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CA BASSE-TERRE (2e ch.), 11 juillet 2022

Nature : Décision
Titre : CA BASSE-TERRE (2e ch.), 11 juillet 2022
Pays : France
Juridiction : Basse-Terre (CA), 2e ch.
Demande : 21/00119
Décision : 22/440
Date : 11/07/2022
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 28/01/2021
Numéro de la décision : 440
Référence bibliographique : 6224 (442-1 C. com., transport), 6238 (L. 442-1 C. com., clause de délai de réclamation)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9705

CA BASSE-TERRE (2e ch.), 11 juillet 2022 : RG n° 21/00119 ; arrêt n° 440

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « Dans ces conditions, M. X. ne pouvait en aucun cas facturer comme il l'a fait à la société Banema France la somme de 8 euros par personne et par trajet, doublant ainsi le montant de la prestation contractuellement prévue. […]

Il est également indifférent que la société Banema ait réglé sans difficulté les premières factures émises le 26 avril 2019, ce règlement, même effectué à tort, ne permettant en aucun cas de considérer que la société aurait accepté de régler le double du montant prévu au contrat.

Enfin, M. X. ayant fait preuve de mauvaise foi dans l'exécution du contrat, puisqu'il a doublé le montant de ses prestations sans l'accord de son cocontractant, il ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 4 du contrat qui dispose que « les factures qui ne sont pas contestées dans les 8 jours suivant réception de la facture seront considérées comme définitives et inviolables » afin de revendiquer le paiement intégral de ses factures adressées à la société Banema le 28 mai 2019 et le 13 juin 2019, au seul motif que cette dernière aurait attendu le 13 juillet 2019 pour les contester.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré qu'en réglant la moitié des factures 101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7 qui lui avaient été adressées par M. X. sur la base de 8 euros par personne et par trajet, la société Banema s'est acquittée de ses obligations et en ce qu'il a débouté M. X. de ses demandes au titre du solde de ces factures et des intérêts de retard. »

2/ « La société Banema fonde sa demande de dommages-intérêts sur les dispositions des articles 1231-1 et 1217 du code civil relatifs à la responsabilité contractuelle, mais également sur celles de l'article L. 442-1 du code de commerce qui dispose : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services : 1° D'obtenir ou de tenter d'obtenir de l'autre partie un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie ».

Elle indique qu'elle a subi un préjudice moral car elle a été contrainte en toute hâte de rompre le contrat la liant à M. X. et de rechercher un nouveau transporteur en raison de la faute commise par M. X. dans l'exécution de ses obligations contractuelles, puisqu'il a produit de fausses factures afin de s'enrichir à son détriment.

Cependant, si M. X. a effectivement émis des factures contenant des mentions erronées, la société Banema n'a pas fondé la résiliation du contrat sur ce motif mais sur la simple faculté de résiliation anticipée prévue par l'article 2 de ce contrat. A aucun moment, jusqu'au 13 juillet 2019, elle n'a évoqué l'erreur de facturation qu'elle qualifie désormais de faux et de d'escroquerie. Dans ces conditions, elle ne peut valablement se prévaloir d'un préjudice lié à la nécessité de rechercher un urgence un nouveau prestataire alors qu'elle a décidé seule de résilier le contrat.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre d'un préjudice moral. »

 

COUR D’APPEL DE BASSE-TERRE

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 11 JUILLET 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/00119. Arrêt n° 440. N° Portalis DBV7-V-B7F-DI6O. Décision déférée à la cour : Jugement du tribunal mixte de commerce de Basse-Terre, décision attaquée en date du 30 octobre 2020, enregistrée sous le n° RG N°202J00006.

 

APPELANT :

Monsieur X.

[adresse], Représenté par Maître Loïse Guillaume-Matime, avocat au barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy.

 

INTIMÉE :

La SAS Banema France

[adresse], Représentée par Maître Harry Durimel de la Selarl Durimel et Bangou, avocat au barreau de Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy.

