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CASS. CIV. 3e, 30 juin 2021

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 3e, 30 juin 2021
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 3
Demande : 19-23038
Décision : 21-624
Date : 30/06/2021
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:C300624
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Jurica
Numéro de la décision : 624
Référence bibliographique : 5705 (L. 212-1, imprescriptibilité), 5813 (application dans le temps), 6106 (clause d’indexation)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9015

CASS. CIV. 3e, 30 juin 2021 : pourvoi n° 19-23038 ; arrêt n° 624

Publication : Legifrance ; Bull. civ.

 

Extrait : « 5. L'article L. 145-15 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, qui a substitué à la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec aux dispositions des articles L. 145-37 à L. 145-41 du code de commerce leur caractère réputé non écrit, est applicable aux baux en cours lors de l'entrée en vigueur de cette loi (Civ. 3e, 19 novembre 2020, pourvoi n° 19-20.405, publié).

6. L'action tendant à voir réputer non écrite une clause du bail commercial n'est pas soumise à prescription (même arrêt).

7. Aux termes de l'article L. 145-39 du code de commerce, dans sa rédaction applicable, par dérogation à l'article L. 145-38, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire.

8. D'une part, le propre d'une clause d'échelle mobile est de faire varier à la hausse et à la baisse, de sorte que la clause figurant au bail et écartant toute réciprocité de variation, si elle ne crée pas la distorsion prohibée par l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, fausse le jeu normal de l'indexation (Civ. 3e, 14 janvier 2016, pourvoi n° 14-24.681, Bull. 2016, III, n° 7).

9. D'autre part, la neutralisation des années de baisse de l'indice de référence a mathématiquement pour effet de modifier le délai d'atteinte du seuil de variation du quart, conditionnant la révision du loyer, tel qu'il résulterait de l'évolution réelle de l'indice.

10. La cour d'appel a relevé que la clause d'indexation excluait, dans son deuxième alinéa, toute réciprocité de la variation en prévoyant que l'indexation ne s'effectuerait que dans l'hypothèse d'une variation à la hausse de l'indice.

11. Il s'ensuit que cette stipulation, qui a pour effet de faire échec au mécanisme de révision légale prévu par l'article L. 145-39 du code de commerce, doit être réputée non écrite, de sorte que l'action intentée par la société HSBC France n'est enfermée dans aucun délai de prescription.

12. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux justement critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 30 JUIN 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : J 19-23.038. Arrêt n° 624 FP-B+C.

DEMANDEUR à la cassation : Société Reims Talleyrand

DÉFENDEUR à la cassation : Société Reims Talleyrand / Société HSBC Continental Europe

Président : M. Chauvin. Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan, SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

La société Reims Talleyrand, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 19-23.038 contre l'arrêt rendu le 9 juillet 2019 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant à la société HSBC Continental Europe, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée HSBC France, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. David, conseiller, les observations et les plaidoiries de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Reims Talleyrand, de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société HSBC Continental Europe, et l'avis de Mme Guilguet-Pauthe, auquel les parties, invitées à le faire, n'ont pas souhaité répliquer, après débats en l'audience publique du 22 juin 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, MM. Maunand, Echappé, conseillers doyens, M. Nivôse, Mmes Andrich, Farrenq-Nési, conseillers, Mme Georget, M. Béghin, conseillers référendaires, Mme Guilguet-Pauthe, avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 421-4-1, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et procédure :

1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 9 juillet 2019), la société Reims Talleyrand a donné à bail à la société HSBC France des locaux à usage commercial à compter du 1er mai 2009.

2. Le contrat comporte une clause d'indexation annuelle stipulant que l'indexation ne s'appliquera qu'en cas de variation de l'indice à la hausse.

3. Le 23 septembre 2016, la société HSBC France a assigné la société Reims Talleyrand aux fins de voir déclarer la clause d'indexation réputée non écrite et de la voir condamner à lui restituer la somme de 96.379,31 euros sur le fondement de la répétition de l'indu pour la période s'étendant du premier trimestre 2011 au deuxième trimestre 2016.

 

Examen des moyens :

Sur le premier moyen :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Enoncé du moyen :

4. La société Reims Talleyrand fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action engagée par la société HSBC France tendant à voir déclarer la clause d'indexation réputée non écrite, alors « que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'il en va ainsi de l'action tendant à voir réputée une clause non écrite, qui se prescrit par cinq ans à compter du jour de la conclusion du contrat ; qu'en jugeant imprescriptible une telle action, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil. »

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Réponse de la Cour :

5. L'article L. 145-15 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, qui a substitué à la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec aux dispositions des articles L. 145-37 à L. 145-41 du code de commerce leur caractère réputé non écrit, est applicable aux baux en cours lors de l'entrée en vigueur de cette loi (Civ. 3e, 19 novembre 2020, pourvoi n° 19-20.405, publié).

