CA GRENOBLE (ch. com.), 14 octobre 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 9167
CA GRENOBLE (ch. com.), 14 octobre 2021 : RG n° 20/00748
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Le contrat de location a précisé, en sa première page, que si c'est l'appelante qui a loué le véhicule, il a été mentionné comme conducteur n°1 monsieur X., qui a signé le contrat. La case concernant un conducteur n° 2 n'a pas été remplie. Ces deux cases figurent de façon très apparente au recto du contrat, et ne pouvaient échapper à l'attention de son signataire.
L'article 2 des conditions générales de location a stipulé que le locataire, ainsi que les conducteurs désignés au recto du contrat, sont tenus de présenter notamment un permis de conduire en cours de validité, que l'âge minimum requis pour conduire le véhicule est fixé à 20 ans révolus, et que le conducteur doit avoir au moins deux ans de permis. L'article 7 a prévu logiquement qu'au titre de l'assurance, seuls les conducteurs désignés au recto du contrat sont couverts, et qu'elle est exclue si les conditions prévues à l'article 2 ne sont pas remplies.
Ces clauses ont été rédigées en caractères très apparents, dans des paragraphes séparés et identifiés en corps gras. Elles sont conformes au dernier alinéa de l'article L. 112-4 du code des assurances. Monsieur X. représentant l'appelante a apposé sa signature tant au titre des conditions spéciales de location au recto, que sur la page concernant les conditions générales de location. Il en a eu ainsi parfaitement connaissance.
Aucun élément ne permet de retenir que l'intimée devait spécialement attirer l'attention du locataire sur les restrictions apportées concernant les qualités de la personne devant conduire le véhicule, alors qu'il ne ressort d'aucune pièce que l'appelante ait signalé que le véhicule devait être conduit par plusieurs personnes placées sous sa responsabilité, et non par la seule personne désignée dans le contrat, ce qu'elle aurait dû faire s'il s'agissait d'un véhicule devant être utilisé par ses salariés afin qu'il soit tenu compte de cet élément dans le cadre de la conclusion du contrat, d'autant que la mention relative aux conducteurs pouvant conduire le véhicule est très apparente au recto du contrat. Le fait que le contrat de location soit conclu par une société commerciale n'implique pas nécessairement qu'il soit prévu que tous ses salariés soient amenés à conduire le véhicule loué. Dans cette hypothèse, il appartient alors au locataire d'attirer l'attention du bailleur sur ce point afin qu'il puisse apprécier l'existence d'un risque supplémentaire, sauf au locataire à ne pas exécuter alors le contrat de bonne foi.
Il n'est pas plus justifié d'un caractère déséquilibré des conditions générales de vente, puisque l'intimée n'a pas ainsi recherché à obtenir un avantage significatif au détriment du locataire, lequel n'a pas signalé les conditions réelles d'utilisation du véhicule lors de la conclusion du contrat. Les restrictions apportées concernant les qualités requises chez le conducteur, outre sa désignation, sont parfaitement usuelles dans les contrats d'assurances et de location de véhicules.
En conséquence, ces conditions générales ne sont ni illicites, ni déséquilibrées au détriment de l'appelante, et lui sont parfaitement opposables. »
2/ « Cependant, en raison du fait qu'il est acquis que le sinistre est imputable au locataire et que l'assureur du véhicule était fondé à refuser sa garantie en raison de l'âge de la conductrice et de l'absence ainsi de possession d'un permis de conduire depuis au moins deux ans (madame X. étant âgée de moins de 20 ans lors de l'accident), ce moyen est sans effet sur l'obligation de l'appelante de prendre à sa charge les conséquences du sinistre. »
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/00748.- N° Portalis DBVM-V-B7E-KLMM. Appel d'une décision (N° RG 2019J00036) rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE en date du 17 janvier 2020 suivant déclaration d'appel du 13 février 2020.