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 799 alinéa 3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, à la demande des parties, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile jusqu'au 23 mai 2022.

Par avis du 23 mai 2022 le président a informé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la cour composée de : Madame Corinne Desjardins, présidente de chambre, Madame Annabelle Clédat, conseillère, Madame Christine Defoy, conseillère, qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 11 juillet 2022.

GREFFIER : Lors des débats et lors du prononcé Mme Armélida Rayapin, greffière.

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Signé par Mme Corinne Desjardins, Présidente de chambre et par Mme Armélida Rayapin, greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte sous seing privé du 4 avril 2019, M. X. a conclu avec la Sas Banema France un contrat pour le transport d'ouvriers sur des chantiers.

Par courrier daté du 16 mai 2019, la société Banema France a informé M. X. qu'elle entendait résilier ce contrat à effet du 31 mai.

Par courrier du 12 juillet 2019, M. X. a mis en demeure la société Banema France de lui régler ses factures impayées. La société Banema France s'est opposée à cette demande en indiquant que les factures correspondaient au double du prix prévu par le contrat. Le 11 octobre 2019, elle a finalement procédé au règlement de la moitié des sommes réclamées au titre des factures 101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7.

Le 27 janvier 2020, M. X. a assigné la société Banema France devant le tribunal mixte de commerce de Basse-Terre afin de la voir condamner à lui payer :

- 27.560 euros au titre du solde impayé des factures 101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7, outre intérêts au taux légal,

- 143,24 euros au titre de l'intérêt légal pour la période du 28 mai au 11 octobre 2019 sur les factures 101-1 à 101-8,

- 32.04 euros au titre de l'intérêt légal du 13 juin au 11 octobre 2019 pour les factures 102-1 à 102-7,

- 4.000 euros au titre de l'indemnité contractuelle forfaitaire de retard pour les factures 101-1 à 101-8 et 1.112,80 euros pour les factures 102-1 à 102-7,

- 90.726 euros à titre d'indemnisation du délai de préavis,

- 83.600 dollars US à titre de dommages-intérêts pour l'achat de deux bus non amortis,

- 20.000 euros en réparation de son préjudice moral,

- 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre reconventionnel, la société Banema France a demandé au tribunal, après avoir débouté M. X. de ses demandes :

- de le condamner sous astreinte à lui délivrer des factures rectificatives,

- de le condamner à lui payer 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral et 10.000 euros pour procédure abusive.

Par jugement du 30 octobre 2020, exécutoire par provision, le tribunal a :

- rejeté les demandes de M. X.,

- condamné M. X. à rectifier les factures n°101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7 afin que le nombre de trajets facturé corresponde à un trajet aller/retour et non à un trajet aller simple,

- dit qu'en cas d'inexécution de cette rectification dans le délai de deux mois à compter de la signification du jugement il serait redevable d'une astreinte de 50 euros par jour de retard pendant 90 jours,

- dit qu'à défaut d'exécution de cette rectification dans le délai imparti, la société Banema France pourrait saisir le juge de l'exécution aux fins de liquidation de l'astreinte provisoire et de prononcé d'une astreinte définitive,

- rejeté les autres demandes reconventionnelles de la société Banema France,

- condamné M. X. à payer à la société Banema France la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

M. X. a interjeté appel de cette décision par déclaration remise au greffe de la cour par voie électronique le 28 janvier 2021, en indiquant expressément que son appel portait sur chacun des chefs de jugement, à l'exception du rejet des autres demandes reconventionnelles de la société Banema France.

En réponse à l'avis du 4 mai 2021 donné par le greffe, M. X., qui est domicilié à Saint-Martin, a fait signifier à l'intimée le 11 juin 2021 la déclaration d'appel et ses conclusions remises au greffe le 24 mai 2021.

