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CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 29 juin 2022

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 29 juin 2022
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 6
Demande : 20/05137
Date : 29/06/2022
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 12/03/2020
Référence bibliographique : 9742 (prêt en monnaie étrangère), 9744 (prêt, année lombarde), 5730 (appel, demande nouvelle)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9733

CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 29 juin 2022 : RG n° 20/05137 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « En cause d'appel, M. X. demande, dans le dispositif de ses conclusions, à voir déclarer non écrites les clauses relatives au coût total du crédit et au recours à un diviseur de 360 jours dont il estime que la première ne porte pas précisément à la connaissance du consommateur les informations adéquates sur les caractéristiques essentielles du contrat tenant au coût auquel il doit consentir et que la seconde renchérit le crédit à son détriment, leur privation d'effet devant priver la banque du bénéfice du taux contractuel et conduire à l'application du seul intérêt au taux légal et partant, à la restitution par le prêteur des intérêts trop perçus. Dès lors, cette demande tend bien aux mêmes fins que sa demande de nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel soumise aux premiers juges. Elle n'est donc pas nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile.

Par ailleurs, l'action qui tend à faire constater le caractère abusif d'une clause contractuelle en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, est imprescriptible.

Sur le fond, M. X. ne justifie pas que la clause de l'offre de prêt qu'il a acceptée le 10 mai 2010 stipulant page 3 que « Les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et d'un mois de 30 jours » crée un déséquilibre significatif au sens du texte précité, sa démonstration se basant sur l'application d'une année dite lombarde de 360 jours au calcul des intérêts du prêt alors que la clause critiquée ne porte pas sur l'application du diviseur 360 au calcul des intérêts comptabilisés en nombre de jours, mois ou trimestres exacts mais institue pour les modalités de calcul de ces intérêts un rapport qui est de 30/360, qui consiste donc à calculer les intérêts mensuellement en appliquant un douzième de l'intérêt annuel au capital restant dû chaque mois.

M. X. ne démontre pas plus qu'il résulte de ce mode de calcul qui diffère de celui critiqué dans ces écritures relatif à l'année lombarde un renchérissement du coût du crédit.

En outre, il convient de rappeler que l'alinéa 7 du texte précité dispose que : « L'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. » Or, l'offre de prêt stipule clairement que le coût total du prêt est de 135.967,46 francs suisses dont 131.861,54 francs suisses au titre des intérêts, 1.443,17 francs suisses au titre des frais de dossier et 3.3662,75 francs suisses au titre de la participation financière et de la commission de caution de Crédit logement, ce coût étant également stipulé, à titre indicatif, comme correspondant à une contrevaleur en euros de 92.214,77 euros.

Il est à relever que la souscription d'une assurance emprunteur auprès de l'assureur de son choix n'est pas mentionnée comme étant obligatoire.

Dans ces conditions, le caractère abusif des clauses critiquées n'étant pas établi, la demande de M. X. de les voir déclarées non écrites est rejetée. »

2/ « De même, le grief tiré du recours à l'année lombarde de 360 jours pour calculer les intérêts conventionnels aux motifs que l'offre stipule en page 3 que « les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et d'un mois de 30 jours » résulte encore de la simple lecture du contrat. Dans ces conditions, M. X. était à même de constater à l'examen de la teneur du contrat de prêt l'irrégularité du TEG et les modalités de calcul des intérêts dont il se prévaut et pouvait donc agir dès la date de sa formation par acceptation de l'offre, le 10 mai 2010. Par conséquent, son action en nullité, introduite par voie d'assignation du 23 mars 2016, soit plus de cinq années après cette date, est prescrite comme retenu par le premier juge. »

3/ « Alors qu'il a été retenu que M. X. était en mesure de relever l'irrégularité du TEG et des modalités de calcul des intérêts dès l'acceptation de l'offre de prêt, son action en déchéance est irrecevable pour avoir été introduite par voie d'assignation du 23 mars 2016, alors que son délai d'action a expiré le 10 mai 2015, comme retenu par le premier juge. »

4/ « L'action en responsabilité pour manquement de la banque à son obligation de mise en garde est soumise à la prescription désormais quinquennale de l'article L.110-4 du code de commerce tel que modifié par la loi du 17 juin 2008. Le délai court à compter de la réalisation du dommage, constitué par la perte de chance de ne pas contracter, qui se manifeste lors la conclusion du contrat de prêt sauf si l'emprunteur établit qu'il a pu légitimement l'ignorer.

M. X. se prévaut d'un courrier du 15 juillet 2019 que lui a adressé la société BNP paribas l'informant sur la contre-valeur en euros du montant total restant dû de son crédit en francs suisses et d'une augmentation subie par celle-ci de 22 % par rapport à sa contre-valeur si le franc suisse n'avait pas évolué depuis la date de l'offre de crédit et il invoque à titre de préjudice un surcoût tenant au renchérissement du capital restant dû de l'ordre de 36.997,94 francs suisses.

Il convient de retenir la date de ce courrier exposant avec des exemples chiffrés l'évolution de la contre-valeur en euros du capital restant dû en francs suisses par M. X. suivant qu'est appliqué le cours de change EUR/CHF en vigueur lors de la souscription de l'offre ou celui applicable au 15 juillet 2019 comme la contre-valeur des échéances du prêt selon la même méthode, lesquels mettent en évidence une contre-valeur en euros qui s'est renchérie.

Dans ces conditions, la demande en paiement de dommages-intérêts formée par M. X. au titre d'un manquement de la banque à son devoir de mise en garde formée en cause d'appel dans ses premières conclusions d'appelant du 9 juillet 2020 n'est pas prescrite pour avoir été introduite moins de cinq ans après le 15 juillet 2019. »

5/ « En application de l'article 1147 ancien du code civil, lorsqu'il consent un prêt à un emprunteur non averti, le banquier dispensateur de crédit est tenu à son égard, lors de la conclusion du contrat, d'un devoir de mise en garde en considération de ses capacités financières et des risques d'endettement excessif né de l'octroi du prêt.

