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CA NANCY (5e ch. com.), 17 février 2021

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (5e ch. com.), 17 février 2021
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 5e ch. com.
Demande : 20/00047
Date : 17/02/2021
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 7/01/2020
Référence bibliographique : 5889 (art. L. 221-3 C. consom.), 5944 (domaine, site internet)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8807

CA NANCY (5e ch. com.), 17 février 2021 : RG n° 20/00047

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu que c'est en l'espèce par une exacte appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis que le tribunal de commerce d'Épinal a jugé que le contrat litigieux ne remplissait pas cumulativement les deux conditions prévues par l'article L. 221-3, prévoyant l'extension de l'application des dispositions régissant les relations entre un professionnel et un consommateur aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels ;

Qu'il est acquis certes que le contrat prévoyant la création d'un site internet relatif à la promotion à des fins publicitaires des prestations offertes par la société « L’Éveil des sens » n'entre pas dans le champ de l'activité principale de cette dernière qui est l'exploitation d'un salon de coiffure mixte et de toutes activités liées à l'esthétique, ainsi que les soins corporels et de beauté ;

Qu'en revanche, la société « L'Éveil des sensé » ne rapporte pas la preuve qu'elle employait moins de cinq salariés au jour de l'acceptation du devis établi par la société « Le gorille en cravate » ; qu'il n'est pas contesté en effet sur ce point que celle-ci exploite deux établissements, à savoir un salon de beauté et d'esthétique situé [...], ainsi qu'un salon de coiffure situé [...] ;

Que l'attestation de l'expert-comptable de la société « L'Éveil des sens » indique à cet égard que celle-ci employait au 31 mars 2017 deux salariés en contrat à durée indéterminée, un salarié en contrat à durée déterminée, ainsi que cinq apprentis ; que cette attestation ne précise pas cependant si cet effectif concerne exclusivement le premier site situé [...], correspondant au siège social de la société, ou englobe l'effectif total des deux sites, en comptabilisant ainsi celui du second établissement ouvert le 22 août 2010 ;

Que faute de produire son registre unique du personnel à la date de l'acceptation du devis établi par la société « Le gorille en cravate », la société « L’Éveil des sens » ne rapporte pas la preuve qu'elle employait moins de cinq salariés ; qu'il n'y a pas lieu en conséquence d'étendre l'application des dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels à celui conclu entre les parties ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NANCY

CINQUIÈME CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 17 FÉVRIER 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20/00047. N° Portalis DBVR-V-B7E-EQQI. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Commerce d'EPINAL, en date du 10 décembre 2019 : R.G. n° 2019000385.

 

APPELANTE :

SARL L'ÉVEIL DES SENS

prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié [adresse] immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d'Epinal sous le numéro XXX, représentée par Maître Florian H., avocat au barreau d'EPINAL

 

INTIMÉE :

SASU LE GORILLE EN CRAVATE

prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié [adresse] immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d'Epinal sous le numéro YYY, représentée par Maître Dorothée B. de la SCP B. G. B. J., avocat au barreau d'EPINAL

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 6 janvier 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de Chambre et Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de Chambre, Monsieur Olivier BEAUDIER, Conseiller, Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller.

Greffier, lors des débats : Madame Emilie ABAD ;

A l'issue des débats, la Présidente a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 17 février 2021, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; signé par Mme Guillemette MEUNIER, Présidente et par Mme Emilie ABAD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société « Le Gorille en cravate », dont l'activité est la communication publicitaire, a été mandatée en mars 2017 par la société « L'Éveil des sens », un institut de beauté, pour réaliser son site internet.

Un devis, non daté et non signé, d'un montant de 2.650 euros HT ou 3.180 euros TTC correspondant à cette prestation a été produit par les parties.

En décembre 2017, la société « Le gorille en cravate » a sollicité le paiement d'un premier acompte de 50 %.

Après avoir vainement mis en demeure la société « l'Éveil des sens » d'avoir à payer les sommes dues, le 27 juin 2018, puis le 2 octobre 2018, la société « Le Gorille en cravate » a par acte du 11 janvier 2019, assigné la société l'Éveil des sens devant le tribunal de commerce d'Épinal.

