CASS. CIV. 1re, 20 janvier 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 8779
CASS. CIV. 1re, 20 janvier 2021 : pourvoi n° 19-12.541 ; arrêt n° 74
Publication : Legifrance
Extrait : « 4. Vu les articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et R. 313-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016 :
5. Il résulte de ces textes que la mention, dans l'offre de prêt, d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année autre que l'année civile, est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts dans les termes de l'article L. 312-33 susvisé, lorsque l'inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale.
6. Pour annuler les clauses stipulant l'intérêt conventionnel et ordonner la substitution de l'intérêt légal, l'arrêt relève que, quelle qu'en soit l'incidence financière, pour les trois prêts, la banque a procédé aux calculs des intérêts sur la base d'une année de trois-cent-soixante jours, dite année bancaire ou année lombarde et non sur la base de l'année civile de trois cent soixante-cinq ou trois cent soixante-six jours. 7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 20 JANVIER 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : Z 19-12.541. Arrêt n° 74 F-D.
DEMANDEUR à la cassation : Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Savoie
DÉFENDEUR à la cassation :
Président : Mme Batut (président). Avocat(s) : Maître Balat, SCP Thouin-Palat et Boucard.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
La caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Savoie, dont le siège est [adresse], a formé le pourvoi n° Z 19-12.541 contre l'arrêt rendu le 25 octobre 2018 par la cour d'appel de Chambéry (2e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme Y., épouse X., 2°/ à M. X., domiciliés tous deux [adresse], défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Savoie, de Me Balat, avocat de M. et Mme X., et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 25 octobre 2018), suivant offres de prêts acceptées des 25 et 31 août 2011, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Savoie (la banque) a consenti à M. et Mme X. (les emprunteurs) trois prêts immobiliers.
2. Reprochant à la banque d'avoir calculé les intérêts des prêts sur la base d'une année de trois-cent-soixante jours, ceux-ci l'ont assignée en annulation des stipulations de l'intérêt conventionnel et substitution de l'intérêt légal.
Examen des moyens :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Enoncé du moyen
3. La banque fait grief à l'arrêt d'annuler les stipulations d'intérêt des prêts, de leur substituer le taux légal en vigueur au jour de la souscription des prêts, de la condamner à payer aux emprunteurs les sommes de 11 058,37 CHF au titre du prêt n° [...], de 6 574,75 CHF au titre du prêt n° [...] et de 2 581,65 CHF au titre du prêt n° [...], et de la condamner à établir un nouveau tableau d'amortissement, avec application du taux de 0,38 % correspondant au taux d'intérêt légal en vigueur en 2011 sur les mêmes durées de remboursement s'agissant de la période postérieure au mois de février 2016 dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte de la somme de 50 euros par jour de retard passé ce délai, alors « que la déchéance du droit aux intérêts, dans la proportion fixée discrétionnairement par les juges du fond, est la seule sanction encourue dans le cas où la stipulation fixant le taux des intérêts calculés sur la base d'une année lombarde figure dans l'offre de crédit immobilier adressée au consommateur, peu important qu'un acte authentique ait par la suite été dressé pour retranscrire l'engagement ; qu'en prononçant pourtant la nullité de la stipulation d'intérêt des trois prêts et la substitution du taux légal aux taux conventionnels, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce ;
Réponse de la Cour :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
4. Vu les articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et R. 313-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016 :
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
5. Il résulte de ces textes que la mention, dans l'offre de prêt, d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année autre que l'année civile, est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts dans les termes de l'article L. 312-33 susvisé, lorsque l'inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale.
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
6. Pour annuler les clauses stipulant l'intérêt conventionnel et ordonner la substitution de l'intérêt légal, l'arrêt relève que, quelle qu'en soit l'incidence financière, pour les trois prêts, la banque a procédé aux calculs des intérêts sur la base d'une année de trois-cent-soixante jours, dite année bancaire ou année lombarde et non sur la base de l'année civile de trois cent soixante-cinq ou trois cent soixante-six jours.
