CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 17 décembre 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 9324
CA PARIS (pôle 5 ch. 11), 17 décembre 2021 : RG n° 19/05241
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « En vertu de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeurent soumis à la loi ancienne. En l'espèce le contrat invoqué entre les parties, conclu le 5 octobre 2012 pour une durée de 5 ans et non renouvelé après le 1er octobre 2016, est ainsi soumis aux dispositions du code civil ancien. » [N.B. exclusion implicite de l’art. 1171]
2/ « Toute opération intégrant plusieurs contrats dont un contrat de location financière conclus concomitamment ou successivement entraînant l'interdépendance desdits contrats et ce malgré toute clause contraire, la résiliation de l'un quelconque d'entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres, sauf pour la partie à l'origine de l'anéantissement de cet ensemble contractuel à indemniser le préjudice causé par sa faute.
En l'espèce, la résiliation avant l'échéance quinquennale du terme des contrats, le 22 décembre 2015, du contrat de location auprès de B. Paribas Lease Group, a entraîné la caducité, par voie de conséquence, des contrats de fourniture et de prestation de service avec JBS. Les factures éditées après cette date ne sont donc pas dues au titre du contrat, de même que l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement. JBS sera déboutée de ces chefs.
Il n'est en revanche pas contesté que cette résiliation, à l'initiative de FIECI CFE - CGC est sans rapport avec le matériel fourni ou la qualité de la maintenance, mais conséquente à une solution qui lui a paru financièrement plus opportune auprès d'un autre fournisseur, la société Print Platinium. Dès lors, FIECI CFE - CGC qui s'était engagée sur une durée de 5 années avec JBS et a résilié le contrat de location financière sans inexécution de l'une quelconque des prestations de JBS, a commis une faute.
Quant à l'évaluation du préjudice subi par JBS du fait de cette faute, ayant entraîné la caducité du contrat 1 an et 10 mois avant son échéance, elle ne peut correspondre, comme le demande JBS, à la clause résolutoire, la caducité excluant l'application de la clause du contrat caduc stipulant une indemnité de résiliation. Il appartient donc à JBS de rapporter les éléments propres à évaluer le préjudice subi de ce fait. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 11
ARRÊT DU17 DÉCEMBRE 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/05241 (5 pages). N° Portalis 35L7-V-B7D-B7PPE. Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 décembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – R.G. n° 17/03898.
APPELANTE :
SAS JONATHAN BUREAUTIQUE SYSTEM
prise en la personne de ses représentants légaux [...], [...], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de BOBIGNY sous le numéro XXX, assistée de Maître Françoise V.-B. de l'ASSOCIATION G. -V., avocat au barreau de PARIS, toque : R147
INTIMÉE :
LA FÉDÉRATION NATIONALE DU PERSONNEL DE L'ENCADREMENT DES SOCIÉTÉS DE SERVICE INFORMATIQUE, DES ÉTUDES DU CONSEIL, DE L'INGÉNIERIE ET DE LA FORMATION
prise en la personne de ses représentants légaux [...], [...], représentée par Maître Francine H., avocat au barreau de PARIS, toque : D1250, assistée de Maître Pauline G., avocat au barreau de PARIS, toque : G0242
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 4 novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère, et Mme Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE, Conseillère. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Denis ARDISSON, Président de la chambre, Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère, Mme Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE, Conseillère.
Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.
ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, - signé par M. Denis ARDISSON, Président de la chambre et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties.
Il sera succinctement rapporté que le 5 octobre 2012, la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) a signé un bon de commande portant sur la location de deux photocopieurs pour une durée de 5 ans et un contrat de maintenance avec la sas Jonathan Bureautique System, spécialisée dans la fourniture, la maintenance, l'entretien et la réparation de photocopieurs, fax et scanner de la marque Canon.
Le 6 novembre 2012, elle a conclu avec la société la SA B. Paribas Lease Group un contrat de location financière relatif à ces prestations.
