CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 9 décembre 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 9300
CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 9 décembre 2021 : RG n° 20/00571
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Il est constant que le contrat principal conclu entre M. et Mme X. et la société Rev'Solaire est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 ancien et suivants du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur au 9 octobre 2011 dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile. »
2/ « Alors qu'aucune disposition du code de la consommation n'interdit qu'un professionnel et un consommateur s'accordent pour mettre fin à un litige les opposant et concluent une transaction au sens de l'article 2044 du code civil, c'est à tort que le premier juge, assimilant improprement cet accord à un contrat au sens de l'article R. 132-2 (désormais R. 212-2) du code de la consommation a retenu que sa dernière disposition constituait une clause abusive.
Il appartient en revanche au juge de déterminer si l'accord invoqué à l'appui d'une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée constitue une transaction qui implique des concessions réciproques. »
2/ « En proposant une renégociation du crédit, la société Financo a consenti une baisse du taux d'intérêt contractuel de 5,40 % l'an à 3,84 % l'an en allongeant la durée de remboursement de 22 mois (août 2024 à mai 2026), de sorte que le montant total à la charge des emprunteurs, compte tenu des sommes déjà remboursées par eux avant le mois de février 2016, s'établissait à un total 30.707,79 euros au lieu des 30 779,19 euros initialement convenus.
Il est ainsi avéré que le prêteur a consenti une concession dérisoire (en ce compris l'allongement de la période de remboursement) en contrepartie de l'abandon total de tout droit d'action afférent au contrat de crédit affecté initial dans le contexte d'une contestation de la validité du contrat principal.
En conséquence, contrairement à ce que soutient la société Financo, le document signé au mois de février 2016 n'emporte pas de concessions réciproques. Il ne vaut donc pas transaction au sens de l'article 2044 du code civil et n'emporte pas autorité de la chose jugée. »
3/ « En l'espèce, ni le bon de commande, ni la simulation chiffrée faite par le démarcheur ne font état de la présentation d'un investissement autofinancé, la mention d'une garantie de 90 % de rendement sur 25 ans sans autre référence quantitative signifiant seulement que les panneaux devaient conserver un rendement stable.
Il convient d'observer que la dénonciation d'un dol s'appuie sur une fiche de simulation dont les mentions manuscrites sont attribuées au démarcheur, alors que certaines d'entre elles sont très postérieures à la date de signature du bon de commande (ex la référence au crédit d'impôt versé le 28 août 2012), que la société Rev'Solaire est intervenue en service après-vente pour identifier la cause d'une production insuffisante - en vain semble-t-il - et qu'aucun élément technique n'est produit pour établir l'origine de cette production insuffisante ou l'impossibilité d'obtenir une meilleure performance.
Si M. et Mme X. dans leurs différents courriers fustigent l'imputation par la société Rev'Solaire des piètres performances de l'installation à la présence d'un arbre, il convient de relever que les acquéreurs étaient pleinement informés du positionnement des panneaux par un schéma explicite qu'ils versent aux débats.
Dans ces circonstances, le seul fait que la production réelle ne soit à la mesure de ce qui avait été envisagé ne suffit pas à caractériser un dol et peut résulter d'une inexécution contractuelle, d'un défaut du matériel ou d'un défaut de conseil. »
4/ « En l'espèce, la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées produite par la société Financo est grossièrement erronée en ce qu'elle mentionne un montant total dû par l'emprunteur de 182.067,20 euros, reproduisant ainsi l'erreur figurant sur l'offre de crédit alors que le montant total dû par les emprunteurs était de 19 527,24 euros.
Cette anomalie conduit à retenir que le prêteur n'a pas satisfait son obligation d'information.
Pour autant, cette carence est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts contractuels en application de l'article L. 311-48 du code de la consommation.
