CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 22 septembre 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9829
CA BORDEAUX (1re ch. civ.), 22 septembre 2022 : RG n° 19/05705
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « La démarche consistant à faire vérifier par un tiers le calcul du taux effectif global, ou celui des intérêts conventionnels, procède de la seule volonté de l'emprunteur. La date de communication à celui-ci du résultat d'une telle vérification ne saurait constituer la révélation de l'erreur permettant de fixer le point de départ du délai de prescription de son action, sauf à conférer à ce délai un caractère purement potestatif. En effet, l'impératif de sécurité juridique commandant toute prescription ne saurait permettre aux emprunteurs de retarder artificiellement ce point de départ en se prévalant de nouvelles irrégularités s'ajoutant à celles qui seraient visibles à la seule lecture de l'offre.
Les erreurs alléguées en l'espèce sont les suivantes : - la durée de la période ne serait pas expressément communiquée ; - les frais d'acte ne sont pas inclus dans l'assiette de calcul du TEG ; - les primes d'assurance décès invalidité obligatoire ne sont pas pris en compte dans le calcul du TEG ; - le taux effectif global ne serait pas calculé sur la base de l'année civile.
Les emprunteurs s'appuient sur des analyses mathématiques réalisées à partir de l'examen de la teneur de l'offre de prêt et de son avenant, des conditions financières, particulières et générales, et du tableau d'amortissement. Ils étaient ainsi en mesure, dès la réception de l'offre de prêt et de l'avenant, de vérifier, par eux-mêmes ou en s'en remettant à un tiers, l'exactitude des taux effectifs globaux. En tout état de cause, l'erreur alléguée était apparente dès la date de l'offre. »
2/ « En l'espèce, les demandes en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et en déchéance du droit aux intérêts d'une part, et la demande tendant à ce que soit réputée non écrite la clause stipulant le calcul des intérêts sur la base d'une année lombarde d'autre part, tendent aux mêmes fins, à savoir permettre aux époux X. d'échapper au paiement des intérêts du prêt. »
3/ « En l'espèce, il y a lieu de préciser qu'en application des dispositions légales précitées, le caractère abusif d'une clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base d'une année de trois cent soixante jours, d'un semestre de cent quatre vingts jours, d'un trimestre de quatre vingt dix jours et d'un mois de trente jours, suppose d'apprécier quels sont les effets de cette clause sur le coût du crédit, et notamment afin de déterminer si elle entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Or, il résulte des dispositions de l'article R. 313-1 du code de la consommation, applicables en l'espèce que c'est le rapport entre l'année et la périodicité de 365 jours annuels pour un mois normalisé de 30,4166667 qui doit être fixe, soit 12, lequel est équivalent à celui d'une année de 360 jours pour un mois fixé à 30 jours. Et le rapport mensuel d'une année normalisée qui est de 0,0833 (30,41667/365) est identique que l'on fixe l'année à 360 jours et le mois à 30 jours ou l'année à 365 jours et le mois à 30,4166, ce dont il résulte une absence de préjudice au bénéfice de l'emprunteur.
Faute de rapporter la preuve d'un déséquilibre significatif créé à leur détriment, les emprunteurs seront déboutés de leur demande en déclaration de clause abusive. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/05705. N° Portalis DBVJ-V-B7D-LJHD. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 26 septembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 5, R.G. n° 18/00459) suivant déclaration d'appel du 28 octobre 2019.
APPELANTES :
X.
né le [Date naissance 1] à [Localité 2] ([Localité 2]), de nationalité Française, demeurant [Adresse 5] - [Localité 6]/ FRANCE
Y. épouse X.
née le [Date naissance 4] à [Localité 8] ([Localité 8]), de nationalité Française, demeurant [Adresse 5] - [Localité 6]/ FRANCE
Représentés par Maître Océanne AUFFRET DE PEYRELONGUE de la SELARL AUFFRET DE PEYRELONGUE, avocat au barreau de BORDEAUX et assistés par Maître Alexandre BARBELANE de la SELARL BFB Avocats, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
SA CRÉDIT FONCIER DE FRANCE
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 3] - [Localité 7], Représentée par Maître Carolina CUTURI-ORTEGA de la SCP JOLY-CUTURI-WOJAS AVOCATS DYNAMIS EUROPE (ADE), avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître LOUISET substituant Maître Georges JOURDE de l'ASSOCIATION VEIL JOURDE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 juin 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Bérengère VALLEE, conseiller, chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Roland POTEE, président, Bérengère VALLEE, conseiller, Sylvie HERAS DE PEDRO, conseiller.
