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CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 23 novembre 2021

Nature : Décision
Titre : CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 23 novembre 2021
Pays : France
Juridiction : Besancon (CA) 1re ch. civ. et com.
Demande : 20/00344
Date : 23/11/2021
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 19/02/2020
Référence bibliographique : 6638 (prêt immobilier, TEG), 6017 (clause portant sur l’objet principal)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9286

CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 23 novembre 2021 : RG n° 20/00344 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le point de départ de la prescription d'une action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel, engagée par un consommateur ou un non-professionnel en raison d'une erreur affectant le taux de son contrat, court à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur. Il en est de même pour l'action en déchéance du droit aux intérêts et pour l'exception de nullité d'une telle stipulation contenue dans un acte de prêt ayant reçu un commencement d'exécution.

Ainsi, le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur du taux ou, lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l'emprunteur.

En l'espèce, les deux contrats de prêt ne précisent pas les modalités de calcul du taux des intérêts et les emprunteurs n'avaient manifestement pas les compétences financières nécessaires pour déceler, par eux-mêmes, à la simple lecture des deux offres de prêt, l'erreur alléguée affectant le calcul des intérêts, quand bien même ils avaient bénéficié d'un délai de réflexion et de la possibilité de se rapprocher d'un conseil plus avisé. »

2/ « Quant à la déchéance du droit aux intérêts qu'ils sollicitent subsidiairement, s'ils soutiennent, à hauteur de cour, s'être vu appliquer un calcul des intérêts non pas sur une année de 365 jours, mais sur une année dite « lombarde » de 360 jours, ils ne produisent cependant aux débats aucune pièce permettant d'établir, d'une part, l'application d'un tel mode de calcul pour les prêts litigieux et, d'autre part, le surcoût d'un montant supérieur à la décimale que ce calcul sur 360 jours aurait généré à leur détriment. »

3/ « En l'espèce, M. X. et Mme Y. soulèvent à hauteur d'appel le caractère abusif des clauses fixant les intérêts conventionnels dès lors qu'elles présentent un caractère « sibyllin » ne « permettant pas de calculer les surcoûts clandestins engendrés par le recours à l'année lombarde ». Ils ne démontrent cependant pas la pertinence d'un tel grief.

Les clauses contractuelles litigieuses stipulent en effet pour chacun des prêts un taux d'intérêt annuel fixe, un taux effectif global, un taux effectif global en fonction de la périodicité mensuelle et fixent la date retenue pour le calcul des intérêts, dans une rédaction manifestement claire et précise s'opposant en l'état à voir apprécier par la cour le caractère abusif de cette « rémunération » du prêteur, conformément à l'article susvisé.

Tout autant, le déséquilibre significatif que l’utilisation éventuelle de l'année lombarde créerait entre les parties n'est nullement étayé par les appelants, ces derniers n'ayant pas chiffré l'éventuel surcoût subi. »

 

COUR D’APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20/00344. N° Portalis DBVG-V-B7E-EHKZ. Contradictoire. Sur appel d'une décision du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LONS-LE-SAUNIER en date du 13 novembre 2019 [RG N° 16/00655]. Code affaire : 53B Prêt - Demande en remboursement du prêt

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], Représenté par Maître Ludovic P. de la SCP D. - P., avocat au barreau de BESANCON

 

ET :

INTIMÉES :

Madame Y.

née le [date] à [ville], demeurant [adresse], Représentée par Maître Anne V. de la SELARL M. - V., avocat au barreau de JURA

CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE FRANCHE-COMTÉ

société coopérative à capital et personnel variables, régie par le livre V du Code Rural, sis [adresse], Représentée par Maître Jean-Marie L. de la SCP L.-G. L.- M., avocat au barreau de JURA

Association GRIM curatrice de Madame Y.

sise [adresse], Représentée par Maître Anne V. de la SELARL M. - V., avocat au barreau de JURA

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre.

ASSESSEURS : Madame Florence DOMENEGO et Monsieur Cédric SAUNIER, Conseillers.

