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CA MONTPELLIER (ch. com.), 12 octobre 2021

Nature : Décision
Titre : CA MONTPELLIER (ch. com.), 12 octobre 2021
Pays : France
Juridiction : Montpellier (CA), ch. com.
Demande : 19/02548
Date : 12/10/2021
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 11/04/2019
Référence bibliographique : 5889 (L. 221-3),5947 (L. 212-1, domaine, photocopieur)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9203

CA MONTPELLIER (ch. com.), 12 octobre 2021 : RG n° 19/02548 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « L'article liminaire du code de la consommation dans sa rédaction applicable au jour de la conclusion des contrats définit le consommateur comme « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité (...) ou agricole ». Ces dispositions se concilient néanmoins avec l'extension de la protection à d'autres personnes consacrée par l'article L. 221-3, inséré au chapitre 1er « contrats conclus à distance et hors rétablissement » qui ouvre au professionnel, employant cinq salariés au plus ayant souscrit hors établissement un contrat dont l'objet n'entre pas dans le champ de son activité principale, le bénéfice des dispositions protectrices du consommateur édictées par ce code, notamment aux sous-sections 2, 3, 6, 7 et 8 dudit chapitre, applicables aux relations entre consommateurs et professionnels. Ce moyen tiré des dispositions de l'article liminaire du code de la consommation est donc inopérant.

Il en est de même de celui tenant à la clause dactylographiée insérée au contrat de location selon laquelle le client atteste « que le contrat est en rapport direct avec son activité professionnelle et souscrit pour les besoins de cette dernière » puisque le seul critère applicable et plus restrictif résultant de la rédaction de l'article L.221-3 est celui de « l'objet du contrat n'entrant pas dans le champ de l'activité principale du professionnel ». Ainsi la considération de l'utilité de l'opération pour l'exercice de l'activité professionnelle du client ne suffit pas à écarter le bénéfice des dispositions invoquées.

En l'occurrence, les contrats conclus le 27 février 2017 sont des contrats hors établissement au sens de l'article L. 221-1, n'étant pas discuté qu'ils ont été signés dans les locaux de la société Domaine B. qui justifie qu'elle n'emploie pas de salariés. Le bien comme les services souscrits auprès de la société IME étaient étrangers au champ de l'activité agricole de la société Domaine B. et n'avaient été appréhendés que pour en faciliter l'exercice. Cette activité ne lui conférait aucune compétence à pour apprécier l'opportunité et l'intérêt tant matériel que financier à s'engager dans les trois conventions en cause.

Invoquant l'article L. 221-2 du code de la consommation qui exclut les contrats portant sur les services financiers du champ d'application du chapitre « contrats conclus à distance et hors établissement », la société Locam soutient en lecture des articles L. 311-2 et L. 511-21 du code monétaire et financier et L. 222-1 du code de la consommation, que le contrat de location financière conclu avec la société Domaine B. relève d'un service financier.

Mais cette analyse procède d'une assimilation entre opérations de banque et services financiers que le code monétaire et financier différencie en les traitant par des dispositions spécifiques insérées : - au Titre 1 du Livre III, articles L.311-1à L.318-5 pour les opérations de banque, - au Titre IV du Livre III, articles L.341 à L.343-6 pour les services financiers.

Les dispositions relatives aux locations simples de mobilier sont insérées dans le titre 1 mais dans la définition des opérations connexes aux opérations de banque énumérées à l'article L. 311-2 du code monétaire et financier.

S'il est ensuite exact, que l'article L. 222-1 du code de la consommation prévoit que le chapitre « Dispositions particulières au contrat conclu à distance portant sur des services financiers » s'applique aux services mentionnés au Livre Ier à III (...) du code monétaire et financier, (le Livre III contenant l'article L. 311-2), il n'en demeure pas moins que l'exclusion de l'article L .221-2 ne peut concerner que les services financiers du Livre III dudit code.

La société Locam ne prétend d'ailleurs pas avoir mis en œuvre le formalisme prévu aux articles L. 222-1 et suivants prévoyant notamment l'envoi au client des informations énoncées à l'article L. 222-5 en temps utile et avant qu'il ne soit lié par le contrat.