Si, au regard du caractère d'ordre public de ces dispositions, la cour peut requalifier la demande indemnitaire présentée par M. et Mme X. sur ce fondement, il ne saurait être fait droit à leur demande au-delà du montant des intérêts contractuels prévus par l'offre de crédit du 12 avril 2016. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 9-A
ARRÊT DU 9 DÉCEMBRE 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/00571 (10 pages). N° Portalis 35L7-V-B7E-CBHTT. Décision déférée à la Cour : Jugement du 6 novembre 2019 - Tribunal d'Instance de MEAUX – R.G. n° 11-18-000937.
APPELANTE :
La société FINANCO
société anonyme à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège N° SIRET : XXX, [...], [...], [...], Représentée par Maître Olivier H. de la SELARL H.-K.-H.-H., avocat au barreau de l'ESSONNE
INTIMÉS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], [...], [...], Représenté et assistée de Maître Jessica C. de l'ASSOCIATION L & P ASSOCIATION D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : R241
Madame Y. épouse X.
née le [date] à [ville], [...], [...], Représentée et assistée de Maître Jessica C. de l'ASSOCIATION L & P ASSOCIATION D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : R241
La SAS S. P. & ASSOCIES en qualité de mandataire liquidateur de la société REV'SOLAIRE
[...], [...], DÉFAILLANTE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 3 novembre 2021, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Patricia GRANDJEAN, Présidente de chambre, chargée du rapport, Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère, Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, qui en ont délibéré.
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT : - RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Patricia GRANDJEAN, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, la société Rev'Solaire a conclu avec Mme X. et M. X. le 9 octobre 2011 un contrat de fourniture et pose d'un équipement comprenant notamment huit panneaux photovoltaïques et un ballon thermodynamique au prix de 21.400 euros. Le même jour, la société Financo a consenti à M. et Mme X. un crédit affecté à cette acquisition d'un montant de 21.400 euros, remboursable en 144 mensualités de 213,74 euros après une période de franchise de huit mois, moyennant un taux d'intérêt nominal de 5,40 % l'an.
A réception de l'attestation de livraison du 8 décembre 2011, la société Financo a débloqué les fonds dans les mains de la société Rev'Solaire.
Par jugement du tribunal de commerce d'Orléans du 30 octobre 2013, la société Rev'Solaire a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, puis d'une liquidation judiciaire prononcée le 9 juillet 2014.
Par acte sous seing privé en date du 21 février 2016, M. et Mme X. ont conclu avec la société Financo un accord en substituant au contrat de crédit initial un nouveau contrat de crédit d'un montant de 14.451,33 euros, remboursable en 120 mensualités de 145,22 euros moyennant un taux d'intérêts nominal de 3,84 %.
Saisi par M. et Mme X. d'une demande tendant principalement à l'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, le tribunal d'instance de Meaux, par un jugement réputé contradictoire rendu le 6 novembre 2019 auquel il convient de se reporter, a principalement :
- déclaré recevable les demandes de M. et Mme X. à l'encontre de Maître S. en qualité de liquidateur judiciaire de la société Rev'Solaire ;
- prononcé la nullité du contrat de vente et de prestation de services conclu le 9 octobre 2011 entre M. et Mme X. et la société Rev'Solaire ;
- constaté la nullité du prêt conclu entre la société Financo d'une part, et M. et Mme X. d'autre part le 9 octobre 2011 ;
- dit que la société Financo a commis une faute qui la prive du droit d'obtenir de M. et Mme X. restitution du capital emprunté ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Le tribunal a retenu que la clause de l'accord conclu le 21 février 2016 par laquelle les emprunteurs ont renoncé à toute action à l'encontre du prêteur sur le contrat initial au visa de l'article 2044 du code civil est abusive au sens de l'article R. 132-2 du code de la consommation. Il a rejeté le moyen tiré de la prescription de l'action. Il a relevé que le contrat de vente ne comportait pas l'ensemble des mentions prescrites par l'article L. 121-23 du même code et que la preuve de la confirmation de l'acte n'était pas rapportée. Il a retenu que la banque avait commis une faute dans le déblocage des fonds et que les demandeurs ne prouvaient pas avoir subi un préjudice.