GREFFIER : Madame Leïla ZAIT, Greffier

Lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre

ASSESSEURS : Madame Florence DOMENEGO et Monsieur Cédric SAUNIER, Conseillers.

L'affaire, plaidée à l'audience du 12 octobre 2021 a été mise en délibéré au 23 novembre 2021. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et prétention des parties :

Par acte sous seing privé en date du 2 août 2007, le Crédit agricole mutuel de Franche Comté (La banque) a consenti à M. X. et Mme Y. son épouse un prêt immobilier n° 56XX642 d'un montant de 300.000 euros remboursable en 240 mensualités au taux d'intérêts annuel de 3,95 %.

Par acte sous seing privé en date du 1er décembre 2007, la même banque leur a accordé un second prêt immobilier d'un montant de 375.000 euros, remboursable en 280 mensualités au taux d'intérêt annuel de 4,30 %, renégocié à 2,30 % à compter du mois de mars 2015.

Saisi le 4 juillet 2016 par la banque d'une demande en paiement des mensualités et capitaux restant dus, le tribunal de grande instance de Lons-Le-Saunier, par jugement rendu la 13 novembre 2019, a :

- donné acte à l'association Grim de son intervention volontaire en qualité de curatrice de Mme Y. divorcée X.,

- déclaré irrecevables les demandes formulées par M. X. tendant à obtenir la nullité et la déchéance de la clause d'intérêt conventionnel des contrats de prêts,

- débouté M. X. et Mme Y. de leur demande de substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel, de délais de paiement et d'imputation des remboursements des crédits en capital,

- condamné solidairement M. X. et Mme Y. à payer à la banque :

* au titre du contrat de prêt n° 56XX642, la somme de 91.469,43 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,95 % à compter du 29 août 2017,

* au titre du contrat de prêt n° 560YY9092 celle de 107.395,09 euros avec intérêts au taux conventionnel de 2,30 % à compter du 29 août 2017,

- débouté la banque de sa demande de capitalisation des intérêts

- condamné solidairement M. X. et Mme Y. à lui payer 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, avec distraction au profit de la SCP L. -G.-L.,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

[*]

Le 19 février 2020, M. X. a relevé appel de cette décision et, dans ses dernières conclusions transmises le 12 mars 2021, il en sollicite l'infirmation et demande à la cour de :

- juger que les contrats de prêts ne faisaient pas mention de la durée de la base de calcul,

- juger que les taux avaient été calculés sur la base de 360 jours et non 365,

- juger que les clauses de stipulations d'intérêts étaient abusives,

- substituer au taux conventionnel le taux légal de l'année 2015 (année de renégociation des prêts), soit 0,99 %,

- condamner la banque à établir de nouveaux tableaux d'amortissement,

- la condamner à lui rembourser la somme de 289.705,54 euros,

- la condamner à lui payer 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- subsidiairement, reporter le paiement des sommes réclamées à deux ans, et à défaut, le faire bénéficier des plus larges délais de paiement avec imputation des paiements sur le capital et confirmer la non-capitalisation des intérêts.

Il fait principalement valoir que :

- ses demandes étaient recevables dès lors d'une part, que le point de départ de la prescription de la demande de nullité n'a commencé à courir qu'à compter de la découverte de l'erreur affectant la stipulation d'intérêts conventionnels, soit le 12 septembre 2018, et d'autre part, que la demande fondée sur le caractère abusif de la stipulation d'intérêts est imprescriptible,

- les deux contrats de prêts ne portaient mention ni de la durée de la base de calcul du taux, ni du recours à l'année lombarde, absence devant justifier la substitution d'un intérêt au taux légal en lieu et place d'un intérêt au taux conventionnel et le remboursement des intérêts au taux conventionnel,

- l'indivision post-communautaire constituée de plusieurs biens immobiliers tarde à être liquidée, de sorte que des délais de paiement les plus larges doivent lui être accordés.

[*]

Dans ses dernières conclusions transmises le 15 mars 2021, Mme Y., assistée de l'association Grim, sa curatrice, a formé appel incident au jugement du tribunal de grande instance de Lons-le-Saunier.

