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CA GRENOBLE (2e ch. civ.), 13 juillet 2021

Nature : Décision
Titre : CA GRENOBLE (2e ch. civ.), 13 juillet 2021
Pays : France
Juridiction : Grenoble (CA), 2e ch. civ.
Demande : 18/02859
Date : 13/07/2021
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 26/06/2018
Référence bibliographique : 5852 (domaine, consommateur donataire), 6384 (assurance habitation, indemnité, valeur à neuf et vétusté)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9031

CA GRENOBLE (2e ch. civ.), 13 juillet 2021 : RG n° 18/02859 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « En l'espèce, la donation de l'exploitation agricole a emporté transmission du contrat d'assurance. Si M. X. a pu rechercher, sur le fondement du contrat SILLONS, la garantie de la SA Groupama pour le sinistre du 19 septembre 2010, l'assureur est en droit de lui opposer les exclusions de garantie contractuellement prévues dans le contrat transféré. »

2/ « L'article L. 114-1 du code des assurances prévoit un délai de prescription de 2 ans à compter du jour du sinistre, sous réserve d'éventuelles causes d'interruption ou suspension.

La clause critiquée prévoit expressément que le paiement de l'indemnité est effectué en deux fois, soit 70 % de la valeur réelle dans le mois suivant l'accord amiable des parties et le solde sur production de mémoires ou factures, dans un délai de 2 ans (écrit en caractère gras) à partir de la date du sinistre.

Le point de départ du délai biennal figure expressément et en caractère apparent dans le contrat SILLONS, avec, au besoin, un schéma explicatif à la page suivante (Cf pages 28 et 29 des conditions générales). Cette clause est ainsi conforme aux dispositions d'ordre public.

La clause litigieuse ne peut davantage être considérée comme abusive, M. X. étant en capacité à tout moment d'interrompre la prescription biennale par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception relative au règlement de l'indemnité à l'assureur en application de l'article L. 114-2 du code des assurances.

De plus, la SA Groupama a versé à M. X. une indemnité de 54.700 euros HT le 9 février 2011, soit 5 mois après la réalisation du sinistre et un mois après l'acceptation de l'offre d'indemnisation du 12 janvier 2011.

Les moyens tirés de la non-validité de la clause litigieuse ne peuvent ainsi prospérer. »

3/ « Aux termes de l'article 2234 du code civil, la prescription ne court ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure. Néanmoins, cette règle ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, à la cessation de l'empêchement, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription.

En l'espèce, M. X. expose qu'il a été empêché d'agir et que le délai n'a pu courir à son encontre avant le 20 février 2012, date d'obtention de son permis de construire en application de l'article susvisé.

Il résulte toutefois des pièces du dossier que l'assuré a attendu le mois d'avril 2011 pour déposer sa 1re demande de permis de construire. Sa demande initiale ainsi que les suivantes ont été rejetées par l'administration pour dossier incomplet et le permis de construire a finalement été délivré le 20 février 2012, soit 7 mois avant l'expiration du délai de prescription.

Ces circonstances ne sont donc pas constitutives d'une impossibilité d'agir au sens de l'article susvisé, d'autant que M. X. disposait de la faculté d'adresser à l'assureur une demande relative au paiement de l'indemnité par lettre recommandée avec accusé de réception pour interrompre la prescription au fur et à mesure de l'exécution des travaux. Dans ces conditions, la demande de M. X. tendant à faire reporter le délai de prescription doit être rejetée. »

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 13 JUILLET 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/02859. N° Portalis DBVM-V-B7C-JSYA. Appel d'un jugement (R.G. n° 16/01025) rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE en date du 14 mai 2018, suivant déclaration d'appel du 26 juin 2018.

 

APPELANT :

M. X.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, [adresse], [...], représenté et plaidant par Maître Alain G., avocat au barreau de GRENOBLE

 

INTIMÉE :

Compagnie d'assurances GROUPAMA RHONE ALPES AUVERGNE

agissant par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège [...], [...], représentée par Maître Sylvain R. de la SELARL EUROPA AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE

 

COMPOSITION DE LA COUR :LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Emmanuèle Cardona, présidente, Mme Agnès Denjoy, conseillère, M. Laurent Grava, conseiller.

DÉBATS : A l'audience publique du 18 mai 2021, M. Laurent Grava, conseiller, qui a fait son rapport, assisté de Frédéric STICKER, greffier, a entendu seul les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile. Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte notarié du 19 mars 2009, M. R. X. a fait donation à son fils, M. X., de son exploitation agricole, assurée auprès de la SA Groupama Rhône-Alpes Auvergne, aux termes d'un contrat SILLONS.