APPELANTE :
SAS CONNECT & REL
SAS immatriculée au RCS de Grenoble sous XXX, prise en la personne de Monsieur X., son représentant légal [...], [...], représentée et plaidant par Maître Régine P. de la SCP CONSOM'ACTES, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMÉE :
SASU ACTION exerçant sous l'enseigne CAR'GO,
SASU immatriculée au RCS sous le numéro YYY, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [...], [...], représentée par Maître Bernard B., avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et par Maître Marie-Josèphe L., avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente de Chambre, Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseillère, M. Lionel BRUNO, Conseiller,
DÉBATS : A l'audience publique du 2 septembre 2021, M. Lionel BRUNO, Conseiller, qui a fait rapport assisté de Alice RICHET, Greffière, a entendu les avocats en leurs conclusions et Me P. en sa plaidoirie, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile. Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
Le 23 septembre 2016, la société Connect & Rel a loué, pour une courte durée, un véhicule Renault Clio à la société Action, exerçant sous l'enseigne Car'Go. Elle a restitué ce véhicule accidenté le 15 février 2017, et des réparations ont été réalisées pour 8.946,20 euros, que la société Connect & Rel a refusé de régler.
Par ordonnance du 5 décembre 2018, il a été fait injonction à la société Connect & Rel de payer la somme de 8.946,20 euros en principal, celle de 51,94 euros au titre des intérêts contractuels, celle de 40 euros à titre d'indemnité de recouvrement, outre les frais de greffe.
Le 21 janvier 2019, la société Connect & Rel a formé opposition à cette ordonnance.
Par jugement du 17 janvier 2020, le tribunal de commerce de Grenoble a ;
- déclaré cette opposition recevable, mais mal fondée ;
- dit que la société Connect & Rel n'a pas respecté ses obligations contractuelles ;
- condamné cette société à payer à la société Action, exerçant sous l'enseigne Car'Go, la somme de 8.946,20 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 2018 et 40 euros au titre de l'indemnité de recouvrement prévue par l'article L. 441-6 du code de commerce ;
- ordonné la capitalisation des intérêts, par année entière, à chaque anniversaire du 19 septembre 2018 ;
- débouté la société Action de sa demande d'exécution provisoire ;
- condamné la société Connect & Rel à payer à la société Action la somme de 1.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- condamné la société Connect & Rel aux dépens.
La société Connect & Rel a interjeté appel de cette décision le 13 février 2020, sauf en ce qu'elle a débouté la société Action de la demande d'exécution provisoire.
L'instruction de cette procédure a été clôturée le 24 juin 2021.
Prétentions et moyens de la société Connect & Rel :
Selon ses conclusions n° 2 remises le 15 juin 2021, elle demande, au visa des articles 1103, 1104, 1112, 1171 et 1231-1 du code civil, L. 112-4 du code des assurances, L. 442-6-I-2° du code de commerce :
- de déclarer son appel recevable et bien-fondé ;
- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit non fondée l'opposition à l'ordonnance portant injonction de payer formée par la concluante, dit que la concluante n'a pas respecté ses obligations contractuelles, condamné la concluante à payer à l'intimée la somme de 8.946,20 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 31 octobre 2018, et 40 euros au titre de l'indemnité de recouvrement prévue à l'article L. 441-6 du code de commerce, ordonné la capitalisation des intérêts, par année entière, à chaque anniversaire du 19 septembre 2018, date de l'exploit introductif d'instance, condamné la concluante à payer à l'intimée une somme de 1.000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, débouté la concluante du surplus de ses demandes, condamné la concluante aux dépens ;
- statuant à nouveau, de déclarer bien fondée son opposition à l'ordonnance portant injonction de payer ;
- de juger que l'intimée est mal fondée à opposer la clause sur les conditions à remplir pour louer ;
- de la débouter de l'intégralité de ses demandes en paiement des sommes au titre de la remise en état du véhicule, compte tenu de la cause exclusive du sinistre imputable à l'usure des freins, résultant de son manquement à son obligation de délivrer un véhicule en bon état général et d'entretien et faute de justificatifs de l'éventuel refus d'indemnisation par l'assurance ;
- en tout état de cause, de dire que la clause de l'article 7-3 relative à l'exclusion de garantie est illicite faute d'être mentionnée en caractères très apparents, et subsidiairement déséquilibrée, et donc non écrite, et par voie de conséquence inopposable à la concluante ;
- de débouter également l'intimée de l'ensemble de ses demandes annexes ;
- de condamner l'intimée à lui payer une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, pour les procédures de première instance d'appel, d'un montant de 4.000 euros ;
- de condamner l'intimée aux entiers dépens.
