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CA CHAMBÉRY (2e ch.), 3 juin 2021

Nature : Décision
Titre : CA CHAMBÉRY (2e ch.), 3 juin 2021
Pays : France
Juridiction : Chambery (CA), 2e ch.
Demande : 19/01650
Date : 3/06/2021
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 3/09/2019
Référence bibliographique : 5705 (L. 212-1, imprescriptibilité), 5984 (preuve du caractère abusif), 6017 (clause portant sur l’objet principal, crédit)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8957

CA CHAMBÉRY (2e ch.), 3 juin 2021 : RG n° 19/01650 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « A titre liminaire il sera observé qu'il est constant que la demande tendant à voir une clause abusive réputée non écrite ne s'analysant pas en une demande d'annulation, n'est pas soumise à la prescription (Cass. com., 8 avril 2021, n° 19-17.997). »

2/ « Il convient de relever que Madame X. ne développe pas d'argumentation propre au soutien de ses prétentions sur le caractère abusif des clauses de stipulation des intérêts. Elle donne un certain nombre d'éléments démontrant, selon elle, que des irrégularités affectent le TEG et le coût du crédit sans distinguer entre ce qui relève du régime de la clause abusive (invoqué à titre principal) et ce qui se rapporte à la nullité des clauses de stipulation des intérêts (invoquée à titre subsidiaire en cause d'appel). Par ailleurs, elle ne se réfère pas forcément au bon établissement bancaire (conclusions p.28 où il est question de la banque populaire et lieu et place de la Caisse d'épargne). En outre, elle ne précise pas clairement quelles sont les clauses du contrat qu'elle souhaite voir déclarer abusives.

Il est possible néanmoins de déduire de ses écritures que les reproches adressés à l'organisme bancaire sont, en substance : - l'utilisation de l'année Lombarde dans le calcul des intérêts, - des erreurs commises dans le calcul du TEG (erreur dans le taux de période, défaut de proportionnalité du TEG par rapport au taux de période, défaut de prise en compte dans le calcul du TEG des intérêts et frais de la période de préfinancement et des frais d'acte). »

3/ « Il est constant que l'appréciation du caractère abusif des clauses, au sens de ce texte, ne porte pas sur la définition de l'objet principal du contrat pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. Les clauses se rapportant à la stipulation des intérêts sont les suivantes : […] Les clauses discutées, telles que décrites ci-dessus, constituent bien l'objet principal du contrat de prêt immobilier et de son avenant. Elles ne peuvent donc être considérées comme abusives que si elles ne sont pas rédigées de façon claire et compréhensible. Or, en l'espèce, elles décrivent de manière parfaitement claire les conditions du préfinancement, la durée du prêt, le taux d'intérêt, le taux effectif global avec leur mode de calcul, le taux de période, la périodicité, le montant de l'assurance, le coût total hors assurance et assurance, le montant des frais estimés de garantie. En conséquence les clauses litigieuses ne présentent pas de caractère abusif au sens du code de la consommation et Madame X. sera déboutée de sa demande à ce titre. »

 

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 3 JUIN 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/01650. N° Portalis DBVY-V-B7D-GJVO. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ANNECY en date du 25 juillet 2019, R.G. n° 17/01490.

 

Appelante :

Mme X.

née le [date] à [ville], demeurant [adresse], Représentée par Maître Laura D., avocat postulant au barreau d'ALBERTVILLE et la SELARL BFB AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS

 

Intimée :

SA CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE RHÔNE-ALPES

dont le siège social est sis [...] prise en la personne de son représentant légal en exercice, Représentée par Me Céline J., avocat postulant au barreau de THONON-LES-BAINS et la SCP G. B. A. J., avocat plaidant au barreau de LYON

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 6 avril 2021 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,

Et lors du délibéré, par : - Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente, - Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, - Monsieur Fabrice GAUVIN, Vice-Président Placé, qui a procédé au rapport.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte sous seing privé du 22 février 2011, Madame X. acceptait une offre de crédit immobilier émise par la Caisse d'Épargne et de Prévoyance Rhône Alpes le 1er février 2011. Elle empruntait ainsi la somme de 143.000 euros remboursable en 300 mois avec intérêts au taux de 3,90 %, le TEG étant de 4,53 %.

