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CA LYON (3e ch. A), 13 janvier 2022

Nature : Décision
Titre : CA LYON (3e ch. A), 13 janvier 2022
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 3e ch.
Demande : 19/01402
Date : 13/01/2022
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 22/02/2019
Référence bibliographique : 5889 (art. L. 221-3 C. consom.), 5947 (domaine, photocopieur)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9346

CA LYON (3e ch. A), 13 janvier 2022 : RG n° 19/01402 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Dans ses écritures prises en application de l'arrêt avant-dire droit précité, la société Nauti Services Marseille poursuit la nullité du contrat de location comme dans ses premières conclusions du 6 novembre 2019 sur le fondement d'un moyen nouveau, à savoir qu'elle dénonce désormais la nullité de ce contrat pour violation des règles d'ordre public du droit de la consommation en arguant d'un défaut des mentions relatives au droit de rétractation alors qu'initialement, elle se prévalait de sa lettre de rétractation du 11 janvier 2018 pour conclure à la nullité du contrat litigieux.

La réouverture des débats ordonnée par l'arrêt avant-dire droit précité portait sur les dispositions expressément mentionnées par la cour, à savoir les conséquences à tirer de l'exercice du droit de rétractation par la société Nauti Services Marseille au-delà des délais légaux de 14 jours et 12 mois. Toutefois, dès lors que la clôture a été révoquée à l'occasion de cette réouverture des débats, il n'est pas interdit aux parties de soulever un nouveau moyen ; la société Nauti Services Marseille est donc en droit d'invoquer ce nouveau moyen et ce d'autant qu'il tend aux mêmes fins, à savoir la nullité du contrat de location.

Il est rappelé que dans son arrêt avant-dire droit du 23 septembre 2021, la cour a d'ores et déjà motivé :

- d'une part, que la société Nauti Services Marseille pouvait valablement invoquer le bénéfice des dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation renvoyant aux articles L. 221-5 et suivants dès lors que le contrat qu'elle a signé avec la société Locam a été souscrit hors établissement, que l'objet de ce contrat n'entre pas dans le champ de son activité principale et que le nombre de salariés qu'elle emploie est inférieur ou égal à 5, conditions cumulatives,

- d'autre part, que le contrat de location signé avec la société Locam n'était pas un contrat portant sur les services financiers échappant au champ d'application de l'article L. 221-3 précité sinon un contrat de location de matériel.

Il en résulte que le contrat de location signé entre la société Nauti Services Marseille et la société Locam doit contenir toutes les informations mentionnées aux articles L. 221-5 et L. 221-9 tels qu'insérés aux sections II et III du chapitre 1er « contrats conclus à distance et hors établissement » au nombre desquelles l'indication du délai et des modalités d'exercice du droit de rétractation ainsi que le formulaire type de rétractation (...), sous peine d'encourir la nullité expressément prévue à l'article L. 242-1 du code de la consommation.

Dès lors que ce contrat ne comporte ni bordereau de rétractation ni information quant au droit de rétractation, sa nullité doit être prononcée, quand bien même la société Nauti Services Marseille a adressé sa lettre de rétractation tardivement le 11 janvier 2018, ce qu'elle admet en concluant que le délai pour se rétracter expirait « au 19 juillet 2017 au plus tard ».

La nullité entraînant l'effacement rétroactif du contrat les parties doivent être remises dans leur situation initiale, y compris lorsque le contrat annulé a reçu un commencement d'exécution. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

TROISIÈME CHAMBRE A

ARRÊT DU 13 JANVIER 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/01402. N° Portalis DBVX-V-B7D-MG4G. [Sur appel de] Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ÉTIENNE, Au fond, du 8 janvier 2019 : RG n° 2018j1295.