Greffier lors des débats : Séléna BONNET
ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :
Suivant offre préalable du 14 décembre 2000, acceptée le 29 décembre 2000, la SA Crédit Foncier de France (ci-après dénommée la SA CFF) a consenti à M. X. et Mme Y. épouse X. (ci-après dénommés les époux X.) un prêt « locatif intermédiaire » d'un montant de 622.710 francs (94.932 euros), remboursable par période trimestrielle et sur une durée de 25 ans, au taux fixe de 5,50 % l'an avec un TEG de 6,08 %.
Le 9 janvier 2013, ce prêt a fait l'objet d'un avenant selon les modalités suivantes :
- date d'effet de l'avenant : 12 février 2013
- date de première échéance réaménagée : 12 mars 2013
- frais d'avenant : 680 euros
- coût total du crédit restant dû : 19.442,44 euros
- TEG sur capital restant dû : 4,4507 %
- taux de période : 0,3695 %
Se plaignant du caractère erroné du taux effectif global (TEG), les époux X. ont, par acte du 8 juillet 2018, fait assigner la SA CFF aux fins d'obtenir, à titre principal, la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et, à titre subsidiaire, la déchéance de son droit à intérêts.
Par jugement contradictoire du 26 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :
- rejeté la demande des époux X.,
- dit n'y avoir lieu au prononcé l'exécution provisoire,
- condamné in solidum les époux X. aux dépens ainsi qu'à payer à la SA CFF une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile avec application de l'article 699 du même code.
[*]
Les époux X. ont relevé appel de ce jugement par déclaration du 28 octobre 2019.
Par conclusions déposées le 28 janvier 2020, ils demandent à la cour de :
- recevoir les époux X. en leur appel et les en déclarer bien fondés,
- recevoir les époux X. en leurs demandes et les en dire bien fondés,
- infirmer la décision du 26 septembre 2019 en ce qu'elle a rejeté la demande des époux X. tant au niveau du contrat de prêt que de l'avenant et tendant à voir prononcer la nullité de la clause de stipulations d'intérêts conventionnels et la déchéance du droit aux intérêts,
- infirmer la décision du 26 septembre 2019 en ce qu'elle a condamné les époux X. à verser la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens,
- constater les erreurs de calcul du TEG du prêt et de l'avenant litigieux,
- constater que la durée de la période n'est pas mentionnée dans le contrat de prêt,
- constater que les intérêts ne sont pas calculés sur la base de 365 jours,
En conséquence,
Au titre du prêt initial,
A titre principal,
- prononcer la nullité de la clause de stipulation d'intérêts du prêt et de l'avenant,
- prononcer la substitution du taux d'intérêt applicable au taux d'intérêt conventionnel applicable au jour de la conclusion des actes soit 2,74 %,
A titre subsidiaire,
- prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du prêt à hauteur du taux d'intérêt légal soit 2,74 %,
Au titre de l'avenant,
A titre principal,
- déclarer abusive et par conséquent réputer non écrite la clause figurant dans l'avenant prévoyant
le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours et d'un mois de 30 jours,
- enjoindre la SA CFF, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8e jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un tableau d'amortissement, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal soit 0,04 %,
A titre subsidiaire,
- prononcer la nullité de la clause de stipulation d'intérêts de l'avenant,
- prononcer, la substitution du taux d'intérêt applicable au taux d'intérêt conventionnel applicable
au jour de la conclusion des actes soit 0,04 % pour l'avenant,
- enjoindre la SA CFF, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8e jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un tableau d'amortissement, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal soit 0,04 %,
A titre infiniment subsidiaire,
- prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du prêt à hauteur du taux d'intérêt légal soit 0,04 % pour l'avenant,
- enjoindre la SA CFF, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8e jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un tableau d'amortissement, prenant en considération cette déchéance du droit aux intérêts à hauteur du taux d'intérêt légal soit 0,04 %,
En tout état de cause,
- condamner la SA CFF à verser aux époux X. la somme de 42.228,09 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis sa conclusion jusqu'au jour de la présente sauf à parfaire,