Il s'avère enfin que le contrat de location de longue durée prévoyant la mise à disposition de la société Domaine B. d'un photocopieur moyennant paiement d'un loyer sur 21 trimestres n'est pas assimilable à une opération de crédit faute d'option d'achat à son terme et qu'il s'agit d’une location simple non soumise à la règlementation bancaire.

Les moyens tenant au caractère inapplicables des dispositions des articles L. 221-3 et suivants du code de la consommation seront donc écartés. »

2/ « 

 

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 12 OCTOBRE 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/02548. N° Portalis DBVK-V-B7D-ODMB. Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 FÉVRIER 2019, TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER : R.G. n° 2017012663.

 

APPELANTE :

SARL DOMAINE B.

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de BEZIERS, sous le numéro XXX, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège [...], [...], Représentée par Maître Alexandre G., avocat au barreau de BEZIERS

 

INTIMÉS :

Maître Philippe P. ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL IMPRESSIONS MULTIFONCTIONS & EQUIPEMENTS (IME)

SARL au capital de 300.000,00 €, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de MONTPELLIER sous le numéro YYY, dont le siège social se situe [...], société placée en liquidation judiciaire suivant jugement du Tribunal de commerce de MONTPELLIER en date du 24 novembre 2017, de nationalité Française, [...], [...], Assigné à domicile le 11/06/2019

SAS LOCAM

immatriculée au RCS de Saint-Étienne sous le n° ZZZ prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [...], [...], Représentée par Maître Yann G., avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Maître Fanny L. de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER G., G., L., avocat au barreau de MONTPELLIER

 

Ordonnance de clôture du 17 août 2021

COMPOSITION DE LA COUR : En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7 SEPTEMBRE 2021, en audience publique, Madame Marianne ROCHETTE, conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de : Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller, Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Audrey VALERO

ARRÊT : - Rendu par défaut - prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; - signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS et PROCÉDURE - MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SARL Domaine B. ayant pour activité la culture de la vigne a signé le 20 novembre 2014 avec la société Chrome bureautique (devenue IME) un premier contrat de location portant sur une imprimante MF 3100 ainsi qu'un contrat de partenariat commercial avec la société Chrome communication lui allouant une participation commerciale.

Par acte sous seing privé du 27 février 2017, elle a encore signé :

- avec la société IME un bon de commande portant sur une imprimante multifonctions MF 3504 pour un coût locatif mensuel de 589 euros HT sur une durée de 63 mois ainsi qu'un contrat de maintenance, la société IME s'engageant au « solde du contrat Locam en cours par nos soins en intégralité » pour un montant de 12.159 euros HT,

- avec la SA Locam un contrat de location portant sur cette imprimante moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels de 1.767 euros HT (2.120,40 euros TTC).

Le même jour, la société Domaine B. a établi à l'attention de la société IME une facture de 12.159 euros HT relative au solde du contrat de maintenance de 2014.

Un procès-verbal de livraison et de conformité du matériel MF 3504 a été signé par la société Domaine B. le 21 mars 2017.

Par courriers recommandés avec accusé de réception en date du 23 mai 2017, la société Domaine B. a :

- indiqué à la société Locam qu'elle était victime d'une escroquerie de la part de la société IME, puisque la somme de 12.159 euros HT ne lui avait pas été versée.

- mis en demeure la société IME de lui verser la somme de 14.590,80 euros TTC.

Par courriers en date du 6 juillet 2017, le conseil de la société Domaine B. a vainement sollicité les sociétés IME et Locam pour convenir d'une résiliation sans frais du contrat puis par lettre recommandé avec accusé de réception en date du 18 juillet 2017, la société Locam a notifié la résiliation du contrat de location en vertu de la clause résolutoire de plein droit pour défaut de paiement.

La société IME a fait l'objet, le 4 septembre 2017, d'une procédure de redressement judiciaire convertie ultérieurement liquidation judiciaire, dans le cadre de laquelle, la société Domaine B. a régulièrement déclaré une créance en principal de 14.590,80 euros TTC.

Elle a, par exploits d'huissier des 7 août 2017 et 16 avril 2018 assigné la société IME, M. P. ès qualités de mandataire liquidateur et la société Locam devant le tribunal de commerce de Montpellier pour solliciter notamment la nullité des contrats et subsidiairement leur résolution.