Le 29 juin 2011, Maître Z., Notaire à [ville A.], recevait ce prêt par acte authentique.

Le 8 septembre 2015, Madame X. acceptait un avenant à effet du 1er octobre 2015, proposé par le prêteur le 28 août 2015, et aux termes duquel, sur un capital restant dû de 134.158,29 euros, l'amortissement se ferait désormais sur une période restante de 232 mois au taux d'intérêts de 2,85 % et au TEG de 3,425 % l'an.

En 2017, Madame X. sollicitait les services de la société Rousseau Expert Finance aux fins d'analyse des conditions de son prêt, de détermination du TEG véritable et de détermination du montant des intérêts correspondant à la différence entre les intérêts effectivement versés en application du contrat et ceux qui auraient dû l'être en application du taux recalculé. La société Rousseau Expert Finance remettait son rapport le 25 février 2017.

Par courrier recommandé en date du 15 mars 2017, Maître Fiona B., conseil de Madame X. mettait en demeure la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Rhône Alpes de produire un tableau d'amortissement prenant en compte la nullité de la stipulation des intérêts et la substitution du taux légal au taux conventionnel et de régler la somme de 18.000 euros correspondant aux intérêts jugés indûment versés.

Par acte du 13 octobre 2017, Madame X. assignait la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Rhône-Alpes devant le tribunal de grande instance d'Annecy en lui demandant de constater les erreurs de calculs des taux d'intérêts, d'annuler la clause de stipulation des intérêts et de lui payer la somme totale de 18.000 euros.

Par jugement du 25 juillet 2019, le tribunal de grande instance d'Annecy a :

- déclaré irrecevables, comme prescrites, les demandes portant sur le prêt du 1er février 2011 et l'acte notarié du 29 juin 2011,

- débouté Madame X. de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Rhône-Alpes de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Madame X. aux dépens.

Le tribunal a notamment relevé que, pour le prêt tel que réitéré dans l'acte notarié, l'action engagée le 13 octobre 2017 l'était plus de 5 ans après la conclusion du contrat sans que le rapport de l'analyste financier ne puisse être considéré comme un acte interruptif de prescription. Quant à l'avenant de 2015, le tribunal a considéré que Madame X. ne démontrait pas l'existence d'erreur de calcul ni celle d'un préjudice qui en aurait résulté. Quant à la question du taux de période, le Tribunal a jugé que les erreurs relatives au TEG inférieures à une décimale n'étaient pas sanctionnables.

Madame X. a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe du 3 septembre 2019.

[*]

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 2 décembre 2019, Madame X. demande à la cour de :

- infirmer la décision du 25 juillet 2019 en ce qu'elle a dit que les demandes portant sur le contrat de prêt du 1er février 2011 et sur l'acte notarié daté du 29 juin 2011 sont irrecevables par l'effet de la prescription,

- infirmer la décision du 25 juillet 2019 en ce qu'elle l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes,

- infirmer la décision du 25 juillet 2019 en ce qu'elle l'a condamnée aux entiers dépens,

- constater les erreurs de calcul du taux de période dans le contrat de prêt du 1er février 2011, dans l'acte de prêt notarié et dans l'avenant litigieux,

- constater les erreurs de calcul du TEG du prêt litigieux dans le contrat de prêt du 1er février 2011, dans l'acte de prêt notarié et dans l'avenant litigieux,

- constater que les intérêts sont calculés sur la base d'une année bancaire de 360 jours dans le contrat de prêt du 1er février 2011, dans l'acte de prêt notarié et dans l'avenant litigieux,

- constater que les intérêts et les primes d'assurance de la période de préfinancement ne sont pas pris en compte dans le calcul du TEG dans le contrat de prêt du 1er février 2011 et dans l'acte de prêt notarié,

- constater que « les frais de garantie évalué sont évalués dans le contrat de prêt du 1er février 2011 et dans l'acte de prêt notarié ».