- condamner la SA CFF à payer la somme de 5.000 euros aux époux X. au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SA CFF aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Fiona Bourdon conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
[*]
Par conclusions déposées le 26 mars 2020 comportant appel incident, la SA CFF demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
- déclarer irrecevable et, en tout état de cause, mal fondée l'action en nullité de la clause de stipulation d'intérêts conventionnels formée au titre du contrat de prêt,
- déclarer irrecevable et, en tout état de cause, mal fondée les actions en nullité de la clause de stipulation d'intérêts conventionnels et en déchéance du droit aux intérêts formées au titre de l'avenant de renégociation,
- déclarer prescrite l'action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels,
- déclarer prescrite l'action en la déchéance du droit aux intérêts conventionnels,
- déclarer irrecevable l'action en déclaration de clause abusive,
A défaut,
- débouter les époux X. de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
A titre subsidiaire,
- si la cour devait entrer en voie de condamnation, la sanction encourue serait une déchéance partielle du droit aux intérêts conventionnels à concurrence de l'écart entre le TEG mentionné
dans l'avenant et le TEG obtenu après intégration de l'assurance-décès,
En tout état de cause,
- condamner in solidum les époux X. à payer à la SA CFF la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- les condamner enfin aux entiers dépens, dont distraction au profit de Mme Carolina Cuturi Ortega, avocat aux offres de droit, en application de l'article 699 du Code de procédure civile.
[*]
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 9 juin 2022 et l'affaire fixée à l'audience du 23 juin 2022.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la prescription de l'action en nullité de la stipulation d'intérêt :
L'action fondée sur l'erreur affectant le taux effectif global mentionné dans l'écrit constatant le contrat de prêt, qui vise à sanctionner l'absence de consentement de l'emprunteur au coût global du prêt, relève du régime de la prescription quinquennale de l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige. Aux termes de l'article 2224 du même code, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. En cas d'octroi d'un crédit à un consommateur ou à un non-professionnel, le point de départ de cette prescription est le jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur, c'est-à-dire la date de la convention, jour de l'acceptation de l'offre, lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, ou lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l'emprunteur.
La démarche consistant à faire vérifier par un tiers le calcul du taux effectif global, ou celui des intérêts conventionnels, procède de la seule volonté de l'emprunteur. La date de communication à celui-ci du résultat d'une telle vérification ne saurait constituer la révélation de l'erreur permettant de fixer le point de départ du délai de prescription de son action, sauf à conférer à ce délai un caractère purement potestatif.
En effet, l'impératif de sécurité juridique commandant toute prescription ne saurait permettre aux emprunteurs de retarder artificiellement ce point de départ en se prévalant de nouvelles irrégularités s'ajoutant à celles qui seraient visibles à la seule lecture de l'offre.
Les erreurs alléguées en l'espèce sont les suivantes :
- la durée de la période ne serait pas expressément communiquée ;
- les frais d'acte ne sont pas inclus dans l'assiette de calcul du TEG ;
- les primes d'assurance décès invalidité obligatoire ne sont pas pris en compte dans le calcul du TEG ;
- le taux effectif global ne serait pas calculé sur la base de l'année civile.
Les emprunteurs s'appuient sur des analyses mathématiques réalisées à partir de l'examen de la teneur de l'offre de prêt et de son avenant, des conditions financières, particulières et générales, et du tableau d'amortissement. Ils étaient ainsi en mesure, dès la réception de l'offre de prêt et de l'avenant, de vérifier, par eux-mêmes ou en s'en remettant à un tiers, l'exactitude des taux effectifs globaux.
En tout état de cause, l'erreur alléguée était apparente dès la date de l'offre.
Ainsi, le défaut de communication de la durée de la période que dénoncent les emprunteurs était nécessairement apparent dès la date de l'offre de prêt.
L'omission du coût de l'hypothèque de premier rang était également décelable à la lecture de l'offre de prêt qui mentionne expressément : « Il est précisé que ce coût ne comprend pas le coût des sûretés réelles évalué à 14.310 euros ».