Par jugement prononcé le13 février 2019, le tribunal, a :

- dit le tribunal de commerce de Montpellier compétent pour statuer sur l'action,

- déclaré l'interdépendance des contrats de maintenance et de location,

- dit que les contrats sont des contrats signés hors établissement,

- rejeté la demande de nullité des contrats au titre des articles L. 221-3 et suivants du code de la consommation,

- rejeté la demande de nullité des contrats pour dol,

- rejeté la demande de nullité pour erreur sur la substance,

- rejeté la demande de résolution des contrats pour défaut d'exécution,

- confirmé l'inscription au passif de la société IME de la somme de 14.590,80 euros TTC, au profit de la SARL Domaine B.,

- débouté la SARL Domaine B. de l'ensemble de ses demandes,

- constaté la résiliation du contrat pour défaut de paiement au profit de la société Locam,

- condamné la SARL Domaine B. au paiement de la somme de 44.528,40 euros au titre des loyers échus et à échoir à la société Locam outre intérêts légaux à compter du 20 juillet 2017,

- débouté la société Locam de ses demandes au titre de la clause pénale,

- condamné la SARL Domaine B. à la restitution à ses frais de l'imprimante multifonctions au profit de la société Locam sous un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 20 euros par jour de retard,

- (...),

- condamné la SARL Domaine B. à payer la somme de 500 euros à la société Locam au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et 500 euros à la société IME représentée par M. P. au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens (...).

[*]

La société Domaine B. a régulièrement relevé appel, le 11 avril 2019, de ce jugement en vue de sa réformation.

Elle demande à la cour, en l'état de ses conclusions déposées et notifiées le 26 juillet 2021 via le RPVA et signifiées à M. P. ès qualités par acte d'huissier de justice du 28 juillet 2021, de :

- (...),

A titre principal,

Vu les articles 221-1 et suivants du code de la consommation,

- dire et juger que les articles L. 221-1 et suivants du code de la consommation sont applicables aux contrats conclus hors établissement par Mme B., gérante de la SARL Domaine B.,

- dire et juger que ni la société IME, ni la société Locam n'ont respecté leurs obligations d'informations précontractuelles,

- dire et juger que le contrat IME et le contrat Locam sont interdépendants,

- prononcer l'annulation du contrat de maintenance de la SARL IME et du contrat de location longue durée de la société Locam, signés par Mme B., cette dernière n'étant alors débitrice d'aucune somme,

- débouter la société Locam de l'intégralité de ses demandes (...),

A titre subsidiaire,

Vu les articles 1137 et 1104 du code civil

- dire et juger que :

* le contrat IME et le contrat Locam sont interdépendants,

* la nullité de l'un entraîne la caducité de l'autre,

* les clauses inconciliables avec cette interdépendance ne sont pas applicables et doivent être déclarées non écrites,

* la SARL IME représentant de la société Locam, a, par ses manœuvres, vicié le consentement de la SARL Domaine B. qui n'a pas été informée de l'étendue des obligations contractées par ses soins lors de la signature des contrats qui lui ont été présentés,

* la SARL IME n'a jamais eu l'intention, et ce dès la signature du contrat de maintenance, la volonté de respecter ses obligations en versant à la SARL Domaine B. la somme promise de 12 159 euros HT, et ce alors même qu'elle a été réglée de sa facture de vente du matériel par la société Locam,

* le silence de la SARL IME est fautif et constitue une réticence dolosive,

- prononcer l'annulation du contrat de location longue durée de la société Locam et du contrat de maintenance de la société IME signés le 27 février 2017 par la SARL Domaine B. pour dol, cette dernière n'étant alors débitrice d'aucune somme,

- débouter la société Locam de l'intégralité de ses demandes (...),

A titre très subsidiaire,

Vu les articles 1132, 1133 et 1104 du code civil,

- prononcer l'annulation du contrat de location longue durée de la société Locam et du contrat de maintenance de la société IME signés le 27 février 2017 par la SARL Domaine B. pour erreur sur la substance,

A titre plus subsidiaire,

Vu les articles 1217 et 1224 du code civil,

- constater que la société IME n'a pas procédé au règlement de la somme de 12.159 euros HT, condition essentielle de l'engagement de la SARL Domaine B., malgré de nombreuses demandes de sa part,

- dire et juger que cette inexécution, d'une particulière gravité, est de nature à entrainer la résolution des contrats litigieux,