[*]
Par une déclaration en date du 22 décembre 2019, la société Financo a relevé appel de cette décision.
Aux termes de conclusions remises le 24 juillet 2020, elle demande à la cour :
- de dire M. et Mme X. irrecevables et subsidiairement mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions,
- de réformer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
- de condamner solidairement M. et Mme X. à reprendre l'exécution du contrat de crédit, conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d'amortissement et à lui rembourser en une seule fois l'arriéré des échéances impayées,
- à titre subsidiaire, si la Cour venait à confirmer la nullité des conventions, de dire qu'elle n'a commis aucune faute à quelque titre que ce soit et que M. et Mme X. n'apportent nullement la preuve d'un préjudice de nature à priver la banque de son droit à restitution du capital,
- de condamner solidairement M. et Mme X. à lui rembourser le capital emprunté d'un montant de 21.400 euros au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,
- de condamner solidairement M. et Mme X. à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'appelante indique que M. et Mme X. ont fait état d'un jugement pénal obtenu à l'encontre de la société Rev'Solaire qui n'est pas produit mais aurait autorité de chose jugée.
Elle invoque par ailleurs l'autorité de la chose jugée par le protocole d'accord transactionnel signé par les parties le 21 février 2016 dont les termes sont conformes à l'article 2044 du code civil.
Elle soutient que la demande d'annulation du contrat principal fondée sur des irrégularités formelles du bon de commande ou sur le dol est prescrite en application de l'article 2224 du code civil et que la déclaration d'une créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Rev'Solaire n'a pu interrompre la prescription à l'encontre du prêteur.
S'agissant de la demande d'annulation du contrat principal pour dol, elle invoque l'autorité de la chose jugée au pénal à l'encontre de la société Rev'Solaire.
Elle note que les allégations de dol ne sont aucunement étayées et relève qu'aucun élément n'est fourni sur la réalité d'une promesse d'autofinancement ou sur la rentabilité de l'installation. Elle indique que le fait que seul M. L. ait signé le bon de commande et l'attestation de fin de travaux est indifférent dès lors que M. et Mme X. se sont engagés solidairement à son égard.
Elle soutient que le bon de commande est conforme aux dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation et subsidiairement indique au visa de l'article 1184 que les emprunteurs n'établissent pas que l'éventuelle carence du bon de commande ait porté sur un élément déterminant de leur consentement.
Au visa de l'article 1182 du code civil, l'appelante note qu'en attestant de la réception des travaux sans réserve, en procédant à un remboursement anticipé du crédit en utilisant l'installation et en vendant l'électricité à EDF, les emprunteurs ont entendu confirmer le contrat, nonobstant sa nullité relative éventuelle. Elle relève qu'ils avaient connaissance des irrégularités affectant l'acte, les mentions obligatoires étant copiées au verso du bon de commande. Elle rappelle que si la nullité du contrat de vente était prononcée, les emprunteurs resteraient tenus de restituer le capital emprunté.
Elle indique que le vendeur n'est pas le mandataire de la banque, elle se défend d'avoir à vérifier la mise en service de l'installation, de devoir contrôler la régularité du bon de commande et indique que les emprunteurs ne justifient pas d'un préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque en soulignant que le matériel et la prestation promis ont été effectivement livrés, M. et Mme X. disposant d'un équipement fonctionnel qui leur fournit un revenu.
[*]
Par des conclusions remises le 1er septembre 2021, M. et Mme X. demandent à la cour :
- de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts et d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner la société Financo à leur payer :
- la somme de 5.000 euros au titre du trouble de jouissance,
- la somme de 5.000 euros au titre de leur préjudice moral,
- la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les intimés relatent les circonstances dans lesquelles ils ont été démarchés et les déboires rencontrés avec la société Rev'Solaire.
Ils contestent l'existence d'une décision pénale et indiquent qu'ils ont seulement fait référence à la procédure d'admission de leur créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Rev'Solaire.