A titre principal,

- déclarer « abusive et par conséquent réputée non écrite les clauses de stipulation d'intérêts insérées dans le contrat de prêt, l'acte notarié et dans l'avenant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours »,

A titre subsidiaire,

- prononcer la nullité des clauses de stipulation d'intérêts insérées dans le contrat de prêt et dans l'avenant,

- prononcer, la substitution au taux d'intérêt conventionnel, du taux d'intérêt légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt du 1er février 2011, soit 0,38 %,

- prononcer, la substitution au taux d'intérêt conventionnel, du taux d'intérêt légal applicable au jour de la conclusion de l'avenant du 28 août 2015, soit 0,99 %,

A titre infiniment subsidiaire,

- prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du contrat de prêt du 1er février 2011 à hauteur du taux d'intérêt légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt, soit 0,38 %,

En conséquence,

- condamner la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Rhône-Alpes à lui payer la somme de 16.000 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt du 1er février 2011, depuis sa conclusion jusqu'au 28 août 2015, date de la conclusion de l'avenant,

- condamner la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Rhône-Alpes à lui payer la somme de 2.000 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre de l'avenant du 28 août 2015, depuis sa conclusion jusqu'au jour de la décision à intervenir, sauf à parfaire,

- enjoindre à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Rhône-Alpes, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire pour l'avenant du 28 août 2015, un nouveau tableau d'amortissement prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal applicable au jour de la conclusion de l'avenant, au taux conventionnel, soit 0,99 %.

En tout état de cause,

- condamner la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Rhône-Alpes à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Rhône Alpes aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Alexandre B., avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, Madame X. expose que :

- le délai de prescription de l'action en nullité ne court à compter de la date du contrat que lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, ou lorsque tel n'est pas le cas à compter de la date de la révélation de l'erreur à l'emprunteur; qu'en l'espèce, elle n'était pas en mesure de percevoir une erreur provenant d'un calcul fondé sur l'année lombarde en raison de la complexité des calculs ; qu'elle n'a pris la mesure de l'erreur qu'à la remise de l'analyse financière, la prescription ayant commencé à courir à ce moment-là,

- elle ne pouvait pas non plus prendre la mesure de l'absence de prise en compte des frais d'actes réels et des frais de garantie sur le calcul du TEG,

- le TEG est impacté au-delà d'une décimale par les erreurs de calcul et en toute hypothèse, l'utilisation d'une base de calcul différente de celle prévue par les textes est sanctionnable sans qu'un impact ne soit exigé, une erreur même minime engageant la responsabilité de la banque,

- le TEG indiqué dans le contrat de prêt n'est pas proportionnel au taux de période et ne prend pas en compte les intérêts et frais d'assurance sur la phase de pré financement,

- la sanction des erreurs est l'annulation de la clause de stipulation des intérêts et la substitution du taux légal au taux conventionnel,

- la clause de stipulation des intérêts est abusive et donc réputée non écrite.

[*]

Dans ses conclusions adressées par voie électronique le 12 février 2020, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Rhône-Alpes demande à la cour de :

A titre principal

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Annecy en date du 25 juillet 2019,

Y ajoutant,

- condamner Madame X. à lui payer une somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens distraits au bénéfice de Me Céline J., avocat, sur son offre de droit,

A titre subsidiaire

- déclarer Madame X. irrecevable en ses contestations à l'encontre de l'offre de prêt,

- débouter Madame X. en ses contestations à l'encontre de l'avenant,

- condamner Madame X. à lui payer une somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens distraits au bénéfice de la Me Céline J., avocat, sur son offre de droit,

A titre très subsidiaire

- débouter Madame X. en ses contestations à l'encontre de l'offre de prêt et de l'avenant,

- condamner Madame X. à lui payer une somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens distraits au bénéfice de la Maître Céline J., avocat, sur son offre de droit,

A titre infiniment subsidiaire

- dire et juger n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts,

- à défaut, limiter la déchéance du droit aux intérêts à 1 euro symbolique,

- débouter Madame X. de l'ensemble de ses autres prétentions.