La société Banema, dont le siège social est également situé à Saint-Martin, a remis au greffe sa constitution d'intimée par voie électronique le 25 juin 2021 et conclu le 11 octobre 2021.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 mars 2022 et les parties ont été autorisées à déposer leurs dossiers au greffe jusqu'au 23 mai 2022, date à laquelle la décision a été mise en délibéré au 11 juillet 2022.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

1/ M. X., appelant :

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 29 décembre 2021 par lesquelles l'appelant demande à la cour :

- de déclarer irrecevables les demandes reconventionnelles de la Sas Banema France,

- d'infirmer les dispositions attaquées du jugement en cause,

- statuant à nouveau :

- de condamner la Sas Banema France à lui payer les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation :

- 27.560 euros au titre du solde impayé des factures 101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7,

- 143,24 euros au titre de l'intérêt légal pour la période du 28 mai au 11 octobre 2019 sur les factures 101-1 à 101-8,

- 32.04 euros au titre de l'intérêt légal du 13 juin au 11 octobre 2019 pour les factures 102-1 à 102-7,

- 4.000 euros au titre de l'indemnité contractuelle forfaitaire de retard pour les factures 101-1 à 101-8 et 1.112,80 pour les factures102-1 à 102-7,

- 1.112,80 euros au titre de l'indemnité contractuelle forfaitaire de retard de règlement des factures 102-1 à 102-7,

- 90.726 euros à titre d'indemnisation du délai de préavis,

- 83.600 dollars US à titre de dommages-intérêts pour l'achat de deux bus non amortis,

- 20.000 euros en réparation de son préjudice moral,

- de condamner la Sas Banema France à lui payer les intérêts au taux légal à compter du 12 octobre 2019 jusqu'au règlement pour les sommes restant dues au titre des factures impayées,

- de condamner la Sas Banema France à lui payer la somme de 6.000 euros au titre de ses frais irrépétibles en première instance et en appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé des prétentions et moyens.

2/ La Sas Banema France, intimée :

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 6 janvier 2022 par lesquelles l'intimée demande à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté ses autres demandes reconventionnelles,

- de l'infirmer de ce chef,

- de condamner M. X. à lui payer les sommes suivantes :

* 20.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi,

* 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- de rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de M. X.,

- de condamner M. X. à lui payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la Selarl Durimel et Bangou, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

[*]

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions pour un exposé détaillé des prétentions et moyens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Sur la recevabilité de l'appel incident :

Conformément aux dispositions de l'article 909 du code de procédure civile, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.

Ce délai est prolongé d'un mois en vertu de l'article 911-2 pour les parties qui résident à Saint-Martin.

L'article 562 rappelle que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

Par ailleurs, il est désormais constant qu'en vertu des articles 542 et 954 du code de procédure civile, lorsque l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement, cette disposition étant applicable pour les appels interjetés postérieurement au 17 septembre 2020.

En l'espèce, après avoir reçu notification le 11 juin 2021 des conclusions de l'appelant, la Sas Banema France a régulièrement remis au greffe ses conclusions « responsives n°1 » le 11 octobre 2021.

Elle a libellé le dispositif de ses écritures dans les termes suivants : « confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal mixte de commerce le 30 octobre 2020, sauf en ce qu'il a rejeté les autres demandes reconventionnelles de la Sas Banema France ».

Contrairement à ce que soutient M. X., il ressort sans ambiguïté de ces termes que la Sas Banema France a formé appel incident à l'encontre du chef de jugement rejetant ses autres demandes reconventionnelles. Elle avait d'ailleurs reproché à ce titre au tribunal mixte de commerce, en page 17 de ses premières conclusions, d'avoir rejeté ses demandes au motif qu'aucun élément ne permettait d'établir le préjudice et le quantifier.

Par ailleurs, une demande expresse tendant à voir infirmer ce chef de jugement figure dans le dispositif de ses dernières conclusions.