 

APPELANTE :

SARL NAUTI SERVICES

[...], [...], Représentée par Maître Peggy J. de la SCP G. B. A. J., avocat au barreau de LYON, toque : 673 et ayant pour avocat plaidant, Maître S.S. M., avocat au barreau de MARSEILLE

 

INTIMÉE :

SAS LOCAM

[...], [...], Représentée par Maître Michel T. de la SELARL L., avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE

 

Date de clôture de l'instruction : 21 octobre 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 3 novembre 2021

Date de mise à disposition : 16 décembre 2021 prorogé au 13 janvier 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Anne-Marie ESPARBÈS, président, - Hélène HOMS, conseiller, - Catherine CLERC, conseiller, assistées pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier.

A l'audience, Catherine CLERC a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Anne-Marie ESPARBÈS, président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 28 janvier 2016, la SARL Nauti Services Marseille a signé avec la SAS Locam un contrat de location moyennant le règlement de 21 loyers trimestriels de 1.196,55 € TTC assurance incluse, destinés à financer l'imprimante professionnelle multifonctions qu'elle avait commandée à la société Neos Copy selon bon de commande signé le même jour.

Le procès-verbal de livraison et de conformité a été signé le 1er février 2016 par la société Nauti Services Marseille.

Estimant que le fournisseur n'avait pas respecté ses engagements visés au bon de commande, la société Nauti Services Marseille, par courrier du 11 janvier 2018,

a sollicité auprès de la société Locam l'annulation du contrat de location sur le fondement de l'article L. 221-3 du code de la consommation en usant de son droit de rétractation ; par courrier en réponse du 25 janvier 2018, la société Locam a rejeté cette demande au motif que la rétractation visée par ce texte ne s'applique pas aux professionnels.

Par jugement du 8 février 2018, le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a ouvert la procédure de liquidation judiciaire de la société Neos Copy et désigné Maître De C. en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 15 mars 2018, la société Nauti Services Marseille a déclaré au passif de la liquidation judiciaire une créance chirographaire de 66.675,60 euros au titre du contrat souscrit avec la débitrice.

Elle a cessé de s'acquitter des loyers trimestriels après les 8 premières échéances et n'a pas régularisé les arriérés malgré une mise en demeure recommandée avec AR visant la clause résolutoire prévue au contrat délivrée à son encontre le 30 juillet 2018 par la société Locam.

Par acte extrajudiciaire du 4 septembre 2018, la société Locam a fait assigner en paiement la société Nauti Services Marseille devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne.

Par jugement « contradictoire » du 8 janvier 2019, le tribunal de commerce précité a :

- condamné la société Nauti Services Marseille à payer à la société Locam la somme de 16.751,70 euros et celle de 1 euro à titre de clause pénale, outre intérêts au taux légal à dater de l'assignation,

- dit ne pas y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens seront payés par la société Nauti Services Marseille à la société Locam,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement, nonobstant toutes voies de recours et sans caution.

La société Nauti Services Marseille a interjeté appel par acte du 22 février 2019.

Selon ordonnance de référé du 3 mai 2019, la juridiction du premier président a rejeté la demande de la société Nauti Services Marseille aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré.

 

Par conclusions du 6 novembre 2019 fondées sur l'article L. 212-3 (comprendre L. 221-3) du code de la consommation, la société Nauti Services Marseille a demandé à la cour de :

- dire et juger son appel recevable en la forme et l'accueillir en son recours,

- infirmer le jugement dont appel du 8 janvier 2019 en toutes ses dispositions contraires aux présentes écritures,

statuant à nouveau,

- dire et juger que sa demande de rétractation l'est pour de justes motifs et est conforme à l'article L. 212-3 (comprendre L. 221-3) du code de la consommation,

en conséquence,

- annuler judiciairement en toutes ses dispositions le contrat de location du 28 janvier 2016 et la décharger de tout engagement financier à l'égard de la société Locam,

- débouter la société Locam de ses fins, demandes et conclusions,

- condamner la société Locam à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel, ceux compris afférents aux frais et débours d'exécution forcée et de référé en demande d'arrêt de l'exécution provisoire.