Elle sollicite son infirmation et demande à la cour de :

- annuler les taux d'intérêts contractuels, et à défaut prononcer la déchéance des intérêts qui devaient être perçus,

- substituer le taux des intérêts conventionnels par le taux légal de l'année 2015,

- voir établir par la banque de nouveaux tableaux d'amortissement,

- condamner la banque à lui payer 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- subsidiairement, lui accorder un report des paiements à deux ans et, le cas échéant, des délais de paiement avec imputation sur le capital et rejet de l'anatocismes.

Elle se prévaut, selon les mêmes moyens que ceux développés par M. X., de la nullité des intérêts contractuels et du caractère abusif des clauses relatives à la date de retenue pour le calcul des intérêts.

Elle rappelle également les difficultés rencontrées dans le cadre de la liquidation de l'indivision post-communautaire et sollicite les délais de paiement les plus larges.

[*]

Dans ses dernières conclusions transmises le 8 juin 2021, la banque demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- juger qu'il n'existe pas de cause de nullité du contrat,

- juger que les clauses afférentes à la date retenue pour le contrat de prêt ne sont pas abusives,

- juger que M. X. et Mme Y. ont déjà bénéficié des délais de paiement les plus larges et les débouter de leurs demandes en ce sens,

- les condamner solidairement à lui payer :

* au titre du contrat de prêt n° 56XX642 la somme de 104.117,66 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,95 % à compter du 27 mai 2021,

* au titre du contrat de prêt n° 560YY9092 celle de 47.061,67 euros avec intérêts au taux conventionnel de 2,30 % à compter du 27 mai 2021,

* 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu'aux dépens.

Elle fait principalement valoir que :

- les demandes nouvelles formées par Mme Y. sont irrecevables, dès lors que cette dernière n'avait sollicité en première instance que l'octroi de délais de grâce,

- la stipulation de l'intérêt conventionnel des deux prêts n'est pas nulle, puisque le recours à l'année lombarde pour le calcul des intérêts annuels était parfaitement autorisé lors de la conclusion des deux prêts et qu'au surplus, une erreur de TEG ne peut entraîner la nullité de la stipulation que si l'erreur est supérieure à 0,10 points, ce dont les appelants ne rapportent pas la preuve,

- la stipulation de l'intérêt conventionnel des deux prêts n'était pas constitutive d'une clause abusive.

[*]

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 septembre 2021.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs de la décision :

A titre liminaire, il convient de relever que si la banque a opposé l'irrecevabilité des demandes de Mme Y. relatives à la stipulation d'intérêts conventionnels dans la discussion de ses dernières conclusions, elle n’a cependant pas repris cette fin de non-recevoir dans son dispositif de telle sorte que la cour n’en est pas saisie.

 

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription :

Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le point de départ de la prescription d'une action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel, engagée par un consommateur ou un non-professionnel en raison d'une erreur affectant le taux de son contrat, court à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur. Il en est de même pour l'action en déchéance du droit aux intérêts et pour l'exception de nullité d'une telle stipulation contenue dans un acte de prêt ayant reçu un commencement d'exécution.

Ainsi, le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur du taux ou, lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l'emprunteur.

En l'espèce, les deux contrats de prêt ne précisent pas les modalités de calcul du taux des intérêts et les emprunteurs n'avaient manifestement pas les compétences financières nécessaires pour déceler, par eux-mêmes, à la simple lecture des deux offres de prêt, l'erreur alléguée affectant le calcul des intérêts, quand bien même ils avaient bénéficié d'un délai de réflexion et de la possibilité de se rapprocher d'un conseil plus avisé.

Dès lors, le point de départ de la prescription doit se situer, non pas au jour de la signature des deux conventions, mais au jour où M. X. a constaté l'absence de cette mention, soit en l'état dans ses conclusions du 12 septembre 2018.