En conséquence, son appel incident sera déclaré recevable, tout comme les demandes qu'elle forme à ce titre.

 

Sur la demande en paiement du solde des factures :

Conformément aux dispositions de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux lui les ont faits.

En l'espèce, le contrat de transport conclu le 4 avril 2019 entre la société Banema France et M. X. prévoyait dans son article 1 relatif à l'objet du contrat :

« Le contrat de transport concerne le transport de personnes de LB Scott Road et de Grand Case, ou de tout autre lieu se trouvant sur le même itinéraire, à leur lieu de travail aller/retour du lundi au samedi pour un départ de 6 heures du matin et un retour à 18 heures ou à 21 heures ».

S'agissant du prix du transport, l'article 4 disposait :

« Le prestataire établit les factures le 25 du mois en fonction du nombre de personnes transportées. Les factures qui ne sont pas contestées dans les 8 jours suivant réception de la facture seront considérées comme définitives et inviolables. [...]

Le prix est fixé à 8 euros par personne ».

Il ressort de la combinaison de ces deux articles que les parties se sont accordées sur le fait que l'objet du contrat était un transport aller/retour et qu'il devait être facturé 8 euros par personne.

Les termes de ce contrat, qui ne nécessitent aucune interprétation dès lors qu'ils sont parfaitement clairs, correspondent en tout point aux négociations pré-contractuelles des parties telles qu'elles ressortent des échanges de courriels entre la société Banema et M. X. des 29 et 31 mars 2019, produits en pièces 1 et 2 de l'intimée.

En effet, la société Banema avait consulté M. X. en lui demandant ses tarifs pour le transport d'une trentaine de personnes par jour de Saint Peters à Saint-Marcel et vingt-sept personnes de Grand Case à Saint-Marcel « aller/retour », ce terme étant expressément indiqué dans le courrier, ce à quoi M. X. avait répondu que ses « tarifs pour le transport » étaient de « 8 €/personne ».

Dans ces conditions, M. X. ne pouvait en aucun cas facturer comme il l'a fait à la société Banema France la somme de 8 euros par personne et par trajet, doublant ainsi le montant de la prestation contractuellement prévue.

Il n'y a pas lieu dès lors de suivre M. X. dans sa démonstration inopérante tendant à prouver qu'il serait fondé à percevoir 8 euros par trajet au motif qu'il aurait lui-même versé 5 euros par personne et par trajet à ses sous-traitants, ceci d'autant qu'aucun contrat de sous-traitance mentionnant ces conditions financières n'est versé aux débats et que les prétendues « factures » adressées par M. X. à ses sous-traitants sont des pièces établies unilatéralement par l'appelant, qui sont d'autant plus dépourvues de tout caractère probant que M. X. n'aurait pas dû émettre de factures à l'égard de ses sous-traitants mais au contraire recevoir les leurs ou à tout le moins produire en complément les relevés de prestations établis par leurs soins.

Il est également indifférent que la société Banema ait réglé sans difficulté les premières factures émises le 26 avril 2019, ce règlement, même effectué à tort, ne permettant en aucun cas de considérer que la société aurait accepté de régler le double du montant prévu au contrat.

Enfin, M. X. ayant fait preuve de mauvaise foi dans l'exécution du contrat, puisqu'il a doublé le montant de ses prestations sans l'accord de son cocontractant, il ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 4 du contrat qui dispose que « les factures qui ne sont pas contestées dans les 8 jours suivant réception de la facture seront considérées comme définitives et inviolables » afin de revendiquer le paiement intégral de ses factures adressées à la société Banema le 28 mai 2019 et le 13 juin 2019, au seul motif que cette dernière aurait attendu le 13 juillet 2019 pour les contester.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré qu'en réglant la moitié des factures 101-1 à 101-8 et 102-1 à 102-7 qui lui avaient été adressées par M. X. sur la base de 8 euros par personne et par trajet, la société Banema s'est acquittée de ses obligations et en ce qu'il a débouté M. X. de ses demandes au titre du solde de ces factures et des intérêts de retard.

