CA VERSAILLES (3e ch.), 17 février 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9421
CA VERSALILLES (3e ch.), 17 février 2022 : RG n° 20/03546
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Ainsi que l'a bien jugé le tribunal, s'il était urgent et nécessaire à la conservation de l'immeuble de faire réaliser les travaux destinés à arrêter la fuite d'eau, la réparation de l'ascenseur n'était pas urgente au sens du texte précité puisque la panne de cet équipement ne menaçait pas l'immeuble, pas plus que les travaux nécessaires à sa remise en service ne peuvent être qualifiés d'accessoires à la réparation de la fuite.
S'il appartenait à l'appelante de faire réaliser au plus vite un devis de réparation de l'ascenseur, qui constitue à l'évidence un équipement nécessaire voire indispensable dans un immeuble de sept étages, ce qu'elle a d'ailleurs fait, elle ne pouvait engager les travaux de sa propre initiative, ce d'autant que les clauses du contrat d'assurance lui imposaient de solliciter l'autorisation de l'assureur.
S'agissant des demandes pressantes auxquelles la société appelante a été confrontée pour réparer au plus vite l'ascenseur, celles-ci ne l'autorisaient pas à faire réaliser sa réparation et il lui appartenait de répondre aux copropriétaires que le conseil syndical devait l'autoriser et que si la réparation était réalisée avant le passage de l'expert d'assurance, elle resterait à la charge de la copropriété. »
2/ « La clause querellée du contrat d'assurance était la suivante : « l'assuré a l'obligation de s'abstenir de procéder à toute réparation sans l'accord de l'assureur. Toutefois en cas d'urgence, le souscripteur ou l'assuré peut demander à l'assureur l'autorisation de réparer immédiatement les biens endommagés, à condition que ces réparations ne modifient pas l'aspect du sinistre ».
L'appelante soutient que cette clause serait abusive et que l'assureur ne peut utilement l'invoquer pour refuser sa garantie en ce qu'elle crée entre les parties un déséquilibre significatif, la réalisation de travaux qui « ne modifient pas l'aspect » du sinistre étant impossible et l'assuré étant soumis à un accord de son assureur, lequel peut attendre des mois pour donner son autorisation, l'expertise s'étant en l'espèce achevée plus de 2 ans après le sinistre.
Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date de conclusion du contrat, […]. L'assureur ne discute pas que le syndicat des copropriétaires est un « non professionnel ».
Toutefois, l'appelante ne démontre pas en quoi cette clause créerait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations de l'assuré et de l'assureur. Il apparaît en effet nécessaire que l'assureur puisse constater le dommage qu'on lui demande de garantir et la circonstance qu'en cas d'urgence, l'assuré puisse demander à l'assureur l'autorisation de réparer immédiatement les biens endommagés, à condition que ces réparations ne modifient pas l'aspect du sinistre, apparaît respectueuse des besoins et des obligations de chacune des parties. Contrairement à ce qu'indique l'appelante, il n'est pas impossible de prendre des mesures urgentes qui ne compromettent pas « l'aspect du sinistre », ce qui a été le cas en l'espèce s'agissant de la réparation destinée à mettre un terme à la fuite.
En conséquence, le caractère abusif de la clause n'étant pas établi, il apparaît que, n'en ayant pas respecté les termes, elle a permis à l'assureur de refuser sa garantie. Elle a donc privé le syndicat des copropriétaires de la possibilité de percevoir une indemnité du chef de la réparation de l'ascenseur et a de surcroît engagé la dépense à ce titre sans autorisation de la copropriété. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 17 FÉVRIER 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/03546. N° Portalis DBV3-V-B7E-T7GF. Code nac : 62A. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 9 mars 2020 par le TJ de NANTERRE (8e ch.) : R.G. n° 16/03563.