- prononcer en conséquence la résolution du contrat de location longue durée de la société Locam et du contrat de maintenance de la société IME signés le 27 février 2017 par la SARL Domaine B., cette dernière n'étant alors débitrice d'aucune somme,

- débouter la société Locam de l'intégralité de ses demandes (...),

A titre extrêmement subsidiaire,

(...) Vu les articles 1103 et suivants et 1152 du code civil,

- débouter la société Locam de ses demandes formées au titre des loyers, et de la clause pénale, sauf à réduire les sommes dues à la somme de :

* 4.240,80 euros au titre des deux loyers échus,

* 1 euro en réparation du préjudice subi par la société Locam au titre du non-paiement des loyers à échoir,

En toutes hypothèses,

- dire et juger qu'il appartient à la société Locam de prendre à sa charge la restitution du photocopieur Olivetti MF 3504 litigieux,

- condamner solidairement M. P., es qualité de liquidateur de la société IME et la société Locam à payer la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement M. P., ès qualités de liquidateur de la société IME et la société Locam aux entiers dépens.

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :

- le contrat a été souscrit hors établissement et n'entre pas dans le champ de son activité principale exercée sans emploi d'un quelconque salarié,

- la société IME s'abstient de démontrer la remise des contrats et avoir respecté ses obligations d'information, notamment sur le prix du bien et sur le droit de rétractation,

- le contrat Locam est un contrat de location simple qui ne relève pas d'un service financier exclu du dispositif législatif invoqué,

- elle n'aurait jamais contracté si elle avait été informée de l'étendue de ses obligations, de l'existence d'un nouveau contrat de location, du montage financier et des difficultés financières de la société IME,

- l'élément déterminant de son consentement avait été de pouvoir bénéficier pendant 21 mois d'un photocopieur à moindre coût mais l'opération s'était révélée onéreuse

- le contrat IME doit être subsidiairement résolu puisque le versement de la somme de 12 159 euros HT par IME était la condition essentielle de son engagement, la résolution de ce contrat entraînant celle du contrat liant la SARL Domaine B. à la société Locam.

[*]

La déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été signifiées à M. P. ès qualités de mandataire liquidateur de la société IME par actes d'huissier de justice des 11 juin 2019 et 04 juillet 2019, délivrés à domicile.

[*]

Formant appel incident, la société Locam sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 2 octobre 2019 :

Vu les articles 1103 et 1231-2 du code civil, L. 121-6 et suivants du code de la consommation, 311-2 et 511-21 du code monétaire et financier,

- (...)

- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a réduit la clause pénale de 10 % sur les sommes dues à la société Locam, condamner à ce titre la SARL Domaine B. à lui régler une somme complémentaire de 4.452,84 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 18 juillet 2017,

- condamner la SARL Domaine B. à régler à la société Locam une nouvelle indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'instance comme d'appel.

Elle expose en substance que :

- les dispositions du code de la consommation ne s'appliquent pas à la SARL Domaine B., personne morale ayant agi dans le cadre et pour les besoins de son activité professionnelle,

- le contrat de location simple conclu participe des opérations connexes aux opérations de banque qui relèvent des « services financiers »,

- l'engagement, non tenu, de la société IME n'est pas opposable à la société Locam et la créance invoquée par l'appelante ne peut donner lieu qu'à déclaration à la procédure collective de la société IME, et non à la résolution du contrat,

- le contrat de location est clair notamment sur ses points essentiels tels que les nombre, périodicité, date d'exigibilité et montant des loyers,

- ni le dol, ni l'erreur ne sont démontrés,

- le montant indemnitaire conventionnel n'est pas manifestement excessif puisqu'il correspond seulement à celui des loyers restant à courir à compter de la résiliation et à la seule exécution par équivalent du contrat.

[*]

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 17 août 2021.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'exception d'incompétence n'étant plus soutenue, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu la compétence du tribunal de commerce de Montpellier.

 

Sur l'application des articles L.221-3 et suivants du code de la consommation :

L'article liminaire du code de la consommation dans sa rédaction applicable au jour de la conclusion des contrats définit le consommateur comme « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité (...) ou agricole ».