En l'espèce, M. X. ne justifie pas d'un risque d'endettement excessif né de l'octroi du prêt accordé le 10 mai 2010. Il ne fait état d'aucune difficulté de paiement.

De même, il résulte de la première page de l'offre de prêt litigieuse qu'il s'agit d'« un prêt immobilier valant contrat amortissable en CHF au taux d'intérêt fixe destiné aux frontaliers avec la Suisse pour une opération immobilière en France » portant sur un capital prêté en francs suisses et remboursable en francs suisses, M. X. étant domicilié à l'époque à Genève et désormais au Luxembourg et ne contestant pas percevoir des revenus dans cette devise.

Si ce prêt est susceptible, selon la convention des parties, d'être converti en euros et remboursé en euros ou dans une autre devise en cas d'indisponibilité du franc suisse, M. X. ne soutient ni ne justifie que cela a été le cas, de sorte que la seule conversion qui a eu lieu du franc suisse en euro l'a été sur le capital emprunté afin de procéder au règlement du bien immobilier acquis en France à l'aide de ce financement, conversion sur laquelle M. X. ne donne aucun élément pas plus que sur sa situation financière de l'époque.

M. X. ne justifie ainsi d'aucun risque d'endettement excessif au vu de ses capacités financières ni d'aucun dommage résultant du prêt consenti tenant à l'application du taux de change tel qu'il l'expose dans ses écritures.

Enfin, M. X. ne conteste pas que, lors de la souscription du prêt, il exerçait la profession d'ingénieur financier en charge de la gestion de fonds d'actions laquelle suppose de sérieuses connaissances en matière économique et financière et qu'il disposait ainsi de compétences et d'une expérience le plaçant en mesure d'apprécier les conséquences du taux de change sur un prêt accordé en francs suisses et remboursés en francs suisses.

Dans ces conditions, la banque n'était pas débitrice envers lui d'un devoir de mise en garde et sa demande en paiement de dommages-intérêts, formée à ce titre, est rejetée. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 6

ARRÊT DU 29 JUIN 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20/05137 (15 pages). N° Portalis 35L7-V-B7E-CBU72. Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er octobre 2019 - Tribunal de Grande Instance de PARIS : RG n° 16/04855.

 

APPELANT :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], [adresse] (SUISSE), Représenté par Maître Nathalie MASSART, avocat au barreau de PARIS, toque : P0020, assisté de Maître Hervé Brosseau, avocat au barreau de Nancy

 

INTIMÉE :

SA BNP PARIBAS

[adresse], Représentée par Maître Philippe METAIS du PARTNERSHIPS BRYAN CAVE LEIGHTON PAISNER (France) LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J002

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Marc BAILLY, Président de chambre et Madame Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère

Ces magistrats a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de : M. Marc BAILLY, Président de chambre, Madame Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère, Mme Pascale LIEGEOIS, Conseillère, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Marc BAILLY, Président de chambre et par Anaïs DECEBAL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Selon offre acceptée le 10 mai 2010, la société BNP Paribas a consenti à M. X., alors domicilié à Genève en Suisse, un prêt immobilier d'un montant maximum de 313.671,91 francs suisses, et d'une durée de 300 mois, destiné à financer l'acquisition d'un bien à usage de résidence principale situé à Annemasse au prix de 207.000 euros, remboursable au taux d'intérêt nominal fixe de 2,95 % par an par 100 échéances trimestrielles de 4.445,32 francs suisses.

L'offre de prêt mentionne un taux effectif global (« TEG ») de 3,09937 % par an, et un taux de période trimestriel de 0,77484 %.

Le montant du prêt débloqué s'est élevé à 276.655,50 francs suisses et le montant des échéances mensuelles à 3.920,73 francs suisses.

Soutenant que le contrat de prêt ne respectait pas diverses dispositions du code de la consommation, M. X. a assigné la société BNP Paribas par acte en date du 23 mars 2016.

Par jugement contradictoire en date du 1er octobre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a déclarées irrecevables comme prescrites l'ensemble des demandes formées par M. X., l'a condamné aux dépens ainsi qu'à payer à la société BNP Paribas la somme de 1.800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, ce, aux motifs que :

- l'action fondée sur l'erreur affectant le TEG et les coûts mentionnés dans l'écrit constatant le contrat de prêt relèvent de la prescription quinquennale de l'article 1304 (ancien) du code civil, tout comme l'action fondée sur l'erreur affectant le calcul des intérêts conventionnels, et le délai de prescription a commencé à courir à la date d'acceptation de l'offre, soit au 10 mai 2010, l'action initiée par acte en date du 23 mars 2016 est en conséquence irrecevable comme prescrite ;

- l'action tendant au prononcé de la sanction civile que constitue la déchéance du droit aux intérêts fondée sur l'erreur affectant le TEG relève de la prescription quinquennale, et le délai de prescription a commencé à courir à la date d'acceptation de l'offre, soit au 10 mai 2010, l'action initiée par acte en date du 23 mars 2016 est en conséquence irrecevable comme prescrite ;

- l'action en indemnisation pour manquements de la banque à ses obligations précontractuelles relève de la prescription quinquennale, et le délai de prescription a commencé à courir à la date d'acceptation de l'offre, soit au 10 mai 2010, l'action initiée par acte en date du 23 mars 2016 est en conséquence irrecevable comme prescrite.

* * *

Par déclaration remise au greffe de la cour le 12 mars 2020, M. X. a formé appel de ce jugement en critiquant chacun de ses chefs, sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.