LE DIX SEPT FEVRIER DEUX MILLE VINGT DEUX, La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTE :
SARL ADVISORING IMMOBILIER
[...], [...], Représentant : Maître Johanna T. de l'AARPI LE C., Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0154, Représentant : Maître Camille D., Plaidant, avocat au barreau de PARIS même cabinet
INTIMÉES :
1/ SARL MS AMLIN INSURANCE venant aux droits de la société AMLIN CORPORATE INSURANCE NV
[...], [...]
3/ SAS AMLIN FRANCE LEGACY SERVICES
[...], [...]
Représentant : Maître Claire R., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - N° du dossier 2201099, Représentant : Maître Anne-isabelle T., Plaidant, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : P0429
INTIMÉ :
2/ Syndicat des copropriétaires C. A.
représenté par de son syndic la SAS HABITAT CONTACT ([...]) [...], [...], Représentant : Maître Mélina P., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 24971, Représentant : Maître Benoît A. de la SELASU CABINET A., Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0608
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 décembre 2021 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-José BOU, Président, Madame Françoise BAZET, Conseiller, Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller.
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
La société Advisoring Immobilier a été, jusqu'au 3 avril 2014, le syndic de l'immeuble situé [adresse] (92) soumis au statut de la copropriété.
A la suite de l'installation de compteurs d'eau froide, une fuite d'eau s'est produite dans l'immeuble le 13 mai 2013. Le sinistre s'est propagé et a provoqué l'inondation de l'ensemble du palier avant de s'écouler par le fuseau de l'ascenseur provoquant des dommages à la machinerie de celui-ci.
Le 14 mai 2013, la société Advisoring Immobilier a déclaré ce sinistre auprès de la société d'assurance de la copropriété, la société Amlin France, puis a fait réaliser un devis de réparation de la cabine d'ascenseur par la société Schindler le 16 mai 2013 pour un montant de 12.832,59 euros.
Le syndic a accepté le devis et fait engager les travaux dès le 17 mai 2013.
La société Duotec a été mandatée en qualité d'expert assurance et a organisé un premier rendez-vous d'expertise le 12 juin 2013.
Le syndicat des copropriétaires C. A., [...] (ci-après le syndicat des copropriétaires), représenté par son syndic Habitat Contact a considéré que la société Advisoring Immobilier, avait commis une faute contractuelle dans la gestion de ce sinistre en faisant effectuer la réparation de l'ascenseur sans attendre la visite de l'expert mandaté par la société d'assurance de la copropriété.
Invoquant cette faute, le syndicat des copropriétaires a, par acte du 21 janvier 2016, fait assigner la société Advisoring Immobilier devant le tribunal de grande instance de Nanterre afin, principalement, de la voir condamnée à lui payer la somme de 12.832,59 euros en réparation de son préjudice.
Par acte du 3 novembre 2017, le syndicat des copropriétaires a fait assigner en garantie l'assureur de la copropriété, la société Amlin France Legacy Service (ci-après, la société Amlin France).
Les procédures ont été jointes.
Par jugement du 9 mars 2020, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
- constaté la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société Amlin France et déclaré cette action irrecevable,
- condamné la société Advisoring Immobilier à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 12.832,59 euros,
- condamné la société Advisoring Immobilier à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
- condamné le syndicat des copropriétaires à verser à la société Amlin France la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,
- ordonné l'exécution provisoire.
[*]
Par acte du 23 juillet 2020, la société Advisoring Immobilier a interjeté appel de cette décision et, aux termes de conclusions du 20 octobre 2020, demande à la cour de :
- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau :
- débouter le syndicat des copropriétaires et la société Amlin France de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions formulées à son encontre,
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la société Amlin à lui verser la somme de 1.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la société Amlin à lui verser la somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
[*]
Par dernières écritures du 8 janvier 2021, les sociétés Amlin France et MS Amlin Insurance demandent à la cour de :
A titre liminaire :
- donner acte à la société MS Amlin Insurance de ce qu'elle intervient à la procédure aux lieu et place de la société Amlin France,
- mettre hors de cause la société Amlin France,
A titre principal :
- rejeter l'appel incident relevé par le syndicat des copropriétaires,
- confirmer en tous points le jugement entrepris,
A titre subsidiaire, si le jugement entrepris venait à être infirmé concernant ses chefs relatifs à la société MS Amlin Insurance :
- juger mal fondée la demande de paiement du syndicat des copropriétaires,
- débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble des demandes dirigées à l'encontre de la société Amlin France,
- constater que la société Amlin ne peut pas être condamnée au-delà de ses limites de garantie,
En tout état de cause :
- condamner tout succombant à payer à la société Amlin la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.