Elle expose :
- que le 10 février 2017, le véhicule a été impliqué dans un accident de la circulation provoqué par un dysfonctionnement des freins, de sorte qu'il a été restitué, de manière prématurée, le 15 février 2017 ; que le 6 mars 2017, l'intimée, arguant d'un usage non conforme du véhicule et un non-respect des conditions générales de location du fait que le conducteur n'était âgé que de 19 ans, et n'avait que six mois d'ancienneté sur son permis de conduire, a sollicité le paiement des frais de remise en état du véhicule pour un montant total de 8.943,20 euros ; que trois devis de réparation ont été joints à ce courrier, pour des montants respectifs de 6.249,67 euros pour la remise en état du bloc avant, 1.762,64 euros pour les dégâts ARD et 933,89 euros pour les dégâts ARG ;
- que si pour condamner la concluante à payer la somme sollicitée par l'intimée au titre des frais de remise en état du véhicule, le tribunal a retenu que le contrat fait loi des parties et que la concluante n'aurait pas respecté les termes du contrat, notamment de l'article 2 prévoyant un âge minimum requis pour conduire le véhicule, cet article, visant « Les conditions à remplir pour louer » et stipulant que le locataire, ainsi que les conducteurs désignés au recto du contrat, sont tenus de présenter au loueur un permis de conduire en cours de validité sur le territoire où ils circulent, et que l'âge minimum requis pour conduire un véhicule est fixé à 20 ans révolus et que le conducteur doit avoir au moins 2 ans de permis, cette clause a vocation à s'appliquer de manière générale à un particulier, alors qu'en l'espèce, le véhicule a été loué afin d'être conduit par l'ensemble de ses salariés, ce que l'intimée n'ignorait pas, car ce n'était pas le premier contrat de location souscrit par la concluante ; que pour le moins, à défaut de précision au recto de l'ensemble des salariés susceptibles de conduire le véhicule, l'intimée aurait dû attirer son attention sur le fait que le véhicule ne pouvait être conduit que par ses salariés âgés de plus de 20 ans et ayant au moins 2 ans de permis ; qu'il en ressort une inopposabilité de cette clause et en tout état de cause, un manquement de l'intimée à son obligation d'exécution du contrat de bonne foi au sens des articles 1104 et 1112 du code civil ;
- que l'inopposabilité de la clause, et particulièrement la mention relative à la sanction associée à cette obligation telle que prévue à l'article 7-3, prévoyant une exclusion de garantie des dommages « causés lorsque le véhicule est conduit par des personnes ne remplissant pas les conditions visées à l'article 2 », se justifie également au regard de l'article L. 112-4 du code des assurances, faute d'être de caractères très apparents, et subsidiairement de l'article 1171 du code civil, compte tenu de son caractère déséquilibré ; qu'elle est ainsi injustifiée en ce sens qu'elle prévoit une exclusion de garantie des dommages quelle qu'en soit la cause, et donc même lorsque celle-ci résulte, comme en l'espèce, d'une défaillance mécanique ; qu'elle n'est pas réciproque en ce sens qu'elle impose une sanction au locataire qui ne respecte pas ses obligations alors que le loueur ne respecte pas les siennes, sans prévoir de sanction ;
- que l'accident n'a aucun rapport avec l'âge du conducteur, ni avec son expérience dans la conduite, puisqu'il résulte de l'usure des freins avant, alors qu'il appartient au loueur de remettre au locataire un véhicule en bon état de marche et d'entretien, ce qui ne semble pas être le cas, et en tout cas n'est pas justifié ; qu'il y a eu une impossibilité de freiner au feu rouge, de sorte que le véhicule a percuté l'arrière du véhicule qui le précédait ; que cet état d'usure a été relaté par le concessionnaire Renault Auto Dauphiné ainsi que par le coordinateur technique ; que cela ne signifie pas que le conducteur aurait continué de rouler en dépit du témoin allumé, puisqu'il n'y avait aucun témoin allumé ; que l'intimée n'a pas justifié de l'entretien de ce véhicule ; que ce problème a été signalé le 9 février 2017, tandis que l'accident s'est produit le 10 février 2017, soit précisément le jour convenu pour que la concluante ramène le véhicule à l'agence pour qu'il soit examiné par son mécanicien ; que si à cette date, le véhicule n'avait pas un an et n'avait pas atteint les 30.000 km, n'en ayant parcouru au total que 28.222 km, les prescriptions du constructeur prévoient le changement des plaquettes tous les 30.000 km ou tous les ans ; que le tribunal n'a pu retenir une faute de l'usager du véhicule du seul fait du kilométrage parcouru, de 10.500 Km en 5 mois, dès lors que le nombre de 30.000 km préconisé par le constructeur n'avait pas été atteint ;
- que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la seule existence d'un dommage au véhicule est insuffisante pour faire supporter au locataire le coût de la remise en état, dès lors que le véhicule est assuré ; qu'il n'est pas justifié à ce titre ni de la déclaration de sinistre faite par le loueur, ni de l'éventuel refus de prise en charge par l'assureur ; que le tribunal ne pouvait se contenter de la seule affirmation par le loueur qu'il aurait procédé à la déclaration de sinistre et qu'un refus de prise en charge lui aurait été opposé, sans pièces justificatives.