Les emprunteurs auraient donc dû connaître l'erreur alléguée dès l'acceptation de l'offre de prêt le 29 décembre 2000 d'une part, et dès la conclusion de l'avenant le 9 janvier 2013 d'autre part. L'action en nullité est irrecevable pour avoir été introduite après le 30 décembre 2005 s'agissant de l'offre de prêt et après le 10 janvier 2018 s'agissant de l'avenant.
Sur la prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts conventionnels :
L'action en déchéance des intérêts, prévue à l'article L. 312-33 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au présent litige, sanctionne la mention d'un taux effectif global erroné dans l'offre de prêt immobilier, commise en violation de l'article L. 312-8, tertio, du même code. Cette action relève du régime de la prescription quinquennale, anciennement décennale, de l'article L. 110-4 du code de commerce instaurée par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile. Aux termes de l'article 26, paragraphe II, de ladite loi du 17 juin 2008, les dispositions de la loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée de la loi antérieure.
En cas d'octroi d'un crédit à un consommateur ou à un non-professionnel, le point de départ de cette prescription est le jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur, c'est-à-dire la date de la convention, jour de l'acceptation de l'offre, lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, ou lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l'emprunteur.
Pour les raisons précédemment énoncées, il s'ensuit que s'agissant des griefs tenant à l'offre de prêt, l'action en déchéance du droit aux intérêts est prescrite pour avoir été intentée après le 30 décembre 2010.
S'agissant des griefs tenant à l'avenant, l'action en déchéance du droit aux intérêts est prescrite pour avoir été engagée après le 10 janvier 2018.
Sur l'action en déclaration de clause abusive :
Les époux X. demandent de voir déclarer abusive la clause figurant dans l'avenant du 9 janvier 2013 prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours et d'un mois de 30 jours.
La banque oppose l'irrecevabilité de cette demande comme étant nouvelle en appel.
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
L'article 565 du même code dispose que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.
En l'espèce, les demandes en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et en déchéance du droit aux intérêts d'une part, et la demande tendant à ce que soit réputée non écrite la clause stipulant le calcul des intérêts sur la base d'une année lombarde d'autre part, tendent aux mêmes fins, à savoir permettre aux époux X. d'échapper au paiement des intérêts du prêt.
La demande sera par conséquent déclarée recevable.
Selon l'article L. 132-1, alinéa 1, du code de la consommation, tel qu'applicable en la cause, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
En l'espèce, il y a lieu de préciser qu'en application des dispositions légales précitées, le caractère abusif d'une clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base d'une année de trois cent soixante jours, d'un semestre de cent quatre vingts jours, d'un trimestre de quatre vingt dix jours et d'un mois de trente jours, suppose d'apprécier quels sont les effets de cette clause sur le coût du crédit, et notamment afin de déterminer si elle entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Or, il résulte des dispositions de l'article R. 313-1 du code de la consommation, applicables en l'espèce que c'est le rapport entre l'année et la périodicité de 365 jours annuels pour un mois normalisé de 30,4166667 qui doit être fixe, soit 12, lequel est équivalent à celui d'une année de 360 jours pour un mois fixé à 30 jours. Et le rapport mensuel d'une année normalisée qui est de 0,0833 (30,41667/365) est identique que l'on fixe l'année à 360 jours et le mois à 30 jours ou l'année à 365 jours et le mois à 30,4166, ce dont il résulte une absence de préjudice au bénéfice de l'emprunteur.
Faute de rapporter la preuve d'un déséquilibre significatif créé à leur détriment, les emprunteurs seront déboutés de leur demande en déclaration de clause abusive.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Les appelants en supporteront donc la charge.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, les appelants seront condamnés à payer la somme de 1 500 euros à la partie intimée.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR,
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement ;
Y ajoutant,
Déclare recevable mais non fondée la demande des époux X. tendant à voir déclarer abusive la clause prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours et d'un mois de 30 jours,
DÉBOUTE les époux X. de leur demande en ce sens,
Condamne in solidum les époux X. à payer à la société Crédit Foncier de France la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum les époux X. aux dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Carolina Cuturi Ortega, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,
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