6. L'action tendant à voir réputer non écrite une clause du bail commercial n'est pas soumise à prescription (même arrêt).

7. Aux termes de l'article L. 145-39 du code de commerce, dans sa rédaction applicable, par dérogation à l'article L. 145-38, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire.

8. D'une part, le propre d'une clause d'échelle mobile est de faire varier à la hausse et à la baisse, de sorte que la clause figurant au bail et écartant toute réciprocité de variation, si elle ne crée pas la distorsion prohibée par l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, fausse le jeu normal de l'indexation (Civ. 3e, 14 janvier 2016, pourvoi n° 14-24.681, Bull. 2016, III, n° 7).

9. D'autre part, la neutralisation des années de baisse de l'indice de référence a mathématiquement pour effet de modifier le délai d'atteinte du seuil de variation du quart, conditionnant la révision du loyer, tel qu'il résulterait de l'évolution réelle de l'indice.

10. La cour d'appel a relevé que la clause d'indexation excluait, dans son deuxième alinéa, toute réciprocité de la variation en prévoyant que l'indexation ne s'effectuerait que dans l'hypothèse d'une variation à la hausse de l'indice.

11. Il s'ensuit que cette stipulation, qui a pour effet de faire échec au mécanisme de révision légale prévu par l'article L. 145-39 du code de commerce, doit être réputée non écrite, de sorte que l'action intentée par la société HSBC France n'est enfermée dans aucun délai de prescription.

12. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux justement critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié.

 

Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Enoncé du moyen :

13. La société Reims Talleyrand fait grief à l'arrêt de déclarer non écrite dans son ensemble la clause d'indexation intitulée « Article 6 : Indexation » contenue dans le bail et, en conséquence, de la condamner à restituer à la preneuse une somme au titre des loyers indûment versés du 23 septembre 2011 jusqu'au deuxième trimestre 2016, alors « que l'obligation est indivisible si elle a pour objet un fait ou une chose qui, dans l'exécution, n'est pas susceptible de division, soit matérielle, soit intellectuelle ; que la clause litigieuse, qui prévoit l'indexation du loyer et du dépôt de garantie chaque année à la date anniversaire de la prise d'effet du bail, suivant la variation de l'indice Insee du 3ème trimestre de chaque année, l'indice de base étant celui du 3ème trimestre 2008 et l'augmentation étant limitée à 3 % par an les trois premières années, peut être exécutée que la variation soit à la hausse ou à la baisse, et donc divisément de la stipulation selon laquelle l'indexation ne s'effectuera que dans l'hypothèse d'une variation à la hausse de l'indice ; qu'en affirmant cependant que la clause d'indexation est indivisible, sans caractériser cette indivisibilité par aucun motif, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1217 ancien du code civil, ensemble l'article L. 112-1 du code monétaire et financier. »

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Réponse de la Cour :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'article 1217 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

14. Aux termes de ce texte, l'obligation est divisible ou indivisible selon qu'elle a pour objet ou une chose qui dans sa livraison, ou un fait qui dans l'exécution, est ou n'est pas susceptible de division, soit matérielle, soit intellectuelle.

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

15. Pour réputer non écrite la clause en son entier, l'arrêt retient que seule la dernière phrase de l'alinéa 2 de l'article 6 du contrat de bail contrevient aux dispositions légales, que cependant l'alinéa 3 de la clause relative à la limitation de l'augmentation ne s'explique qu'au vu de l'absence de réciprocité de la variation, que, pour autant, il n'y a pas lieu de réputer non écrit également cet alinéa car la limitation qu'il prévoit n'est nullement prohibée et qu'il en résulte que la clause d'indexation est indivisible.

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

16. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'indivisibilité, alors que seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare non écrite dans son ensemble la clause d'indexation et condamne en conséquence la société Reims Talleyrand à payer à la société HSBC France la somme de 94.873,48 euros au titre des loyers indûment versés pour la période du 23 septembre 2011 au second trimestre 2016 outre intérêts au taux légal, l'arrêt rendu le 9 juillet 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé le trente juin deux mille vingt et un par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Reims Talleyrand

 

PREMIER MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir, par confirmation du jugement déféré, déclaré recevable l'action engagée par la société anonyme HSBC en ce qu'elle tend à voir déclarer la clause d'indexation réputée non écrite, d'avoir déclaré non écrite dans son ensemble la clause d'indexation intitulée « Article 6 : Indexation » contenue dans le bail du 23 février 2009 conclu entre la Sarl Reims et HSBC et d'avoir en conséquence condamné la Sarl Reims Talleyrand à payer à la SA HSBC France la somme de 94.873, 48 € au titre des loyers indûment versés pour la période allant du 23 novembre 2011 jusqu'au second trimestre 2016 avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, soit le 23 novembre 2016 pour les sommes indûment versées du 23 novembre 2011 au jour de l'assignation ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux motifs que l'action tendant à faire déclarer une clause réputée non écrite n'étant pas une action en nullité, elle n'est enfermée dans aucun délai de prescription, puisque la clause réputée non écrite est censée ne jamais avoir existé de sorte qu'elle ne peut faire courir aucun délai.