Ils exposent au visa de l'article R. 132-2 du code de la consommation que la clause du protocole d'accord conclu est abusive et contestent que leur action en nullité des contrats soit prescrite dans la mesure où ils n'ont découvert le faible rendement de l'installation qu'au mois de juin 2013 ou plus encore au mois de septembre 2016 lors de l'abattage de l'arbre auquel la venderesse imputait un défaut de rendement de l'installation. Ils invoquent l'effet interruptif de prescription de la déclaration de leur créance au passif de la société Rev'Solaire.
Ils soutiennent que le bon de commande méconnaît les dispositions de l'article L. 121-23 du code de la consommation notamment en ce qu'il ne précise pas les caractéristiques des panneaux, les conditions d'exécution du contrat, ou les délais de livraison et de mise en service. Ils indiquent au visa des articles 1109, 1116 et 1117 du code civil que leur consentement a été vicié et que le démarcheur a fait preuve de manœuvres dolosives en leur promettant une opération « blanche » sans aucune étude de faisabilité, un revenu annuel inatteignable, un paiement mensuel de ce revenu et en leur donnant l'assurance qu'aucune ombre d'arbre ne gênerait la production.
Ils se prévalent de l'article L. 312-55 du code de la consommation pour réclamer la nullité subséquente du contrat de crédit en maintenant que la clause de non-poursuites figurant dans le protocole d'accord conclu le 21 février 2016 est abusive.
Les intimés soutiennent que la banque, en s'abstenant de contrôler la régularité formelle du bon, a commis une négligence fautive la privant de sa créance de restitution du capital emprunté.
Ils notent que le prêteur a méconnu ses obligations précontractuelles telles qu'elles résultent des articles L. 341-1 et suivants, L. 312-12, L. 311-16 du code de la consommation dans leur nouvelle rédaction et soutiennent que la banque n'a pas vérifié leur solvabilité, tant pour le crédit consenti en 2011 que pour le crédit accordé en 2016.
Ils indiquent que la conclusion du protocole d'accord du 21 février 2016 leur a été imposée, qu'ils y ont consenti sous la pression et la menace d'une inscription au fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) et qu'on ne saurait y voir une exécution volontaire du contrat de crédit couvrant la nullité encourue.
Ils exposent que les divers manquements de la banque à ses obligations d'information et de contrôle ont fortement impacté leur situation personnelle, familiale et pécuniaire et détaillent le préjudice subi.
Régulièrement assigné par acte d'huissier signifié le 17 février 2020 conformément aux dispositions de l'article 655 du code de procédure civile, Maître S. ès qualités n'a pas constitué avocat.
[*]
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 septembre 2021.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Il est constant que le contrat principal conclu entre M. et Mme X. et la société Rev'Solaire est soumis aux dispositions des articles L. 121-21 ancien et suivants du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur au 9 octobre 2011 dès lors qu'il a été conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile.
Sur l'autorité de la chose jugée du jugement pénal et de l'accord conclu le 21 février 2016 :
Il ressort des pièces versées aux débats qu'après plusieurs échanges avec la venderesse relatifs à la faiblesse de la production de l'équipement, M. et Mme X., informés de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société Rev'Solaire, ont déclaré leur créance au passif de la procédure le 27 mars 2014 et leur créance a été admise à titre provisionnel pour la somme de 35 503,16 euros, après relevé de forclusion.
Alors qu'il n'est justifié d'aucune procédure pénale engagée à l'encontre de la société Rev'Solaire, il est retenu que c'est à cette admission de créance que M. et Mme X. faisaient référence dans le document signé le 21 février 2016.
Les développements de la société Financo relatifs à une décision pénale s'avèrent donc sans objet.