Aux termes de ses conclusions en date du 9 juillet 2020, M. X. demande à la Cour de :

Vu les dispositions de l'article 1907 du code civil ;

Vu les dispositions de l'article 1376 du code civil ;

Vu les dispositions des articles L. 111-1, L. 212-1 à L. 212-3 (nouveau) et L. 133-2 (ancien) du code de la consommation ;

Vu les dispositions des articles L. 312-8-4°, devenu L. 313-25-6°, et L. 312-9 du code de la consommation ;

Vu les dispositions des articles L. 141-4 du code des assurances ;

Vu les dispositions des articles L. 131-1, L. 313-2, R. 313-1, et son annexe, concernant la définition du TEG et son mode de calcul ;

- RECEVOIR l'appelant en son recours, et le dire bien fondé ;

- INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement attaqué ;

- STATUER à nouveau, et :

- JUGER que le prêteur qui n'exécute pas le contrat, ni en ce qui concerne le taux des intérêts qu'il applique, ni en ce qui concerne la période de calcul des intérêts entre deux échéances de paiement, ne peut prétendre à plus que l'intérêt légal, faute de fondement contractuel à la perception des intérêts à un autre taux que celui que prévoit la loi ;

- ORDONNER le retour à l'intérêt légal, et condamner le prêteur à restituer les sommes qu'il aurait reçu en sus de l'application de l'intérêt légal ;

Sur les demandes en déclaration de clauses non écrites :

- RAPPELER que la demande en déclaration de clause non écrite n'est pas une demande en annulation, et n'est pas enserrée dans des délais particuliers, le déséquilibre causé au préjudice du consommateur étant actuel en se plaçant au moment auquel le tribunal de grande instance de Paris a été saisi ;

- JUGER que les informations données à l'emprunteur sur le coût total de la dette par l'offre de crédit immobilier critiquée devant la Cour, sont incomplètes, incompréhensibles et ambigües, créant un déséquilibre significatif au détriment d'un consommateur profane normalement vigilant et que, privé par conséquent d'informations adéquates sur les caractéristiques essentielles de l'opération de crédit proposée, il n'a pas valablement consenti au coût global du prêt ni à l'obligation la dette ;

- JUGER spécialement que le recours à un diviseur de marché financiers de 360 jours pour calculer les intérêts produits par l'amortissement crée un déséquilibre manifeste au détriment du consommateur, puisqu'il renchérit le coût du crédit à l'insu de l'emprunteur ;

- DÉCLARER cette stipulation abusive, et partant, non écrite ;

- ORDONNER que l'amortissement du capital mis à disposition sera poursuivi, sans qu'il y ait lieu à substitution d'un autre taux d'intérêt, la stipulation étant non écrite ;

- ORDONNER l'émission d'un nouveau tableau d'amortissement des sommes mise à la disposition de l'emprunteur, sur la durée conventionnelle de l'amortissement, expurgé des conséquences des stipulations abusives, et condamner le prêteur à restituer les sommes qu'il aurait reçu en sus de l'application de l'intérêt légal ;

Sur les demandes en nullité tirées du vice du consentement de l'emprunteur, et en restitution :

- JUGER subsidiairement que la stipulation d'intérêts conventionnelle est nulle ;

- ORDONNER le retour à l'intérêt légal, et condamner le prêteur à restituer les sommes qu'il aurait reçues en sus de l'application de l'intérêt légal ;

Sur les demandes en déchéance :

- JUGER enfin que faute d'avoir intégré au calcul du TEG les coûts exacts de la dette, charges auxquelles le prêteur a subordonné l'octroi du crédit, la déchéance des intérêts, dans la proportion que fixera le juge, sera également prononcée, taux auquel l'intérêt au taux égal applicable pour l'année au cours de laquelle est intervenue l'acceptation de l'offre, sera substitué, et condamner le prêteur à restituer les sommes qu'il aurait reçues en sus de l'application de l'intérêt légal ;

Sur les demandes indemnitaires :

- CONDAMNER la société BNP Paribas à payer à M. X. une somme de 36.997,94 francs suisses, ou sa contrepartie euro au 27 avril 2010, à titre de dommages et intérêts venant compenser la perte certaine en capital, connue du prêteur, pour laquelle il s'est fautivement abstenu d'adresser une mise en garde expliquée et illustrée d'exemples chiffrés ;

- CONDAMNER en tout état de cause la société BNP Paribas à payer à l'emprunteur une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- LAISSER à sa charge les dépens de l'instance, avec faculté de recouvrement direct au profit de Maître Nathalie Massart ;

faisant valoir pour l'essentiel que :

S'agissant de la prescription. M. X. verse aux débats une pièce nouvelle, un courrier daté du 19 juillet 2019, qui informe celui-ci de l'évolution depuis le départ de l'amortissement de son crédit, en le comparant à l'évolution théorique de ce dernier si les remboursements s'étaient opérés en euros. Il s'agit du premier et unique courrier d'information reçu par M. X. à propos de l'évolution et de l'impact du change, étant précisé que le prêt du 10 mai 2010 ne comporte aucune annexe qui simulerait des évolutions favorables ou défavorables du change. Ainsi, aucune prescription n'est opposable aux prétentions de M. X. liée au change, ne disposant pas de ressources en francs suisses, et qui subit les effets défavorables du change.

S'agissant de l'application du taux légal. La stipulation du calcul des intérêts sur une autre durée que l'année civile est nulle, le prêteur se dispensant d'appliquer le contrat pour migrer vers l'utilisation d'un taux d'intérêt légèrement majoré par l'utilisation d'une année 360 jours et d'un mois de 30 jours. De plus, la communication à M. X., emprunteur, de la durée de la période applicable au calcul des intérêts, n'est pas précisée dans l'offre de prêt, exposant la société BNP Paribas à la déchéance des intérêts.

S'agissant des clauses abusives. D'une part, la clause liée aux dispositions de l'offre proposant d'adhérer à des modalités d'amortissement calculées sur une année autre que l'année civile, apprécie le coût de la dette de façon cachée, n'a pas été expliquée à M. X., et est en conséquence abusive.