[*]
Par dernières écritures du 8 avril 2021, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de :
- déclarer la société Advisoring Immobilier mal fondée en son appel, l'en débouter,
En conséquence :
- débouter la société Advisoring Immobilier et la société Amlin France de toutes leurs demandes,
- dire le syndicat des copropriétaires bien-fondé dans ses conclusions et toutes ses demandes,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré pour ce qui concerne la mise en cause de la responsabilité de la société Advisoring Immobilier et les condamnations prononcées à son encontre,
Y ajoutant :
- condamner la société Advisoring Immobilier à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 10.000 euros à titre d'indemnisation de son préjudice supplémentaire subi du fait de la résistance abusive de la société Advisoring Immobilier,
- condamner la société Advisoring Immobilier à verser au syndicat des copropriétaires une somme supplémentaire de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens 'étant rappelé le nombre de procédures supportées par le syndicat des copropriétaires du fait de la société Advisoring Immobilier',
- déclarer recevable et bien fondé le syndicat des copropriétaires en son appel incident et y faire droit,
Statuant à nouveau :
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu la prescription biennale de l'action en garantie engagée à l'encontre de la société Amlin par acte en date du 3 novembre 2017,
- condamner « solidairement » la société Amlin France à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 12.832,59 euros TTC,
- condamner « solidairement » la société Amlin France à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec recouvrement direct.
[*]
La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 octobre 2021.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI :
Le tribunal, après avoir rappelé que le syndic d'une copropriété pouvait, en cas d'urgence, faire procéder de sa propre initiative à l'exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de l'immeuble, a jugé que s'il était établi que la réparation de la fuite à l'origine des désordres présentait un caractère d'urgence, le syndic ne démontrait pas qu'il était indispensable de procéder en urgence à la remise en état de l'ascenseur. Observant que l'assureur de la copropriété n'avait pas pu constater la matérialité des dommages ni procéder au chiffrage précis des dommages en l'absence de détails dans la facture de la société Schindler, le tribunal a considéré que le lien entre le fait que les travaux aient été réalisés avant l'expertise et le refus de prise en charge opposé par l'assureur était établi. Il a ainsi considéré que le syndic avait engagé sa responsabilité et qu'il devait être fait droit à la demande du syndicat des copropriétaires.
L'appelante fait valoir qu'elle n'a commis aucune faute. Elle indique que, tant les travaux de réparation de la fuite que ceux de l'ascenseur étaient indiscutablement urgents : les premiers pour mettre un terme à l'aggravation du préjudice et les seconds pour permettre l'accès des copropriétaires aux 7 étages de l'immeuble. Elle observe que si, par extraordinaire, la cour estimait que la réparation de l'ascenseur n'était pas urgente, en tout état de cause, elle doit être considérée comme accessoire aux travaux de réparation de la fuite puisqu'elle en est la conséquence directe et relève donc à ce titre de l'urgence. Elle rappelle qu'à la date de la réalisation des travaux, elle devait faire face à :
- un assureur qui restait silencieux malgré le caractère urgent de la demande (déclaration de sinistre du 14 mai 2013, contact du 16 mai 2013 pour alerter sur l'urgence et réitérée par courrier le 22 mai 2013)
- une urgence à faire réaliser des travaux (risque pour l'immeuble et indispensable pour le besoin des copropriétaires s'agissant d'un immeuble de 7 étages)
- aux réclamations unanimes de la copropriété
- aux injonctions du conseil syndical de ne pas laisser l'ascenseur à l'arrêt plus de 48h.