* * *
Il ressort d'un document intitulé « Protocole d'accord » qu'après avoir indiqué que la société Rev'Solaire n'avait pas exécuté ses obligations contractuelles et qu'elle faisait l'objet d'une liquidation judiciaire et que le rendement de l'équipement ne correspondait pas aux prévisions du vendeur et mettait les emprunteurs dans une situation financière difficile, M. et Mme X. et la société Financo ont convenu :
- de signer un nouveau contrat de crédit n° 49974193 pour un montant de 14.451,33 euros au « TEG de 3,91 % », remboursable en 120 mensualités de 162,56 euros assurance incluse,
- de clore le dossier n° 51431725 correspondant au crédit affecté initial, définitivement à la fin du délai de rétractation relatif à la signature du nouveau contrat.
L'acte prévoyait que faute pour l'une des parties de respecter l'une des conditions précitées, le protocole serait caduc de plein droit et l'amortissement du contrat de crédit 51431725 se poursuivrait selon les conditions initiales.
Il ajoutait : « Ce protocole d'accord constitue une transaction au sens de l'article 2044 du code civil et met définitivement un terme au litige apparu suite à la cessation d'activité de la SAS Rev'Solaire, chaque partie s'engageant à ne pas agir en justice ou à ne pas réclamer de sommes complémentaires ».
Il est un fait qu'une nouvelle offre de crédit a été signée par M. et Mme X. le 12 avril 2016 prévoyant un crédit de 14.451,33 euros remboursable en 120 mensualités de 145,22 euros hors assurance, au taux d'intérêt nominal de 3,84 % l'an, soit un taux annuel effectif global de 3,91 % l'an et que la société Financo a abandonné le recouvrement du premier crédit.
Alors qu'aucune disposition du code de la consommation n'interdit qu'un professionnel et un consommateur s'accordent pour mettre fin à un litige les opposant et concluent une transaction au sens de l'article 2044 du code civil, c'est à tort que le premier juge, assimilant improprement cet accord à un contrat au sens de l'article R. 132-2 (désormais R. 212-2) du code de la consommation a retenu que sa dernière disposition constituait une clause abusive.
Il appartient en revanche au juge de déterminer si l'accord invoqué à l'appui d'une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée constitue une transaction qui implique des concessions réciproques.
En l'espèce, les courriers échangés entre M. et Mme X. et la société Financo entre le mois de juillet 2015 et le mois de février 2016 révèlent que les emprunteurs s'étaient montrés défaillants dans le remboursement du crédit affecté initial et que, sous la menace d'une déclaration au fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, ceux-ci ont accepté un plan d'apurement portant sur deux mensualités impayées et le report d'une mensualité, leur courrier du 15 juillet 2015 s'achevant par des remerciements au préposé de la banque pour son écoute et la clarté de ses explications.
Ont suivi plusieurs courriers dans lesquels M. et Mme X. dénonçaient l'escroquerie de la société Rev'Solaire dont ils estimaient avoir été victimes, mentionnaient la possibilité de faire annuler le contrat principal et le crédit affecté, sollicitaient l'annulation du contrat de crédit et des courriers par lesquels la société Financo proposait une renégociation du contrat de crédit.
Il convient d'observer que M. et Mme X. avaient procédé à un remboursement partiel du contrat de crédit initial en acquittant au mois de septembre 2012 la somme de 4 500 euros issue de leur crédit d'impôt de sorte que les mensualités ont été réduites à 211,34 euros puis 211,17 euros (au lieu de 254,40 euros).
Le nouveau contrat de crédit proposé par le protocole d'accord portait sur un capital de 14.451,33 euros qui correspondait exactement au solde restant dû au titre du crédit antérieur (capital échu et à échoir, intérêts échus et intérêts de retard).
En proposant une renégociation du crédit, la société Financo a consenti une baisse du taux d'intérêt contractuel de 5,40 % l'an à 3,84 % l'an en allongeant la durée de remboursement de 22 mois (août 2024 à mai 2026), de sorte que le montant total à la charge des emprunteurs, compte tenu des sommes déjà remboursées par eux avant le mois de février 2016, s'établissait à un total 30.707,79 euros au lieu des 30 779,19 euros initialement convenus.