D'autre part, la clause liée aux dispositions de l'offre stipulant un intérêt fixe et d'adhérer à des modalités d'amortissement calculées sur une année qui n'est pas l'année civile, majore le taux convenu au détriment du consommateur, et est en conséquence abusive.

Enfin, procéduralement, le moyen tiré du caractère abusif d'une clause contractuelle ne se prescrit pas, tout comme il peut être soulevé en tout état de cause et survit à la chose jugée par la voir de l'opposition incidente.

S'agissant de l'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts. La Cour annulera la stipulation conventionnelle des intérêts, et y substituera le taux d'intérêt légal applicable à la date d'émission des offres.

S'agissant de la responsabilité du prêteur. L'offre de prêt ne comporte aucune mise en garde autre que l'affirmation selon laquelle le bénéficiaire reconnait avoir pleine conscience des risques de fluctuation des cours de change inhérent au prêt, et acceptent d'en supporter les conséquences jusqu'au parfait remboursement de la banque, et n'emporte donc aucune explication claire sur les mécanismes de change et leur impact sur l'accroissement du coût du crédit, alors que la société BNP Paribas, prêteur, pouvait parfaitement évaluer la perte en capital en vue d'adresser une mise en garde sévère à M. X., emprunteur, sur les risques auxquels expose l'offre de prêt.

[*]

Aux termes de ses conclusions en date du 8 octobre 2020, la société BNP Paribas demande à la Cour de :

Vu les articles 1304, 1907 et 2224 du code civil, L. 312-1 et L. 313-1 et suivants, et R. 313-1 du code de la consommation ;

Vu les articles 564 et 954 du code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance n°2019-740 du 17 juillet 2019 relative aux sanctions civiles applicables en cas de défaut ou d'erreur du TEG ;

Vu le jugement rendu le 1er octobre par le tribunal judiciaire de Paris ;

- CONFIRMER le jugement rendu le 1er octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Paris en toutes ses dispositions ;

Et, y ajoutant,

A titre principal :

- DIRE ET JUGER que les demandes qui tendraient à faire constater l'existence de clauses prétendument abusives dans l'offre de prêt souscrite par M. X. sont nouvelles en cause d'appel, et en conséquence irrecevables ;

- DIRE ET JUGER que les demandes qui tendraient à faire constater l'existence de clauses prétendument abusives dans l'offre de prêt souscrit par M. X. sont prescrites et en conséquence irrecevables ;

- DIRE ET JUGER que la demande tendant au prononcé de la nullité du prêt pour vice de consentement est nouvelle en cause d'appel et en conséquence irrecevable ;

- DIRE ET JUGER que la demande tendant au prononcé de la nullité du prêt pour vice du consentement est prescrite et en conséquence irrecevable ;

- DIRE ET JUGER que la demande tendant à la condamnation de la société BNP Paribas à payer à M. X. des dommages et intérêts est irrecevable car prescrite ;

- DIRE ET JUGER que l'action de M. X. tendant à la nullité de la stipulation d'intérêt conventionnelle en raison des contestations portées sur le TEG mentionné dans l'offre de prêt est irrecevable car prescrite ;

- DIRE ET JUGER que la demande subsidiaire de déchéance du droit aux intérêts en raison de contestations portées sur le TEG mentionné dans l'offre de prêt est irrecevable car prescrite ;

En conséquence :

- DÉCLARER irrecevables les demandes formulées par M. X. dans le cadre de la présente instance ;

A titre subsidiaire :

- JUGER que l'offre de prêt souscrite par M. X. ne compte pas de clauses abusives ;

- JUGER que la société BNP Paribas n'était pas tenue au devoir de conseil envers M. X. ;

- JUGER que la société BNP Paribas n'a pas manqué à son devoir de mise en garde tel qu'il est défini par la jurisprudence à l'égard de M. X. compte tenu du fait qu'il est un emprunteur averti ;

- JUGER que la société BNP Paribas a rempli son obligation d'information à l'égard de M. X. s'agissant du risque lié à la variation du taux de change et des conséquences de cette variation sur l'amortissement du crédit ;

- DIRE ET JUGER que M. X. ne rapporte pas la preuve d'un préjudice indemnisable ;

- DIRE ET JUGER que l'« analyse » réalisée par Mme Y. pour la société Chalane est non contradictoire et en tout état de cause erronée ;

- DIRE ET JUGER que M. X. ne rapporte pas la preuve du prétendu caractère erroné du TEG mentionné dans l'offre de prêt ;

- JUGER que le TEG mentionné dans l'offre de prêt est correct ;

En conséquence,

- DÉBOUTER M. X. de sa demande tendant à voir déclarer non écrites les clauses qu'il considère prétendument abusives ;

- DÉBOUTER M. X. de sa demande tendant à la condamnation de la société BNP Paribas au paiement de la somme de 46 529,21 euros à titre de dommages et intérêts ;

- ÉCARTER l'« analyse » réalisée par Mme Y. pour la société Chalane des débats;

- DÉBOUTER M. X. de sa demande tendant à la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels ;

- DÉBOUTER M. X. de sa demande tendant à la déchéance du droit aux intérêts ;

En tout état de cause :

- DÉBOUTER M. X. de l'intégralité de ses demandes ;

- CONDAMNER M. X. au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Le CONDAMNER aux entiers dépens ;

faisant valoir pour l'essentiel que :

S'agissant de l'irrecevabilité des demandes de M. X., et plus précisément sur la demande tendant à voir juger réputées non écrites car abusives les clauses relatives au coût total de la dette ainsi que la clause de calcul des intérêts sur 360 jours. D'une part, la cour jugera que cette demande est nouvelle en cause d'appel, et la déclarera irrecevable.

