'espèce, en premier lieu, il n'est pas discuté que le contrat a été souscrit hors du siège de Locam comme étant conclu sur le lieu d'exploitation de la boucherie par l'intermédiaire du commercial de la société Citycare.
En deuxième lieu, M. X. justifie par une attestation de son expert-comptable qu'au 31 décembre 2014 correspondant à l'époque de la conclusion du contrat, il employait en moyenne un effectif salarial de 4 salariés.
En troisième lieu, si les parties s'opposent sur l'appréciation du champ de l'activité principale de l'appelante, il est affirmé, comme le dit M. X., que l'usage d'un défibrillateur ne relève pas de l'activité principale d'une boucherie, peu important par ailleurs une éventuelle clause contraire du contrat que Locam, qui l'invoque dans ses écritures, ne précise pas et qui n'est en tous cas pas opposable au cocontractant dès lors que les dispositions précitées sont d'ordre public.
Par ailleurs, ce contrat de location n'entre pas, contrairement à ce que soutient Locam, dans la catégorie des services financiers exclus du champ d'application des dispositions précitées du code de la consommation par l'article L. 221-2, et visés par les articles L. 311-2 ou L. 511-21 du code monétaire et financier, encore par la directive communautaire du 25 octobre 2011, transposée en droit interne par les articles précités, qui qualifie de service financier « tout service ayant trait à la banque, au crédit ».
En effet, peu important que Locam se qualifie de société de financement, il s'avère que le contrat litigieux est un simple contrat de location d'un matériel moyennant paiement de loyers mensuels au propriétaire du bien qu'est en l'espèce Locam et ne correspond pas à une opération connexe à une opération de banque qui relèverait de la catégorie des services financiers.
Le contrat de location cédé à Locam doit donc être annulé pour défaut des mentions relatives au droit de rétractation et notamment du formulaire de rétractation, peu important que M. X. ait tenté d'exercer ce droit par l'envoi de courriers et le retour du matériel.
Les plus amples moyens développés par les parties sont inutiles à la résolution du litige.
Les entiers dépens sont à la charge de Locam qui doit verser une indemnité de procédure à M. X.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de l'assignation et dit que la société Locam est recevable à agir,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant,
Annule le contrat de location signé entre M. X. et Locam pour non-respect des dispositions légales relatives au droit de rétractation,
Déboute en conséquence la société Locam de toutes ses demandes,
Condamne la société Locam à verser à M. X. une indemnité de procédure de 2.500 €,
Condamne la société Locam aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,
- 5889 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Contrats conclus hors établissement ou à distance (après la loi du 17 mars 2014 - art. L. 221-3 C. consom.)
- 5956 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Autres contrats
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