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne M. et Mme X. aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Savoie
PREMIER MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à la décision confirmative attaquée d'avoir déclaré nulles les stipulations d'intérêt des prêts nos [...], [...] et [...] consentis par la banque aux époux X., d'avoir dit que le taux légal en vigueur au jour de la souscription des prêts, soit le taux de 0,38 %, correspondant au taux légal de l'année 2011, serait substitué au taux conventionnel prévu dans chacun des prêts, d'avoir condamné la banque à payer aux époux X. les sommes de 11.058,37 CHF au titre du prêt n° [...], de 6.574,75 CHF au titre du prêt n° [...] et de 2.581,65 CHF au titre du prêt n° [...], et d'avoir condamné la banque à établir un nouveau tableau d'amortissement, avec application du taux de 0,38 % correspondant au taux d'intérêt légal en vigueur en 2011 sur les mêmes durées de remboursement s'agissant de la période postérieure au mois de février 2016 dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, et sous astreinte d'un montant de 50 euros par jour de retard passé ce délai ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
aux motifs que « sur la valeur probante du rapport d'analyse financière de monsieur C., les époux X. et Y., ayant indiscutablement la qualité de consommateur, ont fait procéder, de manière non contradictoire, à une analyse financière par M. C..., conseil de l'entreprise et analyste en mathématiques financières, concernant les trois prêts immobiliers précédemment détaillés consentis par le Crédit Agricole pour la construction de leur résidence principale, mais cette circonstance n'interdit pas aux intimés de se prévaloir de cette étude, ni à la cour d'en apprécier la valeur probante dans la mesure où elle a été versée aux débats dès la première instance, permettant aux parties d'en débattre tant devant le tribunal que devant la cour durant deux ans et dix mois ; qu'or, force est de constater que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie, qui en a eu le temps et les moyens en sa qualité d'établissement de crédit professionnel et qui conclut longuement, conteste le principe du recours à ce mode de preuve, mais ne contredit à aucun moment les constatations et les conclusions dudit rapport que ce soit par ses propres analyses qu'elle avait tout loisir de développer aux cours des instances ou par l'établissement d'analyse par des sachants ; qu'il est donc établi que dans le cadre des trois crédits litigieux, le Crédit Agricole a procédé aux calculs des intérêts sur la base d'une année de 360 jours, dite année bancaire ou année lombarde et non sur la base de l'année civile de 365 ou 3655 jours ; qu'alors, au surplus, que si les conditions générales du prêt du 31 août 2011 le prévoient expressément, les deux prêts du 25 août 2011, les plus importants quant à leur montant, ne le stipulent pas ; que sur l'illicéité du calcul des intérêts annuels sur la base de 360 jours, il est d'abord inexact de prétendre qu'aucun texte n'encadre les modalités de calcul du taux d'intérêt conventionne, dans la mesure où l'article R. 313-1 et son annexe, devenu l'article R. 314-3 du code de la consommation, concernant le calcul du TEG et donc celui des intérêts conventionnels qui en constituent l'élément principal, dispose expressément que ce calcul doit être réalisé sur la base d'une année de 365 jour ou 366 jours ; que la permanence de cette référence inchangée au travers des décrets des 10 juin 2002, du 1er février 2011, entrée en vigueur le 1er mai 2011 et donc applicable aux trois crédits objets du litige et du décret du 29 juin 2016 tranche avec la volatilité du droit positif que tente de suggérer la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie ; qu'il n'est pas inutile de rappeler que les dispositions du code de la consommation sont d'ordre public et que la qualité de consommateur des époux X. et Y. est acquise ; que les deux parties invoquent les positions prises par la Cour de cassation ; qu'or, cette dernière a largement pris parti pour la prohibition de l'année dite lombarde, ainsi l'arrêt du 19 juin 1993 n° 10-16651, n'est pas isolé puisque réitéré par une décision du 17 juin 2015 n° 14-14326 disposant que le taux conventionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel ; que la Cour de cassation n'a pas modifié cette position concernant les prêts immobiliers consentis à des consommateurs ; que la commission des clauses abusives a, dans le cadre d'une recommandation n° 05-02 du 20 septembre 2005, condamné le recours à l'année de jours ; que le principal argument avancé par le Crédit Agricole pour défendre son calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours est la possibilité pour les parties, au nom de l'autonomie de la volonté qui est de règle en matière contractuelle, de stipuler une base de calcul des intérêts autre que l'année civile, mais le moyen est particulièrement inopérant en l'espèce d'une part parce qu'il a été rappelé que les dispositions du code de la consommation sont d'ordre public, mais surtout parce que concernant les deux prêts les plus importants, ceux consentis le 25 août 2011, chacun pour des montants de 158.000 € soit 180.647,40 CHF, ne stipulent pas le recours à l'année lombarde sur la base de laquelle la banque a calculé les intérêts en l'absence de toute clause contractuelle le prévoyant ; que qu'elle qu'en soit l'incidence financière, il s'agit, en l'espèce, non pas de sanctionner une simple erreur de calcul, mais une absence de consentement des emprunteurs au véritable coût du crédit, les privant de la possibilité de comparer de manière pertinente les prêts proposés avec d'autres offres concurrentes ; que la nullité de la clause d'intérêt avec substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel n'apparaît dès lors nullement disproportionnée ; que le Crédit Agricole ne conteste pas en lui-même le calcul des sommes qu'il a été condamné à restituer aux époux X. et Y. suite à la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel ; que le jugement sera, en conséquence, confirmé de ce chef » ;