M. X. était également assuré auprès du même assureur pour son activité et le contenu du bâtiment, selon une police d'assurance CONTOURS.

Le 19 septembre 2010, le bâtiment agricole a été détruit à la suite d'un incendie.

M. X. a été indemnisé pour le contenu du bâtiment, en exécution de son contrat d'assurance CONTOURS à hauteur de 28.844 euros HT.

M. X. a également accepté le 12 janvier 2011, en exécution de son contrat d'assurance SILLONS une indemnisation totale de 89.880 euros HT, comprenant une indemnité immédiate de 54.710 euros HT et une indemnité différée de 35.170 euros HT.

Par courrier du 8 décembre 2013, M. X. a adressé à la SA Groupama la facture de reconstruction du bâtiment agricole pour un montant de 55.850,59 euros et a sollicité le paiement de l'indemnité différée contractuellement prévue.

La société Groupama a refusé sa garantie au motif que les travaux n'avaient pas été réalisés dans les deux ans de la date de signature de la lettre d'acceptation d'indemnité du 12 janvier 2011.

La saisine du médiateur de la société Groupama n'a pas permis aux parties de transiger.

Par ordonnance de référé du 20 mai 2015, M. X. a été débouté de ses demandes indemnitaires au motif qu'elles se heurtaient à l'existence d'une contestation sérieuse.

Par acte du 26 février 2016, M. X. a fait assigner la SA Groupama Rhône-Alpes Auvergne devant le tribunal de grande instance de Grenoble au visa des articles 1165, 1134, 1147, 2333 et 2334 du code civil aux fins de la voir condamner au paiement des sommes suivantes :

- 35.170 euros HT au titre de l'indemnité différée outre intérêts au taux légal à compter du 12 décembre 2013 avec capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1154 du code civil,

- 5.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au entiers dépens dont distraction au profit de l'avocat de la cause.

Par jugement contradictoire en date du 14 mai 2018, le tribunal de grande instance de Grenoble a :

- débouté M. X. de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté la SA Groupama Rhône-Alpes Auvergne de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. X. aux dépens.

M. X. a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 26 juin 2018.

 

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions récapitulatives n° 3 notifiées par voie électronique le 15 janvier 2021, M. X. demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris ;

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 4 avril 1995 publié au bulletin, jurisprudence constante sur la suspension de la prescription jusqu'à l'émission des factures en cas d'indemnité différée ;

Vu les dispositions de l'article L. 114-1 du code des assurances, les dispositions de l'article 2251 devenu article 2234 du code civil ;

Vu le caractère contractuel de la lettre d'indemnisation ;

Vu dès lors la suspension de l'action jusqu'à la date de réception définitive des factures qui seule pouvait faire à nouveau courir le délai de deux ans ;

Vu que M. X. a bien adressé dans le délai de deux ans l'intégralité des factures lorsqu'elles ont été émises ;

Vu la déclaration de sinistre en protection juridique à la SA Groupama sur l'inexécution de travaux de l'incendie qui a également suspendu le délai de prescription ;

Vu que la SA Groupama a renoncé à la prescription en ne la reprenant pas dans la lettre de règlement de l'indemnité article L. 113-17 du code des assurances ;

Vu dès lors la totale mauvaise foi de la SA Groupama qui a engagé sa responsabilité civile contractuelle et extra-contractuelle ;

Vu les dispositions des articles ex 1142 et 1147, 1240 ensemble du code civil ;

Vu les articles L. 114-2 et L. 114-3, R. 112-1 et suivants du code des assurances et L. 132-1 du code de la consommation ;

- juger nulle et inopposable et ambiguë la prétendue clause des conditions générales et en écarter l'application au visa ensemble de l'article R. 112-1 et L. 114-1 du code des assurances ;

Vu le non-respect par la clause des dispositions de l'article L. 113-1 du code des assurances, l'absence de formalisme ;

Vu le non-respect pour la SA Groupama des dispositions de l'article R. 112-1 du code des assurances ;

Vu la jurisprudence Cassation 2e Chambre civile du 18 avril 2019 ;

Vu dès lors l'inopposabilité du prétendu délai biennal alors que les conditions générales n'ont jamais été remises à M. X., qu'au surplus noyées à la 29e page et sans qu'il n'y ait un quelconque caractère apparent, qu'il n'y ait aucune sanction contractuellement prévue dans ladite clause, il ne peut y avoir en l'espèce application de la prescription ;

