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T. COM. ROUEN, 9 novembre 1998

Nature : Décision
Titre : T. COM. ROUEN, 9 novembre 1998
Pays : France
Demande : 98/003811
Date : 9/11/1998
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 27/03/1998
Décision antérieure : CA ROUEN (2e ch.), 7 décembre 2000
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 972

T. COM. ROUEN, 9 novembre 1998 : RG n° 98/003811

(sur appel CA Rouen (2e ch.), 7 déc. 2000 : RG n° 99/00924)

 

Extrait : « Vu l'article 1134 du Code Civil, Attendu que SOCREA a volontairement rendu contractuels les articles L. 121-23 à 26 du Code de la Consommation dans son contrat de location ; Attendu qu'il importe donc peu de savoir si Madame X. est « surprotégée » dans ses rapports avec SOCREA, puisque telle est la volonté des parties ; Attendu en outre, que dans le cas d'espèce, Madame X., commerçante en restauration, se trouve vis à vis d'un matériel de téléphonie, dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre consommateur, Le Tribunal constatera que les articles L. 121-23 à 26 du Code de la Consommation trouvent à s'appliquer. »

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE ROUEN

JUGEMENT DU 9 NOVEMBRE 1998

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 98/003811. Audience Publique du Tribunal de Commerce de ROUEN (Seine-Maritime) du neuf novembre mil neuf cent quatre vingt dix huit, où siégeaient MR LOZES, Président d'audience, MRS VAQUÉ et NOUVEL, Juges, assistés de MR CLERC, Greffier. Le Tribunal vidant son délibéré du 14 septembre 1998, où siégeaient MR LOZES, Président, d'audience, MRS FELIS et POUILLEVET, Juges, assistés de MR CLERC, Greffier, a rendu le jugement suivant :

 

ENTRE :

SA SOCREA LOCATION

[adresse], demandeur, plaidant par MAÎTRE MICHEL JALLOT, Avocat à LYON, d'une part

 

ET :

Madame X.

[adresse], défendeur plaidant par MAÎTRE PILLARD ET ASSOCIÉS, Avocats à ROUEN, d'autre part

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que par acte d'huissier en date du 27 mars 1998, la société SOCREA LOCATION a assigné devant le Tribunal de céans Madame X., lui demandant de :

- condamner Madame X. à lui payer la somme de 22.475,23 francs avec intérêts de droit à dater de la mise en demeure,

- condamner Madame X. à lui payer la somme de 8.000 francs de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,

- condamner Madame X. au paiement de la somme de 5.000 francs sur le fondement de l'art 700 du NCPC et aux entiers dépens,

- condamner Madame X. à restituer le matériel objet du contrat de location, sous astreinte de 2.000 fis par jour à compter du second jour suivant la signification du jugement,

Attendu que dans ses conclusions, Madame X. demande au Tribunal de :

- débouter SOCREA de ses demandes, fins et conclusions,

- constater la nullité du contrat,

En conséquence,

- condamner SOCREA à lui restituer la somme de 1.881,36 francs

- condamner SOCREA à lui payer la somme de 20.000 francs de dommages et intérêts,

- condamner SOCREA au paiement de la somme de 5.000 francs sur le fondement de l'art 700 du NCPC et aux entiers dépens,

[minute page 2] Attendu que dans ses conclusions en réponse, SOCREA demande au Tribunal de :

- débouter Madame X. de ses demandes, fins et conclusions,

 

LES FAITS :

Madame X. exerce une activité de restauration à BOOS ;

Le 6 février 1997, un représentant de TELESIX, fournisseur en matériel téléphonique, fait signer à Madame X. un contrat de location d'une durée de 48 mois pour un téléphone à pièces ;

Ce contrat précise que TELESIX intervient comme mandataire de COFIGEST, qui se réserve le choix du futur bailleur (parmi une liste où figure SOCREA LOCATION) ;

La ligne téléphonique, inexistante jusqu'alors, est installée le 16 février et le matériel installé le lendemain ;

Le matériel fonctionnerait mal ;

Madame X. demande la résiliation du contrat, ce que refuse SOCREA ;

Le 10 septembre 1997, Madame X. par l'intermédiaire d'une association de défense des entreprises en difficulté, confirme à SOCREA que l'appareil ne fonctionne pas correctement ;

Madame X. ayant cessé de régler les mensualités, SOCREA l'assigne,

 

MOYENS DES PARTIES :

SOCREA expose :

qu'il s'agit d'un contrat de location financière conclu avec elle-même, par l'intermédiaire de COFIGEST ;

que le matériel a été choisi personnellement et directement par Madame X. auprès de TELESIX fournisseur et installateur ;

que le contrat remplit toutes les conditions de validité prévues par la loi ,

que Madame X. a signé le contrat et apposé son tampon, reconnaissant en avoir pris connaissance ; que Madame X. n'a formulé aucune réserve lors de l'installation du matériel ;

Que Madame X. n'a formulé aucune réserve lors de l'installation du matériel ;