Par jugement en date du 10 décembre 2019, le tribunal de commerce d'Épinal a :

- dit l'action de la société « Le gorille en cravate » recevable en la forme,

- dit que les conditions d'application des dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation ne sont pas réunies,

- dit valablement formé le contrat de fait liant les sociétés « Le gorille en cravate » et « L'Éveil des sens »,

- débouté la société « L’Éveil des sens » de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

- condamné la société « L’Éveil des sens » à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 3.180 euros TTC au titre de la prestation réalisée,

- condamné la société « L’Éveil des sens » des sens à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement,

- condamné la société « L’Éveil des sens » à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire des décisions prises par application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile,

- condamné la société « L’Éveil des sens » aux entiers dépens de l'instance.

La société « L'Éveil des sens » a interjeté appel de ce jugement par déclaration transmise au greffe par voie électronique en date du 7 janvier 2020.

[*]

En ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 octobre 2020, fondées sur les articles L221-1 et suivants du code de la consommation, la société « L’Éveil des sens » demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 10 décembre 2019 par le tribunal de commerce d'Epinal en ce qu'il a dit que les conditions d'application des dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation ne sont pas réunies, dit valablement formé le contrat de fait liant les sociétés « Le gorille en cravate » et « L’Éveil des sens », débouté la société « L’Éveil des sens » de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions, condamné la société « L’Éveil des sens » à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 3.180 euros TTC au titre de la prestation réalisée, condamné « la société L’Éveil » des sens à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, condamné la société « L’Éveil des sens » à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné l'exéction provisoire des décisions prises par application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile, condamné la société « L’Éveil des sens » aux entiers dépens de l'instance.

Statuant à nouveau :

- constater l'absence de contrat liant la société « Le gorille en cravate » et la société « L’Éveil des sens »,

- dire et juger que la société « L’Éveil des sens » n'est redevable d'aucune somme envers la société « Le gorille en cravate » au titre d'un prétendu contrat de prestation de création de site Web,

- condamner la société « Le gorille en cravate » à payer à la société « L’Éveil des sens » la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

- condamner la société « Le gorille en cravate » à payer à la société « L’Éveil des sens » la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société « Le gorille en cravate » aux entiers dépens de première instance et d'appel.

[*]

En ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 10 avril 2020, fondées sur l'article 1103 du code civil, la société « Le gorille en cravate » demande à la cour de :

- confirmer la décision rendue par le tribunal de commerce d'Epinal le 18 décembre 2019 en ce qu'elle a dit que les conditions d'application des dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation ne sont pas réunies, dit valablement formé le contrat de fait liant les sociétés « Le gorille en cravate » et « L’Éveil des sens », débouté la société « L’Éveil des sens » de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions, condamné la société « L’Éveil des sens » à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 3.180 euros TTC au titre de la prestation réalisée, outre 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement et 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et condamné la société « L’Éveil des sens » aux dépens.

- infirmer la décision du tribunal de commerce d'Epinal en ce qu'elle a rejeté la demande de la société « Le gorille en cravate » d'obtenir le paiement d'une indemnité de retard,

Statuant à nouveau :

- condamner la société « L’Éveil des sens » à verser à la société « Le gorille en cravate » la somme de 954 euros à titre de pénalité de retard,

- condamner la société « L’Éveil des sens » à verser à la société « Le gorille en cravate » la somme de 2.000 euros, à hauteur d'appel, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société « L’Éveil des sens » aux entiers dépens.

[*]

La procédure a été clôturée par ordonnance le 16 décembre 2020.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

 

Sur l'application des dispositions du code de la consommation :

Attendu que l'article L. 221-3 du code de la consommation dispose que : « les dispositions des sections II, III, VI du présent chapitre applicable aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale de professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égale à cinq » ;

Qu'au soutien de son appel, la société « L'éveil des sens » fait valoir que les dispositions précitées sont applicables au contrat, qu'elle a conclu hors établissement, au mois de mars 2017, avec la société « Le gorille en cravate » ; que conformément à l'article L. 221-5 du code de la consommation, elle prétend que celui-ci est nul, faute pour l'intimée de lui avoir communiqué, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 112-2, relatives aux modalités d'exercice de son droit de rétractation dans le délai de quatorze jours suivant l'acceptation du devis communiqué ;

Attendu que c'est en l'espèce par une exacte appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis que le tribunal de commerce d'Épinal a jugé que le contrat litigieux ne remplissait pas cumulativement les deux conditions prévues par l'article L. 221-3, prévoyant l'extension de l'application des dispositions régissant les relations entre un professionnel et un consommateur aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels ;