Prétentions et moyens de la société Action :
Selon ses conclusions n° 2 remises le 22 juin 2021, elle demande :
- de débouter l'appelante de l'ensemble de ses prétentions ;
- de confirmer en conséquence le jugement rendu par le tribunal de commerce en ce qu'il a condamné l'appelante à lui payer la somme de 8.946,20 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 31 octobre 2018, et 40 euros au titre de l'indemnité de recouvrement prévue à l'article L. 441-6 du code de commerce ;
- d'ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil ;
- de condamner l'appelante à lui payer la somme de 1.700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Elle soutient :
- que l'article 2 des conditions générales concernant l'âge minimum requis pour conduire un véhicule et l'ancienneté de l'obtention du permis de conduire opère une distinction entre le locataire et les conducteurs ; que ces conditions ne concernent ainsi que les conducteurs ;
- que lors de l'accident, le véhicule était conduit par une conductrice âgée de 19 ans et ne disposant que de six mois d'ancienneté sur son permis de conduire ; que le tribunal a donc justement retenu que l'appelante n'avait pas respecté ses obligations contractuelles ;
- que si l'appelante estime que les conditions à remplir pour chaque conducteur stipulées à l'article 2 ne s'appliqueraient qu'aux locataires personnes physiques, et donc pas à un locataire personne morale, ces conditions générales ne distinguent nullement selon le type de locataire, ce qui n'aurait pas de sens pour un loueur professionnel, car cela permettrait à des sociétés de passer outre des conditions d'âge et d'expérience qui sont fixées pour des raisons évidentes de sécurité ;
- que si l'appelante invoque un défaut d'entretien du véhicule, notamment au niveau des plaquettes de frein, le concessionnaire Auto Dauphiné à qui le véhicule a été confié après l'accident, a précisé que le véhicule a parcouru des kilomètres après avoir atteint la côte d'usure maximale des plaquettes, ce qui a entraîné la destruction des disques de frein ; qu'il précise que cette usure excessive aurait dû interpeler le conducteur du véhicule notamment par le bruit au freinage et le témoin de baisse de niveau du liquide de frein ; que si l'appelante était en possession du véhicule depuis le 23 septembre 2016, ce n'est que le 9 février 2017 qu'elle a pris attache avec la concluante pour lui faire part d'un bruit au freinage, soit la veille de l'accident ; que le coordinateur technique d'Auto Dauphiné a bien déclaré qu'il y avait dû y avoir un bruit anormal au freinage et un témoin allumé ; qu'en cinq mois de location, le véhicule a parcouru 10.598 km, alors qu'il avait été loué initialement pour 3 semaines avec 2.000 km de distance ; que l'article 3-3 des conditions générales fait obligation au locataire de signaler les anomalies constatées ; que lors de sa location, le véhicule, totalisait alors 16.624 km et sept mois, de sorte que les plaquettes de frein n'avaient nullement à être changées ; qu'il en était de même en décembre 2016 puisque le véhicule n'avait pas 1 an et n'avait pas atteint les 30 000 km ;
- que si l'appelante prétend que la clause d'exclusion de garantie prévue à l'article 7-3 des conditions générales de location ne serait pas valide puisqu'elles ne seraient pas mentionnées en caractères très apparents, la mention « Ne sont pas garantis » est indiquée en caractère gras, de sorte qu'une typographie particulière a été utilisée pour attirer l'attention du lecteur sur ces exclusions, qui ont été signées et donc lues et acceptées par l'appelante ;
- que si l'appelante soutient que cette clause serait déséquilibrée au titre de l'article 1171 du code civil, l'appréciation du déséquilibre significatif doit s'effectuer au regard de l'économie générale du contrat et non clause par clause ; que les conditions générales font peser des obligations également sur la concluante, de sorte que ce contrat n'est pas déséquilibré ;
- concernant le refus de prise en charge du sinistre par l'assurance, que lors de la restitution du véhicule endommagé, la concluante a conservé le dépôt de garantie puisque l'appelante refusait de prendre en charge les frais de remise en état conformément à l'article 6 des conditions générales de location ; que la concluante a procédé à une déclaration de sinistre et qu'un refus de prise en charge lui a été opposé en raison de l'âge de la conductrice et de l'ancienneté de son permis de conduire.