Que Madame X. n'a pas de juste motif pour s'opposer au bon déroulement du contrat ;

[minute page 3] Qu'elle a d'ailleurs fait intervenir TELESIX le 23 septembre 1997 ;

Que Madame X. n'a jamais proposé de restituer le matériel ;

Que c'est donc à juste titre que le contrat a été résilié ;

Que le comportement de Madame X. est exempt de bonne foi, lui causant un important préjudice financier et commercial ;

Que Madame X., commerçante professionnelle et avertie, ne peut se prévaloir des articles L. 123-23 à 26 du Code de la Consommation, qui régit le démarchage à domicile, car l'objet du contrat de location est en rapport direct avec son commerce ;

Que le mauvais fonctionnement de l'appareil ne lui est pas opposable, n'intervenant qu'en tant qu'organisme financier, qu'il aurait fallu se rapprocher de TELESIX ;

Madame X. expose :

Que le contrat de location est soumis, de par la volonté contractuelle de SOCREA, aux articles L. 121-23 à 26 du Code de la Consommation, qui régit le démarchage à domicile, articles littéralement reproduits dans le contrat ;

Qu'en tout état de cause, ces articles trouvent à s'appliquer, car dans le cas présent, Madame X. ne peut être qualifiée de commerçante avertie, au sens de l'article L. 121-22 modifié par la loi du 31 décembre 1989 ;

Que le contrat de location n'est donc pas conforme à ces articles ;

Qu'en outre, des mentions indispensables sous peine de nullité du contrat ne figurent pas sur son contrat (mentions rajoutées par SOCREA sur son propre exemplaire) ;

Que par ailleurs, d'autres ajouts figurent sur l'exemplaire versé aux débats par SOCREA ;

Que le contrat doit donc être annulé ;

Que les sommes versées doivent donc lui être restituées ;

Qu'en outre, le matériel n'a jamais correctement fonctionné et qu'elle l'a fait savoir ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIVATION :

Sur l'application des articles du Code de la consommation :

Vu l'article 1134 du Code Civil,

Attendu que SOCREA a volontairement rendu contractuels les articles L. 121-23 à 26 du Code de la Consommation dans son contrat de location ;

[minute page 4] Attendu qu'il importe donc peu de savoir si Madame X. est « surprotégée » dans ses rapports avec SOCREA, puisque telle est la volonté des parties ;

Attendu en outre, que dans le cas d'espèce, Madame X., commerçante en restauration, se trouve vis à vis d'un matériel de téléphonie, dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre consommateur,

Le Tribunal constatera que les articles L. 121-23 à 26 du Code de la Consommation trouvent à s'appliquer.

 

Sur la nullité du contrat :

Vu l'article L. 121-23 du Code de la Consommation,

Attendu que l'exemplaire du contrat en possession de Madame X. ne répond pas aux exigences dudit article et notamment de la sixième mention obligatoire « Prix global à payer...» ;

Attendu que les sommes payées par Madame X. se montent à 1.881,36 francs, Le Tribunal prononcera la nullité du contrat ;

En conséquence, condamnera SOCREA LOCATION à rembourser la somme de 1.881,36 francs à Madame X., et SOCREA LOCATION devra reprendre le matériel entreposé dans les locaux de Madame X., sans qu'il y ait lieu à astreinte ;

 

Sur les autres demandes de SOCREA LOCATION :

Attendu que SOCREA est déboutée de sa demande principale ;

Le Tribunal la déboutera de ses autres demandes.

 

Sur la demande de dommages et intérêts de Madame X. :

Attendu que Madame X. ne justifie d'aucun préjudice, Le Tribunal la déboutera de sa demande.

 

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Attendu que SOCREA LOCATION succombe et qu'il serait inéquitable de laisser les frais irrépétibles à la charge de Madame X., le Tribunal condamnera SOCREA LOCATION à payer à Madame X. une somme de 2.000 francs au titre des dispositions de l'art 700 du NCPC, ainsi que les entiers dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, après en avoir délibéré, statuant publiquement, en premier ressort et par jugement contradictoire

[minute page 5] Reçoit SOCREA LOCATION en ses demandes, fins et conclusions, les dit partiellement fondées,

Prononce la nullité du contrat pour non respect de l'article L. 121-23 du Code de la Consommation,

Condamne SOCREA LOCATION à rembourser la somme de mille huit cent quatre vingt un francs 36 (1.881,36 francs) à Madame X.,

Dit que Madame X. devra tenir à disposition le matériel,

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,

Déboute SOCREA LOCATION de ses autres demandes,

Déboute Madame X. de sa demande de dommages et intérêts,

Condamne SOCREA LOCATION à payer à Madame X. une somme de deux mille francs (2.000 francs) au titre des dispositions de l'art 700 du NCPC, ainsi que les entiers dépens liquidés à ce jour à la somme de sept cent deux francs 07 (702,07 francs)

Ont signé l’original :

Le Président              Le Greffier