[*]

Par conclusions du 13 août 2019, fondées sur les articles 1103 et suivants, 1231-2 et 1231-5 du code civil et sur l'article 14 du code de procédure civile, la société Locam a sollicité que la cour :

- dise non fondé l'appel de la société Nauti Services Marseille et la déboute de toutes ses demandes,

- confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a réduit à l'euro symbolique la clause pénale de 10% sur les sommes dues,

- réformant de ce chef, condamne la société Nauti Services Marseille à lui payer la somme complémentaire de 1 675,18 euros,

- condamne la société Nauti Services Marseille à lui régler une indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la même en tous les dépens d'instance comme d'appel.

[*]

Par arrêt avant dire-dire droit du 23 septembre 2021, la cour a :

- rectifié l'erreur matérielle affectant le jugement déféré en ce qu'il doit être porté en son dispositif la mention suivante : « le tribunal statuant publiquement par décision réputée contradictoire et en premier ressort » aux lieu et place de la mention erronée : « le tribunal statuant publiquement par décision contradictoire et en premier ressort »,

- ordonné la réouverture des débats avec révocation de l'ordonnance de clôture à l'audience de plaidoirie du 3 novembre 2021à 13 h. 30, sans renvoi possible, et nouvelle clôture au 21 octobre 2021, les parties étant invitées à présenter leurs observations sur la date à laquelle la société Nauti Services Marseille a adressé sa demande de rétractation à la société Locam et sur les conséquences à en tirer au regard des dispositions de l'article L. 221-20 du code de la consommation,

- réservé les autres demandes en fin de cause.

[*]

Dans ses dernières conclusions déposées le 19 octobre 2021 sur le fondement des articles L. 212-3 (comprendre L. 221-3) et L. 221-20 du code de la consommation, 1128 et 1162 du code civil, la société Nauti Services Marseille demande que la cour, jugeant son appel recevable en la forme, au fond infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions contraires aux présentes écritures, et statuant à nouveau :

- juge que sa demande de rétractation est revendiquée pour de justes motifs et est conforme à l'article L. 212-3 (comprendre L. 221-3) du code de la consommation,

- statue ce que de droit sur la conformité formelle de cette demande de rétractation du 11 janvier 2018,

- en tout état de cause, juge nul et de nul effet pour enfreindre la réglementation d'ordre public attachée au droit de la consommation et annule judiciairement en toutes ses dispositions le contrat de location du 28 janvier 2016,

- la décharge de tout engagement financier à l'égard de la société Locam et notamment remette les parties en l'état antérieur à la conclusion du contrat du 28 janvier 2016, et condamne la même société à rembourser toutes sommes qui lui ont été acquittées à tort dans le cadre de l'exécution spontanée du contrat et celles acquittées par voie d'exécution forcée en vertu du jugement déféré du 8 janvier 2019,

- condamne la société Locam à lui payer la somme de 10.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, ceux compris afférents aux frais et débours d'éxécution forcée et de référé en demande d'arrêt de l'exécution provisoire.

[*]

La société Locam n'ayant pas déposé de nouvelles écritures après l'arrêt avant-dire droit précité, il sera statué au vu de ses conclusions déposées initialement le 13 août 2019.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Sauf indication contraire, les articles visés dans la présente décision sont issus du code de la consommation.

Dans ses écritures prises en application de l'arrêt avant-dire droit précité, la société Nauti Services Marseille poursuit la nullité du contrat de location comme dans ses premières conclusions du 6 novembre 2019 sur le fondement d'un moyen nouveau, à savoir qu'elle dénonce désormais la nullité de ce contrat pour violation des règles d'ordre public du droit de la consommation en arguant d'un défaut des mentions relatives au droit de rétractation alors qu'initialement, elle se prévalait de sa lettre de rétractation du 11 janvier 2018 pour conclure à la nullité du contrat litigieux.

La réouverture des débats ordonnée par l'arrêt avant-dire droit précité portait sur les dispositions expressément mentionnées par la cour, à savoir les conséquences à tirer de l'exercice du droit de rétractation par la société Nauti Services Marseille au-delà des délais légaux de 14 jours et 12 mois.