D'autre part, l'action tendant à voir réputée non écrite une clause abusive, de même que la demande de réparation des prétendus préjudices qui en découlent, est soumise à la prescription quinquennale de droit commun, dont le point de départ court à compter du jour de la conclusion du contrat de prêt litigieux, en l'espèce le 10 mai 2010. L'arrêt de la CJUE du 9 juillet 2020 n'affirme aucunement l'imprescriptibilité des actions relatives aux clauses abusives, jugeant uniquement que la Directive 93/13 ne s'oppose pas à une règlementation nationale prévoyant l'imprescriptibilité d'une action visant à constater le caractère abusif d'une clause.

La Cour jugera prescrites les demandes de M. X. tendant à réputer non écrites certaines clauses de son offre de prêt qui seraient selon lui abusives, et partant irrecevables.

S'agissant de l'irrecevabilité des demandes de M. X., et plus précisément sur la demande tendant au prononcé de la nullité du prêt pour vice du consentement. D'une part, la Cour jugera que cette demande est nouvelle en cause d'appel, et la déclarera irrecevable.

D'autre part, le régime de l'action en nullité pour dol est soumis à une prescription quinquennale, dont le point de départ est le jour de la découverte des faits fondant le vice de consentement, que le co-contractant a connu ou aurait dû connaitre, soit à la date de conclusion du contrat de prêt en date du 10 mai 2010. De plus, M. X. ne justifie pas sa demande.

La Cour jugera que l'action en nullité du contrat de prêt engagée par M. X. en conséquence des vices du consentement qu'il impute à la société BNP Paribas est prescrite.

S'agissant de l'irrecevabilité des demandes de M. X., et plus précisément sur la demande tendant à la condamnation de la société BNP Paribas à payer à l'emprunteur des dommages et intérêts. L'action en responsabilité contractuelle est soumise à une prescription quinquennale, le point de départ étant le jour de l'octroi du prêt, en l'espèce le 10 mai 2010.

La Cour confirmera le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré la demande tendant à l'octroi de dommages et intérêts fondée sur la responsabilité de la société BNP Paribas est prescrite et en conséquence irrecevable.

S'agissant de l'irrecevabilité des demandes de M. X., et plus précisément sur l'action de l'action de l'emprunteur tendant à la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels en raison des contestations portées sur le TEG mentionné dans l'offre de prêt. M. X. ne peut, lorsqu'il conteste le TEG mentionné dans l'offre de prêt, solliciter la nullité de la stipulation d'intérêt et l'application du taux légal, seule la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, dont la proportion et la durée est soumise à l'appréciation souveraine des juges du fond, devant s'appliquer.

Par ailleurs, le point de départ du délai de prescription quinquennale de cette action est en principe la date de la convention lorsque ses éléments intrinsèques permettent à l'emprunteur de prendre connaissance du caractère erroné du TEG. En l'espèce, M. X., gestionnaire de portefeuille, était en mesure de procéder à la vérification du calcul du TEG et d'émettre les contestations qu'il soulève dans cette procédure dès la date de son acceptation de l'offre de prêt, le 10 mai 2010.

La Cour confirmera le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré la demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels prescrite et en conséquence irrecevable.

S'agissant de l'irrecevabilité des demandes de M. X., et plus précisément sur la demande de déchéance du droit aux intérêts. Le point de départ de l'action tendant à la déchéance du droit aux intérêts contractuels est le jour de la conclusion du contrat de prêt, c'est-à-dire le jour de l'acceptation de l'offre, le 10 mai 2010. Cette action relevant du régime de la prescription quinquennale, la demande est en conséquent prescrite. Si la Cour devait retenir la date à laquelle M. X. a connu ou aurait dû connaitre les prétendues erreurs alléguées par celui-ci, à savoir l'absence d'intégration dans l'assiette du calcul du TEG du coût de l'assurance-vie, l'absence alléguée d'égalité entre les sommes prêtées et les versements dus, et le calcul des intérêts sur 360 jours, celles-ci peuvent être constatées à partir de l'examen de l'offre de prêt, acceptée le 10 mai 2010. Ainsi, M. X. ne peut reporter le point de départ du délai de prescription en opportunité en se référant au rapport du 8 février 2018 qu'il produit aux débats.

La Cour confirmera le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré la demande de déchéance du droit aux intérêts prescrite et en conséquence irrecevable.

S'agissant du mal fondé des demandes de M. X., et plus précisément sur l'absence de clauses abusives dans l'offre de prêt valablement souscrite par celui-ci. D'une part, la clause portant intérêt conventionnel porte sur la définition de l'objet principal en ce qu'elle fixe une prestation essentielle du contrat. D'autre part, les stipulations relatives aux intérêts conventionnels sont rédigées de manière claire et compréhensibles. Enfin, M. X. ne fait pas la démonstration d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

La Cour déboutera M. X. de sa demande tendant à réputer non écrites les clauses litigieuses.

S'agissant du mal fondé des demandes de M. X., et plus précisément sur l'absence de manquement aux obligations contractuelles de la société BNP Paribas dans le cadre de la souscription du prêt. Tout d'abord, la Cour jugera qu'aucune obligation de conseille ne pèse sur la société BNP Paribas, et déboutera M. X. de sa demande sur ce point.

Ensuite, le devoir de mise en garde à la charge de la société BNP Paribas était limité au risque d'endettement excessif par rapport aux capacités financières de l'emprunteur non averti, cette qualité ne pouvant être revendiquée par M. X., percevant à l'époque des revenus en francs suisses, en sa qualité de gérant de portefeuille de la société Bank of China. Par ailleurs, l'offre de prêt indique clairement que le bénéficiaire du prêt reconnait avoir pleinement conscience du risque de fluctuation des cours de changes inhérents au prêt immobilier, et acceptent d'en supporter les conséquences jusqu'à parfait remboursement. De plus, M. X. n'apporte aucun élément permettant d'affirmer qu'il existait au moment de l'octroi du prêt un risque d'endettement excessif par rapport à ses capacités financières.