C'est donc à tort que le tribunal a déclaré irrecevables, comme prescrites, l'exception de nullité soulevée par M. X., tout comme sa demande subsidiaire de déchéance du droit aux intérêts conventionnels, ces dernières ayant bien été présentées dans le délai de cinq ans requis.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

 

Sur la stipulation des intérêts conventionnels :

Aux termes des articles 1907 du code civil, L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur lors de la conclusion des deux prêts litigieux, le taux effectif global doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt. Il doit être calculé à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires, selon la méthode d'équivalence prévue au décret n° 2002-908 du 10 juin 2002, et la durée de période doit être expressément communiquée à l'emprunteur, en application de l'article R. 313-1 du code de la consommation.

L'absence du taux effectif global ou la mention d'un taux effectif global erroné, qui équivaut à une absence de taux, est sanctionné par la substitution du taux de l'intérêt légal au taux conventionnel.

Néanmoins, pour être sanctionnée, l'erreur affectant le taux effectif global doit être supérieure ou égale à une décimale, conformément à l'annexe de l'article R. 313-1 du code de la consommation, applicable tant aux prêts entre professionnels qu'aux prêts immobiliers (Cass. Civ. 1ère, 11 mars 2020, n° 19-10858).

En l'espèce, si les deux contrats de prêts mentionnent bien le taux d'intérêt annuel fixe, le taux effectif global, le taux effectif global en fonction de la périodicité mensuelle et la date de retenue pour le calcul des intérêts, la durée de période de calcul du taux d'intérêt n'est cependant pas précisée sur ces derniers.

Si M. X. et Mme Y. excipent de la nullité subséquente de la stipulation d'intérêts, une telle demande ne saurait cependant aboutir.

En effet, une telle sanction ne pourrait se concevoir, compte-tenu de la jurisprudence ci-dessus rappelée, que si les appelants démontraient l'existence d'une part d'une erreur sur la substance même de leur engagement, et d'autre part d'un consentement ainsi vicié, conformément à l'article 1110 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause.

Or, M. X. et Mme Y. ne rapportent pas une telle preuve.

Quant à la déchéance du droit aux intérêts qu'ils sollicitent subsidiairement, s'ils soutiennent, à hauteur de cour, s'être vu appliquer un calcul des intérêts non pas sur une année de 365 jours, mais sur une année dite « lombarde » de 360 jours, ils ne produisent cependant aux débats aucune pièce permettant d'établir, d'une part, l'application d'un tel mode de calcul pour les prêts litigieux et, d'autre part, le surcoût d'un montant supérieur à la décimale que ce calcul sur 360 jours aurait généré à leur détriment.

En aucune façon, la preuve du recours à l'année lombarde ne saurait résulter du seul tableau sommaire présent dans les conclusions de M. X., une partie ne pouvant se préconstituer un titre à elle-même en application de l'article 1363 du code civil, et ce tableau ne concernant au demeurant qu'un contrat de prêt sur les deux aujourd'hui litigieux. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient M. X., cette preuve ne s'excipe pas plus des conclusions de la banque quand bien même celle-ci soulève dans ces dernières la validation par la jurisprudence du recours à l'année lombarde sous certaines conditions.

Par ailleurs, M. X. et Mme Y. ne chiffrent nullement la différence entre le taux mentionné dans les contrats de crédit et le taux réel appliqué, de telle sorte que la cour ne peut se convaincre de l'erreur affectant le calcul du taux effectif global ou du taux conventionnel mentionné dans les deux contrats, comme du dépassement de la décimale tolérée.

M. X. et Mme Y. seront en conséquence déboutés de leur demande de nullité des stipulations des intérêts, comme de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.

M. X. sera également débouté de sa demande tendant à voir substituer un taux d'intérêt légal au taux conventionnel 'au motif que son ex-épouse refuserait toute renégociation des prêts', la cour ne disposant pas, en dehors des sanctions ci-dessus examinées, de la faculté de s'immiscer dans la commune intention des parties et de modifier unilatéralement les stipulations contractuelles déterminées dans le respect des dispositions des articles 1304 et suivants du code civil dans leur rédaction applicable à la cause.