et aux motifs adoptés que « sur les demandes relatives au taux d'intérêt, il résulte de l'application combinée des articles 1997 alinéa 2 du code civil et L. 313-1 et R. 313-1 anciens du code de la consommation que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel doit, à l'instar du taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile, de sorte que le taux d'intérêt doit nécessairement être calculé sur la base de l'année civile, soit 365 ou 366 jours ; que cette règle présentant un caractère d'ordre public, il est impossible d'y déroger par convention particulière ; qu'or, il ressort des pièces versées aux débats que les intérêts des prêts souscrits par les époux X. ont été calculés sur la base d'une année de 360 jours, dite année lombarde, ce qui au demeurant n'est pas contesté par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE (cf. pièce n° 2) ; qu'une telle stipulation concernant le taux conventionnel qui vise une période de 360 jours se trouver frappée de nullité ; qu'il importe peu que le calcul sur la base de 360 jours ait eu un surcoût négligeable pour les emprunteurs dès lors que la loi sanctionne l'irrégularité formelle affectant la stipulation d'intérêts conventionnels sans subordonner la sanction édictées à une incidence défavorable pour l'emprunteur ; que la clause de stipulation d'intérêts des prêts n° [...] et n° [...] sera donc déclarée nulle, cette nullité emportant substitution de l'intérêt légal en cours en 2011 ; qu'en conséquence, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE sera condamnée, au terme des décomptes produits par les époux X., lesquels n'ont pas été contestés dans leurs montants par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE, à verser aux époux X. les sommes suivantes : * 2.581,65 CHF au titre du prêt n° [...], * 11.058,37 CHF au titre du prêt n° [...], * 6.574,25 CHF au titre du prêt n° [...] ; que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE devra par ailleurs établir et communiquer aux époux X. un nouveau tableau d'amortissement, avec application du taux légal en cours en 2011, dans un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 € par jour de retard passé ce délai » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
alors 1°/ que le prêteur qui réclame des intérêts supérieurs à ceux résultant de l'application du taux contractuellement prévu engage sa responsabilité à l'égard de l'emprunteur et doit réparer le dommage ainsi causé à ce dernier ; qu'en estimant que le calcul des intérêts sur la base d'une année lombarde de 360 jours affectait le consentement des emprunteurs et donc la formation du contrat et entraînait à ce titre l'annulation de la stipulation d'intérêt, la cour d'appel a violé l'article 1907 alinéa 2 du code civil, par fausse application, et les articles 1134 et 1147 du code civil en leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016, par refus d'application ;
alors 2°/ subsidiairement que la déchéance du droit aux intérêts, dans la proportion fixée discrétionnairement par les juges du fond, est la seule sanction encourue dans le cas où la stipulation fixant le taux des intérêts calculés sur une la base d'une année lombarde figure dans l'offre de crédit immobilier adressée au consommateur, peu important qu'un acte authentique ait par la suite été dressé pour retranscrire l'engagement ; qu'en prononçant pourtant la nullité de la stipulation d'intérêt des trois prêts et la substitution du taux légal aux taux conventionnels, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce ;
alors 3°/ subsidiairement que la substitution du taux de l'intérêt légal au taux d'intérêt contractuel initial, qui sanctionne le calcul des intérêts sur la base d'une année lombarde, a pour fondement l'absence de consentement de l'emprunteur aux intérêts du prêt ; que pour procéder à l'annulation des stipulations d'intérêt des trois prêts litigieux, la cour d'appel a dit qu'il ne s'agissait pas de sanctionner une simple erreur de calcul, mais l'absence de consentement des emprunteurs au coût véritable du prêt, les privant de la possibilité de comparer de manière pertinente les prêts proposés avec d'autres offres concurrentes ; qu'en statuant ainsi, sans constater que les emprunteurs, après avoir comparé les offres de crédit qu'ils auraient sollicitées auprès de plusieurs établissements de crédit, auraient écarté celles de la CRCAM s'ils avaient eu connaissance du coût réel des prêts litigieux, la cour d'appel a violé les articles 1109, 1110, et 1116 du code civil, en leur rédaction applicable à l'espèce.