La Cour constatera que M. X. est un emprunteur averti, de sorte que la société BNP Paribas n'était pas tenue d'un devoir de mise en garde envers celui-ci, et jugera qu'il est mal fondé à demander la condamnation de la société BNP Paribas pour manquement au devoir de mise en garde.

Enfin, la société BNP Paribas a respecté son obligation d'information, ayant clairement exprimé dans l'offre de prêt que M. X. paierait des échéances en francs suisses. Par ailleurs, la société BNP Paribas ne peut être tenue responsable de circonstances exceptionnelles indépendantes de sa volonté dont M. X. se prévaut.

La Cour ne pourra donner aux nombreuses décisions citées par M. X. la portée alléguée par celui-ci, et jugera que la société BNP Paribas n'a pas manqué à ses obligations contractuelles dans le cadre de la souscription du prêt par M. X.

S'agissant du mal fondé des demandes de M. X., et plus précisément sur l'absence d'erreur dans le TEG du prêt souscrit par celui-ci. D'une part, le rapport du 8 février 2018 n'a pas de valeur probante en ce que Mme Y., qui n'en est pas à sa première contestation d'un TEG dans une instance opposant un établissement bancaire à ses clients, ne présente pas les garanties élémentaires d'indépendance et de compétence, ayant été salariée de la société BNP Paribas pendant 11 ans, et ne figurant sur aucune liste d'expert agréé. De plus, ce rapport n'est pas contradictoire, et devra être écarté des débats en ce qu'il est basé sur des données et postulats erronés, tant sur le montant du prêt que sur les bases de calcul ou le montant des intérêts.

La Cour écartera le rapport du 8 février 2018 des débats.

D'autre part, concernant l'allégation de M. X. que les frais liés à l'assurance Cardif n'étaient pas intégrés dans l'assiette de calcul du TEG de l'offre de prêt, ces frais n'étaient pas connus de la société BNP Paribas au moment où l'offre de prêt a été émise.

La Cour jugera que le TEG calculé dans l'offre de prêt est conforme aux dispositions légales, et déboutera M. X. de ses demandes.

S'agissant du mal fondé des demandes de M. X., et plus précisément sur l'égalité entre les sommes prêtées et les versements dus par l'emprunteur. M. X. prétend que le principe d'égalité des flux ne serait pas respecté, fondant cette allégation sur le rapport du 8 février 2018, non contradictoire, dont la conclusion est que, soit le TEG mentionné dans l'offre de prêt est erroné, soit le montant des charges communiqué par la société BNP Paribas l'est. En l'espèce, les montant indiqués dans le rapport du 8 février 2018 sont erronés, prenant des hypothèses en francs suisses avec une seule décimale d'une part, et ne tenant pas compte du montant réel des cotisations d'assurances variant annuellement d'autre part.

Par ailleurs, le rapport du 8 février 2018 consiste en un tableau de calcul non daté, dont les termes révèlent qu'il a été élaboré à partir des seules données contenues dans l'offre de prêt et, en tout état de cause, M. X. ne rapporte pas en l'égalité des flux ne serait pas respectée.

La Cour déboutera M. X. de ses demandes fondées sur le caractère prétendument erroné du TEG qui découlerait selon lui d'une absence d'égalité des flux.

S'agissant des demandes de M. X., et plus précisément sur l'absence de démonstration de la perte de chance de ne pas contracter à des conditions préférables et l'existence d'un préjudice indemnisable. Après avoir constaté que la société BNP Paribas n'a commis aucune faute envers M. X., la Cour déboutera ce dernier de sa demande de réparation du préjudice qu'il prétend subir.

Par ailleurs, si la Cour retenait la responsabilité de la société BNP Paribas pour manquement à ses obligations contractuelles, M. X. ne pourrait voir indemnisée que sa perte de chance de ne pas contracter à des conditions plus favorables, dont la preuve n'est pas rapportée par celui-ci. La Cour jugera alors que M. X. ne démontre ni l'existence, ni le montant d'une perte de chance réelle, certaine et sérieuse.

Si la Cour devait considérer qu'une perte de chance était en l'espèce caractérisée, les circonstances factuelles relatives au litige, à savoir le changement de lieu de situation professionnelle de M. X., ainsi que le taux d'intérêt attractif dont celui-ci a bénéficié, devront être pris en compte afin de réduire l'évaluation du montant du préjudice de perte de chance. La Cour déboutera M. X. de sa demande tendant à la condamnation de la société BNP Paribas en réparation du préjudice qu'il prétend subir et qu'il évalue arbitrairement à la somme de 36.997,64 francs suisses, ou sa contrepartie en euros, au 27 avril 2010. La Cour appréciera le fait que ce dernier ne justifie ni du versement de ladite somme, ni du fait que la différence entre le taux d'intérêt légal et les intérêts conventionnels pourraient être d'un tel montant, cette somme n'apparaissant que dans le dispositif des conclusions de M. X., sans que la moindre pièce ou explication ne vienne à l'appui de cette prétention.

S'agissant des demandes de M. X., et plus précisément sur les sanctions sollicitées par celui-ci au titre du caractère erroné du TEG. D'une part, la demande de nullité de la stipulation d'intérêt de l'offre de prêt est mal fondée, car seule la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, dont la proportion et la durée est soumise à l'appréciation souveraine des juges du fond, doit s'appliquer.

La Cour déboutera M. X. de l'intégralité de ses demandes tendant à la nullité de la stipulation d'intérêt de l'offre de prêt.

D'autre part, la société BNP Paribas n'encourt pas la déchéance du droit aux intérêts car M. X. n'apporte pas la preuve que ses griefs sont fondés, se contentant d'affirmer en une ligne que le TEG mentionné dans l'offre de prêt est erroné et ne respecte pas les exigences du code de la consommation. Par ailleurs, il ne peut prétendre avoir subi un quelconque préjudice consistant dans la perte de chance de contracter à un taux plus avantageux dans la mesure où il ne justifie d'aucune offre de prêt concurrente. Si elle était appliquée, la sanction sollicitée par M. X. bouleverserait l'économie du contrat en privant la société BNP Paribas de l'intérêt qu'elle reçoit en échange des fonds mis à disposition et du risque que celle-ci a pris à s'en dessaisir.