Contrairement à ce que soutient la société Reims Talleyrand, la sanction applicable à la clause d'indexation, qui exclut la réciprocité de la variation et stipule que le loyer ne peut être révisé qu'à la hausse est bien le réputé non écrit et non la nullité. Certes, dans son arrêt du 14 janvier 2016, la Cour de cassation énonce d'abord qu'une telle clause est nulle mais ensuite elle indique que la cour d'appel qui a réputé la clause d'indexation non écrite sur le fondement de l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier a légalement justifié sa décision. La Cour de cassation approuve ensuite la cour d'appel d'avoir jugé que la clause devait être, dans son entier, réputée non écrite. En outre, l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier prévoit expressément le réputé non écrit comme sanction.

Il en résulte que l'action intentée par la SA HSBC France tendant à voir la clause d'indexation déclarée non écrite sur le fondement de l'article L 112-1 du Code monétaire et financier n'est enfermée dans aucun délai de prescription. C'est donc à juste titre que le tribunal l'a déclarée recevable ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'il en va ainsi de l'action tendant à voir réputée une clause non écrite, qui se prescrit par cinq ans à compter du jour de la conclusion du contrat ; qu'en jugeant imprescriptible une telle action, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil.

 

SECOND MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir, par confirmation du jugement déféré, déclaré non écrite dans son ensemble la clause d'indexation intitulée « Article 6 : Indexation » contenue dans le bail du 23 février 2009 conclu entre la Sarl Reims et HSBC et d'avoir en conséquence condamné la Sarl Reims Talleyrand à payer à la SA HSBC France la somme de 94.873,48 € au titre des loyers indûment versés pour la période allant du 23 novembre 2011 jusqu'au second trimestre 2016 avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, soit le 23 novembre 2016 pour les sommes indûment versées du 23 novembre 2011 au jour de l'assignation ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux motifs propres qu'est réputée non écrite toute clause d'indexation d'un contrat de bail excluant la réciprocité de la variation (Code des assurances. Civ. 3ème, 14 janvier 2016) ; que l'article 6 « indexation » du contrat de bail stipule :

« Le loyer et le dépôt de garantie seront révisés de plein droit chaque année à la date anniversaire de la prise d'effet du bail suivant la variation de l'indice du coût de la construction publié trimestriellement par l'Insee, sans l'accomplissement d'aucune formalité judiciaire ou extrajudiciaire, et ce pour la première fois le 1er mai 2010.

L'indice de base retenu sera celui du 3ème trimestre 2008, soit 1594, l'indice de comparaison celui du 3ème trimestre correspondant de chacune des années suivantes. L'augmentation en résultera sera applicable dès le 1er mai de chaque année. Cette indexation ne s'effectuera que dans l'hypothèse d'une variation à la hausse de ce dernier indice.

Par dérogation à cet article, les parties conviennent que cette augmentation annuelle n'excédera pas 3 % par an, cette disposition ne s'appliquant que pour les trois premières années du bail. A compter de la 4ème année, l'indexation s'appliquera sans limite de plafond.

Si l'indice Insee cessait d'être publié, il serait remplacé à défaut d'un nouvel indice officiel par un indice équivalent, choisi par accord amiable entre les parties ou, à défaut, par voie d'expertise effectuée par ordonnance du président du tribunal de grande instance rendu sur requête de la partie la plus diligente.

Il est précisé que la présente clause constitue une indexation conventionnelle et ne se réfère pas à la révision triennale prévue par les articles L. 145-37 et L. 145-38 du code de commerce et par l'article 26 alinéas 2 et suivants du décret du 30 septembre 1953 et qui est de droit.

La présente clause d'indexation constitue une condition essentielle et déterminante sans laquelle le bailleur n'aurait pas contracté. En conséquence, sa non application partielle ou totale pourra autoriser le bailleur, et lui seul, à demander la résiliation du bail, sans indemnités quelconques au profit du preneur ».