Vu l'absence de caractères apparents ;

Vu que le sinistre devait être garanti, que la lettre d'acceptation du sinistre ne reprenait aucunement un quelconque délai pour demander le solde de l'indemnité différée jusqu'à la fin des travaux ;

Vu en conséquence la mauvaise foi de la SA Groupama ;

Vu l'absence de caractères apparents de la « clause », vu la violation de l'article L. 112-4 du code des assurances ;

- réformer dans toutes ses dispositions le jugement entrepris car M. X. ne pouvait pas adresser de factures de règlement avant de les avoir eues lui-même ;

Vu notamment les dispositions de l'article L. 114-1 du code des assurances qui disposent : « 2e qu'en cas de sinistre, les intéressés ne peuvent agir que du jour où ils ont eu connaissance du dommages », or l'étendue du dommage était en attente pour les facturations, dès lors le délai ne courait pas puisque l'assureur reconnaît lui-même avoir été parfaitement informé des difficultés de reconstruction et au surplus des difficultés avec les entrepreneurs dont la SA Groupama était elle-même chargée dans le cadre de la protection juridique, ce qui a interrompu l'éventuelle prescription ;

- qu'ainsi et en l'état de la mauvaise foi caractérisée de la SA Groupama, si par extraordinaire les demandes sur le fondement des garanties d'assurances n'étaient pas admises, les demandes de condamnation au paiement de dommages-intérêts contractuels au visa de l'article 1147 du code civil sont particulièrement bien fondées et maintenue à hauteur de 5 000 euros pour son préjudice moral et à hauteur de 35.170 euros en raison du préjudice subi du défaut d'information de l'existence du délai de prescription biennal ;

Vu le libellé totalement ambigu de la « clause » qui doit s'interpréter au bénéfice de M. X., simple maraîcher ;

Au surplus, la lettre d'indemnisation n'a jamais contenu ni rappelé les termes d'une prescription, qu'elle était constitutive et une transaction ;

A titre principal,

- recevoir l'appel à l'encontre du jugement du 14 mai 2018 et le dire bien fondé ;

Vu l'acceptation de l'indemnité et son caractère différé pour 35.170 HT ;

Vu l'article 1165 du code civil ;

Vu le contrat d'assurance « CONTOURS » souscrit par M. X. ;

Vu le contrat d'assurance « SILLONS » dont M. X. est bénéficiaire ;

Vu la lettre d'acceptation d'indemnité signée par M. X. le 12 janvier 2011 valant contrat ;

Vu les articles 1134 et 1147 du code civil ;

Vu le défaut d'information de la SA Groupama sur le délai de deux ans imposé pour la réalisation des travaux de reconstruction, l'obtention des factures et leur envoi ;

Vu le refus de la SA Groupama de verser l'indemnité différée contractuellement prévue ce qui constitue une inexécution de ses engagements contractuels ;

Vu la responsabilité contractuelle de la société Groupama ;

Vu les articles 2333 et 2334 du code civil ;

Vu la lettre d'acceptation d'indemnité qui précise que l'indemnité différée est due après travaux sur justificatifs, sans autres précisions ni indications de délais, en contradiction avec les conditions générales prévoyant le versement au fur et à mesure de l'exécution des travaux ;

Vu l'article 2221 du code civil sur l'abandon exprès ou tacite des délais de prescription et les modifications unilatérales de la société d'assurance sur ce délai et son point de départ ;

Vu l'article R.132-1 du code de la consommation ;

Vu les articles L114-1 et suivants du code des assurances ;

Vu les articles 1303 et suivants du code civil sur l'enrichissement sans cause ;

- dire et juger bien fondé et recevable l'appel de M. X. à l'encontre du jugement déféré ;

- infirmer et réformer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;

Par conséquent,

- dire et juger que la clause imposant un délai de deux ans pour présenter les factures de reconstruction à compter du sinistre aux fins de percevoir l'indemnité différée est abusive et que son libellé n'est pas suffisant pour opposer une prescription qui n'y était pas explicitée ;

- la réputer non écrite ;

Vu le délai biennal légal non applicable en l'espèce ;

- dire et juger que la clause renfermant le délai de présentation des factures après travaux dans les deux ans du sinistre pour obtenir paiement de l'indemnité après accord sur ledit montant est nulle comme illégale en violation de l'article L. 114-1 du code des assurances ;

- dire et juger qu'il s'agit d'un enrichissement sans cause de l'assureur ;