Ces dispositions se concilient néanmoins avec l'extension de la protection à d'autres personnes consacrée par l'article L. 221-3, inséré au chapitre 1er « contrats conclus à distance et hors rétablissement » qui ouvre au professionnel, employant cinq salariés au plus ayant souscrit hors établissement un contrat dont l'objet n'entre pas dans le champ de son activité principale, le bénéfice des dispositions protectrices du consommateur édictées par ce code, notamment aux sous-sections 2, 3, 6, 7 et 8 dudit chapitre, applicables aux relations entre consommateurs et professionnels.

Ce moyen tiré des dispositions de l'article liminaire du code de la consommation est donc inopérant.

Il en est de même de celui tenant à la clause dactylographiée insérée au contrat de location selon laquelle le client atteste « que le contrat est en rapport direct avec son activité professionnelle et souscrit pour les besoins de cette dernière » puisque le seul critère applicable et plus restrictif résultant de la rédaction de l'article L.221-3 est celui de « l'objet du contrat n'entrant pas dans le champ de l'activité principale du professionnel ».

Ainsi la considération de l'utilité de l'opération pour l'exercice de l'activité professionnelle du client ne suffit pas à écarter le bénéfice des dispositions invoquées.

En l'occurrence, les contrats conclus le 27 février 2017 sont des contrats hors établissement au sens de l'article L. 221-1, n'étant pas discuté qu'ils ont été signés dans les locaux de la société Domaine B. qui justifie qu'elle n'emploie pas de salariés.

Le bien comme les services souscrits auprès de la société IME étaient étrangers au champ de l'activité agricole de la société Domaine B. et n'avaient été appréhendés que pour en faciliter l'exercice. Cette activité ne lui conférait aucune compétence à pour apprécier l'opportunité et l'intérêt tant matériel que financier à s'engager dans les trois conventions en cause.

Invoquant l'article L. 221-2 du code de la consommation qui exclut les contrats portant sur les services financiers du champ d'application du chapitre « contrats conclus à distance et hors établissement », la société Locam soutient en lecture des articles L. 311-2 et L. 511-21 du code monétaire et financier et L. 222-1 du code de la consommation, que le contrat de location financière conclu avec la société Domaine B. relève d'un service financier.

Mais cette analyse procède d'une assimilation entre opérations de banque et services financiers que le code monétaire et financier différencie en les traitant par des dispositions spécifiques insérées :

- au Titre 1 du Livre III, articles L.311-1à L.318-5 pour les opérations de banque,

- au Titre IV du Livre III, articles L.341 à L.343-6 pour les services financiers.

Les dispositions relatives aux locations simples de mobilier sont insérées dans le titre 1 mais dans la définition des opérations connexes aux opérations de banque énumérées à l'article L. 311-2 du code monétaire et financier.

S'il est ensuite exact, que l'article L. 222-1 du code de la consommation prévoit que le chapitre « Dispositions particulières au contrat conclu à distance portant sur des services financiers » s'applique aux services mentionnés au Livre Ier à III (...) du code monétaire et financier, (le Livre III contenant l'article L. 311-2), il n'en demeure pas moins que l'exclusion de l'article L .221-2 ne peut concerner que les services financiers du Livre III dudit code.

La société Locam ne prétend d'ailleurs pas avoir mis en œuvre le formalisme prévu aux articles L. 222-1 et suivants prévoyant notamment l'envoi au client des informations énoncées à l'article L. 222-5 en temps utile et avant qu'il ne soit lié par le contrat.

Il s'avère enfin que le contrat de location de longue durée prévoyant la mise à disposition de la société Domaine B. d'un photocopieur moyennant paiement d'un loyer sur 21 trimestres n'est pas assimilable à une opération de crédit faute d'option d'achat à son terme et qu'il s'agit d’une location simple non soumise à la règlementation bancaire.

Les moyens tenant au caractère inapplicables des dispositions des articles L. 221-3 et suivants du code de la consommation seront donc écartés.