Au soutien de ses prétentions, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Rhône-Alpes expose que :

- l'action en nullité concernant l'offre de prêt du 1er février 201, acceptée le 13 février 2011 et exécutée depuis, s'est prescrite par 5 années à compter de l'acceptation dans la mesure où, dès ce moment, Madame X. pouvait percevoir les erreurs de calcul, les mentions concernées étant parfaitement claires et ne comprenant aucune difficulté de compréhension,

- l'appelante ne démontre pas que l'erreur dont elle se prévaut serait supérieure à la décimale et lui aurait causé un préjudice,

- elle fournit un calcul justifié contrairement à celui effectué dans l'analyse financière, calcul aboutissant à des nombres infinitésimaux ayant donné lieu à des arrondis,

- l'erreur sur le taux de période ne modifie pas le TEG tel que prévu au contrat,

- les intérêts intercalaires et la prime de raccordement d'assurance n'entrent pas dans le calcul du TEG, le prêteur étant, par définition, dans l'incapacité de connaître à l'avance la durée exacte du pré financement ; qu'en toute hypothèse en retenant la période maximum de préfinancement, l'intégration des frais aurait conduit à un TEG inférieur à celui auquel l'appelante parvient par ses calculs,

- le taux d'intérêt conventionnel peut être défini légalement par rapport à une année de 360 jours,

- la clause de calcul des intérêts n'est pas abusive faute de déséquilibre significatif créé entre les parties,

- concernant l'avenant, l'appelante ne démontre pas une erreur supérieure à la décimale,

- la clause relative au calcul des intérêts est bien différente entre l'offre et l'avenant toute référence à l'année lombarde ayant été supprimée dans ce dernier,

- les sommes demandées ne sont pas justifiées.

[*]

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 mars 2021.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

A titre liminaire, la cour précise que son office consiste à trancher un différend ou homologuer un accord mais pas à statuer sur des demandes de « donner acte » ou de faire des constats autres que ceux prévus par la loi. Ainsi, il ne sera pas répondu aux demandes de constats figurant dans le dispositif des écritures Madame X., celles-ci ne constituant pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

 

I) Sur le caractère abusif des clauses de stipulations d'intérêts :

A titre liminaire il sera observé qu'il est constant que la demande tendant à voir une clause abusive réputée non écrite ne s'analysant pas en une demande d'annulation, n'est pas soumise à la prescription (Cass. com., 8 avril 2021, n° 19-17.997).

Il convient de relever que Madame X. ne développe pas d'argumentation propre au soutien de ses prétentions sur le caractère abusif des clauses de stipulation des intérêts. Elle donne un certain nombre d'éléments démontrant, selon elle, que des irrégularités affectent le TEG et le coût du crédit sans distinguer entre ce qui relève du régime de la clause abusive (invoqué à titre principal) et ce qui se rapporte à la nullité des clauses de stipulation des intérêts (invoquée à titre subsidiaire en cause d'appel). Par ailleurs, elle ne se réfère pas forcément au bon établissement bancaire (conclusions p.28 où il est question de la banque populaire et lieu et place de la Caisse d'épargne). En outre, elle ne précise pas clairement quelles sont les clauses du contrat qu'elle souhaite voir déclarer abusives.

Il est possible néanmoins de déduire de ses écritures que les reproches adressés à l'organisme bancaire sont, en substance :

- l'utilisation de l'année Lombarde dans le calcul des intérêts,

- des erreurs commises dans le calcul du TEG (erreur dans le taux de période, défaut de proportionnalité du TEG par rapport au taux de période, défaut de prise en compte dans le calcul du TEG des intérêts et frais de la période de préfinancement et des frais d'acte).

Les erreurs ainsi dénoncées sont contestées point par point par laC aisse d'Epargne et de Prévoyance Rhône-Alpes.

Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version antérieure à celle de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 applicable au présent litige, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Il est constant que l'appréciation du caractère abusif des clauses, au sens de ce texte, ne porte pas sur la définition de l'objet principal du contrat pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.