Vu les incohérences du contrat sur ce délai, les arrangements internes de l'assureur sur ledit délai, l'absence de présentation de manière très apparente de cette déchéance du droit à garantie faute de présentation d'un document dans un délai déterminé, ensemble les articles L. 112-4 (inopposabilité de la déchéance) et L. 113-1 du code des assurances (nullité pour illicéité de la déchéance) ;

- dire et juger que le délai de deux ans invoqué par la SA Groupama pour refuser le paiement de l'indemnité différée est inopposable à M. X., à tout le moins inapplicable, et en tout cas nul ;

- dire et juger que la lettre d'acceptation d'indemnité signée le 12 janvier 2011 par M. X. vaut contrat, transaction et engagement de payer à terme de la SA Groupama sans limitation de durée ;

- retenir l'interversion de prescription en faveur de M. X. ;

- dire et juger que sa demande de paiement est intervenue dans le délai, dès qu'il a pu avoir les factures de travaux qui avaient été retardées par les difficultés justifiées d'urbanisme et des litiges avec les entrepreneurs ;

- et en tout cas la suspension de la prescription vu l'impossibilité d'agir de M. X. ;

Par conséquent,

- condamner la société Groupama au paiement de l'indemnité différée de 35.170 € HT outre intérêts au taux légal à compter de la demande de paiement du 18/12/2013 et dire et juger que les intérêts seront capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- retenir la responsabilité contractuelle de la SA Groupama pour inexécution de ses obligations contractuelles en refusant le paiement de l'indemnité différée ;

- condamner la société Groupama au paiement de la somme de 45.000 € de dommages-intérêts à M. X. ;

A titre subsidiaire,

Vu les articles 2233 et 2234 du code civil ;

Vu l'arrêt de la cour de cassation publié au bulletin du 04/04/1995 rappelant que le paiement différé de l'indemnité soumise à condition fait courir le délai de prescription à compter de la réalisation des conditions ;

Vu encore l'arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 12 janvier 2012 retardant le point de départ du délai de prescription de 2 ans en cas d'impossibilité d'agir ;

Vu l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme imposant un permis de construire ;

Vu les différents refus de permis de construire opposés à M. X. ;

Vu les difficultés dans l'exécution des travaux engendrant des retards dans l'avancement des travaux, ce qui avait été justifié à la SA Groupama ;

Vu la facture adressée le 18 décembre 2013 à la SA Groupama par M. X. ;

- constater que M. X. était dans l'impossibilité de fournir la facture avant la fin de ses travaux à la SA Groupama dans le délai de deux ans à compter du 12 janvier 2011 suite à des contraintes administratives et des retards dans l'exécution de ses travaux qui ne lui sont pas imputables ;

- dire et juger que la prescription n'a commencé à courir qu'à compter de la fin des travaux et l'envoi des factures par les entrepreneurs, soit fin 2013, ou au plus tôt à compter de la date d'obtention du permis de construire en février 2012 ;

En conséquence,

- dire et juger que M. X. a transmis les factures le 18 décembre 2013 dans le délai de deux ans ;

- condamner la société Groupama au paiement de l'indemnité différée de 35.170 € HT outre intérêts au taux légal à compter de la demande de paiement du 18/12/2013 et dire et juger que les intérêts seront capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

- retenir la responsabilité contractuelle de la SA Groupama pour inexécution de ses obligations contractuelles en refusant le paiement de l'indemnité différée ;

- condamner la société Groupama au paiement de la somme de 45.000 € de dommages-intérêts ;

Subsidiairement,

- condamner Groupama au paiement de la somme de 35.170 € en réparation du préjudice subi du fait du défaut d'information et des manquements dans l'exécution de bonne foi du contrat dont l'assureur modifie à sa guise le contenu pour ensuite opposer des délais à son assuré ;

En tout état de cause,

- condamner Groupama au paiement de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction sera prononcée au profit de maître G. sur son affirmation de droit conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Il expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

- il rappelle la chronologie des événements ;

- le délai de deux ans à compter de la lettre d'acceptation d'indemnité n'a nullement été porté à sa connaissance et il ne lui est pas opposable ;

- ce délai de deux ans n'était présent que dans les conditions générales du contrat d'assurance « SILLONS » et celles-ci n'ont pas été remises à M. X. lors du transfert de contrat à son profit ;

- il lui était impossible de respecter le délai de 2 ans ;

- le délai de deux ans est reporté quand l'assuré s'est trouvé dans l'impossibilité de respecter ce délai suite à des contraintes administratives ;