La Cour déboutera M. X. de sa demande tendant à la déchéance du droit aux intérêts conventionnels en raison du prétendu TEG erroné mentionné dans l'offre de prêt. A fortiori, la Cour le déboutera de sa demande de substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel pour l'avenir, et le déboutera en conséquence de ses demandes relatives au prétendu TEG erroné mentionné dans son offre de prêt.

[*]

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 11 janvier 2022.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les demandes de déclaration de clauses comme non écrites car abusives :

En application de l'article L. 132-1 du code de la consommation devenu L. 212-1 et L. 212-2, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

La cour, saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de prétentions nouvelles en cause d'appel ou la relevant d'office, est tenue de l'examiner au regard des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile.

L'article 564 dispose que, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

L'article 565 précise que les prétentions ne sont pas nouvelles lorsqu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

En cause d'appel, M. X. demande, dans le dispositif de ses conclusions, à voir déclarer non écrites les clauses relatives au coût total du crédit et au recours à un diviseur de 360 jours dont il estime que la première ne porte pas précisément à la connaissance du consommateur les informations adéquates sur les caractéristiques essentielles du contrat tenant au coût auquel il doit consentir et que la seconde renchérit le crédit à son détriment, leur privation d'effet devant priver la banque du bénéfice du taux contractuel et conduire à l'application du seul intérêt au taux légal et partant, à la restitution par le prêteur des intérêts trop perçus.

Dès lors, cette demande tend bien aux mêmes fins que sa demande de nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel soumise aux premiers juges.

Elle n'est donc pas nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile.

Par ailleurs, l'action qui tend à faire constater le caractère abusif d'une clause contractuelle en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, est imprescriptible.

Sur le fond, M. X. ne justifie pas que la clause de l'offre de prêt qu'il a acceptée le 10 mai 2010 stipulant page 3 que « Les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et d'un mois de 30 jours » crée un déséquilibre significatif au sens du texte précité, sa démonstration se basant sur l'application d'une année dite lombarde de 360 jours au calcul des intérêts du prêt alors que la clause critiquée ne porte pas sur l'application du diviseur 360 au calcul des intérêts comptabilisés en nombre de jours, mois ou trimestres exacts mais institue pour les modalités de calcul de ces intérêts un rapport qui est de 30/360, qui consiste donc à calculer les intérêts mensuellement en appliquant un douzième de l'intérêt annuel au capital restant dû chaque mois.

M. X. ne démontre pas plus qu'il résulte de ce mode de calcul qui diffère de celui critiqué dans ces écritures relatif à l'année lombarde un renchérissement du coût du crédit.

En outre, il convient de rappeler que l'alinéa 7 du texte précité dispose que : « L'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

Or, l'offre de prêt stipule clairement que le coût total du prêt est de 135.967,46 francs suisses dont 131.861,54 francs suisses au titre des intérêts, 1.443,17 francs suisses au titre des frais de dossier et 3.3662,75 francs suisses au titre de la participation financière et de la commission de caution de Crédit logement, ce coût étant également stipulé, à titre indicatif, comme correspondant à une contrevaleur en euros de 92.214,77 euros.

Il est à relever que la souscription d'une assurance emprunteur auprès de l'assureur de son choix n'est pas mentionnée comme étant obligatoire.

Dans ces conditions, le caractère abusif des clauses critiquées n'étant pas établi, la demande de M. X. de les voir déclarées non écrites est rejetée.

 

Sur les demandes de nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel :

En application des articles 1304 ancien, 1907 du code civil et L. 313-2 ancien du code de la consommation, en cas d'octroi d'un crédit à un consommateur ou à un non-professionnel, le point de départ de la prescription quinquennale prévue par le premier texte est le jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur, c'est-à-dire la date de la convention, jour de l'acceptation de l'offre, lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, ou lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l'emprunteur.

En l'espèce, l'absence de mention de la durée du taux de période présenté à 0,77484 % invoquée par M. X. ressort de la lecture de l'offre de prêt, laquelle se borne à stipuler dans la clause « Taux effectif global » que « Le taux de période du prêt pendant la période de remboursement, sur la base du taux d'intérêt fixe au jour de l'édition de l'offre est de 0,77484 % » sans préciser la durée de cette période.

En outre, il suffit de poursuivre la lecture de cette clause laquelle stipule que le taux effectif global est « un taux annuel calculé selon la méthode proportionnelle à partir d'un taux de période tel que défini à l'alinéa précédent. En fonction du coût total évalué ci-dessus, le taux effectif global s'élève à 3,09937 % l'an. » et de se référer à la clause « Conditions financières » stipulée à la page précédente qui indique que le taux nominal est de 2,95 % l'an, « soit un taux de période trimestrielle de 0,7375 % » pour comprendre que la durée de la période prise en compte pour le calcul du taux effectif global, laquelle correspond à la période des versements à effectuer par l'emprunteur en application de l'article R. 313-1 ancien du code de la consommation, est le trimestre.

De même, le grief tiré du recours à l'année lombarde de 360 jours pour calculer les intérêts conventionnels aux motifs que l'offre stipule en page 3 que « les intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et d'un mois de 30 jours » résulte encore de la simple lecture du contrat.

Dans ces conditions, M. X. était à même de constater à l'examen de la teneur du contrat de prêt l'irrégularité du TEG et les modalités de calcul des intérêts dont il se prévaut et pouvait donc agir dès la date de sa formation par acceptation de l'offre, le 10 mai 2010.

Par conséquent, son action en nullité, introduite par voie d'assignation du 23 mars 2016, soit plus de cinq années après cette date, est prescrite comme retenu par le premier juge.