 

Sur la nullité des contrats pour non-respect des articles L. 221-3 et suivants du code de la consommation :

L'article L. 221-9 du code de la consommation dispose que « Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5. (...). Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2o de l'article L. 221-5.] »

La société Domaine B. soutient en premier lieu qu'aucun contrat (IME et Locam) ne lui a été remis lors de la signature et qu'elle ne les avait eu en sa possession que le 31 mars 2017. Par sa signature du bon de commande IME sur lequel elle a également apposé le tampon humide de sa société, elle a pourtant « attesté avoir reçu une exemplaire de ce document ». Elle ne démontre pas qu'elle n'aurait eu les contrats en sa possession que le 17 mars 2017 qui est la date d'un courrier de Locam lui communiquant « la facture unique de loyers » exclusivement. Elle n'a d'ailleurs pas contesté en temps utiles les termes de cette correspondance dans laquelle Locam écrivait « notre relation contractuelle est matérialisée par le contrat de location référencé ci-dessus, dont vous détenez un exemplaire ainsi que les conditions générales et particulières associées ». (souligné par la cour).

Il apparaît ensuite que le bon de commande signé le 27 février 2017 a été établi à l'en-tête d'IME et contient les informations nécessaires à l'identification de la société cocontractante. Il mentionne un coût locatif mensuel sur 63 mois de 589 euros de sorte que le grief portant sur le défaut d'information du prix du bien au visa de l'article L.111-1 manque en fait. Il comprend la mention selon laquelle ' le présent contrat et son renouvellement sont conclus sous réserve de l'acceptation du dossier de financement par notre partenaire financier' et la SARL Domaine B. qui a signé le même jour le contrat de location financière ne peut prétendre en avoir ignoré l'existence.

Par contre, l'article L. 221-5, 2° précité dispose que « Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'État » (codifié aux articles R. 221-1 et R. 221-3).

Ces dispositions sont d'ordre public en vertu de l'article L.221-29 du code de la consommation.

En l'espèce, le bon de commande IME comporte la mention selon laquelle « le client atteste avoir reçu un exemplaire de ce document et dispose d'un délai de rétractation de 14 jours à compter de la signature de ce contrat de prestation ».

Cette information relative au droit de rétractation n'est cependant pas conforme aux dispositions de l'article R. 221-1 dont l'annexe précise les modalités possibles de la déclaration de rétractation, l'absence de motif à donner, les conséquences financières et l'absence de frais induits par la décision de se rétracter.

Le bon de commande ne comporte ensuite aucun bordereau de rétractation.

Ainsi le contrat conclu avec la société IME encourt effectivement la nullité pour avoir enfreint les dispositions d'ordre public précitées et par application de l'article L. 242-1 du code de la consommation. Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a débouté la société Domaine B. de sa demande de nullité du contrat.

Le contrat de location d'un photocopieur, par lequel la société Locam s'est engagée à fournir la jouissance du photocopieur en contrepartie du paiement d'un loyer, entre dans le champ d'application des dispositions précitées pour être un contrat de fourniture de services au sens de l'article L. 221-1 du code de la consommation.

Etant dépourvu de toute information relative au droit de rétractation, il s'ensuit que ce contrat est également nul à défaut de contenir les informations sur les conditions, le délai et les modalités d'exercice du droit de rétractation ainsi que le formulaire type de rétractation.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité des contrats au titre de l'article L. 221-3 et suivants du code de la consommation et en ce qu'il a fait droit aux demandes tendant au paiement des loyers et de la clause pénale.

Il appartiendra donc à la société Locam de reprendre possession de ce matériel à ses seuls frais au siège social de la société Domaine B. à qui aucune faute n'est imputable et selon les modalités spécifiées au dispositif.

 

Sur les frais et les dépens :

La société Locam qui succombe, devra supporter les dépens de première instance et d'appel et payer à la société Domaine B. la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, la situation financière obérée de la société IME justifiant qu'il ne soit pas fait application de ses dispositions à l'égard de M. P. ès qualités de mandataire liquidateur de la société IME.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement et par arrêt de défaut,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 13 février 2019 en ce qu'il s'est déclaré compétent,

Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,

Annule le contrat conclu le 27 février 2017 avec la SARL IME et le contrat de location longue durée conclu le même jour avec la SAS Locam,

Déboute la société Locam de l'ensemble de ses demandes,

Dit qu'il appartient à la société Locam de récupérer à ses frais l'imprimante multifonctions MF 3504 au siège social de la SARL Domaine B. après l'avoir avisée de la date à laquelle cette récupération interviendra par courrier recommandé avec demande d'avis de réception expédié 30 jours avant,

Dit que la société Locam supportera les dépens de première instance et d'appel et payera à la société Domaine B. une somme de 2.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

le greffier,                                         le président,