 

Sur les clauses abusives :

Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. (...) L'appréciation du caractère abusif ne porte cependant ni sur la définition de l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération du bien vendu ou du service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible (...).

En l'espèce, M. X. et Mme Y. soulèvent à hauteur d'appel le caractère abusif des clauses fixant les intérêts conventionnels dès lors qu'elles présentent un caractère « sibyllin » ne « permettant pas de calculer les surcoûts clandestins engendrés par le recours à l'année lombarde ».

Ils ne démontrent cependant pas la pertinence d'un tel grief.

Les clauses contractuelles litigieuses stipulent en effet pour chacun des prêts un taux d'intérêt annuel fixe, un taux effectif global, un taux effectif global en fonction de la périodicité mensuelle et fixent la date retenue pour le calcul des intérêts, dans une rédaction manifestement claire et précise s'opposant en l'état à voir apprécier par la cour le caractère abusif de cette « rémunération » du prêteur, conformément à l'article susvisé.

Tout autant, le déséquilibre significatif que l’utilisation éventuelle de l'année lombarde créerait entre les parties n'est nullement étayé par les appelants, ces derniers n'ayant pas chiffré l'éventuel surcoût subi.

Il y a lieu en conséquence de rejeter cette demande.

 

Sur les demandes en paiement :

M. X. et Mme Y. ne contestent pas à hauteur d'appel le principe de leur dette mais en sollicitent une actualisation au regard de la vente de plusieurs biens immobiliers survenue depuis 2017.

En l'état, eu égard au décompte actualisé produit par la banque et non-contredit par ces derniers il y a lieu de fixer les créances ainsi qu'il suit :

- au titre du contrat de prêt n° 56XX642, la somme de 91.469,43 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,95 % l'an à compter du 29 août 2017,

- au titre du contrat de prêt n° 560YY9092, celle de 46.890,30 euros avec intérêts au taux conventionnel de 2,30 % l'an à compter du 30 mars 2021 (compte-tenu des derniers paiements imputés sur ce prêt, ayant soldé la presque totalité des intérêts échus).

A défaut de rapporter la preuve de s'en être acquittés, M. X. et Mme Y. seront condamnés solidairement au paiement de ses sommes.

 

Sur les délais de paiement :

Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte-tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

En l'espèce, si M. X. et Mme Y. font grief aux premiers juges de leur avoir refusé des délais de paiement, la particulière ancienneté des mensualités impayés (2014), leurs tergiversations à liquider leur indivision post-communautaire dans laquelle demeurent encore plusieurs biens immobiliers comme l'absence de production des avis d'impositions permettant de fixer leurs réels revenus (Mme Y. bénéficiant manifestement d'une prestation compensatoire versée par mensualité de 2.250 euros depuis le jugement du 18 mai 2017) s'opposent à les faire bénéficier de nouveaux délais de grâce.

C'est donc à bon droit, par des motifs que la cour adopte, que le premier juge a rejeté cette demande.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Lons-le-Saunier du 13 novembre 2019 en ces chefs critiqués, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de délais de paiement et statué sur les frais irrépétibles et les dépens.

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Déclare recevables les demandes présentées par M. X. et Mme Y. divorcée X. mais les en déboute.

Condamne solidairement M. X. et Mme Y. divorcée X. à payer au Crédit agricole mutuel de Franche Comté les sommes suivantes :

- au titre du contrat de prêt n° 56XX642, la somme de 91.469,43 euros avec les intérêts au taux conventionnel de 3,95 % l'an à compter du 29 août 2017,

- au titre du contrat de prêt n° 560YY9092, celle de 46.890,30 euros avec les intérêts au taux conventionnel de 2,30 % l'an à compter du 30 mars 2021.

Les condamne in solidum aux dépens d'appel

Et, vu l'article 700 du code de procédure civile, les déboute de leur demande et les condamne in solidum à payer au Crédit agricole mutuel de Franche Comté la somme de 2.000 euros.

Ledit arrêt a été signé par M. Edouard Mazarin, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier,                            le président de chambre