La FIECI CFE - CGC a décidé de résilier le contrat de location financière conclu avec la société B. Paribas Lease Group, le 22 décembre 2015.
Par courrier du 11 mai 2016, la sas Jonathan Bureautique System (JBS) a lui réclamé une indemnité de résiliation anticipée du contrat de 12.477,30 euros outre le règlement de la somme de 4.936,60 euros TTC au titre de factures impayées.
Vu le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 18 décembre 2018, qui a :
- débouté la sas Jonathan Bureautique System (JBS) de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) ;
- condamné la sas Jonathan Bureautique System (JBS) à payer à la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné la sas Jonathan Bureautique System (JBS) aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement.
Vu la déclaration d'appel de la sas Jonathan Bureautique System (JBS) du 7 mars 2019,
Vu l'article 455 du code de procédure civile,
[*]
Vu les dernières conclusions de la sas Jonathan Bureautique System (JBS) reçues par le réseau privé virtuel des avocats le 7 juin 2019 par lesquelles elle demande à la Cour de :
- Déclarer recevable et bien-fondé la sas Jonathan Bureautique System (JBS) en son appel ;
Y faisant droit et statuant à nouveau,
- Condamner la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) à verser à la sas Jonathan Bureautique System (JBS) la somme de 4.936,60 euros au titre de factures restées impayées, avec intérêts au taux légal à compter de la date d'échéance de chaque facture ;
- Condamner la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) à verser à la sas Jonathan Bureautique System (JBS) la somme de 160 euros à titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de quatre factures d'un montant de 40 euros, conformément aux articles L. 441-6 et D. 441-5 du code de commerce ;
- Dire et juger que la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) a rompu de façon anticipée et unilatérale le contrat de location par pure convenance personnelle et qu'elle doit donc être condamnée à lui verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice que cette dernière subit par sa faute ;
- Condamner la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) à verser à la sas Jonathan Bureautique System (JBS) le somme de 12.477,30 euros au titre de dommages-intérêts sur le fondement des articles 1134 et 1147 (ancienne numérotation) ;
- Rejeter toutes demandes, fins et prétentions de la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) ;
- Condamner la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) à verser à la sas Jonathan Bureautique System (JBS) la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) aux dépens d'instance conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
[*]
Vu les dernières conclusions de la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) reçues par le réseau privé virtuel des avocats le 21 juin 2019 par lesquelles elle demande à la cour :
Vu les dispositions de l'article 1171 du code civil ;
Vu les dispositions des articles 695, 699 et 700 du code procédure civile ;
Vu les dispositions contractuelles précitées ;
Vu la jurisprudence précitée,
- Recevoir la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) en ses demandes, fins et conclusions,
Et y faisant droit,
A titre principal, confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 18 décembre 2018 par la cinquième chambre du TGI de Paris :
- Constater de plus fort l'interdépendance du contrat de location de financière et du contrat de maintenance conclus concomitamment avec la SA B. Paribas Lease Group et la sas Jonathan Bureautique System (JBS) ;
En conséquence,
- Constater la caducité du contrat de maintenance conclu entre la Sas Jonathan Bureautique System (JBS) depuis le 1er janvier 2016 ;
- Débouter la sas Jonathan Bureautique System (JBS) de l'intégralité de ses demandes ;
A titre subsidiaire,
- constater que l'article 10 du contrat d'adhésion, produit par la Société JBS, crée un déséquilibre manifeste entre les parties au contrat,
- Dire et juger que cette clause est réputée non-écrite,
En conséquence,
- Débouter la sas Jonathan Bureautique System (JBS) de l'intégralité de ses demandes ;
A titre infiniment subsidiaire,
- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat liant les parties et ce, à compter du 1er janvier 2016 ;
- Débouter la sas Jonathan Bureautique System (JBS) de l'intégralité de ses demandes ;
En tout état de cause,
- Condamner la sas Jonathan Bureautique System (JBS) à verser à la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil, de l'ingénierie et de la formation (FIECI CFE - CGC) la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la sas Jonathan Bureautique System (JBS) au versement des éventuels dépens de l'instance sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile et dont recouvrement par Maître Francine H., avocat aux offres de droit.