SECOND MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à la décision confirmative attaquée d'avoir déclaré nulles les stipulations d'intérêt des prêts nos [...], [...] et [...] consentis par la banque aux époux X., d'avoir dit que le taux légal en vigueur au jour de la souscription des prêts, soit le taux de 0,38 %, correspondant au taux légal de l'année 2011, serait substitué au taux conventionnel prévu dans chacun des prêts, d'avoir condamné la banque à payer aux époux X. les sommes de 11.058,37 CHF au titre du prêt n° [...], de 6.574,75 CHF au titre du prêt n° [...] et de 2.581,65 CHF au titre du prêt n° [...], et d'avoir condamné la banque à établir un nouveau tableau d'amortissement, avec application du taux de 0,38 % correspondant au taux d'intérêt légal en vigueur en 2011 sur les mêmes durées de remboursement s'agissant de la période postérieure au mois de février 2016 dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, et sous astreinte d'un montant de 50 euros par jour de retard passé ce délai ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
aux motifs que « sur la valeur probante du rapport d'analyse financière de monsieur C., les époux X. et Y., ayant indiscutablement la qualité de consommateur, ont fait procéder, de manière non contradictoire, à une analyse financière par M. C., conseil de l'entreprise et analyste en mathématiques financières, concernant les trois prêts immobiliers précédemment détaillés consentis par le Crédit Agricole pour la construction de leur résidence principale, mais cette circonstance n'interdit pas aux intimés de se prévaloir de cette étude, ni à la cour d'en apprécier la valeur probante dans la mesure où elle a été versée aux débats dès la première instance, permettant aux parties d'en débattre tant devant le tribunal que devant la cour durant deux ans et dix mois ; qu'or, force est de constater que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie, qui en a eu le temps et les moyens en sa qualité d'établissement de crédit professionnel et qui conclut longuement, conteste le principe du recours à ce mode de preuve, mais ne contredit à aucun moment les constatations et les conclusions dudit rapport que ce soit par ses propres analyses qu'elle avait tout loisir de développer aux cours des instances ou par l'établissement d'analyse par des sachants ; qu'il est donc établi que dans le cadre des trois crédits litigieux, le Crédit Agricole a procédé aux calculs des intérêts sur la base d'une année de 360 jours, dite année bancaire ou année lombarde et non sur la base de l'année civile de 365 ou 3655 jours ; qu'alors, au surplus, que si les conditions générales du prêt du 31 août 2011 le prévoient expressément, les deux prêts du 25 août 2011, les lus importants quant à leur montant, ne le stipulent pas ; que sur l'illicéité du calcul des intérêts annuels sur la base de 360 jours, il est d'abord inexact de prétendre qu'aucun texte n'encadre les modalités de calcul du taux d'intérêt conventionne, dans la mesure où l'article R. 313-1 et son annexe, devenu l'article R. 314-3 du code de la consommation, concernant le calcul du TEG et donc celui des intérêts conventionnels qui en constituent l'élément principal, dispose expressément que ce calcul doit être réalisé sur la base d'une année de 365 jour ou 366 jours ; que la permanence de cette référence inchangée au travers des décrets 25 sur 43 des 10 juin 2002, du 1er février 2011, entrée en vigueur le 1er mai 2011 et donc applicable aux trois crédits objets du litige et du décret du 29 juin 2016 tranche avec la volatilité du droit positif que tente de suggérer la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie ; qu'il n'est pas inutile de rappeler que les dispositions du code de la consommation sont d'ordre public et que la qualité de consommateur des époux X. et Y. est acquise ; que les deux parties invoquent les positions prises par la Cour de cassation ; qu'or, cette dernière a largement pris parti pour la prohibition de l'année dite lombarde, ainsi l'arrêt du 19 juin 1993 n° 10-16651, n'est pas isolé puisque réitéré par une décision du 17 juin 2015 n° 14-14326 disposant que le taux conventionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel ; que la Cour de cassation n'a pas modifié cette position concernant les prêts immobiliers consentis à des consommateurs ; que la commission des clauses abusives a, dans le cadre d'une recommandation n° 05-02 du 20 septembre 2005, condamné le recours à l'année de jours ; que le principal argument avancé par le Crédit Agricole pour défendre son calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours est la possibilité pour les parties, au nom de l'autonomie de la volonté qui est de règle en matière contractuelle, de stipuler une base de calcul des intérêts autre que l'année civile, mais le moyen est particulièrement inopérant en l'espèce d'une part parce qu'il a été rappelé que les dispositions du code de la consommation sont d'ordre public, mais surtout parce que concernant les deux prêts les plus importants, ceux consentis le 25 août 2011, chacun pour des montants de 