Toutefois, dès lors que la clôture a été révoquée à l'occasion de cette réouverture des débats, il n'est pas interdit aux parties de soulever un nouveau moyen ; la société Nauti Services Marseille est donc en droit d'invoquer ce nouveau moyen et ce d'autant qu'il tend aux mêmes fins, à savoir la nullité du contrat de location.

Il est rappelé que dans son arrêt avant-dire droit du 23 septembre 2021, la cour a d'ores et déjà motivé :

- d'une part, que la société Nauti Services Marseille pouvait valablement invoquer le bénéfice des dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation renvoyant aux articles L. 221-5 et suivants dès lors que le contrat qu'elle a signé avec la société Locam a été souscrit hors établissement, que l'objet de ce contrat n'entre pas dans le champ de son activité principale et que le nombre de salariés qu'elle emploie est inférieur ou égal à 5, conditions cumulatives,

- d'autre part, que le contrat de location signé avec la société Locam n'était pas un contrat portant sur les services financiers échappant au champ d'application de l'article L. 221-3 précité sinon un contrat de location de matériel.

Il en résulte que le contrat de location signé entre la société Nauti Services Marseille et la société Locam doit contenir toutes les informations mentionnées aux articles L. 221-5 et L. 221-9 tels qu'insérés aux sections II et III du chapitre 1er « contrats conclus à distance et hors établissement » au nombre desquelles l'indication du délai et des modalités d'exercice du droit de rétractation ainsi que le formulaire type de rétractation (...), sous peine d'encourir la nullité expressément prévue à l'article L. 242-1 du code de la consommation.

Dès lors que ce contrat ne comporte ni bordereau de rétractation ni information quant au droit de rétractation, sa nullité doit être prononcée, quand bien même la société Nauti Services Marseille a adressé sa lettre de rétractation tardivement le 11 janvier 2018, ce qu'elle admet en concluant que le délai pour se rétracter expirait « au 19 juillet 2017 au plus tard ».

La nullité entraînant l'effacement rétroactif du contrat les parties doivent être remises dans leur situation initiale, y compris lorsque le contrat annulé a reçu un commencement d'exécution.

La société Locam dont les demandes en paiement sont consécutivement rejetées, doit être condamnée à restituer à la société Nauti Services Marseille les loyers trimestriels que celle-ci lui a payés depuis le 10 mai 2016 (premier loyer de 1.196,55 € assurance incluse selon la facture unique de loyers produite en pièce 4 par la société Locam) jusqu'à l'échéance trimestrielle du 10 novembre 2017, les loyers étant demeurés impayés à partir de cette date.

Il n'y a pas lieu d'ordonner la restitution des sommes dites prélevées par voie d'exécution forcée du jugement déféré assorti de l'exécution provisoire, le présent arrêt valant titre pour en obtenir la restitution.

 

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La société Locam qui succombe, doit supporter outre ses frais de procédure, les dépens de première instance et d'appel les seuls sur lesquels la cour peut statuer, et verser à la société Nauti Services Marseille une indemnité de procédure de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Vu l'arrêt avant-dire droit du 23 septembre 2021,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la SAS Locam de sa demande de frais irrépétibles,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et ajoutant,

Annule le contrat de location signé le 28 janvier 2016 entre la SARL Nauti Services Marseille et la SAS Locam pour non-respect des dispositions légales relatives au droit de rétractation,

Déboute en conséquence la SAS Locam de toutes ses demandes,

Condamne la SAS Locam à rembourser à la SARL Nauti Services Marseille les loyers trimestriels assurance comprise versés entre le 10 mai 2016 et le 10 novembre 2017 inclus,

Dit que le présent arrêt vaut titre pour réclamer à la SAS Locam la restitution des sommes payées en exécution du jugement déféré,

Condamne la SAS Locam à verser à la SARL Nauti Services une indemnité de procédure de 2.000 €,

Déboute la SAS Locam de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en appel,

Condamne la SAS Locam aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier,                           Le Président,