[*]
Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 23 septembre 2021,
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR,
En vertu de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeurent soumis à la loi ancienne. En l'espèce le contrat invoqué entre les parties, conclu le 5 octobre 2012 pour une durée de 5 ans et non renouvelé après le 1er octobre 2016, est ainsi soumis aux dispositions du code civil ancien.
Aux termes de l'article 1134 du code civil ancien les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutés de bonne foi.
En l'espèce les parties s'accordent pour dire qu'il résulte du bon de commande de photocopieurs auprès de JBS du 5 octobre 2012 qui devait également en assurer la maintenance, et du contrat conclu entre FIECI CFE - CGC et B. Paribas Lease Group le 6 novembre suivant, que cette opération relève d'une location financière.
Toute opération intégrant plusieurs contrats dont un contrat de location financière conclus concomitamment ou successivement entraînant l'interdépendance desdits contrats et ce malgré toute clause contraire, la résiliation de l'un quelconque d'entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres, sauf pour la partie à l'origine de l'anéantissement de cet ensemble contractuel à indemniser le préjudice causé par sa faute.
En l'espèce, la résiliation avant l'échéance quinquennale du terme des contrats, le 22 décembre 2015, du contrat de location auprès de B. Paribas Lease Group, a entraîné la caducité, par voie de conséquence, des contrats de fourniture et de prestation de service avec JBS. Les factures éditées après cette date ne sont donc pas dues au titre du contrat, de même que l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement. JBS sera déboutée de ces chefs.
Il n'est en revanche pas contesté que cette résiliation, à l'initiative de FIECI CFE - CGC est sans rapport avec le matériel fourni ou la qualité de la maintenance, mais conséquente à une solution qui lui a paru financièrement plus opportune auprès d'un autre fournisseur, la société Print Platinium.
Dès lors, FIECI CFE - CGC qui s'était engagée sur une durée de 5 années avec JBS et a résilié le contrat de location financière sans inexécution de l'une quelconque des prestations de JBS, a commis une faute.
Quant à l'évaluation du préjudice subi par JBS du fait de cette faute, ayant entraîné la caducité du contrat 1 an et 10 mois avant son échéance, elle ne peut correspondre, comme le demande JBS, à la clause résolutoire, la caducité excluant l'application de la clause du contrat caduc stipulant une indemnité de résiliation. Il appartient donc à JBS de rapporter les éléments propres à évaluer le préjudice subi de ce fait.
En l'espèce il n'est pas contesté que le matériel a été restitué début janvier 2016 (pièce 9 FIECI CFE - CGC) ; JBS a ainsi pu le relouer à compter de cette date et aucune maintenance n'a plus été nécessaire pour FIECI CFE - CGC. Il résulte également de l'offre technique du nouveau prestataire Print Platinium (pièce 1 FIECI CFE - CGC) que ce dernier a pris en charge la procédure de restitution des matériels, le transport en retour des photocopieurs n'ayant ainsi pas été supporté par JBS. Enfin, la cour relève que JBS ne produit aucun élément sur la nature du préjudice qu'elle allègue avoir subi, alors que cette charge lui incombe. Faute de permettre à la cour d'évaluer ce préjudice, elle doit être déboutée de sa demande indemnitaire.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté JBS de l'ensemble de ses demandes ainsi qu'en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.
Au vu de ce qui précède, il y a lieu de laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens en appel, en application de l'article 696 du code de procédure civile, et en conséquence, de débouter les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles en application de l'article 700 du même code.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement,
Y ajoutant,
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens,
Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 6151 - Code civil et Droit commun - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Droit postérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 et à la loi du 20 avril 2018 - Art. 1171 C. civ. - Application dans le temps
- 6392 - Code civil et Droit commun - Sanction indirecte des déséquilibres significatifs – Indivisibilité dans les locations financières - Droit postérieur aux arrêts de Chambre mixte