 

Sur l'indemnité contractuelle forfaitaire de retard :

L'article 4 du contrat de transport disposait que : « Si [dans] les 15 jours suivant la mise en demeure par lettre recommandée par la poste, le débiteur reste défaillant, la somme de la créance sera ipso jure augmentée de 10 % avec un minimum de 125 € et un maximum de 4.000 € en tant qu'indemnité forfaitaire pour les frais administratifs supplémentaires, le suivi du dossier des débiteurs ».

Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il ressort de cette stipulation contractuelle que l'indemnité forfaitaire n'est due que si le créancier adresse à son débiteur une mise en demeure par lettre recommandée par la poste.

Or, en l'espèce, la mise en demeure adressée par l'avocat de M. X. à la société Banema a été envoyée le 12 juillet 2019 à 19h04 par courrier électronique, ainsi que le démontre la pièce n° 8a qu'il verse aux débats.

En conséquence, quand bien même la société Banema n'a réglé les sommes qu'elle devait que le 11 octobre 2019, M. X. n'est pas fondé à obtenir le versement d'une indemnité forfaitaire à ce titre.

Le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.

 

Sur la rupture abusive du contrat :

L'article 2 du contrat de transport était rédigé dans les termes suivants :

« Le client s'engage à donner au prestataire les missions relatives au transport du 6 avril 2019 au 31 août 2019.

Il est convenu entre les parties, pour plus de flexibilité et compte tenu de l'incertitude de la durée du chantier pour lequel la société intervient actuellement sur l'île de Saint-Martin et l'avancement des travaux, qu'elles pourront, l'une comme l'autre, donner congé à l'autre partie, avant l'arrivée du terme, sous réserve d'un préavis de 15 jours, adressé par courrier recommandé et notification par e-mail ».

Par courrier daté du 16 mai 2019, adressé à M. X. le 18 mai 2019 par e-mail et le 20 mai par courrier recommandé présenté le 28 mai 2019, qui n'a pas été réclamé (pièces 7 et 7 bis de l'intimée et 5 a de l'appelant), la société Banema l'a informé qu'elle souhaitait résilier le contrat. Elle a fondé sa résiliation sur les dispositions de l'article 2 du contrat et a précisé que le délai de préavis de 15 jours débutait à la date du courrier, soit le 16 mai, le contrat devant dès lors prendre fin le 31 mai inclus.

En réalité, le contrat s'est poursuivi jusqu'au 2 juin inclus.

Alors que les premiers juges ont estimé que le contrat prévoyait une faculté de résiliation sous réserve d'un préavis de 15 jours et du respect de certaines formalités, M. X. soutient que tel n'était le cas que dans l'hypothèse où le chantier arriverait à son terme avant le 31 août 2019.

Cependant, contrairement à son analyse, l'article 2 précité ne subordonne l'exercice de cette faculté de rétractation à aucun motif particulier. L'interruption du chantier ne pouvait en tout état de cause pas constituer la seule cause de révocation anticipée dès lors que cette faculté était ouverte aux deux parties, et pas seulement à la société Banema. En réalité, la référence aux incertitudes concernant la durée du chantier n'est mentionnée dans le contrat que pour expliquer la raison pour lesquelles les parties ont prévu cette faculté de rétractation anticipée, sans la limiter à une quelconque hypothèse.

Dès lors, la société Banema pouvait valablement résilier le contrat de transport de manière anticipée sous réserve de respecter un délai de préavis de quinze jours et des formalités.

Ces formalités ont été respectées le 18 mai 2019 et le 20 mai 2019.