Il est ainsi avéré que le prêteur a consenti une concession dérisoire (en ce compris l'allongement de la période de remboursement) en contrepartie de l'abandon total de tout droit d'action afférent au contrat de crédit affecté initial dans le contexte d'une contestation de la validité du contrat principal.
En conséquence, contrairement à ce que soutient la société Financo, le document signé au mois de février 2016 n'emporte pas de concessions réciproques. Il ne vaut donc pas transaction au sens de l'article 2044 du code civil et n'emporte pas autorité de la chose jugée.
La fin de non-recevoir tirée de ce chef est donc rejetée.
Au surplus, il convient de relever qu'une transaction conclue entre les emprunteurs et le prêteur ne ferait pas obstacle à une action des premiers visant à l'annulation du contrat principal, une telle annulation emportant alors nullité du contrat de crédit affecté non pas à l'initiative des emprunteurs mais par l'effet même de la loi.
Sur l'action en annulation des contrats :
En application tant de l'article L. 110-4 du code de commerce que de l'article 2224 du code civil, l'action aux fins d'annulation du contrat de vente et de prestation de services conclu entre M. et Mme X. et la société Rev'Solaire se prescrit par cinq ans.
Si les intimés font valoir que leur déclaration de créance au passif de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société Rev'Solaire a interrompu le délai de prescription qui courrait à compter de la conclusion du contrat litigieux, force est de constater que cette action tendant à la reconnaissance d'une créance déclarée au surplus à titre provisionnel ne visait pas la nullité du contrat.
Or, le délai de prescription de l'action en annulation fondée sur des irrégularités formelles du bon de commande a commencé à courir à la date de signature de ce bon de commande, soit le 9 octobre 2011, soit plus de cinq années avant que M. et Mme X. assignent la société Rev'Solaire en la personne de son liquidateur judiciaire par acte du 22 juin 2018.
M. et Mme X. sont donc prescrits en leur action sur ce fondement.
* * *
M. et Mme X. poursuivent aussi l'annulation du contrat principal pour dol et soutenant qu'ils n'ont pu avoir connaissance du dol qu'ils invoquent qu'à la réception de la première facture de rachat de l'électricité produite par l'équipement litigieux en la comparant avec les données chiffrées de la simulation faite par le démarcheur.
De fait, c'est à réception de cette facture que M. et Mme X. ont pris attache avec la société Rev'Solaire pour dénoncer une production insuffisante et qu'une intervention de la société Rev'Solaire en date du 20 septembre 2013 a avéré la persistance de cette production faible.
Il est donc retenu qu'en assignant la société Rev'Solair le 22 juin 2018 et la société Financo le 21 juin 2018, M. et Mme X. ont agi dans un délai utile.
Ils sont recevables en leur demande de ce chef.
Selon l'article 1116 ancien du code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
Il ne se présume pas et doit être prouvé.
Le vice du consentement doit être apprécié à la date de conclusion du contrat.
En l'espèce, ni le bon de commande, ni la simulation chiffrée faite par le démarcheur ne font état de la présentation d'un investissement autofinancé, la mention d'une garantie de 90 % de rendement sur 25 ans sans autre référence quantitative signifiant seulement que les panneaux devaient conserver un rendement stable.
Il convient d'observer que la dénonciation d'un dol s'appuie sur une fiche de simulation dont les mentions manuscrites sont attribuées au démarcheur, alors que certaines d'entre elles sont très postérieures à la date de signature du bon de commande (ex la référence au crédit d'impôt versé le 28 août 2012), que la société Rev'Solaire est intervenue en service après-vente pour identifier la cause d'une production insuffisante - en vain semble-t-il - et qu'aucun élément technique n'est produit pour établir l'origine de cette production insuffisante ou l'impossibilité d'obtenir une meilleure performance.
Si M. et Mme X. dans leurs différents courriers fustigent l'imputation par la société Rev'Solaire des piètres performances de l'installation à la présence d'un arbre, il convient de relever que les acquéreurs étaient pleinement informés du positionnement des panneaux par un schéma explicite qu'ils versent aux débats.