- en l'espèce, la loi impose l'obtention d'un permis de construire pour une reconstruction d'une exploitation agricole ;

- ce n'est que la 5e demande de permis de construire qui a été admise en date du 20 février 2012 par arrêté du maire n° 2012-22-037 après un délai d'instruction ;

- ce mécanisme biennal génère un enrichissement sans cause de l'assureur ;

- le véritable point de départ d'une éventuelle prescription sur la base du seul délai biennal de la loi, article L. 114-1 du code des assurances, est le 26 novembre 2013, date à laquelle la facture à l'achèvement des travaux a été reçue ;

- la clause présente un caractère abusif en ce qu'elle prévoit le paiement d'une indemnité différée dans les deux ans du sinistre, peu important la date de paiement de l'indemnité immédiate ou de l'accord amiable ou de la décision judiciaire la condamnant à prendre en charge le sinistre ;

- une clause abusive opposée à un consommateur par un professionnel est réputée non écrite par application de l'article R. 132-1 du code de la consommation ;

- il sollicite donc le versement de l'indemnité différée contractuellement prévue, soit la somme de 35.170 euros HT, ainsi que les intérêts au taux légal à compter de sa demande du 18 décembre 2013, outre capitalisation ;

- subsidiairement, l'assureur a manqué à son devoir d'information.

[*]

Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 5 janvier 2021, la SA Groupama Rhône-Alpes Auvergne demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté Groupama de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dire et juger que les conditions générales du contrat « SILLONS » sont parfaitement opposables à M. X. ;

- dire et juger encore qu'à la date du 18 décembre 2013, le délai pour solliciter l'indemnité différée était expiré depuis le 12 janvier 2013 ;

- dire et juger par conséquent que les réclamations formulées par M. X. ne sont nullement fondées ;

- rejeter les réclamations formulées par M. X. dans leur intégralité ;

- faire droit à l'appel incident de Groupama ;

En conséquence,

- condamner M. X. à verser à Groupama la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en première instance, et aux entiers dépens de première instance ;

En cause d'appel,

- condamner M. X. à verser à Groupama la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

Elle expose les principaux éléments suivants au soutien de ses écritures :

- la clause contractuelle est opposable en raison du transfert du contrat ;

- l'article L. 121-10 du code des assurances doit s'appliquer ;

- l'assureur peut opposer toutes les exceptions qu'il aurait pu opposer au précédent assuré ;

- le délai biennal imparti à l'assuré pour produire les factures expirait le 12 janvier 2013 ;

- aucune transaction n'est intervenue entre les parties ;

- la lettre d'acceptation d'indemnité n'est pas un document contractuel, ni un protocole, ni un accord amiable ;

- M. X. a attendu près de 7 mois après l'incendie pour déposer sa première demande de permis de construire ;

- en l'espèce, l'indemnité immédiate a été versée dès le 9 février 2011, de sorte qu'il restait à l'assuré près de 23 mois pour respecter le délai contractuel prévu (jusqu'au 12 janvier 2013) ;

- la clause obligeant l'assuré, pour prétendre au paiement de l'indemnité différée, à justifier de la reconstruction du bâtiment sinistré, en produisant, dans un certain délai, des factures attestant la réalisation des travaux, n'est pas une clause de déchéance, mais une clause fixant l'étendue de la garantie de l'assureur, en ce qu'elle subordonne la garantie totale à la reconstruction de l'immeuble dans le délai prévu ;

- les dispositions de l'article L. 113-11 du code des assurances ne sont donc pas applicables, en l'espèce à la clause litigieuse, laquelle est ainsi valable ;

- M. X. aurait pu adresser un courrier recommandé à son assureur, lui réclamant le paiement du solde de l'indemnité prévue par l'assureur, pour interrompre la prescription biennale, peu importe que l'appelant puisse fournir une facture ou pas ;

- le délai biennal court à compter du sinistre et non à compter de la date d'achèvement des travaux, comme le soutient M. X.

[*]

La clôture de l'instruction est intervenue le 03 mars 2021.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'opposabilité de la clause litigieuse :

En l'espèce, la donation de l'exploitation agricole a emporté transmission du contrat d'assurance.

Si M. X. a pu rechercher, sur le fondement du contrat SILLONS, la garantie de la SA Groupama pour le sinistre du 19 septembre 2010, l'assureur est en droit de lui opposer les exclusions de garantie contractuellement prévues dans le contrat transféré.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

 

Sur la validité de la clause litigieuse :

L'article L. 114-1 du code des assurances prévoit un délai de prescription de 2 ans à compter du jour du sinistre, sous réserve d'éventuelles causes d'interruption ou suspension.