Elle indique que l'expert a retenu sans contestation possible que l'assuré (à savoir la copropriété) était un « assuré lésé », après avoir identifié les causes du sinistre et ses conséquences sur les parties communes (notamment « d'importants dommages » sur « la machinerie de l'ascenseur »).
Elle considère que la clause du contrat d'assurance de la copropriété aux termes de laquelle l'assuré a l'obligation de s'abstenir de procéder à toute réparation sans l'accord de l'assureur et, en cas d'urgence, doit demander à l'assureur l'autorisation de réparer immédiatement les biens endommagés à condition que ces réparations ne modifient pas l'aspect du sinistre, est une clause abusive qui doit être annulée.
Elle ajoute qu'en l'espèce, l'absence d'indemnisation de la copropriété n'est pas liée :
- à la réalisation des travaux avant le passage de l'expert,
- à l'absence de détermination de l'origine du sinistre (un lot privatif),
- ni à l'absence de constat matériel des désordres subis par la copropriété (cf. rapport d'expertise),
mais bien à une demande tardive de pièces de l'expert d'assurance vraisemblablement non satisfaite par le nouveau syndic de la copropriété (donc par le syndicat des copropriétaires lui-même).
Elle indique qu'en tout état de cause, le syndicat des copropriétaires a fait choix de conserver la société habitat Contact comme son syndic, et que les fautes de ce dernier dans le défaut de d'indemnisation du sinistre et donc la réalisation du préjudice lui sont directement imputables par un lien de causalité patent.
Elle en déduit que le syndicat des copropriétaires, par l'intermédiaire de son syndic qui le représente, est seul responsable de son préjudice par ses fautes dans la gestion de son sinistre et de ses suites.
* * *
Il résulte de la déclaration de sinistre et du rapport de l'expert mandaté par l'assureur de l'immeuble que le 13 mai 2013 vers 20 h. s'est produit une fuite sur collet battu reliant la canalisation privative du lot 34 au compteur divisionnaire ; le sinistre a provoqué l'inondation de l'ensemble du palier avant de s'écouler par le fuseau de l'ascenseur provoquant de ce fait d'importants dommages à la machinerie. L'immeuble était réceptionné depuis moins d'un an et les compteurs d'eau privatifs avaient été installés le jour même par la société Proxiserve.
Par courrier du 7 mars 2016, l'expert d'assurance a écrit au syndic de l'immeuble : « nous vous précisons que, dans la présente affaire et malgré nos demandes, nous n'avons jamais pu constater la matérialité des dommages, ni obtenir des devis détaillés concernant la remise en état des ascenseurs. Aussi, nous ne sommes pas en mesure de pouvoir procéder au chiffrage précis des dommages ne disposant pas de factures de remise en état dénouées de tout détail ».
Il n'est pas produit de courrier que la société Amlin aurait écrit à son assuré pour décliner sa garantie, et elle a invoqué la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires à son encontre devant les premiers juges.
Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, le syndic est notamment chargé « d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien et, en cas d'urgence, de faire procéder de sa propre initiative à l'exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de celui-ci ».
Ainsi que l'a bien jugé le tribunal, s'il était urgent et nécessaire à la conservation de l'immeuble de faire réaliser les travaux destinés à arrêter la fuite d'eau, la réparation de l'ascenseur n'était pas urgente au sens du texte précité puisque la panne de cet équipement ne menaçait pas l'immeuble, pas plus que les travaux nécessaires à sa remise en service ne peuvent être qualifiés d'accessoires à la réparation de la fuite.
S'il appartenait à l'appelante de faire réaliser au plus vite un devis de réparation de l'ascenseur, qui constitue à l'évidence un équipement nécessaire voire indispensable dans un immeuble de sept étages, ce qu'elle a d'ailleurs fait, elle ne pouvait engager les travaux de sa propre initiative, ce d'autant que les clauses du contrat d'assurance lui imposaient de solliciter l'autorisation de l'assureur.