Le délai a également été respecté puisque le contrat s'est poursuivi jusqu'au 02 juin 2019, soit jusqu'au quinzième jour suivant la réception de la notification par voie électronique adressée à M. X., nonobstant le fait que le courrier recommandé a été présenté plus tardivement et qu'en tout état de cause n'a pas été réclamé.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu que la rupture n'était ni abusive, ni brutale.

Il sera également confirmé en ce qu'il a débouté M. X. de toutes ses demandes de dommages-intérêts, les demandes indemnitaires n'étant présentées, aux termes de ses conclusions, que comme les conséquences de la rupture brutale du contrat de transport.

 

Sur la rectification des factures :

Alors même qu'il sollicite l'infirmation de tous les chefs de jugement contestés, y compris donc celui par lequel il a été condamné sous astreinte à produire des factures rectifiées, M. X. ne développe aucun moyen d'infirmation à ce titre et justifie s'être acquitté de cette obligation.

Ce chef de jugement sera donc confirmé.

 

Sur la demande formée à titre reconventionnel par la société Banema au titre du préjudice moral :

La société Banema fonde sa demande de dommages-intérêts sur les dispositions des articles 1231-1 et 1217 du code civil relatifs à la responsabilité contractuelle, mais également sur celles de l'article L. 442-1 du code de commerce qui dispose :

« Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services :

1° D'obtenir ou de tenter d'obtenir de l'autre partie un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie ».

Elle indique qu'elle a subi un préjudice moral car elle a été contrainte en toute hâte de rompre le contrat la liant à M. X. et de rechercher un nouveau transporteur en raison de la faute commise par M. X. dans l'exécution de ses obligations contractuelles, puisqu'il a produit de fausses factures afin de s'enrichir à son détriment.

Cependant, si M. X. a effectivement émis des factures contenant des mentions erronées, la société Banema n'a pas fondé la résiliation du contrat sur ce motif mais sur la simple faculté de résiliation anticipée prévue par l'article 2 de ce contrat.

A aucun moment, jusqu'au 13 juillet 2019, elle n'a évoqué l'erreur de facturation qu'elle qualifie désormais de faux et de d'escroquerie.

Dans ces conditions, elle ne peut valablement se prévaloir d'un préjudice lié à la nécessité de rechercher un urgence un nouveau prestataire alors qu'elle a décidé seule de résilier le contrat.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre d'un préjudice moral.

 

Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive :

Il est constant, en vertu de l'article 1240 du code civil et de l'article 32-1 du code de procédure civile, que le droit d'agir en justice ne dégénère en abus qu'en cas de mauvaise foi, de légèreté blâmable ou d'erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, la société Banema soutient que M. X. a agi de mauvaise foi en l'assignant pour obtenir le paiement de fausses factures et celui de deux bus qu'il a acquis après la résiliation du contrat.

Cependant, si M. X. a pu faire preuve de mauvaise foi dans l'exécution du contrat en appliquant un tarif différent de celui prévu contractuellement, son action judiciaire n'était pas limitée au paiement du solde de ses factures. Il a en effet développé au titre de la rupture abusive du contrat de transport des moyens sérieux, quand bien même ils n'ont pas été retenus.

En conséquence, la mauvaise foi dans le cadre de l'action en justice n'étant pas suffisamment établie, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Banema France de sa demande de dommages-intérêts.

 

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

M. X., qui succombe en cause d'appel, sera condamné aux entiers dépens qui seront recouvrés par la Selarl Durimel & Bangou conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il sera également condamné à payer à la Sas Banema France la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et débouté de sa propre demande à ce titre.

Enfin, les dispositions du jugement contesté seront confirmées de ce chef.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt rendu par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable l'appel incident formé par la Sas Banema France et les demandes formées à ce titre,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. X. à payer à la Sas Banema France la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. X. de sa propre demande à ce titre,

Condamne M. X. aux entiers dépens de l'instance d'appel,

Dit que les dépens seront recouvrés par la Selarl Durimel & Bangou conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Et ont signé,

La greffière                                       La présidente