Qu'il est acquis certes que le contrat prévoyant la création d'un site internet relatif à la promotion à des fins publicitaires des prestations offertes par la société « L’Éveil des sens » n'entre pas dans le champ de l'activité principale de cette dernière qui est l'exploitation d'un salon de coiffure mixte et de toutes activités liées à l'esthétique, ainsi que les soins corporels et de beauté ;

Qu'en revanche, la société « L'Éveil des sensé » ne rapporte pas la preuve qu'elle employait moins de cinq salariés au jour de l'acceptation du devis établi par la société « Le gorille en cravate » ; qu'il n'est pas contesté en effet sur ce point que celle-ci exploite deux établissements, à savoir un salon de beauté et d'esthétique situé [...], ainsi qu'un salon de coiffure situé [...] ;

Que l'attestation de l'expert-comptable de la société « L'Éveil des sens » indique à cet égard que celle-ci employait au 31 mars 2017 deux salariés en contrat à durée indéterminée, un salarié en contrat à durée déterminée, ainsi que cinq apprentis ; que cette attestation ne précise pas cependant si cet effectif concerne exclusivement le premier site situé [...], correspondant au siège social de la société, ou englobe l'effectif total des deux sites, en comptabilisant ainsi celui du second établissement ouvert le 22 août 2010 ;

Que faute de produire son registre unique du personnel à la date de l'acceptation du devis établi par la société « Le gorille en cravate », la société « L’Éveil des sens » ne rapporte pas la preuve qu'elle employait moins de cinq salariés ; qu'il n'y a pas lieu en conséquence d'étendre l'application des dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels à celui conclu entre les parties ;

Attendu qu'il résulte de L. 221-1-1° du code de la consommation que les dispositions du titre II sont applicables au contrat à distance ; que ce dernier se définit comme tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans présence simultanée du professionnel et du consommateur par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat ;

Qu'en l'espèce, la société « L’Éveil des sens » ne démontre pas, ni même n'allègue dans ses conclusions d'appel, que le contrat litigieux aurait été conclu dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, au sens des dispositions précitées ; qu'il n'est donc pas établi que ce contrat entrerait dans le domaine des contrats à distance qui sont expressément régis par le code de la consommation ;

 

Sur la créance de la société « Le gorille en cravate » :

Attendu que conformément à la facture établie le 15 janvier 2018, la société « L’Éveil des sens » sera condamnée à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 3.200 euros, au titre des prestations réalisées et sur lesquelles l'appelante ne forme aucune critique ;

Que s'agissant de la clause pénale, le devis soumis à la société « L’Éveil des sens » mentionne que : « le paiement de la facture doit être effectif au plus tard dans les quinze jours de la date d'émission de la facture. Dans le cas contraire, une pénalité de retard de 30 % pourra être ajoutée au montant de la facture » ;

Que faute pour la société « L’Éveil des sens » d'avoir signé ce devis après avoir reconnu qu'il avait pris connaissance des conditions du contrat, en particulier de l'existence de cette clause pénale en cas de retard de paiement dans les prestations commandées, l'intimée sera déboutée de sa demande formée au titre de l'exécution de cette dernière ;

 

Sur la demande de dommages-intérêts formée par la société « L’Éveil des sens » :

Attendu que la société « L’Éveil des sens », succombant dans ses prétentions, sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et injustifiée formée à l'encontre de l'intimée ne peut prospérer ;

 

Sur les dépens et l'application de les frais irrépétibles de procédure :

Attendu que la société « L’Éveil des sens » sera condamnée aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel ; qu'elle sera déboutée de ses demandes formées au titre des frais irrépétibles de procédure exposés devant le tribunal et la cour ;

Qu'il convient de confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a condamné la société « L’Éveil des sens » à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 1.000 euros, au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en première instance ;

Que la société « L’Éveil des sens » sera condamnée à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 1 000 euros, au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en cause d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,

Vu les dispositions des articles L. 221-1 et L. 221-3 du code de la consommation ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Déboute la société « L’Éveil des sens » de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et pour frais irrépétibles de procédure ;

Condamne la société « L’Éveil des sens » à payer à la société « Le gorille en cravate » la somme de 1.000 € (mille euros), au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en cause d'appel ;

Condamne la société « L’Éveil des sens » aux entiers frais et dépens d'appel ;

Rejette toute autre demande.

Le présent arrêt a été signé par Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame Emilie ABAD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,                               LA PRÉSIDENTE,

Minute en sept pages.