Dans ces circonstances, le seul fait que la production réelle ne soit à la mesure de ce qui avait été envisagé ne suffit pas à caractériser un dol et peut résulter d'une inexécution contractuelle, d'un défaut du matériel ou d'un défaut de conseil.
En conséquence, M. et Mme X. sont déboutés de leur demande d'annulation du contrat principal.
Sur l'action en responsabilité contre le prêteur et l'exécution du contrat de crédit du 12 avril 2016 :
Selon l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
M. et Mme X. reprochent à la société Financo d'avoir commis des fautes en libérant les fonds entre les mains de la société Rev'Solaire sans vérifier la régularité du bon de commande.
Alors que les motifs qui précèdent rendent sans objet ce grief dès lors que le bon de commande n'est pas annulé, cette demande est en toute hypothèse prescrite, la libération des fonds ayant eu lieu au mois de décembre 2012 et l'action en justice étant introduite en 2018.
De même en est-il des griefs émis dans le cadre d'une action introduite en 2018 sur le fondement des obligations d'informations précontractuelles imposées au prêteur par les articles L. 311-6 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction applicable au litige, relativement à un contrat de crédit conclu le 9 octobre 2011.
* * *
M. et Mme X. reprochent enfin à la société Financo d'avoir manqué à ses obligations précontractuelles lors de la présentation de l'offre de crédit le 12 avril 2016.
Selon l'article L. 311-6 du code de la consommation (désormais L. 312-12), préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.
En l'espèce, la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées produite par la société Financo est grossièrement erronée en ce qu'elle mentionne un montant total dû par l'emprunteur de 182.067,20 euros, reproduisant ainsi l'erreur figurant sur l'offre de crédit alors que le montant total dû par les emprunteurs était de 19 527,24 euros.
Cette anomalie conduit à retenir que le prêteur n'a pas satisfait son obligation d'information.
Pour autant, cette carence est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts contractuels en application de l'article L. 311-48 du code de la consommation.
Si, au regard du caractère d'ordre public de ces dispositions, la cour peut requalifier la demande indemnitaire présentée par M. et Mme X. sur ce fondement, il ne saurait être fait droit à leur demande au-delà du montant des intérêts contractuels prévus par l'offre de crédit du 12 avril 2016.
En conséquence, la société Financo est condamnée à rembourser à M. et Mme X. les intérêts perçus jusqu'à ce jour au titre du crédit consenti le 12 avril 2016 et M. et Mme X. seront tenus de poursuivre l'exécution de ce contrat à compter du mois de décembre 2021 dans la seule limite de l'amortissement du capital.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,
- Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
- Rejette la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ;
- Déclare M. et Mme X. irrecevable en leurs demandes :
- d'annulation du contrat conclu avec la société Rev'Solaire le 9 octobre 2011 sur le fondement des articles L. 121-23 et suivants du code de la consommation,
- relatives au contrat de crédit conclu avec la société Financo le 9 octobre 2011 ;
- Rejette pour le surplus la fin de non-recevoir tiré de la prescription ;
- Déboute M. et Mme X. de leur demande d'annulation du contrat conclu avec la société Rev'Solaire le 9 octobre 2011 sur le fondement du dol ;
- Dit que la société Financo est déchue de son droit aux intérêts contractuels prévus par l'offre de crédit conclue le 12 avril 2016 ;
- Condamne la société Financo à restituer à M. et Mme X. les intérêts au taux contractuel perçus en exécution de ce contrat jusqu'à la date du présent arrêt ;
- Dit que M. et Mme X. poursuivront l'exécution de ce contrat de crédit à compter du mois de décembre 2021 selon le tableau d'amortissement dans la seule limite du capital amorti ;
- Condamne in solidum M. X. et Mme X. aux dépens de première instance et d'appel ces derniers pouvant être recouvrés directement par la SELARL H., K. H. H., avocats conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
- Dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du même code.
La greffière La présidente