S'agissant des demandes pressantes auxquelles la société appelante a été confrontée pour réparer au plus vite l'ascenseur, celles-ci ne l'autorisaient pas à faire réaliser sa réparation et il lui appartenait de répondre aux copropriétaires que le conseil syndical devait l'autoriser et que si la réparation était réalisée avant le passage de l'expert d'assurance, elle resterait à la charge de la copropriété.
La clause querellée du contrat d'assurance était la suivante : « l'assuré a l'obligation de s'abstenir de procéder à toute réparation sans l'accord de l'assureur. Toutefois en cas d'urgence, le souscripteur ou l'assuré peut demander à l'assureur l'autorisation de réparer immédiatement les biens endommagés, à condition que ces réparations ne modifient pas l'aspect du sinistre ».
L'appelante soutient que cette clause serait abusive et que l'assureur ne peut utilement l'invoquer pour refuser sa garantie en ce qu'elle crée entre les parties un déséquilibre significatif, la réalisation de travaux qui « ne modifient pas l'aspect » du sinistre étant impossible et l'assuré étant soumis à un accord de son assureur, lequel peut attendre des mois pour donner son autorisation, l'expertise s'étant en l'espèce achevée plus de 2 ans après le sinistre.
Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date de conclusion du contrat, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Les clauses abusives sont réputées non écrites.
L'assureur ne discute pas que le syndicat des copropriétaires est un « non professionnel ».
Toutefois, l'appelante ne démontre pas en quoi cette clause créerait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations de l'assuré et de l'assureur. Il apparaît en effet nécessaire que l'assureur puisse constater le dommage qu'on lui demande de garantir et la circonstance qu'en cas d'urgence, l'assuré puisse demander à l'assureur l'autorisation de réparer immédiatement les biens endommagés, à condition que ces réparations ne modifient pas l'aspect du sinistre, apparaît respectueuse des besoins et des obligations de chacune des parties. Contrairement à ce qu'indique l'appelante, il n'est pas impossible de prendre des mesures urgentes qui ne compromettent pas « l'aspect du sinistre », ce qui a été le cas en l'espèce s'agissant de la réparation destinée à mettre un terme à la fuite.
En conséquence, le caractère abusif de la clause n'étant pas établi, il apparaît que, n'en ayant pas respecté les termes, elle a permis à l'assureur de refuser sa garantie. Elle a donc privé le syndicat des copropriétaires de la possibilité de percevoir une indemnité du chef de la réparation de l'ascenseur et a de surcroît engagé la dépense à ce titre sans autorisation de la copropriété.
Ce double manquement est directement à l'origine de l'impossibilité pour la copropriété de percevoir la somme de 12.832,59 euros.
Les développements que consacre l'appelante à la carence du syndic qui l'a remplacée, s'agissant des relations avec l'assureur ne sont pas dénués de pertinence, mais cette carence n'est pas à l'origine directe du dommage allégué par le syndicat des copropriétaires, qui avait souscrit un contrat d'assurance et n'était nullement supposé entreprendre des démarches à l'encontre des responsables de la fuite (qui n'ont d'ailleurs pas été engagées par l'appelante pendant son mandat qui a pris fin le 3 avril 2014), démarches qui, en tout état de cause, auraient été compromises par le fait que le désordre affectant l'ascenseur ne pouvait plus faire l'objet du moindre constat contradictoire.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné l'appelante à payer la somme de 12.832,59 euros au syndicat des copropriétaires.
Compte tenu du sens de la présente décision, le rejet par les premiers juges de la demande de dommages-intérêts formée par l'appelante contre le syndicat des copropriétaires pour procédure abusive sera confirmé.
Le syndicat des copropriétaires est mal fondé en sa demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de l'appelante pour « résistance abusive ». Il ne consacre en effet pas une ligne à cette prétention dans les motifs de ses conclusions, en sorte qu'aucun préjudice n'étant caractérisé, la cour rejettera cette demande. A supposer que cette demande prétende sanctionner le fait que l'appelante ait attendu d'être menacée de radiation de son appel pour payer les condamnations mises à sa charge, ceci ne constitue en aucun cas une résistance abusive.