158.000 € soit 180.647,40 CHF, ne stipulent pas le recours à l'année lombarde sur la base de laquelle la banque a calculé les intérêts en l'absence de toute clause contractuelle le prévoyant ; que qu'elle qu'en soit l'incidence financière, il s'agit, en l'espèce, non pas de sanctionner une simple erreur de calcul, mais une absence de consentement des emprunteurs au véritable coût du crédit, les privant de la possibilité de comparer de manière pertinente les prêts proposés avec d'autres offres concurrentes ; que la nullité de la clause d'intérêt avec substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel n'apparaît dès lors nullement disproportionnée ; que le Crédit Agricole ne conteste pas en lui-même le calcul des sommes qu'il a été condamné à restituer aux époux X. et Y. suite à la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel ; que le jugement sera, en conséquence, confirmé de ce chef » ;
et aux motifs adoptés que « sur les demandes relatives au taux d'intérêt, il résulte de l'application combinée des articles 1997 alinéa 2 du code civil et L. 313-1 et R. anciens du code de la consommation que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel doit, à l'instar du taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile, de sorte que le taux d'intérêt doit nécessairement être calculé sur la base de l'année civile, soit 365 ou 366 jours ; que cette règle présentant un caractère d'ordre public, il est impossible d'y déroger par convention particulière ; qu'or, il ressort des pièces versées aux débats que les intérêts des prêts souscrits par les époux X. ont été calculés sur la base d'une année de 360 jours, dite année lombarde, ce qui au demeurant n'est pas contesté par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE (cf. pièce n° 2) ; qu'une telle stipulation concernant le taux conventionnel qui vise une période de 360 jours se trouver frappée de nullité ; qu'il importe peu que le calcul sur la base de 360 jours ait eu un surcoût négligeable pour les emprunteurs dès lors que la loi sanctionne l'irrégularité formelle affectant la stipulation d'intérêts conventionnels sans subordonner la sanction édictées à une incidence défavorable pour l'emprunteur ; que la clause de stipulation d'intérêts des prêts n° [...] et n° [...] sera donc déclarée nulle, cette nullité emportant substitution de l'intérêt légal en cours en 2011 ; qu'en conséquence, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE sera condamnée, au terme des décomptes produits par les époux X., lesquels n'ont pas été contestés dans leurs montants par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE, à verser aux époux X. les sommes suivantes : * 2.581,65 CHF au titre du prêt n° [...], * 11.058,37 CHF au titre du prêt n° [...], * 6.574,25 CHF au titre du prêt n° [...] ; que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE devra par ailleurs établir et communiquer aux époux X. un nouveau tableau d'amortissement, avec application du taux légal en cours en 2011, dans un délai d'un 26 sur 43 mois à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 € par jour de retard passé ce délai » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
alors 1°/ que la substitution automatique des intérêts légaux aux intérêts contractuels, encourue par le prêteur s'étant livré à un calcul des intérêts contractuels sur la base d'une année lombarde, constitue une sanction disproportionnée ; qu'en infligeant toutefois cette sanction, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 313-1 et L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce et l'article 1907 alinéa 2 du code civil ;
alors 2°/ que les principes de proportionnalité et de sécurité juridique s'opposent à ce qu'un créancier soit privé des intérêts conventionnels par application d'une sanction prétorienne qui n'était pas encore en vigueur au jour où le contrat ayant occasionné l'illicéité a été conclu ; qu'en faisant application d'une sanction privant le créancier des intérêts conventionnels en raison de l'utilisation de l'année lombarde quand le prêt du 31 août 2011, contenant une clause d'année lombarde, avait été conclu avant que la Cour de cassation ne prohibe ce type de clause par son arrêt du 19 juin 2013, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 313-1 et L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce et l'article 1907 alinéa 2 du code civil ;
alors 3°/ que le taux légal applicable est celui en vigueur au jour où les intérêts sont acquis au créancier ; qu'il s'en évince que le taux légal imposé au prêteur à titre de sanction du calcul des intérêts sur la base d'une année lombarde doit être celui applicable au jour du versement de chaque échéance et qu'il doit donc suivre les modifications normatives tout au long de la phase d'amortissement ; qu'en décidant que le taux d'intérêt légal applicable pour l'année 2011, soit 0,38 %, serait substitué aux stipulations d'intérêt des trois prêts litigieux et en condamnant la banque à établir un nouveau tableau d'amortissement en conséquence, la cour d'appel a violé l'article L. 313-2 du code monétaire et financier.