Les clauses se rapportant à la stipulation des intérêts sont les suivantes :

- dans le contrat de prêt accepté le 22 février 2011 (pièce appelante n°1),

- en page 2 un tableau indique :

* préfinancement / taux 3,93 % fixe / durée 36 mois / périodicité mensuelle / assurance accessoire 35,75

* amortissement / taux 3,90 % fixe / durée 300 mois / périodicité mensuelle / montant 749,29 / assurance accessoire 35,75 / échéance assurance incluse 785,04

* taux effectif global 4,53 % / coût total sans assurance/accessoire 81 787

* frais de dossier 0,00 / Coût total avec assurance 95 675

* frais de garantie (évaluation) 2 163

* taux de période 0,38 %

* « durant le préfinancement, les intérêts sont calculés sur le montant des sommes débloquées, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours »

* « durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours » ;

Ces éléments sont repris dans l'acte notarié reçu le 29 juin 2011.

- en page 8, l'article 14 intitulé Taux effectif Global (TEG) indique : « le Taux effectif global est déterminé conformément aux articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation, en tenant compte notamment des intérêts, des primes d'assurance qui conditionnent l'octroi du crédit, des frais de dossier et de garantie qui figurent aux conditions particulières ».

- Dans l'avenant accepté le 8 septembre 2015 (pièce appelante n°2),

- en page 2 un tableau indique :

*amortissement / taux 2,850 % fixe / durée 232 mois / périodicité mensuelle / montant 752,81 / assurance accessoire 35,75 / échéance assurance incluse 788,56

- figurent ensuite les indications suivantes :

* date d'effet de l'avenant : 05/10/2015

* date de la première échéance réaménagée : 05/11/2015

* frais d'avenant : 500 EUR

* frais de garantie liés à l'avenant : 0,00

* coût total du crédit restant dû sans assurance/accessoire 40.493,63 euros

* coût total du crédit restant dû avec assurance/accessoire 49.287,63 euros

* taux effectif global sur capital restant dû 3,425 %

* taux de période 0,285 %

* TEG calculé sur la base des seules échéances, frais et accessoires ç compter de la date d'effet de l'avenant

* les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, majoré le cas échéant des intérêts reportés, au taux annuel du crédit stipulé ci-dessus.

Les clauses discutées, telles que décrites ci-dessus, constituent bien l'objet principal du contrat de prêt immobilier et de son avenant. Elles ne peuvent donc être considérées comme abusives que si elles ne sont pas rédigées de façon claire et compréhensible. Or, en l'espèce, elles décrivent de manière parfaitement claire les conditions du préfinancement, la durée du prêt, le taux d'intérêt, le taux effectif global avec leur mode de calcul, le taux de période, la périodicité, le montant de l'assurance, le coût total hors assurance et assurance, le montant des frais estimés de garantie.

En conséquence les clauses litigieuses ne présentent pas de caractère abusif au sens du code de la consommation et Madame X. sera déboutée de sa demande à ce titre.

 

II) Sur la nullité des clauses de stipulation des intérêts et la déchéance du droit aux intérêts :

- Sur le contrat de prêt :

L'article 2224 du code civil dispose que : « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».

Il est constant que le point de départ de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel se situe au jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le taux effectif global soit, s'agissant d'un prêt consenti à un consommateur ou à un non professionnel, la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur.

La cour de cassation reconnaît également la validité d'une décision qui ne se contente pas d'affirmer que la prescription commence à courir au jour de l'acceptation de l'offre mais qui constate que l'offre acceptée contenait tous les éléments de calcul du taux effectif global, faisant ainsi ressortir, qu'à la lecture de l'offre, les emprunteurs avaient pu se convaincre de l'erreur alléguée (Cass. civ. 1re, 9 décembre 2020, n° 18-25.895).

Il résulte du document produit par Madame X. (pièce n°1) que les intérêts seront calculés, tant dans la période de préfinancement que dans la période d'amortissement sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours. Dans la mesure où, comme cela a été relevé ci-dessus, l'offre mentionne très clairement le taux d'intérêt retenu, le TEG, les modalités de calcul, le taux de période, le coût total hors et avec assurance, ainsi que les frais, Madame X. disposait bien, dès la signature du contrat, des éléments lui permettant de vérifier le calcul du taux effectif global. A ce titre, il convient de rappeler que, par application de l'article L. 312-10 du Code de la consommation en vigueur au moment du contrat, l'offre d'un prêt immobilier était valable 30 jours et ne pouvait pas être acceptée avant que ne se soit écoulé un délai de 10 jours de réflexion.