Il sera donné acte à la société MS Amlin Insurance de ce qu'elle intervient à la procédure aux lieu et place de la société Amlin France, et la société Amlin France sera mise hors de cause.
Le syndicat des copropriétaires demande à la cour de condamner « solidairement » la société Amlin France à lui verser la somme de 12.832,59 euros TTC.
La cour suppose qu'il s'agit d'une demande de solidarité avec l'ancien syndic de la copropriété, prétention en totale contradiction avec les écrits du syndicat des copropriétaires qui indique en page 8 de ses conclusions : « si la cour considère que la société Advisoring Immobilier n'a pas commis de faute dans l'exécution de ses missions c'est qu'alors la compagnie d'assurance Amlin France doit couvrir le sinistre ».
Le syndicat des copropriétaires ne peut solliciter une condamnation solidaire du syndic et de son assureur alors qu'il constate lui-même que la responsabilité de l'un exclut l'obligation de garantie du second.
En tout état de cause, il convient de statuer au préalable sur la recevabilité des demandes formées par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de son assureur, le tribunal les ayant déclaré prescrites.
Le syndicat des copropriétaires qui sollicite l'infirmation du jugement de ce chef, n'y consacre toutefois aucune explication dans les motifs de ses écritures, ce que les premiers juges avaient déjà relevé.
Aux termes de l'article L. 114-1 du code des assurances, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance.
La demande de paiement de l'indemnité d'assurance que forme l'assuré contre l'assureur dérive du contrat d'assurance.
Aux termes des dispositions de l'article L. 114-2 du même code, la prescription est interrompue par une des causes ordinaires d'interruption de la prescription et par la désignation d'experts à la suite d'un sinistre. L'interruption de la prescription de l'action peut, en outre, résulter de l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception, adressée par l'assuré à l'assureur en ce qui concerne le règlement de l'indemnité.
Le sinistre a eu lieu le 13 mai 2013, il a été déclaré à l'assureur le lendemain par le syndic. L'assureur a informé le syndic le 24 mai 2013 de ce qu'il avait mandaté la société Duotec en qualité d'expert. Le syndicat des copropriétaires ne produit aucune lettre recommandée adressée
à l'assureur pour obtenir le paiement de l'indemnité qu'il estimait due, il ne justifie d'ailleurs pas avoir émis la moindre réclamation à son encontre après que la société appelante a été remplacée par un nouveau syndic.
Le délai de prescription, interrompu le 24 mai 2013 par la désignation d'un expert a donc expiré le 24 mai 2015. L'assignation n'est intervenue que le 3 novembre 2017.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande du syndicat des copropriétaires formée à l'encontre de la société Amlin.
Il le sera également en ses dispositions relatives aux dépens.
Il sera infirmé en ce qu'il a alloué au syndicat des copropriétaires et à la société Amlin France une indemnisation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Il n'y a en effet pas lieu de leur accorder une réparation de ce chef.
Succombant en appel, la société Advisoring Immobilier sera condamnée aux dépens y afférents.
Il n'y a pas lieu d'allouer aux intimés une indemnisation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS ;
La cour, statuant contradictoirement ;
Donne acte à la société MS Amlin Insurance de ce qu'elle intervient aux lieu et place de la société Amlin France.
Met hors de cause la société Amlin France.
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exceptions de celles relatives aux frais irrépétibles.
Statuant des chefs infirmés :
Rejette les demandes formées par le syndicat des copropriétaires C. A. et la société Amlin France au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Ajoutant :
Condamne la société Advisoring Immobilier aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Rejette toutes les demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-José BOU, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,
- 6053 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Comportement des parties - Consommateur - Fraudes
- 6380 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Assurance - Assurances multirisques - Habitation - Obligations de l’assuré
- 6979 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Droit postérieur à la loi n° 2017-203 du 21 février 2017