 

Sur la demande de déchéance du prêteur de son droit aux intérêts contractuels :

En vertu de l'article L.312-33 ancien code de la consommation, l'action en déchéance du droit de la banque aux intérêts est soumise à la prescription, successivement décennale puis quinquennale issue de la loi du 17 juin 2008, prévue à l'article L. 110-4 du code de commerce relative aux obligations contractées entre une banque prêteuse et le souscripteur d'un crédit immobilier, le point de départ du délai courant à compter du moment où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur relative au taux effectif global.

Alors qu'il a été retenu que M. X. était en mesure de relever l'irrégularité du TEG et des modalités de calcul des intérêts dès l'acceptation de l'offre de prêt, son action en déchéance est irrecevable pour avoir été introduite par voie d'assignation du 23 mars 2016, alors que son délai d'action a expiré le 10 mai 2015, comme retenu par le premier juge.

 

Sur la demande en paiement de dommages-intérêts pour défaut de mise en garde :

L'action en responsabilité pour manquement de la banque à son obligation de mise en garde est soumise à la prescription désormais quinquennale de l'article L.110-4 du code de commerce tel que modifié par la loi du 17 juin 2008.

Le délai court à compter de la réalisation du dommage, constitué par la perte de chance de ne pas contracter, qui se manifeste lors la conclusion du contrat de prêt sauf si l'emprunteur établit qu'il a pu légitimement l'ignorer.

M. X. se prévaut d'un courrier du 15 juillet 2019 que lui a adressé la société BNP paribas l'informant sur la contre-valeur en euros du montant total restant dû de son crédit en francs suisses et d'une augmentation subie par celle-ci de 22 % par rapport à sa contre-valeur si le franc suisse n'avait pas évolué depuis la date de l'offre de crédit et il invoque à titre de préjudice un surcoût tenant au renchérissement du capital restant dû de l'ordre de 36.997,94 francs suisses.

Il convient de retenir la date de ce courrier exposant avec des exemples chiffrés l'évolution de la contre-valeur en euros du capital restant dû en francs suisses par M. X. suivant qu'est appliqué le cours de change EUR/CHF en vigueur lors de la souscription de l'offre ou celui applicable au 15 juillet 2019 comme la contre-valeur des échéances du prêt selon la même méthode, lesquels mettent en évidence une contre-valeur en euros qui s'est renchérie.

Dans ces conditions, la demande en paiement de dommages-intérêts formée par M. X. au titre d'un manquement de la banque à son devoir de mise en garde formée en cause d'appel dans ses premières conclusions d'appelant du 9 juillet 2020 n'est pas prescrite pour avoir été introduite moins de cinq ans après le 15 juillet 2019.

En application de l'article 1147 ancien du code civil, lorsqu'il consent un prêt à un emprunteur non averti, le banquier dispensateur de crédit est tenu à son égard, lors de la conclusion du contrat, d'un devoir de mise en garde en considération de ses capacités financières et des risques d'endettement excessif né de l'octroi du prêt.

En l'espèce, M. X. ne justifie pas d'un risque d'endettement excessif né de l'octroi du prêt accordé le 10 mai 2010.

Il ne fait état d'aucune difficulté de paiement.

De même, il résulte de la première page de l'offre de prêt litigieuse qu'il s'agit d'« un prêt immobilier valant contrat amortissable en CHF au taux d'intérêt fixe destiné aux frontaliers avec la Suisse pour une opération immobilière en France » portant sur un capital prêté en francs suisses et remboursable en francs suisses, M. X. étant domicilié à l'époque à Genève et désormais au Luxembourg et ne contestant pas percevoir des revenus dans cette devise.

Si ce prêt est susceptible, selon la convention des parties, d'être converti en euros et remboursé en euros ou dans une autre devise en cas d'indisponibilité du franc suisse, M. X. ne soutient ni ne justifie que cela a été le cas, de sorte que la seule conversion qui a eu lieu du franc suisse en euro l'a été sur le capital emprunté afin de procéder au règlement du bien immobilier acquis en France à l'aide de ce financement, conversion sur laquelle M. X. ne donne aucun élément pas plus que sur sa situation financière de l'époque.

M. X. ne justifie ainsi d'aucun risque d'endettement excessif au vu de ses capacités financières ni d'aucun dommage résultant du prêt consenti tenant à l'application du taux de change tel qu'il l'expose dans ses écritures.

Enfin, M. X. ne conteste pas que, lors de la souscription du prêt, il exerçait la profession d'ingénieur financier en charge de la gestion de fonds d'actions laquelle suppose de sérieuses connaissances en matière économique et financière et qu'il disposait ainsi de compétences et d'une expérience le plaçant en mesure d'apprécier les conséquences du taux de change sur un prêt accordé en francs suisses et remboursés en francs suisses.

Dans ces conditions, la banque n'était pas débitrice envers lui d'un devoir de mise en garde et sa demande en paiement de dommages-intérêts, formée à ce titre, est rejetée.

Par ailleurs, le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

M. X., qui succombe en appel, supportera les dépens d'appel et ses frais irrépétibles.

En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il est inéquitable de laisser à la charge de la société BNP paribas les frais non compris dans les dépens exposés en appel et il convient de condamner M. X. à lui payer la somme de 5 000 euros à ce titre.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

DÉCLARE recevables les demandes de M. X. tendant à voir déclarer non écrites comme abusives les clauses de l'offre de prêt acceptée le 10 mai 2010 relatives au coût du crédit et aux modalités de calcul des intérêts conventionnels,

Les rejette,

DÉCLARE recevable la demande en paiement de dommages-intérêts de M. X. pour manquement de la société BNP Paribas à son devoir de mise en garde,

La rejette,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE M. X. aux dépens d'appel,

CONDAMNE M. X. à payer à la société BNP Paribas la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,                                           LE PRÉSIDENT,