Ainsi le point de départ du délai de prescription doit être fixé, en l'espèce, à la date de conclusion du contrat soit le 22 février 2011, ou le 29 juin 2011 en se fondant sur la date de l'acte notarié.

Il ressort des éléments du dossier que l'assignation en justice a été délivrée par Madame X. à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Rhône-Alpes le 13 octobre 2017, soit plus de 5 ans après le point de départ du délai de prescription, quelle que soit la date à laquelle il est fixé parmi les deux précisées ci-dessus et sans qu'aucune cause ne soit venue interrompre ou suspendre le délai.

En conséquence, les demandes subsidiaires de l'appelante tendant à la nullité des clauses de stipulation des intérêts et à la déchéance du droit aux intérêts étant engagée, pour le contrat principal, plus de cinq ans après la conclusion du contrat doivent être rejetées comme étant prescrites. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

 

- Sur l'avenant :

Il convient de relever que les demandes relatives à l'avenant ne sont pas prescrites dans la mesure où il a été accepté le 8 septembre 2015, pour une action engagée un peu plus de deux ans plus tard.

L'article 1907 du code civil dispose que l'intérêt est légal ou conventionnel, le second pouvant excéder le premier chaque fois que la loi ne le prohibe pas.

L'article R. 313-1 II alinéa 4 du code de la consommation, applicable au jour de l'acceptation de l'avenant, précise que, lorsque les versements sont effectués avec une fréquence autre qu'annuelle, le taux effectif global est obtenu en multipliant le taux de période par le rapport entre la durée de l'année civile et celle de la période unitaire. Le rapport est calculé, le cas échéant, avec une précision d'au moins une décimale.

Au regard du contenu de l'avenant tel que rappelé ci-dessus, il apparaît que ce dernier ne se réfère pas à 'l'année lombarde' contrairement au contrat qu'il vient précisément modifier notamment sur la question du taux d'intérêt et du TEG. Par ailleurs, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Rhône-Alpes expose dans ses écritures avoir obtenu le TEG de 3,425 % en multipliant un taux de période de 0,285434464142070 par 12 obtenant ainsi le chiffre de 3,425213569704840 arrondi à 3,425 %. Il en résulte que le calcul du TEG s'est bien fait sur la base d'une année civile de 12 mois.

Par ailleurs, en suivant les calculs proposés par la société « Rousseau Expert Finance » (pièce appelante n°3), le TEG de l'avenant aurait dû être de 3,4864 % au lieu des 3,425 % mentionnés. Ainsi, même à supposer exacts les calculs en question, l'emprunteur ne rapporte pas la preuve d'un écart d'au moins une décimale entre le taux réel et celui mentionné dans l'offre de prêt. Enfin, quant à l'inexactitude du taux de période, il est constant que, contrairement à celle du taux effectif global et à la supposer exacte, elle n'est pas de nature à entraîner la déchéance du droit aux intérêts (Cass. civ.1, 6 janvier 2021, n° 18-25.865).

Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame X. de ses demandes relatives à l'avenant.

 

III) Sur les demandes accessoires :

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, Madame X. qui succombe sera tenue au paiement des dépens avec distraction au profit de Maître Céline J., avocat, par application de l'article 699 du même code.

Les conditions d'application de l'article 700 du code de procédure civile ne sont réunies qu'en faveur de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Rhône-Alpes mais en équité, elle sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute Madame X. de sa demande au titre du caractère abusif des clauses de stipulation des intérêts,

Condamne Madame X. aux dépens d'appel, Maître Céline J., avocate étant autorisée à recouvrer directement à son encontre, ceux dont elle a fait l'avance, sans en avoir reçu provision,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi prononcé publiquement le 3 juin 2021 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Viviane CAULLIREAU-FOREL, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La Greffière                          La Présidente