* * *
Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Motifs :
1) Concernant les moyens de l'appelante retirés des clauses du contrat de location :
Le contrat de location a précisé, en sa première page, que si c'est l'appelante qui a loué le véhicule, il a été mentionné comme conducteur n°1 monsieur X., qui a signé le contrat. La case concernant un conducteur n° 2 n'a pas été remplie. Ces deux cases figurent de façon très apparente au recto du contrat, et ne pouvaient échapper à l'attention de son signataire.
L'article 2 des conditions générales de location a stipulé que le locataire, ainsi que les conducteurs désignés au recto du contrat, sont tenus de présenter notamment un permis de conduire en cours de validité, que l'âge minimum requis pour conduire le véhicule est fixé à 20 ans révolus, et que le conducteur doit avoir au moins deux ans de permis. L'article 7 a prévu logiquement qu'au titre de l'assurance, seuls les conducteurs désignés au recto du contrat sont couverts, et qu'elle est exclue si les conditions prévues à l'article 2 ne sont pas remplies.
Ces clauses ont été rédigées en caractères très apparents, dans des paragraphes séparés et identifiés en corps gras. Elles sont conformes au dernier alinéa de l'article L. 112-4 du code des assurances. Monsieur X. représentant l'appelante a apposé sa signature tant au titre des conditions spéciales de location au recto, que sur la page concernant les conditions générales de location. Il en a eu ainsi parfaitement connaissance.
Aucun élément ne permet de retenir que l'intimée devait spécialement attirer l'attention du locataire sur les restrictions apportées concernant les qualités de la personne devant conduire le véhicule, alors qu'il ne ressort d'aucune pièce que l'appelante ait signalé que le véhicule devait être conduit par plusieurs personnes placées sous sa responsabilité, et non par la seule personne désignée dans le contrat, ce qu'elle aurait dû faire s'il s'agissait d'un véhicule devant être utilisé par ses salariés afin qu'il soit tenu compte de cet élément dans le cadre de la conclusion du contrat, d'autant que la mention relative aux conducteurs pouvant conduire le véhicule est très apparente au recto du contrat. Le fait que le contrat de location soit conclu par une société commerciale n'implique pas nécessairement qu'il soit prévu que tous ses salariés soient amenés à conduire le véhicule loué. Dans cette hypothèse, il appartient alors au locataire d'attirer l'attention du bailleur sur ce point afin qu'il puisse apprécier l'existence d'un risque supplémentaire, sauf au locataire à ne pas exécuter alors le contrat de bonne foi.
Il n'est pas plus justifié d'un caractère déséquilibré des conditions générales de vente, puisque l'intimée n'a pas ainsi recherché à obtenir un avantage significatif au détriment du locataire, lequel n'a pas signalé les conditions réelles d'utilisation du véhicule lors de la conclusion du contrat. Les restrictions apportées concernant les qualités requises chez le conducteur, outre sa désignation, sont parfaitement usuelles dans les contrats d'assurances et de location de véhicules.
En conséquence, ces conditions générales ne sont ni illicites, ni déséquilibrées au détriment de l'appelante, et lui sont parfaitement opposables.