Cette clause est contraire aux dispositions de l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier tel qu'interprété par la Cour de cassation puisqu'elle exclut, à la dernière phrase de son alinéa 2, toute réciprocité de la variation en stipulant que l'indexation ne s'effectuera que dans l'hypothèse d'une variation à la hausse de l'indice (arrêt, p. 5) (…)

Si la clause d'indexation illicite est indivisible, elle doit être réputée non écrite pour le tout. Le caractère divisible ou non de la clause relève de l'appréciation souveraine des juges du fond.

En l'espèce, seule la dernière phrase de l'alinéa 2 de l'article 6 du contrat de bail contrevient aux dispositions de l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier.

Cependant, l'alinéa 3 de la clause relative à la limitation de l'augmentation ne s'explique qu'au vu de l'absence de réciprocité de la variation.

Pour autant, il n'y a pas lieu de réputer non écrit également cet alinéa comme le demande la société Reims Talleyrand car la limitation qu'il prévoit n'est nullement prohibée.

Il en résulte que la clause d'indexation est indivisible, de sorte qu'elle doit être réputée non écrite pour la totalité ; (arrêt, p. 6)

Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges qu'il convient toutefois de considérer que la clause d'indexation telle que libellée forme un tout indivisible, l'indication que la première indexation interviendra le 1er mai 2010, et ensuite chaque année à la même date intervenant juste après que les parties aient prévu que le loyer sera modifié annuellement de plein droit à la date anniversaire de la prise d'effet du bail, soit le 1er mai de chaque année ; le bail contient d'ailleurs l'indication que c'est la variation constatée d'une année sur l'autre du même trimestre de référence (soit celui du troisième trimestre 2008) qui sera retenue pour le calcul des loyers ; les parties sont convenues ensuite que cette clause constituait une clause essentielle et déterminante de leur engagement, sans laquelle le bailleur n'aurait pas contracté, ce sans opérer de distinction entre les différentes dispositions. Il s'ensuit que c'est la clause d'indexation du bail initial dans son ensemble qui doit être réputée non écrite ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS D'UNE PART QU'est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive prévoyant la prise en compte dans l'entier déroulement du contrat d'une période de variation indiciaire supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision ; que seule la stipulation qui crée la distorsion prohibée est réputée non écrite ; qu'ayant constaté que seule la dernière phrase de l'alinéa 2 de l'article 6 du contrat de bail contrevenait aux dispositions de l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier, en stipulant que l'indexation ne s'effectuera que dans l'hypothèse d'une variation à la hausse de l'indice, la cour d'appel qui a néanmoins réputée non écrite la totalité de la clause d'indexation, a violé l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier ;

ALORS D'AUTRE PART QUE l'obligation est indivisible si elle a pour objet un fait ou une chose qui, dans l'exécution, n'est pas susceptible de division, soit matérielle, soit intellectuelle ; que la clause litigieuse, qui prévoit l'indexation du loyer et du dépôt de garantie chaque année à la date anniversaire de la prise d'effet du bail, suivant la variation de l'indice Insee du 3ème trimestre de chaque année, l'indice de base étant celui du 3ème trimestre 2008 et l'augmentation étant limitée à 3 % par an les trois premières années, peut être exécutée que la variation soit à la hausse ou à la baisse, et donc divisément de la stipulation selon laquelle l'indexation ne s'effectuera que dans l'hypothèse d'une variation à la hausse de l'indice ; qu'en affirmant cependant que la clause d'indexation est indivisible, sans caractériser cette indivisibilité par aucun motif, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1217 ancien du code civil, ensemble l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier ;

ALORS ENSUITE QUE le juge ne peut dénaturer les stipulations claires et précises des contrats ; que l'article 6 du bail commercial stipule, in fine, que « la présente clause d'indexation constitue une condition essentielle et déterminante sans laquelle le bailleur n'aurait pas contracté. En conséquence, sa non application partielle ou totale pourra autoriser le bailleur, et lui seul, à demander la résiliation du bail, sans indemnités quelconques au profit du preneur » ; qu'en énonçant, pour réputer non écrite la clause d'indexation dans son ensemble, que les parties sont convenues que cette clause constituait une clause essentielle et déterminante de leur engagement, cependant qu'il résulte de ses termes clairs et précis qu'elle ne l'était que de l'engagement du bailleur, lequel se réservait en outre le droit d'en accepter une application partielle, la cour d'appel a dénaturé l'article 6 du bail et violé l'article 1134 ancien du code civil ;

ALORS ENFIN QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence de motif ; qu'en réputant non écrite la clause d'indexation litigieuse pour la totalité, après avoir retenu qu'il n'y avait pas lieu de réputer non écrit l'alinéa 3 de cette clause, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.