La clause critiquée prévoit expressément que le paiement de l'indemnité est effectué en deux fois, soit 70 % de la valeur réelle dans le mois suivant l'accord amiable des parties et le solde sur production de mémoires ou factures, dans un délai de 2 ans (écrit en caractère gras) à partir de la date du sinistre.

Le point de départ du délai biennal figure expressément et en caractère apparent dans le contrat SILLONS, avec, au besoin, un schéma explicatif à la page suivante (Cf pages 28 et 29 des conditions générales).

Cette clause est ainsi conforme aux dispositions d'ordre public.

La clause litigieuse ne peut davantage être considérée comme abusive, M. X. étant en capacité à tout moment d'interrompre la prescription biennale par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception relative au règlement de l'indemnité à l'assureur en application de l'article L. 114-2 du code des assurances.

De plus, la SA Groupama a versé à M. X. une indemnité de 54.700 euros HT le 9 février 2011, soit 5 mois après la réalisation du sinistre et un mois après l'acceptation de l'offre d'indemnisation du 12 janvier 2011.

Les moyens tirés de la non-validité de la clause litigieuse ne peuvent ainsi prospérer.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

 

Sur l'impossibilité d'agir et le point de départ du délai biennal :

Aux termes de l'article 2234 du code civil, la prescription ne court ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure.

Néanmoins, cette règle ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, à la cessation de l'empêchement, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription.

En l'espèce, M. X. expose qu'il a été empêché d'agir et que le délai n'a pu courir à son encontre avant le 20 février 2012, date d'obtention de son permis de construire en application de l'article susvisé.

Il résulte toutefois des pièces du dossier que l'assuré a attendu le mois d'avril 2011 pour déposer sa 1re demande de permis de construire.

Sa demande initiale ainsi que les suivantes ont été rejetées par l'administration pour dossier incomplet et le permis de construire a finalement été délivré le 20 février 2012, soit 7 mois avant l'expiration du délai de prescription.

Ces circonstances ne sont donc pas constitutives d'une impossibilité d'agir au sens de l'article susvisé, d'autant que M. X. disposait de la faculté d'adresser à l'assureur une demande relative au paiement de l'indemnité par lettre recommandée avec accusé de réception pour interrompre la prescription au fur et à mesure de l'exécution des travaux.

Dans ces conditions, la demande de M. X. tendant à faire reporter le délai de prescription doit être rejetée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

 

Sur la responsabilité contractuelle de la SA Groupama :

M. X. soutient que l'assureur a manqué à son obligation d'information en ne mentionnant pas dans la lettre d'acceptation de l'offre le délai de prescription et en modifiant unilatéralement le point de départ du délai biennal et les conditions du versement de l'indemnité différé.

Il convient de rappeler toutefois que la lettre d'acceptation d'indemnité n'a pas vocation à modifier le point de départ du délai biennal, lequel figure expressément et en caractère apparent dans le contrat SILLONS (Cf page 28 des conditions générales).

Par ailleurs, il est établi en droit que la clause obligeant l'assuré, pour prétendre au paiement de l'indemnité différé, à justifier de la reconstruction du bâtiment sinistré en produisant, dans un certain délai, des factures attestant de la réalisation des travaux, n'est pas une clause de déchéance mais une clause fixant l'étendue de la garantie de l'assureur.

En conséquence, les exigences de forme et de fond nécessaires à la validité des clauses d'exclusion de garantie ne s'appliquent pas à la détermination du risque garanti, librement fixé par les parties.

Enfin, M. X. ne peut reprocher à l'assureur d'avoir accepté de retenir comme point de départ de la prescription la date de signature de la lettre d`acceptation, dès lors que cette modification lui est plus favorable.

Dans ces conditions, faute de justifier d'une quelconque faute à l'encontre de l'assureur, M. X. sera débouté de ses demandes de dommages-intérêts.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

 

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

M. X., dont l'appel est rejeté, supportera les dépens d'appel avec distraction, ceux de première instance étant confirmés.

Pour la même raison, il ne sera pas fait droit à sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais engagés pour la défense de ses intérêts. Aucune condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ne sera prononcée à son profit en cause d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. X. aux dépens, avec application, au profit des avocats qui en ont fait la demande des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière placée, Gaëlle Souche, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE,                            LA PRÉSIDENTE,