2) Sur les causes de l'accident :
Il est constant qu'il est survenu en raison d'une usure des freins, alors que le véhicule totalisait un peu plus de 28.000 km, avec une mise en circulation le 17 décembre 2015. Il s'agissait donc d'un véhicule encore récent à la date du sinistre, avec un kilométrage modéré. Aucun élément ne permet d'indiquer qu'il n'avait pas été correctement entretenu avant sa remise à l'appelante le 23 septembre 2016, aucune observation n'ayant été faite lors de cette remise. Cette location devait s'achever le 31 mars 2017, alors que l'accident est survenu le 15 février 2017. Près de 10.500 km avaient été parcourus par l'appelante.
Au titre de l'article 3.2 des conditions générales de location, le preneur est tenu d'user du véhicule en bon père de famille. L'article 3.3 prévoit que pendant la location, le locataire doit procéder aux contrôle d'usage des témoins du véhicules et qu'il doit rester vigilent à tout signal émis par les voyants d'alerte.
En l'espèce, il résulte de l'attestation du responsable du service carrosserie de la société Auto Dauphiné S. que le véhicule a parcouru des kilomètres après avoir atteint la cote d'usure des plaquettes des freins, ce qui a entraîné une destruction des disques et ainsi une perte de contrôle. Il souligne que les signes avant-coureurs de cette usure excessive auraient dû interpeller le conducteur, en raison du bruit au freinage et du témoin de baisse du niveau de liquide de freins. Du reste, la veille de l'accident, l'appelante a signalé au bailleur ce problème de bruit, et devait ramener ce véhicule le jour de l'accident, ce qui indique qu'elle a bien eu conscience de ce problème.
Si l'appelante, dans son courrier du 7 avril 2017, a excipé d'une réparation de ce véhicule en décembre 2016 dans les locaux de l'intimée, pour une réparation suite à un incident de tôlerie, et qu'ainsi le bailleur a pu examiner le véhicule, rien ne permet d'indiquer que l'intimée aurait dû procéder à un examen approfondi de ce véhicule et notamment de ses freins, alors qu'aucun désordre n'a été signalé par le locataire, puisqu'il n'est pas contesté qu'à cette époque, le véhicule était âgé de moins d'un an, avec moins de 30.000 km parcourus.
Il résulte de ces éléments qu'alors que l'appelante avait constaté un problème concernant le freinage de la voiture, elle a poursuivi son utilisation, avec pour conséquence une perte de contrôle et un sinistre responsable, puisqu'elle a percuté les véhicules se trouvant devant elle à un feu rouge selon le constat amiable produit.
Il en résulte qu'à l'égard de l'intimée, l'appelante a ainsi manqué à ses obligations d'utiliser l'objet du bail en personne normalement prudente et avisée.
3) Sur le refus de prise en charge du sinistre par l'assureur de la société Action :
L'intimée ne justifie pas avoir déclaré le sinistre à son assureur ni qu'un refus d'intervention lui ait opposé par ce dernier.
Cependant, en raison du fait qu'il est acquis que le sinistre est imputable au locataire et que l'assureur du véhicule était fondé à refuser sa garantie en raison de l'âge de la conductrice et de l'absence ainsi de possession d'un permis de conduire depuis au moins deux ans (madame X. étant âgée de moins de 20 ans lors de l'accident), ce moyen est sans effet sur l'obligation de l'appelante de prendre à sa charge les conséquences du sinistre.
Il résulte de l'ensemble de ces points que le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en tous ses éléments. Il n'y a pas lieu d'ordonner à nouveau une capitalisation des intérêts comme sollicité par l'intimée, cette capitalisation ayant déjà été ordonnée par le tribunal de commerce.
Succombant en son appel, la société Connect & Rel sera condamnée à payer à la société Action la somme complémentaire de 1.700 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance, par application de l'article 696 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu les articles 1134 et suivants du code civil, l'article L. 112-4 du code des assurances ;
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Condamne la société Connect & Rel à payer à la société Action la somme de 1.700 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Connect & Rel aux dépens exposés en première instance et en cause d'appel ;
SIGNE par Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente
- 6283 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Location de meuble (bail mobilier) - Location de voiture (1) - Conclusion du contrat et réception du véhicule
- 8544 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit postérieur à l’ord. du 10 février 2016 et à la loi du 20 avril 2018 - Art. 1171 C. civ. – Notion de clause abusive – Clauses usuelles
- 9754 - Code civil - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Art. 1171 C. civ. (Ord. 10 février 2016 – L. ratif. 20 avril 2018). – Présentation par contrat – Location de meubles – Location de voiture